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04/09/2024 | FRANCE | N°21/01502

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 04 septembre 2024, 21/01502


Arrêt n° 24/00293



04 septembre 2024

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N° RG 21/01502 -

N° Portalis DBVS-V-B7F-FQT5

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

18 mai 2021

19/00634

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



Quatre septembre deux mille vingt quatre







APPELANTE :


>Mme [E] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Cécile CABAILLOT, avocat au barreau de METZ







INTIMÉE :



SAS TINE représentée par son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Agnè...

Arrêt n° 24/00293

04 septembre 2024

---------------------

N° RG 21/01502 -

N° Portalis DBVS-V-B7F-FQT5

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

18 mai 2021

19/00634

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Quatre septembre deux mille vingt quatre

APPELANTE :

Mme [E] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Cécile CABAILLOT, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

SAS TINE représentée par son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Agnès BIVER-PATE, avocat au barreau de METZ, avocat postulant et par Me Etienne GUIDON, avocat au barreau de NANCY, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 septembre 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE, en présence de Mme [I] [C] [W], greffière stagiaire

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement contradictoire du 18 mai 2021 de la formation paritaire de la section commerce du conseil de prud'hommes de Metz qui a débouté Mme [E] [G] de l'ensemble de ses prétentions, rejeté la demande reconventionnelle de la SAS Tiné et dit que chaque partie supporterait la charge de ses propres frais et dépens ;

Vu la déclaration d'appel interjeté par voie électronique le 16 juin 2021 par Mme [G];

Vu les dernières conclusions déposées par voie électronique le 11 avril 2023 par Mme [G] qui requiert la cour d'infirmer le jugement, en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, puis, statuant à nouveau, de condamner la société Tiné à lui payer les sommes suivantes :

* 1 534,5 euros net à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait de l'illégitimité de la sanction ;

* 3 069 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 1 534,5 euros net à titre de dommages et intérêts en raison de l'exécution fautive du contrat de travail ;

* 1 534,5 euros net à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article L. 1226-12 du code du travail ;

* 278,36 euros brut à titre de rappel de salaire pour le mois de juillet 2018 ;

* 1 762,99 euros brut à titre de rappel de salaire relatif aux heures supplémentaires ;

* 176,3 euros brut au titre des congés payés afférents ;

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance ;

* 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions déposées par voie électronique le 15 novembre 2021 par la société Tiné qui sollicite que la cour confirme le jugement, en ce qu'il a débouté Mme [G] de l'ensemble de ses prétentions, et condamne celle-ci à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Vu l'ordonnance de clôture du 13 septembre 2022 et l'ordonnance de révocation du 11 avril 2023 ;

Vu la seconde ordonnance de clôture du 19 septembre 2023 ;

Vu les autres pièces de la procédure et celles produites par les parties ;

Mme [G] a été engagée à durée déterminée pour la période du 15 janvier 2018 au 28 février 2018, à raison de 35,01 heures par semaine, en qualité d'agent de service, moyennant un salaire de base de 1 518,52 euros brut par mois.

A compter du 1er mars 2018, la relation de travail s'est poursuivie à durée indéterminée, la durée de travail étant fixée à 70 heures par semaine et le salaire de base à 3 036,33 euros brut par mois.

Les parties ont conclu le 5 mai 2018 un avenant ayant effet jusqu'au 31 mai 2018 pour surcroît temporaire d'activité.

La convention collective applicable à la relation de travail était celle des entreprises de propreté.

Le 18 juin 2018, une altercation est survenue entre la salariée et sa collègue, Mme [X]

Mme [G] a été placée en arrêt maladie sans interruption à compter du lendemain.

Le 21 juin 2018, la société Tiné a délivré à Mme [G] un avertissement pour comportement 'inadapté et inadmissible' le 18 juin 2018 sur son lieu de travail.

Par courriers des 25 et 29 juin 2018, l'employeur a convoqué Mme [G], 'en raison des faits survenus le 18 juin dernier', à un entretien préalable fixé au 29 juin 2018, puis au 5 juillet 2018.

La salariée ne s'y est pas rendue en raison de son état de santé.

Aucune suite n'a été donnée par la société Tiné.

Le 2 janvier 2019, à l'occasion de la visite de reprise, le médecin du travail a déclaré Mme [G] 'inapte au poste d'agent de service et à tout poste dans l'entreprise'.

Après entretien préalable du 30 janvier 2019, Mme [G] a été licenciée, par courrier du 4 février 2019, pour inaptitude et impossibilité de reclassement, sans versement d'une indemnité compensatrice de préavis.

Estimant notamment l'avertissement et le licenciement infondés, Mme [G] a saisi, le 1er août 2019, la juridiction prud'homale.

