N° RG 21/04794 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NVHJ
Décision du Cour de Cassation de PARIS au fond du 20 mai 2021
RG : 20-15471
S.A.R.L. CASH HOTEL 2000
C/
S.C.I. DES BARMETTES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 24 Août 2022
APPELANTE :
La société CASH HOTEL 2000, SARL au capital de 31.250 euros dont le siège est situé [Adresse 1], immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Chambéry sous le numéro 319 159 430 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Ci-après désignée Cash Hôtel ou Cash Hôtel 2000
Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1983
Ayant pour avocat plaidant Me Julie DANIEL, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
La société DES BARMETTES, SCI dont le siège est situé [Adresse 1], immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Chambéry sous le numéro 950 010 819, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
Ayant pour avocat plaidant Me Stéphane MILLIAND, avocat au barreau d'ALBERTVILLE
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Date de clôture de l'instruction : 14 Juin 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Juin 2022
Date de mise à disposition : 24 Août 2022
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Christine SAUNIER-RUELLAN, président
- Véronique MASSON-BESSOU, conseiller
- Karen STELLA, conseiller
assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier
A l'audience, Christine SAUNIER-RUELLAN a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Christine SAUNIER-RUELLAN, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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Par acte en date du 24 septembre 2010, la SCI des Barmettes (détenue majoritairement par son gérant [P] [J]) a donné à bail commercial à la société Cash Hôtel 2000 - (qui exploite un commerce de vente en gros dans le domaine alimentaire à Val d'Isère et qui était détenue par le même [P] [J] jusqu'en 2015 puis à partir de ce moment là par son fils [F] devenu actionnaire majoritaire et gérant) - un local à usage d'entrepôt et de garage et un bureau, pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 2007 moyennant un loyer annuel de 84 000 euros HT.
Par acte du même jour, la SCI des Barmettes a également donné à bail civil, à la même SARL Cash Hôtel, sept appartements non meublés, pour une durée de 9 années à compter du 1er janvier 2007 moyennant un loyer annuel de 36 000 euros HT.
En 2015, la SCI des Barmettes a appliqué à compter du 1er janvier 2015 la clause d'indexation annuelle du loyer des deux baux.
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Par actes d'huissier en date du 25 octobre 2016, la SCI des Barmettes a délivré deux commandements de payer à la SARL Cash Hôtel 2000.
l'un concernant le bail commercial pour obtenir le paiement de la somme de 53.280 euros correspondant aux loyers de février 2015 à août 2016 ;
l'autre concernant le bail civil pour obtenir le paiement de la somme de 18.000 euros correspondant aux loyer dus sur la période de mars 2015 à août 2016.
En vain.
Par ordonnance du 25 avril 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance d'Albertville, saisi par la SCI des Barmettes, a débouté cette dernière de ses demandes visant à :
la résiliation des baux consentis à la SARL Cash Hôtel 2000
l'expulsion,
la condamnation à payer à titre provisionnel les arriérés locatifs,
et ce considérant l'absence de preuves suffisantes pour permettre de constater le jeu de la clause résolutoire.
Cette ordonnance du 25 avril 2017 n'a pas été frappée d'appel.
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Par acte en date du 14 juin 2017, la SCI des Barmettes délivrait de nouveau deux commandements de payer visant la clause résolutoire insérée dans les baux :
l'un concernant le bail commercial pour obtenir paiement de la somme de 45 698,33 euros montant de l'arriéré locatif arrête à fin avril 2017,
l'autre concernant le bail civil pour obtenir paiement de la somme de 15 887,50 euros montant de l'arriéré locatif arrêté à fin avril 2017.
Par lettre recommandée du 7 juillet 2017, la société Cash hôtel contestait les montants réclamés.
Le 18 juillet 2017 la SCI des Barmettes mettait en demeure la société Cash Hôtel de payer la somme de 56.670 euros au titre du contrat de bail commercial en prenant en compte les règlements partiels de juin et juillet 2017 et des nouveaux loyers impayés.
Le 4 août 2017, la société Cash Hôtel contestait de nouveau les montants réclamés.
Le 29 août 2017, la SCI des Barmettes signifiait à la société Cash Hôtel son refus de renouvellement de bail commercial pour motif grave lié au non paiement des loyers.
Par acte d'huissier du 29 août 2017, la SCI des Barmettes a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance d'Albertville aux fins, de nouveau, de voir constater la résiliation des baux et d'obtenir la condamnation de la SARL Cash Hôtel à lui verser une provision à valoir sur l'arriéré locatif.
