COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
5o Chambre Section A
ARRET DU 10 AVRIL 2008
Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 04479
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 JUIN 2007 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER No RG 19758p104
APPELANTE :
SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social 23 rue du Faubourg St Jaumes ... représentée par la SCP DIVISIA- SENMARTIN, avoués à la Cour assistée de la SCP ARMANDET- LE TARGAT- GELER, avocats au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur Norbert X... né le 05 Août 1928 à UZES (30700) de nationalité Française ......représenté par la SCP JOUGLA- JOUGLA, avoués à la Cour assisté de Me GRAPPIN, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame Raymonde Z... épouse X... née le 18 Septembre 1931 à DECAZEVILLE (12300) de nationalité Française ......représentée par la SCP JOUGLA- JOUGLA, avoués à la Cour assistée de Me GRAPPIN, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame Armelle X... épouse Séparée Y... née le 12 Mars 1956 à MARSILLARGUES (34590) de nationalité Française ......représentée par la SCP JOUGLA- JOUGLA, avoués à la Cour assistée de Me GRAPPIN, avocat au barreau de MONTPELLIER
AREAS ASSURANCES Compagnie d' Assurance anciennement dénommée CAISSE MUTUELLE D' ASSURANCES ET DE PREVOYANCE, prise en la personne de son président directeur général en exercice domicilié ès qualités au siège social 47- 49 rue de Miromesnil 75389 PARIS CEDEX 08 représentée par la SCP AUCHE- HEDOU AUCHE AUCHE, avoués à la Cour assistée de Me REGNARD avocat loco SCP CHRISTOL avocat au barreau de MONTPELLIER.
Monsieur Pierre B... né le 28 Décembre 1950 à MONTPELLIER (34000) de nationalité Française ...... représenté par la SCP CAPDEVILA- VEDEL- SALLES, avoués à la Cour assisté de Me SOULIER avocat loco Me LACOEUILLE, avocat au barreau de PARIS
MEDICAL INSURANCE COMPAGNY LIMITED, Compagnie d' Assurance, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social 4 rue Tronchet 75008 PARIS représentée par la SCP CAPDEVILA- VEDEL- SALLES, avoués à la Cour assistée de Me SOULIER avocat loco Me LACOEUILLE, avocat au barreau de PARIS
CPAM DE MONTPELLIER LODEVE, prise en la personne de son directeur en exercice domicilié ès qualités au siège social 29 Cours Gambetta 34934 MONTPELLIER CEDEX 9 représentée par la SCP NEGRE- PEPRATX- NEGRE, avoués à la Cour assistée de Me CAUVIN, avocat au barreau de MONTPELLIER
ONIAM OFFICE NATIONAL D' INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, prise en la personne de son directeur en exercice domicilié ès qualités au siège social 36 Avenue du Général de Gaulle Tour Galliéni II 93175 BAGNOLET représentée par la SCP NEGRE- PEPRATX- NEGRE, avoués à la Cour assistée de Me LEMETAIS, (cabinet WESCH) avocat au barreau de PARIS
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 18 Février 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
L' affaire a été débattue le 21 FEVRIER 2008, en audience publique, M. Jean- Marc CROUSIER Conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l' article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Mme France- Marie BRAIZAT, Présidente M. Jean- François BRESSON, Conseiller M. Jean- Marc CROUSIER, Conseiller qui en ont délibéré. L' affaire a été mise en délibéré au 27 mars 08, le délibéré a été prorogé au 10 / 04 / 08.
Greffier, lors des débats : Mme Christiane DESPERIES
ARRET :
- CONTRADICTOIRE.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l' article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Mme France- Marie BRAIZAT, Présidente, et par Mme Christiane DESPERIES, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Norbert X... a été hospitalisé à la clinique SAINT ROCH, le 21 octobre 2002, pour y subir, à la suite d' une arthrose, une prothèse totale du genou droit. Cette intervention a été pratiquée, le 22 octobre suivant, par le docteur B....