A titre liminaire, la cour constate qu'aucune des parties ne sollicite l'infirmation du jugement, en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnité compensatrice de congés payés à hauteur de 667,82 euros, de sorte que cette disposition est d'ores et déjà confirmée.

Sur l'avertissement

Il y a lieu de considérer que Mme [G], en sollicitant des dommages et intérêts 'en raison du préjudice subi du fait de l'illégitimité de la sanction', demande implicitement mais nécessairement l'annulation de l'avertissement du 21 juin 2018.

Conformément aux articles L. 1333-1 à L. 1333-3 du code du travail, un salarié peut contester devant le juge prud'homal, dans les délais de prescription, toute mesure disciplinaire prise à son encontre, même s'il a accepté de se voir appliquer la sanction.

Le juge apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés à l'intéressé sont de nature à justifier la sanction contestée.

Sauf si la sanction est un licenciement ou une rupture du contrat à durée déterminée pour faute grave, le juge peut annuler une sanction irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

En l'espèce, par courrier du 21 juin 2018, la société Tiné a délivré à Mme [G] un avertissement, dans les termes suivants :

'Le 18 juin dernier, vous avez fait preuve d'un comportement inadapté et inadmissible sur votre lieu de travail.

En effet, avec votre collègue de travail Madame [X], vous avez eu une dispute.

Nous seulement, vous ne vous êtes pas arrêtée à cette dispute verbale, mais vous en êtes même arrivée à une bagarre.

Vous comprendrez aisément que ce comportement est inadmissible que ce soit en terme de respect entre collègues mais également en terme de respect envers les autres personnes présentes sur votre lieu de travail. En agissant de la sorte, non seulement vous vous mettez en danger, vous ainsi que votre collègue, mais vous portez également préjudice à l'image et à la réputation de notre société'.

Par conséquent, je me vois contraint de vous notifier par la présente un avertissement'.

La société Tiné a notifié un avertissement dans les mêmes termes à Mme [X] (pièce n° 6).

Pour justifier de la sanction à l'encontre de Mme [G], l'employeur produit un courrier de Mme [X] (pièce n° 17) qui indique avoir subi une insulte raciste et été menacée. Elle demande aussi de ne plus être coéquipière de Mme [G], ajoutant 'je suis traumatisée et psychologiquement mal depuis qu'elle m'a frappée'.

Mme [G] conteste la version de Mme [X] et affirme avoir été victime de violences commises par celle-ci.

Elle produit :

- un certificat médical du 18 juin 2018 constatant notamment des dermabrasions et un 'hématome cervical antérieur linéaire environ 8cm long' entraînant une incapacité totale de travail de 3 jours, sauf complications (pièce n° 18) ;

- un certificat médical initial d'accident du travail illisible, mais, selon les dires non contestés de l'intéressée, faisant débuter un arrêt de travail à compter du 18 juin 2018 (pièce n° 5) ;

- un dépôt de plainte du 27 juin 2018 à l'encontre de Mme [X] pour des faits du 18 juin 2018 de violence ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas huit jours (pièce n° 19), étant relevé que Mme [G] affirmait ne pas avoir frappé et seulement repoussé Mme [X] qui se serait 'jetée' sur elle et lui aurait donné un coup sur la joue gauche.

Le 22 octobre 2018, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Metz a pris une décision de classement, au motif que 'Les faits ou les circonstances des faits de la procédure n'ont pu être clairement établis par l'enquête. Les preuves ne sont pas suffisantes pour que l'infraction soit constituée et que des poursuites pénales puissent être engagées'.

Dans ses conclusions, la société Tiné reconnaît qu'elle n'a pas pu 'faire toute la lumière sur cette affaire'.

En raison de l'incertitude sur le déroulement des faits survenus sans aucun témoin le 18 juin 2018 et donc sur la réalité de la faute, le doute devant profiter à la salariée, il y a lieu d'annuler la sanction.

Le préjudice moral que l'avertissement infondé a causé à Mme [G] justifie qu'il lui soit alloué un montant de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur le licenciement infondé

Mme [G] estime que son licenciement est infondé, aux motifs que l'employeur n'a respecté ni l'obligation de reclassement ni l'obligation de sécurité.

Qu'elle soit ou non d'origine professionnelle, l'incapacité physique dans laquelle se trouve un salarié d'exécuter tout ou partie de son travail peut être constatée par le médecin du travail.

Sauf dispense expresse du médecin du travail, l'employeur doit alors rechercher à reclasser le salarié dans un autre emploi adapté à ses nouvelles capacités.

En l'espèce, il ressort de l'avis d'inaptitude 'au poste d'agent de service et à tout poste dans l'entreprise' du 2 janvier 2019 que le médecin du travail n'a pas entendu dispenser la société Tiné de l'obligation de reclassement (pièce n° 7 de l'intimée), puisqu'il n'a coché aucune des deux cases sous la rubrique 'cas de dispense de l'obligation de reclassement'.