Par ordonnance en date du 19 décembre 2017, le juge des référés a :
° Constaté que les deux baux, civil et commercial, du 24 septembre 2010 liant la SCI des Barmettes et la SARL Cash Hôtel 2000 étaient résiliés de plein droit depuis le 14 juillet 2017 ;
° Ordonné l'expulsion de la SARL Cash Hôtel 2000 et de tous occupants de son chef tant au titre du bail commercial qu'au titre du bail civil ;
° Condamné à titre provisionnel la SARL Cash Hôtel 2000 à payer à la SCI des Barmettes une indemnité d'occupation à compter du 14 juillet 2017 au titre du bail commercial et au titre du bail civil résiliés d'un montant égal au montant des loyers qui étaient dus à la date de résiliation (soit respectivement 9 969 euros TTC et 3 500 euros TTC) et ce jusqu'à la libération définitive des lieux ;
° Condamné la SARL Cash Hôtel 2000 à payer à la SCI des Barmettes à titre de provision sur l'arriéré locatif les sommes de de 56 670 euros TTC (bail commercial) et de 23 179 euros TTC (bail civil), arrêtées au mois de juillet 2017 ;
° Débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
° Condamné la SARL Cash Hôtel 2000 aux dépens.
A l'appui de sa décision, le juge des référés a considéré que les sommes réclamées à titre de provision à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 14 juillet 2017 ne faisaient pas l'objet de contestation sérieuse au regard du décompte clair produit.
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La SARL Cash Hôtel 2000 a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt du 21 janvier 2020, la Cour d'appel de Chambery a confirmé l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.
Elle a également considéré que les décomptes produits étaient parfaitement clairs.
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La société Cash Hôtel a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt rendu le 21 janvier 2020 par la Cour d'Appel de Chambéry.
Aux termes de son arrêt du 20 mai 2021, la 3° chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt précité de la Cour d'appel de Chambéry et a remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la Cour d'appel de Lyon.
La Cour de cassation a considéré :
Vu l'article 808 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret du 11 décembre 2019, et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
-qu'aux termes du premier de ces textes, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse. Selon le second, les conventions doivent être exécutées de bonne foi.
-que pour dire que les clauses résolutoires ont produit leurs effets le 14 juillet 2017, l'arrêt retient que les décomptes annexés aux commandements, mentionnant le montant du loyer dû chaque mois et les versements effectués par le locataire, sont parfaitement clairs et que, faute d'avoir saisi le juge d'une demande d'autorisation de consignation des loyers, la preneuse ne peut exciper d'un défaut de délivrance de la chose louée pour s'abstenir de les payer.
-qu'en se déterminant ainsi, sans procéder, comme il le lui était demandé, à un examen comparatif des montants figurant dans les commandements et dans les décomptes qui y étaient associés, afin de vérifier si la demande de la SCI ne se heurtait pas à une contestation sérieuse, et sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les clauses résolutoires n'avaient pas été mises en 'uvre de mauvaise foi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
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Par déclaration enregistrée par voie électronique le 1° juin 2021, la SARL Cash Hôtel 2000 a saisi la 8° chambre de la Cour d'appel de Lyon aux fins qu'il soit statué sur ses demandes conformément à la décision précitée de renvoi prise par la Cour de cassation.
Par ordonnance du 17 janvier 2022, la juridiction du Premier Président de la Cour d'appel de Lyon saisie par la SARL Cash Hôtel 2000 a rejeté les demandes principales et subsidiaires d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire attachée de plein droit à l'ordonnance de référé rendue le 19 décembre 2017, et a condamné la SARL Cash Hôtel à verser à la SCI des Barmettes une indemnité de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de dernières conclusions n°3 déposées par voie électronique le 12 avril 2022 la société Cash Hôtel 2000 demande à la Cour :
Vu les articles 834 et 835 code de procédure civile,
Vu les anciens articles 1134, 1184, et article 1343-5 du code civil,
Vu l'article L 145-41 alinéa 2 du code de commerce,
de :
débouter la SCI des Barmettes de l'ensemble de ses prétentions, fins et moyens ;
d'infirmer totalement l'ordonnance de référé rendue le 19 décembre 2017 par le Juge des référés du tribunal de grande instance d'Albertville.
