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22/02/2023 | FRANCE | N°19/08119

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 22 février 2023, 19/08119


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR



N° RG 19/08119 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MW2Q



Société TRANS LINE EXPRESS

C/

[L]



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 28 Octobre 2019

RG : 16/02451







COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2023







APPELANTE :



Société TRANS LINE EXPRESS

[Adresse 2]

[Localité 3]



représen

tée par Me Noureddine MEJAI de la SELARL PHENIX AVOCATS, avocat au barreau de LYON







INTIMÉ :



[F] [L]

né le 19 Avril 1957 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 4]



représenté par Me François-xavier MATSOUNGA, avocat au barreau de LY...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 19/08119 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MW2Q

Société TRANS LINE EXPRESS

C/

[L]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 28 Octobre 2019

RG : 16/02451

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2023

APPELANTE :

Société TRANS LINE EXPRESS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Noureddine MEJAI de la SELARL PHENIX AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

[F] [L]

né le 19 Avril 1957 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me François-xavier MATSOUNGA, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 13 Décembre 2022

Présidée par Joëlle DOAT, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Joëlle DOAT, présidente

- Nathalie ROCCI, conseiller

- Anne BRUNNER, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Février 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 6 novembre 2013, M. [F] [L] a été embauché par la société Trans Line Express en qualité de chauffeur polyvalent.

Le 31 mars 2016, l'employeur a remis à M. [L] une attestation destinée à Pôle emploi mentionnant que le motif de la rupture du contrat de travail était un licenciement pour faute grave.

Par requête en date du 6 juillet 2016, M. [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon en lui demandant de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société Trans Line Express à lui verser diverses sommes à titre d'indemnité de préavis, indemnité légale de licenciement, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement.

Au dernier état de la procédure, M. [L] a ajouté une demande en paiement de la somme de 2 500 euros 'pour non paiement du DIF'.

Par jugement en date du 28 octobre 2019, le conseil de prud'hommes a :

- fixé le salaire moyen de M. [L] à la somme de 1 477,12 euros

- dit que le licenciement de M. [L] est abusif et condamné la société Trans Line Express à lui payer :

2 954,24 euros à titre de préavis

295,42 euros à titre de congés payés sur préavis

738,55 euros à titre d'indemnité légale de licenciement

8862,72 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté M. [L] de sa demande de dommages et intérêts au titre du droit individuel à la formation

- débouté la société Trans Line Express de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- dit qu'il sera tenu compte du versement de 1 500 euros par la société Trans Line Express à M. [L] en deniers ou quittances

- condamné la société Trans Line Express aux dépens de l'instance

- dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire autre que celle de droit.

La société Trans Line Express a interjeté appel de ce jugement, le 25 novembre 2019.

Elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement

en conséquence,

- de débouter M. [L] de l'ensemble de ses demandes

- de condamner M. [L] à lui restituer la somme de 1 500 euros nets

- de condamner M. [L] à lui verser la somme de 17 000 euros et 'à tout le moins une somme équivalente à celle qui pourrait lui être accordée pour un quelconque fondement que ce soit', à titre de dommages et intérêts pour manquements à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail

en cas de condamnation financière prononcée à son égard,

- d'ordonner la compensation entre les sommes réciproques dues

y ajoutant,

- de condamner M. [L] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

M. [L] demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner la société Trans Line Express à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais de procédure d'appel, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 novembre 2022.

SUR CE :

M. [L], intimé, n'a pas formé appel incident du chef du jugement qui a rejeté sa demande de dommages et intérêts fondée sur le non-respect du droit individuel à la formation.

Il convient de confirmer cette disposition du jugement.

Sur la rupture du contrat de travail

La société Trans Line Express soutient :

- qu'elle a appris par le nouveau prestataire en charge de ses fiches de paie que M. [L] était également salarié à plein temps d'une autre société de transport (KS Transport) depuis le 24 septembre 2014 et qu'il disposait de deux cartes de conducteur, en parfaite violation de la réglementation en matière de durée du travail et de l'interdiction de détenir plusieurs cartes de transport

- qu'un accord transactionnel a été passé entre les parties, non formalisé par écrit, prévoyant qu'elle acceptait de ne pas déposer plainte au pénal contre le salarié et lui versait la somme de 1500 euros net en plus de son solde de tout compte, qu'en contrepartie, M. [L] s'engageait à cesser immédiatement son activité ainsi qu'à ne pas contester le licenciement et le solde de tout compte, licenciement dont M. [L] reconnaissait le bien fondé.

M. [L] fait valoir :

- qu'il n'a jamais bénéficié d'un entretien préalable au licenciement, ni reçu la moindre lettre de licenciement énonçant les motifs de la rupture de la relation salariale, quoi que la société ait pu lui reprocher, de sorte que la rupture est nécessairement dépourvue de cause réelle et sérieuse

- que dès lors, même si la société rapportait la preuve d'une faute dans le cadre de la présente procédure, le juge ne pourrait la retenir.