Par courrier du 14 janvier 2019, ce même médecin a informé l'employeur que 'Madame [G] pourrait occuper un poste similaire dans un environnement différent, hors de l'entreprise qui l'emploie' (pièce n° 8).

La société Tiné verse aux débats :

- un 'procès-verbal de carence pour tous les collèges' du 5 juillet 2016 portant sur les élections des délégués du personnel (pièce n° 12), ce qui démontre que la consultation de ceux-ci était impossible ;

- les cinq courriers du 3 janvier 2019 interrogeant d'autres sociétés du groupe sur l'existence de postes disponibles conformes aux aptitudes de la salariée (pièce n° 13);

- les cinq réponses négatives reçues (pièce n° 14).

Le fait que les courriers du 3 janvier 2019 de l'employeur aient tous été remis en main propre le même jour aux représentants des sociétés destinataires ne prouve aucune mauvaise foi de sa part, l'intimée expliquant qu'elle fait partie du groupe MPS et que les sociétés du groupe ont participé le 3 janvier 2019 à une réunion de travail commune.

Aucun élément particulier ne démontre que, comme le soutient l'appelante, les réponses négatives - qui ne sont pas identiques dans leur contenu - auraient 'été établies pour les besoins de la cause' et n'auraient pas été effectivement transmises.

En définitive, la société Tiné justifie de recherches sérieuses et loyales, de sorte que le moyen tiré d'un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement est rejeté.

Par ailleurs, il résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Il doit en assurer l'effectivité notamment en prenant en considération les préconisations que le médecin du travail est habilité à faire.

L'employeur peut s'exonérer de sa responsabilité en justifiant avoir pris les mesures générales de prévention nécessaires et suffisantes, telles que prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

En l'espèce, il n'est pas prétendu que les faits survenus le 18 juin 2018 ont été précédés d'une autre altercation entre Mme [G] et Mme [X] ou que l'employeur avait été avisé d'une rivalité entre ces deux salariées.

Les faits du 18 juin 2018, qu'elle que soit la version retenue, relèvent d'un comportement de nature extraprofessionnelle, qui était totalement imprévisible pour l'employeur.

A compter de cette date, Mme [G] est restée sans discontinuer en arrêt maladie, ce qui emportait suspension du contrat de travail.

Le fait que l'employeur lui ait adressé, à la fin du mois de juin 2018, un avertissement, puis deux courriers de convocation à un entretien préalable, traduit la volonté de la société Tiné d'exercer son pouvoir disciplinaire, mais non une absence de mesures de prévention au sens de l'article L. 4121-1 précité.

Au demeurant, aucun élément médical n'est produit établissant un lien entre le comportement de l'employeur postérieurement au 18 juin 2018 et l'arrêt de travail.

Il s'ensuit que, même à supposer que, comme l'appelante l'affirme, la caisse primaire d'assurance maladie ait reconnu une origine professionnelle à l'accident du 18 juin 2018, Mme [G] n'est pas fondée à se prévaloir d'une violation par l'employeur de l'obligation de sécurité.

En conséquence, la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation de l'article L. 1226-12

L'alinéa 1 de l'article L. 1226-12 du code du travail dispose que :

'Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.'

Si l'employeur conclut à l'impossibilité de reclassement, il fait connaître au salarié, par écrit, les motifs s'opposant à son reclassement avant d'engager la procédure de rupture du contrat de travail, sauf si l'intéressé a refusé un emploi conforme aux critères fixés par le Code du travail.

Le non-respect de cette formalité ouvre droit, pour le salarié, à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, mais n'affecte pas à lui seul la légitimité de la rupture.

En l'espèce, la société Tiné ne produit aucun écrit dans lequel elle aurait fait connaître à Mme [G] les motifs s'opposant à son reclassement avant d'engager la procédure de rupture du contrat de travail.

Mme [G] souligne être sans emploi et mère de trois enfants, mais ne produit aucun justificatif comme le souligne l'employeur.

La demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 1226-12 est donc rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.

Sur l'exécution fautive du contrat de travail

Il ressort de l'article L. 1222-1 que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

L'employeur doit ainsi faire bénéficier le salarié des conventions, accords collectifs et usages applicables dans l'établissement et, de manière générale, faire observer la réglementation en vigueur.

La bonne foi est présumée.

En l'espèce, Mme [G] soutient qu'il y a eu exécution fautive du contrat de travail, en ce qu'il 'a été procédé à la conduite d'une procédure de licenciement sans qu'elle ne soit suivie d'effet'.