A titre principal :
d'écarter des débats l'attestation produite par la SCI des Barmettes et établie par son expert comptable M. [C] en date du 21 avril 2017 compte tenu du conflit d'intérêts avéré de cet expert-comptable avec la société Cash Hôtel 2000 ;
de dire et juger que l'attestation établie par l'expert-comptable de la SCI des Barmettes en date du 21 avril 2017 est en totale contradiction avec les deux commandements de payer délivrés au locataire en date du 14 juin 2017 ;
de dire et juger que les deux commandements de payer délivrés le 14 juin 2017 à la SARL CASH Hôtel 2000 par son bailleur sont basés sur des décomptes erronés, et à tout le moins qu'ils sont incompréhensibles pour le locataire ;
de dire et juger en conséquence que le bailleur n'établit pas la réalité de sa créance de loyers à l'égard de son locataire ;
de dire et juger en conséquence que le bailleur est de mauvaise foi en ce qu'il a fait délivrer à plusieurs reprises des commandements de payer à son locataire, alors que les loyers visés n'étaient pas dus ;
de dire et juger que le locataire démontre qu'il est à jour de ses loyers courants y compris mars 2022 ;
de dire et juger que les contestations du locataire au sujet des divers troubles de jouissance qu'il subit et les manquements répétés du bailleur dans son obligation de délivrer la chose louée sont suffisamment sérieux pour justifier que le bailleur soit débouté de l'intégralité de ses prétentions dans le cadre de la présente instance ;
de dire et juger en conséquence que la société SARL Cash Hôtel 2000 invoque des contestations sérieuses à l'égard des demandes de son bailleur ;
de renvoyer les parties à mieux se pourvoir sur le fond compte tenu de l'instance au fond pendante devant le tribunal judiciaire d'Albertville (RG 2019/000876) et du conflit familial en cours.
Ce faisant,
d'infirmer l'ordonnance dont appel ;
se déclarer incompétent et renvoyer les parties à mieux se pourvoir au fond.
A titre infiniment subsidiaire et en tout état de cause :
de dire et juger que la SARL Cash Hôtel 2000 est un preneur de bonne foi qui règle régulièrement ses loyers ;
de dire et juger que l'application tardive et de mauvaise foi des clauses d'indexation annuelle des deux baux par le bailleur, lui a causé nécessairement un préjudice ;
de dire et juger que la SARL Cash Hôtel justifie de ses difficultés actuelles de trésorerie pour apurer sa dette en une seule fois, difficultés aggravées par les effets de la pandémie due au Covid 19 et son impact très négatif sur le secteur d'activité de la montagne ;
de dire et juger en revanche que le bailleur ne démontre pas en quoi l'octroi de délais de paiement au locataire pour apurer son éventuelle dette de loyers lui porterait préjudice compte tenu de sa situation financière.
En conséquence,
Faire droit en tout état de cause à la demande de délais de paiement les plus larges sur deux années pour apurer les loyers qui resteraient dus par le preneur au bailleur en application de l'article 1343-5 du code civil et à la suspension rétroactive des effets de la clause résolutoire des deux baux pendant lesdits délais à compter de la décision de la Cour à intervenir.
En tout état de cause,
de condamner la SCI des Barmettes à payer à la société SARL Cash Hôtel 2000 la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens et frais d'instance distraits au profit de Me Ligier, avocat au barreau de Lyon, sur son affirmation de droit.
A l'appui de ses demandes la société Cash Hôtel 2000 soutient pour l'essentiel que les demandes de la SCI des Barmettes se heurtent à des contestations sérieuses au regard :
du caractère manifestement erroné et incompréhensible pour le locataire des commandements de payer délivrés le 14 juin 2017 par la SCI des Barmettes ;
du caractère sérieusement contestable de l'attestation de l'expert-comptable de la SCI des Barmettes ;
des décomptes erronés ou pour le moins incompréhensible ;
du règlement régulier de ses loyers par Cash Hôtel 2000 entre les mains de l'huissier saisissant depuis la saisie attribution de janvier 2015 et la mauvaise foi manifeste du bailleur ;
du fait que la taxe foncière n'est pas à la charge du locataire Cash Hôtel ;
de l'application tardive et de mauvaise foi de la clause d'indexation ;
des dépenses de travaux qu'il a dû supporter en lieu et place du bailleur et des différents troubles de jouissance subis constituant un harcèlement fautif exercé par le bailleur.
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En réponse, la SCI des Barmettes aux termes de conclusions déposées le 21 décembre 2021, demande à la Cour :
Vu les articles L 145-41 du code de commerce, 873 alinéa 2 du code de procédure civile et 1709 et suivants du code civil,
de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé rendue le 19 décembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance d'Albertville.
Y ajoutant,
d'ordonner à titre subsidiaire, une consultation à tel expert que la Cour choisira aux fins d'établir le décompte des loyers et charges dus par la société Cash Hôtel 2000 au titre du bail civil et du bail commercial du 24 septembre 2010 ;
de condamner la société Cash Hôtel 2000 à payer à la SCI des Barmettes à titre de provision au titre de l'arriéré des loyers et de l'indemnité d'occupation les sommes de :
*4 228,98 euros concernant le bail civil arrêtée au 31 août 2021,
*90 960 euros concernant le bail commercial arrêtée au 31 août 2021.
de condamner la société Cash Hôtel 2000 à payer à la SCI des Barmettes la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens comprenant notamment les frais de première instance avec les commandements de payer et les frais du présent appel.
