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12/03/2024 | FRANCE | N°22/02169

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 12 mars 2024, 22/02169


N° RG 22/02169 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OGE2









Décision du

Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond

du 04 janvier 2022



RG : 19/02346

ch 4



Compagnie d'assurance CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES



C/



[T]

S.A. COMPAGNIE D'ASSURANCE SURAVENIR ASSURANCES

Etablissement CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA LOIRE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON

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1ère chambre civile B



ARRET DU 12 Mars 2024







APPELANTE :



La CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES de RHONE-ALPES AUVERGNE

[Adresse 7]

[Localité 9]



Représentée par Me Jacques VITAL-DURAND...

N° RG 22/02169 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OGE2

Décision du

Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond

du 04 janvier 2022

RG : 19/02346

ch 4

Compagnie d'assurance CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES

C/

[T]

S.A. COMPAGNIE D'ASSURANCE SURAVENIR ASSURANCES

Etablissement CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA LOIRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 12 Mars 2024

APPELANTE :

La CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES de RHONE-ALPES AUVERGNE

[Adresse 7]

[Localité 9]

Représentée par Me Jacques VITAL-DURAND de la SELARL VITAL-DURAND ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : T.1574

INTIMES :

M. [W] [T]

né le [Date naissance 3] 1941 à [Localité 5] (42)

[Adresse 8]

[Localité 5]

S.A. SURAVENIR ASSURANCES

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentés par Me Jacqueline PADEY-GOURJUX, avocat au barreau de LYON, toque : 605

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA LOIRE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Défaillante

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 05 Janvier 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 Novembre 2023

Date de mise à disposition : 27 Février 2024 prorogée au 12 Mars 2024, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Audience tenue par Stéphanie LEMOINE, président, et Bénédicte LECHARNY, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier

A l'audience, un des membres de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

Arrêt rendu par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE

Suivant un acte d'huissier de justice du 8 mars 2019, M. [T] et son assureur, la société Suravenir assurances, ont fait assigner la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de Rhône-Alpes Auvergne (Groupama), ainsi que la Caisse primaire d'assurance maladie de la Loire (la CPAM) devant le tribunal de grande instance de Lyon.

M. [T] explique avoir été victime le 24 novembre 2015 d'un accident de la circulation impliquant un véhicule conduit par Mme [V] et assuré auprès de la compagnie assignée.

Il a perçu une indemnité à titre de provision et une première mesure d'expertise médicale a été organisée par son assureur, ainsi qu'une seconde, réalisée au contradictoire de Groupama par les docteurs [L] et [K], selon un rapport du 14 novembre 2018.

Groupama a finalement opposé un refus d'indemnisation en raison d'un défaut de maîtrise imputable à M. [T].

Par jugement du 4 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Lyon a essentiellement:

- condamné Groupama à réparer l'entier dommage subi par M. [T] consécutivement à l'accident survenu le 24 novembre 2015 et à lui régler une provision complémentaire de 5 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice,

- ordonné une expertise médicale de M. [T] et désigné le Dr [U].

Par déclaration du 18 mars 2022, Groupama a relevé appel du jugement.

Aux termes de ses conclusions, notifiées le 17 juin 2022, il demande à la cour de:

A titre principal,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 4 janvier 2022,

Statuant à nouveau,

- constater que M. [T] a commis des fautes de conduite de nature à exclure son droit à indemnisation,

- constater que M. [T] est seul responsable de l'accident de la circulation survenu le 24 novembre 2015, au cours duquel il a été blessé,

- constater qu'il n'y a pas lieu de mettre à sa charge l'indemnisation de M. [T],

Reconventionnellement,

- condamner la compagnie Suravenir assurances à lui rembourser la somme de 21 272, 56€,

- condamner la compagnie Suravenir assurances, solidairement avec M. [T], à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 4 janvier 2022,

- constater que les fautes de conduite commises par M. [T] entraînent une réduction importante de son droit à indemnisation,

- réduire de moitié la somme allouée par le jugement dont appel à titre provisionnel et fixer celle-ci à 2 500 €,

- condamner la compagnie Suravenir assurances à lui rembourser la somme de 10 636, 28€,

- réserver les dépens.