Les suites immédiates de l' opération n' ont pas posé problème et Norbert X... a été adressé au centre de Rééducation de Maguelone à CASTELNAU LE LEZ, le 30 octobre suivant.
Le 21 novembre 2002 le centre de rééducation précité informait le docteur B... d' une réaction inflammatoire tant loco- régionale qu' intra- articulaire avec gonflement du genou et réaction dermique.
Au mois de décembre suivant Norbert X... présentait un abcès volumineux sur la face latérale du genou droit provoquant une impotence fonctionnelle, avec fistule de l' abcès et écoulement purulent.
Le 24 janvier 2003 le docteur B... procédait à un drainage de cet abcès à la clinique BEAUSOLEIL. Le 28 janvier suivant un nouvel oedème se manifestait et Norbert X... était réhospitalisé dans cet établissement, pendant 4 jours pour un nouveau drainage.
La situation ne s' étant pas sensiblement améliorée le docteur B... pratiquait, à la suite de l' apparition de plusieurs foyers infectieux, le 2 juillet 2003, une nouvelle intervention. Cependant les problèmes persistaient et le docteur B... était consulté à plusieurs reprises. Les soins n' ayant pas amené d' améliorations le docteur B... procédait à l' ablation de la prothèse, le 3 février 2004, à la clinique SAINT ROCH. Le docteur B..., qui avait envisagé une réimplantation ultérieure de la prothèse y renonçait, le phénomène inflammatoire persistant. Des analyses révélaient la présence d' un staphylocoque résistant à l' antibiothérapie prescrite.
Norbert X... consultait le service de rééducation et de réadaptation de l' appareil locomoteur du Centre Hospitalier Universitaire CAREMEAU à NÎMES lequel prescrivait une antibiothérapie prolongée.
La situation ne s' étant pas améliorée le docteur Yves G..., chef de clinique dans ce centre hospitalier, indiquait que la seule solution mettant Norbert X... à l' abri de conséquence vitales était l' amputation.
Norbert X... subissait celle- ci, le 20 janvier 2005, à la jonction du tiers moyen- tiers inférieur de la cuisse droite. Il passait ensuite de nombreux mois au centre de rééducation fonctionnelle du GRAU DU ROI où il sera victime d' un oedème aigu du poumon ayant nécessité une hospitalisation en urgence au centre hospitalier de NÎMES
Une expertise a été ordonnée en référé, le 21 avril 2005 et confiée au Professeur H..., spécialiste en orthopédie, lequel s' est adjoint, comme il y avait été autorisé, un sapiteur en la personne du Professeur I..., infectiologue.
Le rapport de l' expert a été déposé le 18 octobre 2006.
Au vu des conclusions de ce rapport et de celui, qui lui est annexé, du sapiteur infectiologue, Norbert X..., son épouse, Raymonde Z... et leur fille, Armelle X... ont, par actes délivrés le 26 février 2007, saisi le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER, devant lequel ils ont également attrait la CPAM de MONTPELLIER, d' une demande, dirigée contre le docteur B... et de son assureur, la société AREAS CMA ainsi qu' à l' encontre de la SA POLYCLINIQUE ST ROCH, tendant à l' octroi de provisions à valoir sur l' indemnisation de leurs préjudices respectifs.
La SA POLYCLINIQUE, qui a attrait en la cause l' Office National d' Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM), la société AREAS CMA, qui a appelé en la cause la société MEDICAL INSURANCE COMPANY LTD en sa qualité d' assureur du docteur B... et les autres défendeurs, ayant opposé divers moyens à ces demandes le juge des référés précité, par une ordonnance rendue le 21 juin 2007, a :
Ordonné la jonction de ces procédures ;
Constaté que la demande des consorts X... contre le docteur B... et son assureur AREAS échappe à la compétence du juge des référés de même que l' appel en cause de la Cie d' assurances LA MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED par la Cie AREAS ;
Mis hors de cause l' ONIAM ;
Constaté que l' obligation de la SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH à réparation d' un tiers des préjudices des consorts X... n' est pas sérieusement contestable ;
Condamné en conséquence la POLYCLINIQUE SAINT ROCH à verser les provisions suivantes :
· 44 033 euros à Norbert X... ; · 7 000 euros à Raymonde X... ; · 3 600 euros à Armelle X... ;
Réservé les droits de la CPAM de MONTPELLIER ;
Condamné la SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH à payer aux consorts X... une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l' article 700 du NCPC ;
Rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires notamment d' application de l' article 700 du NCPC ;
Condamné la SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH aux dépens en ce compris un tiers du coût de l' expertise ;
Dit cependant que les dépens afférents à l' appel en cause de la Cie d' assurances LA MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED resteront à la charge de la Cie AREAS.
