La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006940257

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 12 mars 2002, JURITEXT000006940257


PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement rendu le 7 juin 2000 par le Tribunal de Grande Instance de MILLAU, qui :

.

a homologué partiellement le rapport de l'expert LIMOUZY;

.

s'est déclaré incompétent pour ordonner l'interdiction d'épandage de lisiers sur certaines parcelles et le traitement des odeurs et renvoyé Daniel X... à mieux se pourvoir;

.

a condamné la société coopérative PORCY SUD à payer à Mr X... la somme de 72.000 francs de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal en réparation de ses préju

dices pour trouble de voisinage;

.

a débouté Mr X... de ses demandes tendant à l'homologation d'accords et d...

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement rendu le 7 juin 2000 par le Tribunal de Grande Instance de MILLAU, qui :

.

a homologué partiellement le rapport de l'expert LIMOUZY;

.

s'est déclaré incompétent pour ordonner l'interdiction d'épandage de lisiers sur certaines parcelles et le traitement des odeurs et renvoyé Daniel X... à mieux se pourvoir;

.

a condamné la société coopérative PORCY SUD à payer à Mr X... la somme de 72.000 francs de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal en réparation de ses préjudices pour trouble de voisinage;

.

a débouté Mr X... de ses demandes tendant à l'homologation d'accords et de sa demande tendant à la réfection des buses des ponts sur les parcelles B 70, B 71 et A 451;

.

a condamné la société PORCY SUD à payer à Mr X... la somme de 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et aux dépens comprenant les frais de l'expertise judiciaire; Vu l'appel régulièrement interjeté par la société COOPERATIVE PORCY SUD;

Vu les conclusions notifiées le14 février 2002 par l'appelante, qui demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de dommages-intérêts pour trouble anormal de voisinage, ce compte tenu du défaut d'anormalité, de lien de causalité, de préjudice, et de condamner Mr X... à lui payer la somme de 1.200 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Vu les conclusions notifiées le 28 novembre 2001 par Mr Daniel X..., qui demande à la cour de:

- donner acte à la Société Coopérative PORCY SUD de ce qu'elle s'engage à ne pas épandre du lisier à moins de 500 mètres de sa propriété et homologuer en conséquence l'accord intervenu devant l'expert judiciaire, et à ne pas épandre de lisier sur la parcelle Y...° B 314;

- la condamner en vertu de l'article 1382 du Code Civil à effectuer les travaux de réfection des buses des ponts des parcelles B 70 et 71 et AI 451, à ne pas épandre du lisier sur les pentes supérieures à 7 %, à effectuer les plantations d' arbres autour de l'ensemble de la

porcherie et réaliser le traitement des odeurs, et dire que l'expert LIMOUZY devra être désigné à nouveau dans le délai d'un an afin de contrôler la mise en oeuvre du traitement des odeurs;

- la condamner à lui payer une somme de 112 000,00 francs au titre de la dépréciation de la valeur de la propriété et une somme annuelle de 40 000,00 francs courant depuis 1992 jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir; subsidiairement, dire que les dommages-intérêts alloués au titre des nuisances olfactives ne sauraient être inférieurs à la somme de 50.000 francs évalués au jour de l'arrêt à intervenir;

- la condamner au paiement de la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux entiers dépens;

M O T I V A T I O Y...

Les autorisations administratives n'étant accordées que sous réserve des droits des tiers, le juge civil est compétent, en application de l'article 8 de la loi du 19 juillet 1976, pour statuer sur la responsabilité civile de droit commun de l'exploitant d'une installation classée et ordonner les mesures propres à faire cesser les troubles anormaux de voisinage causés par cette exploitation, le seul fait qu'elle fonctionne conformément aux règles administratives ne suffisant pas à le décharger de sa responsabilité.

En l'espèce, le maire de la commune de COMBRET n'a émis un avis favorable le 26 juin 1992 à la demande de permis de construire que sous certaines réserves expresses, exigeant notamment que toutes précautions soient prises pour le respect de la réglementation de l'environnement et des règles d'hygiène, que le traitement du lisier pour sa désodorisation soit effectué, et que l'épandage du lisier sur la parcelle de la Combalière en face la Bessède, soit déplacé assez loin des maisons.

Il résulte des constatations de l'expert LIMOUZY, qui ne sont pas sérieusement contestées, que si M. X... ne souffre pas de nuisances anormales dans sa maison d'habitation située à 800 mètres de l'exploitation, il est en revanche fortement incommodé par des odeurs nauséabondes insoutenables lorsqu'il fait paître ses moutons dans les prairies situées entre les bâtiments d'élevage des porcs et les zones d'épandage du lisier.

Même alors que l'on se trouve dans une zone à vocation d'élevage et que celui qui en est victime est lui-même éleveur, ces nuisances constituent des troubles anormaux de voisinage en raison de leur particulière intensité.

Elles proviennent d'une part de l'élevage lui-même, dont la ventilation puissante propulse les odeurs dans l'atmosphère ambiante, et d'autre part de l'épandage sur prairies permanentes, dans lesquelles le lisier ne peut pas être enfoui.

Certaines préconisations de l'expert ont été suivies d'effet: PORCY SUD a planté une haie d'arbres autour de ses installations de manière à diminuer les nuisances olfactives, et retiré du plan d'épandage la

parcelle B 394.

En revanche, l'exploitant apparaît avoir négligé de mettre en place un procédé de désodorisation de ses bâtiments d'élevage et de sa fosse à lisier, ainsi que l'expert a pu le constater, méconnaissant ainsi le règlement sanitaire départemental, les réserves assortissant l'arrêté municipal et la convention sur la gestion des affluents; tout porte à croire que la situation n'a pas évolué, PORCY SUD ne produisant aucune facture d'achat de produits désodorisants ni aucune autre justification du respect de cette obligation qui n'est au demeurant pas contestée. Elle devra par conséquent s'y conformer.

Par ailleurs, l'expert recommande un retrait pur et simple du plan d'épandage de toutes les terres situées à moins de 500 mètres de la propriété bâtie et non bâtie de M. X..., telles qu'apparaissant sur le plan joint en annexe de son rapport. Certes, en présence de certaines réticences, il n'a pas constaté un accord ferme des deux parties sur ce point. Il n'en demeure pas moins que cette mesure, - qui s'inscrit dans le cadre de la levée des réserves exprimées dans l'arrêté municipal du 26 juin 1992-, apparaît être la seule efficace pour réduire significativement les nuisances olfactives provenant de l'épandage du lisier. Elle est par ailleurs suffisante, sans qu'il y ait lieu d'y ajouter une interdiction en fonction de la pente que la configuration des lieux ne permettrait pas de définir ni a fortiori de contrôler.

Il n'apparaît pas suffisamment établi que les dégradations des buses de parcelles B 70, B 71 et A 451 soient imputables à PORCY SUD qui le

conteste; l'expert ne fournit aucune précision et M. X... n'apporte aucun élément objectif sur ce point. Il convient donc de confirmer le rejet de sa demande de ce chef.

Le premier juge a exactement évalué à la somme de 30.000 francs (4.573,47 ä ) le montant des dommages-intérêts compensatoires du préjudice de jouissance subi par M. X... pour avoir été contraint de travailler en supportant les odeurs nauséabondes provenant de l'exploitation de la porcherie; contrairement à ce qu'affirme PORCY SUD, cette exploitation n'a jamais cessé, seule son extension ayant été bloquée; il n'est pas justifié d'un préjudice plus important.

En revanche, les mesures ordonnées par le présent arrêt étant destinées à faire disparaître définitivement ces nuisances olfactives en ce qu'elles présentent un caractère excessif et anormal, et à les ramener à un niveau pouvant être considéré comme acceptable compte tenu de la destination agricole de la zone, il en résulte que l'exploitation de M. X... ne subira aucune plus value dès lors qu'elles auront été mise en oeuvre. Il sera en conséquence débouté de la demande d'indemnisation qu'il présente de ce chef.

Succombant en cause d'appel, la société COOPERATIVE PORCY SUD paiera en équité à M. X..., sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C. et en sus de la somme allouée en première instance, une indemnité complémentaire de 1.300 ä, et supportera tous les dépens.

P A R C E Z... M O T I F Z...

Réforme le jugement déféré et, statuant à nouveau:

Condamne la Société Coopérative PORCY SUD à ne pas épandre de lisier sur la parcelle Y...° B 314, ni sur les parcelles situées à moins de 500 mètres de la propriété de Daniel X..., telles que définies par l'expert LIMOUZY et à mettre en place un traitement permanent de désodorisation des bâtiments d'élevage et de la fosse à lisier.

La condamne à payer à Daniel X... les sommes de:

- 4.573,47 ä à titre de dommages-intérêts compensatoires de son préjudice de jouissance;

- 1.300 ä en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, en sus de la somme allouée en première instance sur le même fondement.

Déboute Daniel X... du surplus de ses demandes.

Se réserve le contentieux lié à toute difficulté d'exécution éventuelle.

Condamne la Société Coopérative PORCY SUD aux dépens incluant les frais d'expertise, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP TOUZERY-COTTALORDA.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006940257
Date de la décision : 12/03/2002

Analyses

PROPRIETE - Trouble de voisinage

Des nuisances telles que des odeurs nauséabondes insoutenables, d'une particulière intensité, provoquées par un élévage porcin et un épandage de lisier, constituent des troubles anormaux de voisinage alors même que l'on se trouve dans une zone ayant vocation à l'élevage et que la personne qui en est victime est elle-même éleveur


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2002-03-12;juritext000006940257 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award