SLS / PDH / AP COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale
ARRET DU 12 Décembre 2007
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 02739
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 MARS 2007 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MONTPELLIER No RG06 / 00920
APPELANTE :
SA TAM prise en la personne de son représentant légal Z. I. Les Broues-Rue des Mûriers 34190 GANGES Représentant : Me CHARBIT de la SELARL JURIPOLE (avocats au barreau de MONTPELLIER)
INTIME :
Monsieur Mounir Y... ...34190 GANGES Représentant : Me Isabelle OGER-OMBREDANE (avocat au barreau de MONTPELLIER)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 NOVEMBRE 2007, en audience publique, Monsieur Pierre d'HERVE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre d'HERVE, Président Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller Monsieur Eric SENNA, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sophie LE SQUER
ARRET :
-Contradictoire.
-prononcé publiquement le 12 DECEMBRE 2007 par Monsieur Pierre d'HERVE, Président.
-signé par Monsieur Pierre d'HERVE, Président, et par Mademoiselle Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.
* ** FAITS ET PROCEDURE
Mounir Y... a été embauché par la SA TAM en qualité de soudeur suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 21 septembre 2005 moyennant une rémunération mensuelle brute de 1218 € pour une durée mensuelle de travail de 150, 15 heures.
Par lettre recommandée du 13 janvier 2006 il a été convoqué par son employeur à un entretien préalable en vue d'une mesure disciplinaire pour le 23 janvier 2006. A l'issue de cet entretien, le salarié a fait l'objet d'un avertissement verbal.
Après convocation du 4 avril 2006 à un entretien préalable à son licenciement pour le 13 avril 2006, Monsieur Y... a été licencié par la SA TAM suivant lettre recommandée datée du 21 avril 2006 rédigée dans les termes suivants :
" Pour faire suite à l'entretien préalable que nous avons eu le jeudi 13 avril 2006 à 11 heures, nous avons le regret de vous signifier la rupture de votre contrat de travail, à compter de la réception de ce courrier pour fautes. Malgré un avertissement sanctionnant vos absences répétées et injustifiées figurant à votre dossier, et qui a été signifié à la suite d'un entretien en date du 23 janvier 2006. L'absence de justification, de raison et d'excuse aux faits qui vous sont reprochés (absences non justifiées et excusées tardivement, insolence répétée vis à vis du chef d'atelier) ne permet plus une collaboration entre nous. Conformément à l'article L. 122-14-1 du Code du Travail, la présentation de cette lettre marque la cessation de nos relations contractuelles. Votre certificat de travail sera tenu à votre disposition ainsi que les salaires vous restant dus, au siège social. "
Contestant la légitimité de son licenciement, Monsieur Y... a saisi le Conseil de Prud'hommes de MONTPELLIER lequel, par jugement du 20 mars 2007 a dit que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur à lui payer la somme de 3750 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, celle de 1224, 30 € à titre d'indemnité de préavis, celle de 122, 43 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis et celle de 700 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, déboutant Monsieur Y... de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires.
La SA TAM par lettre recommandée du 17 avril 2007 a relevé appel de ce jugement qui lui a été notifié le 13 avril 2007.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La SA TAM demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré, de dire que le licenciement est fondé sur une faute grave, de débouter en conséquence Monsieur Y... de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Au soutien de son appel, elle fait valoir pour l'essentiel :
-qu'elle ne conteste pas la règle jurisprudentielle selon laquelle un même fait ne peut justifier successivement deux mesures disciplinaires,-que l'avertissement verbal dont a fait l'objet Monsieur Y... le 23 janvier 2006 n'est pas une sanction disciplinaire au sens de l'article L. 122-40 du Code du Travail, et que par ailleurs la poursuite par le salarié d'un fait fautif autorise l'employeur à se prévaloir de faits similaires y compris ceux ayant déjà été sanctionnés pour caractériser la faute grave,-qu'après la période d'essai de deux mois, le comportement du salarié s'est détérioré dès la fin novembre 2005, se traduisant par des insultes et une insolence à l'égard de ses collègues de travail et de sa hiérarchie directe, conduisant à envisager une mesure disciplinaire par convocation à l'entretien préalable du 13 janvier 2006,-que Monsieur Y... qui s'était engagé à améliorer ses rapports au sein de l'entreprise a de nouveau adopté une attitude irascible, proférant de nouveau des insultes à l'égard de son responsable hiérarchique et de ses camarades de travail,-que par ailleurs, Monsieur Y... s'est absenté sans prévenir à de nombreuses reprises, manquant régulièrement à son obligation de porter dans un délai de 48 heures le justificatif de ses arrêts de travail pour informer son employeur de son absence.
