Arrêt n° 22/00539
05 Juillet 2022
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N° RG 21/00829 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FO4O
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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ
18 Mars 2021
R 21/00015
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE METZ
Chambre Sociale-Section 1
ARRÊT DU
cinq Juillet deux mille vingt deux
APPELANTE :
Mme [U] [G]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Bernard PETIT, avocat au barreau de METZ
INTIMÉE :
S.N.C. LABORATOIRE COTRAL
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Elise SEBBAN, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Janvier 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne FABERT, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre
Mme Anne FABERT, Conseillère
Madame Laëtitia WELTER, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Hélène BAJEUX
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Anne FABERT, conseillère pour la Présidente de Chambre régulièrement empêchée, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS
Mme [U] [G] a été embauchée par la SNC Laboratoires Cotral, selon contrat à durée indéterminée à compter du 9 mars 2009, en qualité d'attachée commerciale-technicienne de prévention.
Mme [G] a dû interrompre ses activités professionnelles en raison d'une grave maladie et a été absente notamment du 5 mai 2015 au 2 avril 2016, du 1er décembre 2017 au 3 janvier 2018, du 29 janvier 2018 au 31 août 2019.
A l'issue de cette suspension et sur proposition du médecin du travail, la salariée a dû exercer son activité en mi-temps thérapeutique du 17 septembre au 2 décembre 2019. Par la suite, l'employeur a refusé de poursuivre le mi-temps thérapeutique et Mme [G] a été à nouveau placée en arrêt maladie à compter du 3 décembre 2019 et jusqu'à la fin de son contrat de travail.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 3 mars 2020, Mme [G] a été convoquée à un entretien préalable pour un éventuel licenciement fixé le 17 mars 2020.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 avril 2020, Mme [G] a été licenciée pour désorganisation du service du fait de l'absence prolongée et de la nécessité de la remplacer définitivement.
Par acte introductif enregistré au greffe le 5 février 2021, Mme [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Metz aux fins de :
- Condamner la SNC Laboratoires Cotral à lui verser les sommes de :
- 7 283,32 € au titre de complément sur l'indemnité de licenciement ;
- 2 000,00 € à titre de dommages et intérêts provisionnels pour le préjudice subi en raison de la non-perception des indemnités chômage liées à son activité à temps complet ;
- 1 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner aux frais et dépens ;
- Ordonner la rectification de l'attestation Pôle emploi en sa rubrique 6.1 avec indication des salaires de l'année précédant la maladie ;
Par ordonnance de référé du 18 mars 2021, le conseil de prud'hommes de Metz, formation de référé, a statué ainsi qu'il suit :
- Ordonne aux Laboratoires Cotral de payer à Mme [G] les sommes de :
- 2 165, 75 € nets au titre de complément sur l'indemnité de licenciement ;
- 2 000,00 € nets au titre de dommages et intérêts provisionnels pour le préjudice subi par la salariée en raison de là non-perception des indemnités chômage liées à son activité à temps plein ;
- 1000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Ordonne aux Laboratoires Cotral de rectifier l'attestation Pôle emploi en sa rubrique 6.1 en partant du dernier salaire complet de Mme [G], à savoir celui du mois de décembre 2017 ;
- Condamne les Laboratoires Cotral aux entiers frais et dépens de la présente instance;
- Rappelle qu'en application de l'article 489 du code de procédure civile, la présente ordonnance est exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration formée par voie électronique le 1er avril 2021, Mme [G] a régulièrement interjeté appel de l'ordonnance.
Par ses dernières conclusions datées du 19 avril 2021, et notifiées par voie électronique le 22 avril 2021, Mme [G] demande à la cour de :
- Réformer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a alloué à la salariée un complément d'indemnité de licenciement de 2 165, 75 € ;
- Dire que le montant de l'indemnité de licenciement fixée à 9 200,17 € est dû ;
- Condamner en conséquence la SNC Laboratoires Cotral à payer à Mme [G] un complément d'indemnité de licenciement de 6 109,11 € ;
- Condamner la SNC Laboratoires Cotral à payer à Mme [G] la somme de 1 000,00 € au titre de l'article du 700 du code de procédure civile ;
- Condamner également la SNC Laboratoires Cotral aux entiers frais et dépens.