Aux termes de ses conclusions, notifiées le 24 août 2022, M. [T] et la compagnie Suravenir assurances demandent à la cour de:

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 4 janvier 2022,

En conséquence,

- condamner Groupama à prendre en charge et indemniser l'entier préjudice subi par M. [T],

Avant dire droit,

- ordonner une expertise afin de déterminer les conséquences médico-légales de l'accident survenu le 24 novembre 2015,

- condamner Groupama à payer à M. [T] la somme de 5.000 euros à titre de provision complémentaire.

En tout état de cause,

- débouter Groupama de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Groupama à payer la somme de 2.500 euros à la société Suravenir assurances au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- réserver les dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 5 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions précitées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la responsabilité de M. [T] dans l'accident

Groupama soutient que M. [T] est entièrement responsable de l'accident. Il fait notamment valoir que:

- selon l'enquête des services de gendarmerie, M. [T] circulait sur la même voie que celle empruntée par Mme [V], dans le même sens de circulation, de telle sorte qu'il arrivait derrière elle au moment de la collision,

- M. [T] n'a pas fait preuve de prudence et de vigilance puisqu'alors même qu'il a, de ses propres dires, vu le véhicule de Mme [V], il n'a réalisé aucune manoeuvre pour l'éviter, venant ainsi le percuter à l'arrière,

- les dégâts constatés sur les deux véhicules ne viennent pas corroborer la version des faits de M. [T], seul le flanc droit du véhicule de Mme [V] a été impacté et son phare arrière gauche est resté intact alors qu'il a déclaré que Mme [V] était stationnée sur le bas-côté droit de la route sur laquelle il circulait et s'est réinsérée dans la circulation de manière brusque et inopinée, sans actionner son clignotant, de sorte que M. [T] aurait dû percuter le véhicule de Mme [V] à l'arrière et à gauche,

- il appartenait à M. [T] de ralentir et de s'arrêter derrière le véhicule de Mme [V], le temps que celle-ci tourne à gauche et s'engage sur [Adresse 12],

- en ne respectant pas les distances de sécurité et en n'étant pas maître de son véhicule, M. [T] a commis des fautes de conduite, de sorte qu'il est seul responsable de l'accident dont il a été victime ou à titre subsidiaire, à hauteur de 50%.

M. [T] et Suravenir assurance soutiennent que les circonstances de l'accident sont indéterminées. Ils font notamment valoir que:

- les gendarmes n'ont pu établir un croquis de l'accident car les véhicules ont été déplacés, il n'y avait pas de témoin et les déclarations des deux conducteurs sont divergentes,

- les gendarmes n'ont pas retenu à son encontre une conduite dangereuse,

- les constatations des services de gendarmerie sur le véhicule de Mme [V], à savoir que le feu arrière gauche était indemne et que le flanc droit de son véhicule était impacté, n'excluent pas le fait qu'elle était stationnée sur le bas-côté droit, qu'elle soit sortie du bas-côté et soit passée devant M. [T], pour tourner sur [Adresse 12], surprenant ce dernier dans sa conduite,

-aucun élément ne permet d'établir que M. [T] a adopté un comportement imprudent, ou irrespectueux à l'égard des autres conducteurs,

- lorsque les circonstances d'un accident de la circulation sont indéterminées, aucune faute ne peut être imputée à la victime, qui a droit à une réparation intégrale de son préjudice.

Réponse de la cour

Selon l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis.

L'article R413-12 du code de la route énonce en outre que lorsque deux véhicules se suivent, le conducteur du second doit maintenir une distance de sécurité suffisante pour pouvoir éviter une collision en cas de ralentissement brusque ou d'arrêt subi du véhicule qui le précède. Cette distance st d'autant plus grande que la vitesse est plus élevée. Elle correspond à la distance parcourue par le véhicule pendant un délai d'au moins deux secondes.

Selon le procès-verbal d'enquête établi le 24 novembre 2015 par les services de gendarmerie de [Localité 13], une collision est survenue sur la RD 8 à [Localité 5] (42) entre le véhicule Peugeot Partner immatriculé [Immatriculation 10] conduit par M. [T] et le véhicule Renault Mégane immatriculé [Immatriculation 11] conduit par Mme [V].