Monsieur Y... demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris, et y ajoutant de condamner la SA TAM à lui payer la somme de 1224, 30 € à titre de dommages et intérêts supplémentaires, d'ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal rétroactivement au jour du prononcé du jugement du Conseil de Prud'hommes, et de lui allouer la somme de 2000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il fait valoir en substance :
-qu'ayant reçu un avertissement comme énoncé dans la lettre de licenciement, fondé sur des absences injustifiées et sur une insolence répétée, il ne pouvait plus faire l'objet d'une seconde sanction pour les mêmes faits,-que contrairement à ce que soutient l'employeur, il ne s'agit pas de nouveaux faits ainsi qu'il en résulte de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige,-que la motivation de la lettre de licenciement est imprécise tant en ce qui concerne les absences injustifiées que l'insolence répétée vis à vis du chef d'atelier,-que dans la lettre de licenciement il est fait état à la fois d'absences injustifiées et d'excuses tardives relatives à ces absences,-qu'il produit des certificats médicaux justifiant les arrêts de travail et que seule une absence n'est pas justifiée laquelle n'est pas constitutive en elle même d'une faute grave,-que ses collègues de travail avaient pour habitude de considérer son travail comme du " boulot d'arabe ", terme souvent utilisé et ressenti par lui comme une insulte à caractère racial, justifiant l'octroi de dommages et intérêts supplémentaires,-que l'employeur n'a pas exécuté le jugement de première instance assorti de l'exécution provisoire, faisant preuve ainsi de mauvaise foi, ce qui justifie que soit ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal rétroactivement au jour du prononcé du jugement.
Pour plus ample exposé des faits, des moyens et arguments des parties, la Cour se réfère à leurs conclusions écrites qu'elles ont développé oralement à l'audience.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur le licenciement et ses conséquences
Il résulte des termes de la lettre de licenciement que Monsieur Y... a été licencié pour faute grave.
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve de cette faute.
Dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, il fait grief tout d'abord au salarié des absences non justifiées et excusées tardivement, et ce malgré " un avertissement, sanctionnant des absences répétées et injustifiées figurant au dossier de l'intéressé ".
Cet avertissement, même s'il est intervenu verbalement, constitue une sanction disciplinaire au sens de l'article L. 122-40 du Code du Travail, dès lors que l'employeur l'a lui même considéré comme tel, en indiquant d'une part que cet avertissement sanctionne des absences répétées et injustifiées et que d'autre part il figure au dossier du salarié.
Par ailleurs le salarié justifie de ses absences par les certificats médicaux produits aux débats, et le fait que l'absence des 29 et 30 mars 2006 a été porté à la connaissance de l'employeur que le 4 avril suivant, et celle du 31 mars 2006 en cours de procédure, est insuffisant pour caractériser la faute grave.
En second lieu, la lettre de licenciement fait état " d'insolence répétée vis à vis du chef d'atelier. "
L'avertissement du 23 janvier 2006ne vise pas des faits de cette nature, ainsi qu'il en ressort de la lettre de licenciement.
Pour faire la preuve de ce grief qui ne concerne que le chef d'atelier, la SA TAM produit des attestions de collègues de travail du salarié (MR Z..., B..., C..., D...) lesquelles soit font état d'insultes à leur égard, soit ne précisent pas la date à laquelle le chef d'atelier aurait été insulté.
La seule attestation du chef d'atelier selon laquelle il a été insulté par Monsieur Y... est insuffisante pour établir la réalité du grief invoqué, d'autant que le chef d'atelier indique que l'insulte a été proféré alors que le salarié lui apportait, le 4 avril (2006), son arrêt de travail demandé pour la veille, et que l'employeur indique dans ses écritures que Monsieur Y... a, le 4 avril 2006, directement porté l'arrêt de travail à la comptable, sans passer par son supérieur hiérarchique, Monsieur A..., chef d'atelier.
En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que le licenciement de Monsieur Y... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et ont alloué au salarié des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de préavis et une indemnité de congés payés sur préavis, dont les montants ne sont pas critiqués.
2. Sur la demande de dommages et intérêts supplémentaires
Monsieur Y... qui prétend sans le prouver que ses collègues avaient pour habitude de considérer son travail comme du " boulot d'arabe ", sera débouté de sa demande de ce chef.
3. Sur les autres demandes
Il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts, formulée en cause d'appel.
Le point de départ des intérêts capitalisés ne peut être antérieur à la demande de capitalisation, de sorte qu'en l'espèce, ce point de départ doit être fixé à la date de l'audience devant la Cour, soit le 8 novembre 207, la procédure devant la Cour, Chambre Sociale, étant orale.
L'équité commande de ne pas laisser à la charge de l'intimé, les frais non inclus dans les dépens qu'il a pu engager en cause d'appel. Il lui sera alloué la somme de 1000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Ordonne la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du Code Civil, le point de départ des intérêts capitalisé étant fixé au 8 novembre 2007,
Condamne la SA TAM aux dépens d'appel et à payer à Mounir Y... la somme de 1000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.