****

Tout licenciement pour motif personnel doit respecter le formalisme imposé par les articles

L. 1232-2 et L. 1232-6 du code du travail, en application desquels, dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce, lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il doit le convoquer avant toute décision à un entretien préalable, puis lui notifier sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

Ainsi, à défaut de notification de la décision de rupture par lettre, le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, l'employeur a imposé au salarié une rupture de son contrat de travail, sans respecter la procédure de licenciement et sans énoncer de motif.

C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes dont le jugement doit être confirmé sur ce point a dit que le licenciement de M. [L] était sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera également confirmé en ses dispositions relatives à l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de congés payés afférents et l'indemnité de licenciement dont les montants ne sont pas remis en cause par l'appelante.

A titre subsidiaire, l'employeur critique le montant de l'indemnisation allouée par les premiers juges, faisant valoir que M. [L] n'a subi aucun préjudice du fait de la rupture du contrat.

En application de l'article L1235-5 ancien du code du travail, la société Trans Line Express employant moins de onze salariés, le salarié peut prétendre, en cas de licenciement abusif à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Au regard de l'ancienneté de M. [L] (2 ans et 4 mois), de son âge à la date de la rupture (58 ans) et du montant de son salaire mensuel brut moyen de 1 477,12 euros, le conseil de prud'hommes a quelque peu surévalué le montant des dommages et intérêts alloués au salarié en réparation du préjudice causé par la perte de son emploi.

Il convient de réduire le montant des dommages et intérêts à la somme de 6 000 euros.

Sur les demandes reconventionnelles

La société Trans Line Express demande que M. [L] soit condamné à lui rembourser la somme de 1 500 euros qu'elle lui a versée à titre transactionnel.

M. [L] ne répond pas à cette demande.

Le conseil de prud'hommes n'a pas statué sur ce point, puisqu'il a simplement indiqué dans le dispositif de son jugement sans s'en expliquer dans les motifs 'dit qu'il sera tenu compte du versement de 1 500 euros par la société Trans Line Express à M. [L] en deniers ou quittances', ce qui n'emporte aucune conséquence juridique.

La société produit deux relevés de compte montrant que deux sommes d'un montant respectif de 1 044,31 euros (correspondant au montant indiqué dans le solde de tout compte) et de 1 500 euros ont été débitées de son compte ainsi que la copie du chèque de 1 500 euros.

Toutefois, la société ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle n'était pas redevable de cette somme envers le salarié et donc de l'absence de cause de ce paiement.

La demande de restitution doit être rejetée.

L'article L. 1222-1 du code du travail impose que le contrat de travail soit exécuté de bonne foi.

La bonne foi se présumant, la charge de la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail par le salarié incombe à l'employeur.

A l'appui de sa demande indemnitaire, la société reproche à M. [L] :

- de l'avoir menacé et de s'être livré à un chantage permanent dès 2014 en exigeant le paiement de sommes d'argent pour exécuter son contrat

- de détenir deux cartes conducteur en violation des dispositions légales et réglementaires du secteur et d'avoir signé un contrat de travail à temps plein avec un autre employeur, lui faisant ainsi courir un risque administratif et pénal pouvant aller jusqu'au retrait de son agrément transport en cas de contrôle par la DREAL.

Le contenu des cinq messages téléphoniques écrits émanant de [F] dont la copie est versée aux débats par l'employeur, datés de mai et novembre 2014, et la lettre manuscrite non signée non datée dénuée de toute valeur probante ne permettent pas de caractériser

l'existence de menaces proférées par le salarié.

Par ailleurs, la société ne démontre pas qu'elle a subi un préjudice en lien avec le double emploi de conducteur de M. [L].

Dès lors, il convient de confirmer le jugement qui a rejeté la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail par le salarié.

La société Trans Line Express dont le recours est rejeté pour l'essentiel sera condamnée aux dépens d'appel et à payer au salarié la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

CONFIRME le jugement, sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts alloués à M. [F] [L] au titre du licenciement abusif

STATUANT à nouveau sur ce point,

CONDAMNE la société Trans Line Express à payer à M. [F] [L] la somme de

6 000 euros en réparation du préjudice causé par le licenciement abusif

REPARANT l'omission de statuer,

REJETTE la demande reconventionnelle de la société Trans Line Express en remboursement de la somme de 1 500 euros

CONDAMNE la société Trans Line Express aux dépens d'appel

CONDAMNE la société Trans Line Express à payer à M. [F] [L] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 19/08119
Date de la décision : 22/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-22;19.08119 ?
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