Par ses dernières conclusions datées du 29 avril 2021 et notifiées par voie électronique le 30 avril 2021, la SNC Laboratoires Cotral demande à la Cour de :
- Confirmer l'ordonnance du conseil de prud'hommes en ce qu'il a retenu exactement une ancienneté de 8 ans et un mois ;
- Réformer l'ordonnance du conseil de prud'hommes de Metz du 18 mars 2021 en toutes ses dispositions ;
- Dire et juger que la SNC Laboratoires Cotral apporte des contestations sérieuses sur les demandes de Mme [G] au titre du complément d'indemnité de licenciement, de la demande de remise d'une attestation Pôle emploi rectifiée, des dommages et intérêts ;
En conséquence,
- Débouter Mme [G] de l'intégralité de ses demandes ;
- Condamner Mme [G] à payer à la SNC Laboratoires Cotral la somme de 1 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner Mme [G] aux entiers dépens.
Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS
Selon l'article R 1455-5 du code du travail, dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
En outre, aux termes de l'article R 1455-7 du même code, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Sur le complément de l'indemnité légale de licenciement :
Selon l'article L 1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement. Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.
Aux termes des articles R 1234-2 et R 1234-1 du code du travail, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour une ancienneté jusqu'à 10 ans. L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à une somme calculée par année de service dans l'entreprise et tenant compte des mois de service accomplis au-delà des années pleines.
Il n'est plus contesté en l'espèce que l'ancienneté de Mme [G] à prendre en considération est de 8 ans et 1 mois, après déduction des périodes de suspension du contrat de travail pour maladie.
En outre, en application de l'article R 1234-4 du code du travail, le salaire servant de base au calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :' - soit 1/12 de la rémunération brute des 12 derniers mois précédant la date d'envoi de la notification du licenciement, y compris gratifications, mois double' ;
- soit 1/3 de la rémunération brute des 3 derniers mois précédant la date d'envoi de la notification du licenciement. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, sera prise en compte prorata temporis.
Mme [G] demande un complément d'indemnité de licenciement calculé sur la base des 12 derniers mois de salaire plein qu'elle a touchés, soit sur les 12 mois de 2017.
La SNC Laboratoires Cotral soutient que les périodes de travail postérieures, mêmes interrompues par des arrêts maladies, et notamment la période de mi-temps thérapeutique, doivent être prises en considération dans le salaire de référence.
Les questions de savoir d'une part si les périodes de mi-temps thérapeutiques doivent être prises en compte ou non dans le salaire de référence et d'autre part de savoir s'il y a lieu de prendre en compte la dernière période travaillée avant le premier arrêt de travail constituent une contestation sérieuse, nécessitant une appréciation sur le fond du droit de ces questions, de sorte qu'il convient d'infirmer l'ordonnance entreprise sur ce point, et de dire qu'il n'y a pas lieu à référé.
A titre surabondant, la cour entend rappeler que Mme [G] ne peut pas, en référé, solliciter de condamnation au paiement, la formation de référé ne pouvant allouer que des provisions.
Sur la rectification de l'attestation pôle emploi et le préjudice résultant de la non perception des indemnités de chômage liées à son activité à temps complet :
Il résulte de l'attestation destinée à Pôle emploi établie le 29 juin 2020 que la SNC Laboratoires Cotral a pris en considération les 12 mois allant de décembre 2018 à novembre 2019 inclus, estimant que le dernier jour travaillé et payé tel que prévu par la réglementation Unedic est le 2 décembre 2019, Mme [G] ayant repris le travail de façon limitée en 2018 et 2019.
Mme [G] estime quant à elle que seuls les 12 derniers mois de salaires pleins doivent être pris en compte, de sorte que l'employeur devait indiquer les salaires versés entre janvier et décembre 2017 inclus.
Cette question impliquant de trancher au fond le droit applicable, et notamment le sort de la période accomplie en mi-temps thérapeutique, il convient de constater qu'il y a bien une contestation sérieuse de sorte qu'il n'y a pas lieu non plus à référé sur ces deux chefs de prétention qui sont liées.
L'ordonnance sera infirmée sur ces points.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Mme [G] succombant à l'instance en référé, il convient de la condamner aux dépens de première instance et d'appel, et de rejeter sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance.
L'équité commande en revanche de laisser à la SNC Laboratoires Cotral la charge des frais non compris dans les dépens engagés par elle au cours de la présente procédure en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant contradictoirement, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi
Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau dans cette limite,
Dit n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes formées par Mme [U] [G] contre la SNC Laboratoires Cotral ;
Invite Mme [U] [G] à saisir la juridiction compétente pour statuer sur le fond de ses demandes ;
Déboute Mme [U] [G] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ;
Condamne Mme [U] [G] aux dépens de première instance ;
Y ajoutant,
Déboute la SNC Laboratoires Cotral de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne Mme [U] [G] aux dépens d'appel.
Le GreffierP/ La Présidente régulièrement empêchée
La Conseillère