En convoquant Mme [G] 'en raisons des faits survenus le 18 juin dernier' à un 'entretien préalable à une sanction disciplinaire' fixé au 29 juin 2018 puis repoussé au 5 juillet 2018, l'employeur a diligenté à l'encontre de sa salariée, pendant une période d'arrêt maladie, une procédure disciplinaire qui n'était pas susceptible d'aboutir, puisqu'il avait déjà sanctionné les mêmes faits par un avertissement du 21 juin 2018.

Ni cette maladresse de la société Tiné ni aucun autre élément du dossier ne révèle néanmoins une intention malveillante de l'employeur.

En conséquence, la demande de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail est rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.

Sur les heures supplémentaires

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le juge ne peut pas se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié pour rejeter sa demande, mais doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés et que l'employeur est tenu de lui fournir.

En l'espèce, Mme [G] présente, à l'appui de sa demande, un relevé quotidien du 26 février 2018 au 18 juin 2018 de son heure de début et de son heure de fin de service (pièce n° 24), ainsi qu'un décompte de la somme due à hauteur de 1762,99 euros pour la période du 1er mars 2018 au 15 juin 2018 (pièce n° 25).

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La société Tiné ne verse aux débats aucun relevé en réplique, bien qu'elle ait été tenue d'effectuer un contrôle des heures de travail de sa salariée.

L'employeur rétorque que les heures supplémentaires ne sont dues que si elles ont été effectivement commandées, mais ne produit aucun document démontrant qu'il avait posé une interdiction expresse à ce sujet ou que les tâches confiées à Mme [G] ne nécessitaient pas l'accomplissement d'heures supplémentaires, alors qu'à la lecture du relevé de l'appelante, celles-ci avaient, pendant la période litigieuse, un caractère habituel que l'employeur ne pouvait ignorer.

La société Tiné souligne néanmoins trois incohérences qui justifient de réduire la somme demandée par l'appelante.

Il ressort du relevé de la salariée qu'elle a travaillé tous les jours normalement au mois d'avril 2018, en contradiction avec son bulletin de paie du même mois qui porte mention 5,20 heures d'absence.

Mme [G] fait figurer une journée de travail de 8h15 à 17h30 le jeudi 24 mai 2018, alors que la fiche de paie fait apparaître celle-ci comme congé payé avec un versement d'une indemnité afférente.

Par ailleurs, Mme [G] sollicite des heures supplémentaires au titre des journées des 4,5,6,13,14 et 15 juin 2018, en contradiction avec l''attestation de paiement des indemnités journalières' établie par la caisse qui mentionne que la salariée était en maladie à ces dates.

En définitive, la cour a acquis la conviction que Mme [G] a accompli des heures supplémentaires, mais seulement pour un montant de 1 170 euros brut.

En conséquence, la société Tiné est condamnée à payer à Mme [G] un rappel d'heures supplémentaires à hauteur de 1 170 euros brut, outre un montant de 117 euros brut de congés payés y afférents, le jugement étant infirmé sur ces deux points.

Sur le maintien de salaire du mois de juillet 2018

Il résulte de l'article L. 1226-23 du code du travail que, dans les départements d'Alsace et de Moselle, le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour une cause personnelle indépendante de sa volonté et pour une durée relativement sans importance a droit au maintien de son salaire.

L'article ajoute que, toutefois, pendant la suspension du contrat de travail, les indemnités versées par un régime d'assurances sociales obligatoire sont déduites du montant de la rémunération due par l'employeur.

En l'espèce, Mme [G] soutient qu'elle doit bénéficier d'un rappel de salaire d'un montant de 278,36 euros au titre du mois de juillet 2018, car elle n'a perçu que la somme de 1256,14 euros d'indemnités journalières.

L'examen des bulletins de salaire montre que la régularisation est intervenue au mois de janvier 2019 : l'employeur a alors versé un montant de 3 663,36 euros brut de 'maintien de salaire maladie ou AT', notamment au titre du 'maintien salaire AT du 19/06/2018 au 16/12/2018".

En conséquence, la demande présentée au titre du maintien de salaire du mois de juillet 2018 est rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Le jugement est confirmé dans ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance, étant observé que l'infirmation du jugement n'est pas sollicitée, en ce qu'il a dit que chaque partie supporterait ses propres frais et dépens.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La société Tiné est condamnée aux dépens d'appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme [E] [G] au titre des dommages et intérêts pour l'avertissement injustifié, au titre du rappel d'heures supplémentaires et au titre des congés payés y afférents ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Annule l'avertissement du 21 juin 2018 ;

Condamne la SAS Tiné à payer à Mme [E] [G] les sommes de :

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'avertissement injustifié du 21 juin 2018 ;

- 1 170 euros brut à titre de rappel d'heures supplémentaires ;

- 117 euros brut à titre de congés payés y afférents ;

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la SAS Tiné aux dépens d'appel.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 21/01502
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;21.01502 ?
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