A l'appui de ses demandes, la SCI des Barmettes soutient :
que l'attestation de l'expert comptable doit être retenue comme prouvant le bien fondé des sommes réclamées dans les commandements de payer et qu'un jugement a été rendu par le tribunal de commerce de Chambéry le 14 décembre 2016 au bénéfice de l'expert comptable ;
que la société Cash Hôtel est incapable de produire de son expert-comptable un décompte pour les loyers civils et commerciaux pouvant contredire ceux produits aux débats par la concluante ayant justifié la signification des commandements critiqués ;
que la société Cash Hôtel 2000 ne justifie nullement des travaux qui seraient à la charge de la SCI ;
que si la Cour s'estimait enfin insuffisamment informée sur le montant des loyers encore dus, la SCI des Barmettes n'est pas opposée à voir instituer une consultation, conformément aux articles 256 et suivants du code de procédure civile ;
que les difficultés économiques évoquées par la société Cash Hôtel 2000 démontrent que celle-ci est dans l'incapacité totale de payer les loyers et éventuellement honorer un échelonnement sur 24 mois du règlement de l'arriéré, majoré des loyers en cours.
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Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il convient, pour plus ample exposé des prétentions et moyens, de se reporter aux écritures des parties.
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DISCUSSION :
A titre liminaire, la Cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du Code de procédure civile « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » et que les ''dire et juger'' et les ''constater'' ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; qu'en conséquence, la Cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués ;
L'article 808 du code de procédure civile, version en vigueur du 01 janvier 1976 au 01 janvier 2020, devenu depuis l'article 834 du même code, prévoit :
«'Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.'»
L'article 1134 du code civil devenu 1104 prévoit :
«'Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.'»
L'article 1353 du code civil prévoit :'
«'Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.'»
En l'espèce,
L'évaluation des créances telles que réclamées au titre des deux commandements de payer signifiés le 14 juin 2017 est contestée au regard de plusieurs éléments.
S'agissant des montants validés par l'expert comptable [Y] [C], il convient de considérer qu'il n'y a pas lieu d'écarter l'attestation de ce professionnel au stade du référé (même si sa neutralité est mise en cause) mais de la prendre en compte pour la comparer avec les autres éléments produits afin de se prononcer sur l'existence ou non d'une contestation sérieuse.
Il y a lieu par ailleurs de constater :
que les décomptes présentés par les parties en conflit ne permettent pas d'avoir une vision évidente du montant des créances en ce qu'il est opposé de part et d'autre des arguments divergents relatifs à la date d'application de l'indexation et à son calcul, aux divers règlements effectués entre les mains de l'huissier saisissant, à l'exécution de travaux susceptibles de donner lieu à compensation ;
que la comparaison des sommes figurant dans les différentes pièces présentées de façon contradictoire comme les factures, les relevés de compte, les premiers commandements de payer du 21 octobre 2016, les extraits de comptes, ne permet pas d'avoir une appréciation évidente des montants des créances en cause, les sommes ne correspondant pas toujours et parfois calculés sur des bases différents contestées et donc peu compréhensibles ;
que la société Cash Hôtel a saisi au fond le tribunal judiciaire d'Albertville aux fins que soit prononcée la nullité des commandements de payer délivrés le 14 juin 2017.
Dans ces conditions le juge des référés qui est le juge de l'évidence doit retenir l'existence d'une contestation sérieuse et doit dire qu'il ne dispose pas -en référé- du pouvoir de statuer sur les mesures sollicitées qui relèvent de l'appréciation des juges du fond, d'autant plus que la bonne foi dans l'exécution du contrat n'est pas évidente au regard des tensions aiguës qui opposent les parties.
La SCI des Barmettes, partie perdante est conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
En équité, il convient de condamner la SCI les Barmettes à verser à la société Cash Hôtel 2000 la somme de 3 000 euros au total au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme l'ordonnance déférée du 19 décembre 2017 en ce qu'elle a constaté la résiliation des baux en cause, ordonné l'expulsion, condamné la société Cash Hôtel 2000 au paiement de l'arriéré locatif et au paiement d'une indemnité d'occupation, ainsi qu'aux dépens.
Statuant à nouveau,
Dit n'y avoir lieu à statuer en référé sur les demandes présentées par la SCI des Barmettes ;
Condamne la SCI des Barmettes aux dépens de première instance et d'appel ;
Confirme la décision du juge des référés qui a rejeté les demandes présentées en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI des Barmettes à verser à la société Cash Hôtel 2000 à la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT