SD / PDH / FB
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale
ARRET DU 12 Décembre 2007
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 02576
ARRET no
Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 NOVEMBRE 2006 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE D'AVEYRON
No RG20400156
APPELANTE :
SAS ADECCO
prise en la personne de son représentant légal
4, rue Louis Guérin
69612 VILLEURBANNE CEDEX
Représentant : Me Alain. DUMAS (avocat au barreau de LYON)
INTIMES :
Monsieur Luc A...
...
12520 AGUESSAC
Représentant : la SCPA SALLES-TAUSSAT (avocats au barreau de RODEZ)
SAS COMBES
prise en la personne de son représentant légal
ZA des Fialets
12100 SAINT GERMAIN
Représentant : Me Xavier CARCY (avocat au barreau de TOULOUSE)
CPAM DE L'AVEYRON
Avenue de Bamberg
12020 RODEZ CEDEX 09
représenté par Mme VIGNESSOULE munie d'un pouvoir en date du 16 / 10 / 2007
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 945-1 du nouveau Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 NOVEMBRE 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Pierre D'HERVE, Président et Madame Bernadette BERTHON, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire, Monsieur Pierre D'HERVE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Pierre D'HERVE, Président
Madame Myriam GREGORI, Conseiller
Madame Bernadette BERTHON, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON
ARRET :
-Contradictoire.
-prononcé publiquement le 12 DECEMBRE 2007 par Monsieur Pierre D'HERVE, Président.
-signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président, et par Mademoiselle Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.
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FAITS ET PROCÉDURE
Luc A..., salarié de la SAS ADECCO, a été victime d'un accident du travail survenu le 23mai 2003, alors qu'il avait été mis par son employeur à disposition de la société Menuiserie COMBES.
Luc A..., a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de l'Aveyron lequel, par jugement du 24 novembre 2006, a :
-dit et jugé que l'accident du travail dont l'intéressé a été victime le 23 mai 2003 a été causé par une faute inexcusable de l'employeur,
-dit et jugé que Luc A..., doit bénéficier de la majoration au taux maximum de la rente accident du travail servie par la CPAM de l'Aveyron,
-avant dire droit sur le préjudice personnel complémentaire subi par Luc A..., ordonné une expertise médicale,
-dit recevable et bien fondée l'action récursoire de la SAS ADECCO à l'encontre de la société Menuiserie COMBES, mais exclusivement sur le coût de l'accident généré en application de l'article L452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'il sera mis en recouvrement pour récupération par la CPAM de l'Aveyron à l'encontre de l'employeur,
-dit et jugé qu'il revient à la société Menuiserie COMBES de prendre en charge une partie de ce coût dans la proportion de 2 / 3 et en outre, dans la même proportion, l'application de l'article 700 du NCPC et les dépens,
-dit et jugé que le surplus des demandes de la SAS ADECCO sur le transfert intégral des charges particulières, en particulier pour la majoration des cotisations sociales générées par l'accident, est irrecevable en l'absence de l'organisme social émetteur et créancier des dites cotisations majorées,
-condamné la SAS ADECCO, pour partie garantie par la société Menuiserie COMBES à concurrence de 2 / 3, à payer à Luc A..., la somme de 900 € en application de l'article 700 du NCPC.
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La SAS ADECCO a, par lettre recommandée du 04 avril 2007, relevé appel de ce jugement qui lui a été notifiée le 19 mars 2007, appel limité à son action récursoire à l'encontre de la société Menuiserie COMBES.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses conclusions écrites reprises oralement à l'audience auxquelles la Cour renvoie pour plus ample exposé de ses arguments et moyens, la SAS ADECCO demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a reconnu la faute inexcusable commise au préjudice de Luc A..., de dire qu'elle n'a commis aucune faute de recrutement en mettant ce dernier à la disposition de la société Menuiserie COMBES et de constater que la période d'essai était révolue au jour de l'accident, de constater également que l'entreprise utilisatrice a été condamnée par le Tribunal Correctionnel pour blessures involontaires dans le cadre du travail et défaut d'information, de réformer le jugement entrepris en accueillant son action récursoire intégrale et en disant que la charge de l'accident devra être transférée intégralement au compte employeur de la société utilisatrice à l'exclusion de la SAS ADECCO, subsidiairement de dire que la société Menuiserie COMBES devra la relever et garantir indemne de l'intégralité des conséquences financières résultant pour elle de la prise en charge du préjudice personnel de Luc A... et de la majoration de la rente afférente, de dire que seule la société Menuiserie COMBES peut être condamnée au profit de Luc A..., au titre de application de l'article 700 du NCPC, sauf a être intégralement garantie par la société Menuiserie COMBES des condamnations prononcées à ce titre, sollicitant enfin la condamnation de la société Menuiserie COMBES à lui payer la somme de 2. 500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Au soutien de son appel, elle fait valoir en substance :
-que le premier juge a considéré à tort qu'il ne pouvait statuer que dans la limite du seul coût de l'accident correspondant aux demandes de la victime fondées sur les articles L452-1 à L452-3 du la code de la sécurité sociale, alors qu'il était également saisi dans les termes de l'article L241-5-1 du dit code permettant d'opérer une répartition différente du droit commun du travail temporaire en fonction des éléments de la cause,
-que l'argumentation développée par la société Menuiserie COMBES fondée sur deux arrêts de Cours d'Appel ne peut être retenue, s'agissant d'arrêts isolés, rendus dans le cadre de procédure où l'action récursoire avait été scindée et dissociée du procès principal,
-que l'action récursoire intégrale de l'entreprise de travail temporaire, prévue par les textes sus visés, ne vise qu'à faire reconnaître le principe du transfert à l'utilisateur d'un accident réparti dans la proportion1 / 3,2 / 3, en l'absence d'un faute inexcusable,
-que par ailleurs seule l'entreprise utilisatrice est responsable des conditions d'hygiène et de sécurité, l'entreprise de travail temporaire ne répondant que de sa faute lourde dans le recrutement du salarié,
-qu'au jour de l'accident, la période d'essai de Luc A..., était révolue depuis longtemps, ce qui ne permet pas à la société Menuiserie COMBES de critiquer les qualités professionnelles de l'intérimaire,
-que la juridiction correctionnelle a condamné la société Menuiserie COMBES tant pour l'irrespect des règles de sécurité et le mauvais état de son matériel que pour défaut de formation à la sécurité,
-que n'ayant commis aucune faute à l'encontre de Luc A..., et disposant d'une action directe à l'encontre de la société Menuiserie COMBES, elle ne pouvait être condamnée au titre de application de l'article 700 du NCPC.
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Dans ses conclusions écrites reprises oralement à l'audience auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et arguments, la société Menuiserie COMBES demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner la SAS ADECCO à lui payer la somme de 2. 500 € en application de l'article 700 du NCPC.
Elle fait valoir pour l'essentiel :
-que le recours de la SAS ADECCO tendant au report des conséquences financières de la faute inexcusable de l'accident du travail dont s'agit en ce qui concerne les cotisations complémentaires " accident du travail " est irrecevable faute de mise en cause tant en première instance qu'en appel, de la CRAM, organisme créancier de ces cotisations,
-qu'en tout état de cause, la demande de la SAS ADECCO est mal fondée, des lors que le report intégral n'est pas possible, ainsi qu'il en résulte des arrêts rendus par les Cours d'Appel de Caen et d'Angers,
-que la possibilité par le juge de procéder à une répartition différente telle que prévue à l'article L241-5-1 du code de la sécurité sociale ne permet pas pour autant à la SAS ADECCO de demander à être relevée et garantie intégralement,
-que c'est la SAS ADECCO qui a proposé la candidature de Luc A... comme répondant à la demande exprimée par l'entreprise utilisatrice ; à cet égard, les pièces échangés au cours de la procédure révèlent que le CV de ce candidat pouvait ne pas correspondre parfaitement à la fonction qui allait être la sienne au sein de la société Menuiserie COMBES.
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Dans ses conclusions écrites reprises oralement à l'audience auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses arguments et moyens, Luc A..., demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et de condamner la partie succombante à lui payer la somme de 1. 000 € en application de l'article 700 du NCPC.
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Dans ses conclusions écrites reprises oralement à l'audience, la CPAM de Rodez demande qu'il lui soit donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice tant en ce qui concerne la reconnaissance le faute inexcusable de l'employeur qu'en ce qui concerne les réparations complémentaires visées aux articles L452-2 et L452-3 du code de la sécurité sociale.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le débat devant la Cour est limité à la garantie due par la société Menuiserie COMBES à la SAS ADECCO.
Contrairement à ce que le premier juge a retenu, il n'y a pas lieu de limiter à 2 / 3 la garantie due par l'entreprise utilisatrice à l'entreprise de travail temporaire, aucune faute ne pouvant être admise à la charge de cette dernière dans l'accident dont Luc A..., a été victime.
En effet, il ressort des pièces produites aux débats que la société Menuiserie COMBES a demandé à la SAS ADECCO de lui mettre à disposition un salarié pour un poste de manutentionnaire dans le cadre de travaux d'assemblage d'ouvrants.
Or il est établi que Luc A... a été victime de l'accident du travail dont s'agit (section de deux phalanges du majeur et de l'index de la main droite) alors qu'il était affecté sur une scie circulaire, c'est à dire employé à une autre tâche que celle de manutentionnaire laquelle ne nécessite pas de compétences ou de formation particulières et ne présente pas de risques particuliers, ainsi que cela est d'ailleurs mentionné sur le contrat de mission, lequel prévoyait une période d'essai limitée à deux jours.
Par ailleurs, le gérant de la société Menuiserie COMBES a été reconnu coupable et condamné en conséquence par le Tribunal Correctionnel de Millau, suivant jugement du 8 décembre 2004, pour avoir le 23 mai 2003 à Millau, dans le cadre du travail, par maladresse, imprudence, inattention ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence, en l'espèce en omettant de respecter la réglementation relative à l'accès aux éléments mobiles de travail, à l'utilisation des organes de service et à la formation des salariés, involontairement causé à Luc A..., une atteinte à l'intégrité de sa personne entraînant une incapacité totale de travail personnel supérieure à 3 mois.
En conséquence, la SAS ADECCO est fondée à demander à être garantie par l'entreprise utilisatrice de l'intégralité des conséquences financières de la faute inexcusable, tant en raison du préjudice subi par Luc A..., qu'en ce qui concerne les cotisations sociales résultant de l'accident de travail, la charge de cet accident devant être transférée intégralement au compte employeur de la société COMBES.
A cet égard, c'est à tort que le premier juge a considéré que la demande de transfert intégral était irrecevable en l'absence de l'organisme social émetteur et créancier des cotisations sociales majorées ;
En effet, la présence de cet organisme n'est nécessaire que lorsqu'il existe une discussion sur le taux de cotisation ou la tarification applicable, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Les autres dispositions du jugement déféré ne sont pas remises en cause.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du NCPC à l'une ou l'autre des parties à l'instance.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit l'accident du travail dont Luc A... a été victime le 23 mai 2003 a été causé par la faute inexcusable de l'employeur, dit que la victime doit bénéficier de la majoration au taux maximum de la rente accident du travail, ordonné avant dire droit sur le préjudice personnel complémentaire de la victime, une mesure d'expertise médicale et condamné la SAS ADECCO à payer à Luc A..., la somme de 900 € en application de l'article 700 du NCPC.
Le réforme pour le surplus, et statuant à nouveau,
Condamne la société Menuiserie COMBES à relever et garantie la SAS ADECCO de l'intégralité des conséquences financières résultant de la faute inexcusable, tant en raison du préjudice subi par Luc A..., qu'à l'égard des cotisations sociales majorées ainsi que de la condamnation au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Dit que la charge de cet accident sera transférée intégralement au compte employeur de la société Menuiserie COMBES.
Dit n'y avoir lieu, en cause d'appel à application de l'article 700 du NCPC.