Les enquêteurs n'ont pas été en mesure d'établir un croquis retraçant les circonstances de l'accident, les véhicules ayant été déplacés avant leur arrivée sur place et aucun témoignage n'a pu être recueilli.

Les auditions des deux protagonistes en cause ne correspondent pas, Mme [V] ayant indiqué qu'elle était arrêtée sur sa voie de circulation, le clignotant gauche allumé, s'apprêtant à tourner sur [Adresse 12], lorsqu'elle a été percutée par l'arrière par un véhicule circulant dans le même sens qu'elle.

M. [T] a quant à lui déclaré s'être inséré derrière un transporteur, en descendant une côte, et avoir vu sur le bas côté droit un véhicule stationné ou à l'arrêt

qui est passé devant lui alors qu'il se trouvait à une dizaine de mètres, sans qu'il n'ait perçu de clignotant, et qu'il a percuté de plein fouet à l'arrière, à défaut d'avoir eu le temps de faire usage de ses freins.

Cependant, il ressort clairement de cette enquête que M. [T] circulait sur la même voie que celle empruntée par Mme [V], dans le même sens de circulation et qu'il se trouvait derrière elle au moment de l'accident.

Dès lors, du fait de la position de M. [T], qui se trouvait à l'arrière du véhicule de Mme [V], il était tenu de maintenir avec lui une distance de sécurité, afin de rester maître de son véhicule et prêt à freiner en cas de nécessité.

Or, il est constant qu'alors qu'il a vu le véhicule de Mme [V] il n'a pas été en mesure de réaliser une manoeuvre pour l'éviter.

Par ailleurs, si l'accident s'était déroulé selon les circonstances relatées par M. [T], alors que le véhicule de Mme [V] était stationné sur le bas côté droit et qu'elle se réinsérait sur la voie de circulation, sur sa gauche, il aurait percuté l'arrière gauche du véhicule de Mme [V].

Or, les gendarmes ont constaté un « impact sur l'arrière (flanc droit) du véhicule, le phare arrière gauche est encore intact ».

Il en résulte que la version des circonstances de l'accident donnée par M. [T], qui n'est pas corroborée par les points d'impact des véhicules, est inexacte. En revanche, elle correspond à celle de Mme [V] qui, s'apprêtant à tourner à gauche, était à l'arrêt, centrée sur la gauche de la voie de circulation, et a donc été percutée à l'arrière droit.

Dès lors, il est établi que M. [T], qui n'a pas maîtrisé la vitesse de son véhicule est, par sa faute, seul à l'origine de l'accident au cours duquel il a été blessé, ce qui l'exclut de tout droit à indemnisation.

Infirmant le jugement, il convient donc de débouter M. [T] de sa demande d'indemnisation et de ses demandes subséquentes, tendant à voir ordonner une expertise et à obtenir le paiement d'une somme provisionnelle à valoir sur son indemnisation.

De même, il n'est pas contesté que la compagnie Suravenir assurances a perçu de Groupama la somme de 21 272,56 euros en application de la convention Irca, de sorte qu'il convient de condamner la première à rembourser cette somme à la seconde.

2. Sur les autres demandes

Le jugement est infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'indemnité de procédure.

La cour estime que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Groupama et condamne in solidum la compagnie Suravenir assurances et M. [T] à lui payer la somme de 2.000 euros à ce titre.

Les dépens de première instance et d'appel sont in solidum à la charge de la compagnie Suravenir assurances et M. [T].

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions;

statuant de nouveau et y ajoutant,

Déclare M. [W] [T] entièrement responsable de l'accident survenu le 24 novembre 2015;

Déboute M. [W] [T] de ses demandes d'indemnisation et de sa demande tendant à voir ordonner une expertise;

Condamne la société Suravenir assurances à payer à la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de Rhône Alpes Auvergne la somme de 21 272,56 euros;

Condamne in solidum M. [W] [T] et la société Suravenir assurances à payer à la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de Rhône Alpes Auvergne, la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne in solidum in solidum M. [W] [T] et la société Suravenir assurances aux dépens de première instance et d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 22/02169
Date de la décision : 12/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-12;22.02169 ?
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