Par déclaration reçue au greffe de cette Cour le 2 juillet 2007 la SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH a relevé appel de cette décision à l' encontre de l' ensemble des parties.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 27 octobre 2007, cette appelante soutient essentiellement, en premier lieu, que, contrairement aux affirmations des demandeurs et du premier juge la réparation des dommages résultant d' infections nosocomiales dans les établissements de soins incombe à l' ONIAM, au titre de la solidarité nationale, dés lors que, comme en l' espèce, les dommages correspondent à un taux d' incapacité permanente supérieure à 25 %, cette prise en charge résultant de la lecture combinée des article L 1142- 1 II alinéa 1 et 2, L 1142- 1- 1 et L 1142- 17 dernier alinéa du Code de la santé publique, l' ONIAM ne disposant d' un recours subrogatoire à son encontre qu' en cas de faute, notamment en cas de manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales.
En réponse au moyen soutenu par l' ONIAM, qui prétend que la loi nouvelle du 30 décembre 2002 n' est pas applicable en l' espèce, elle soutient que l' ensemble des dispositions du Code de la santé publique visé par l' article 101 de la loi du 4 mars 2002, modifié par l' article 3 de la loi du 30 décembre 2002 et donc l' article L 1142- 1- 1 du Code de la santé publique, issu de l' article 1er de la même loi, doit s' appliquer aux infections nosocomiales consécutives à un acte de soins réalisé à compter du 4 septembre 2001, le moment qui détermine l' application de la loi nouvelle correspondant à la date à laquelle a été pratiqué l' acte de soins d' où découle l' infection nosocomiale, de sorte que ce dernier article doit bien régir les conséquences dommageables des infections nosocomiales consécutives à un acte pratiqué après le 5 septembre 2001, ce qui est le cas en l' espèce.
Elle soutient encore, en outre, que le juge des référés n' a pas compétence pour trancher de la difficulté tirée de la date d' effet de la loi du 30 décembre 2002 et ne peut donc dire et juger que le dommage résultant d' une telle infection nosocomiale, contractée à partir du mois d' octobre 2002, doit être supporté par l' établissement de soins plutôt que par l' ONIAM.
Elle prétend surabondamment, que si le phénomène infectieux de nature nosocomiale est bien né au décours de l' hospitalisation à la Polyclinique SAINT ROCH à compter du 22 octobre 2002 elle peut légitimement faire valoir que son obligation à réparation se heurte à une contestation sérieuse dés lors que, d' une part, en ce que les conséquences dommageables sont imputables manifestement aux fautes du chirurgien traitant stigmatisées par les rapports d' expertise, la prise en charge de l' infection par le docteur B... y étant qualifiée d' insuffisante et inadaptée et constituant la cause étrangère prévue par l' article L 1142- 1 I alinéa 2 du Code de la santé publique et que, d' autre part, son obligation est également contestable tant en son principe qu' en son montant les dommages résultant de l' amputation étant imputables à la décision d' amputation, qualifiée d' excessive et d' inadaptée, prise par l' équipe médicale du CHU de NÎMES, constitutive également d' une cause étrangère.
Subsidiairement sur la réparation des postes de préjudices et les indemnités provisionnelles, elle soutient, en premier lieu, que les préjudices invoqués sont imputables directement aux fautes commises par le praticien et les tiers (CHU de NÎMES) de sorte que la charge des indemnités réparatrices ne saurait être supportée par l' établissement de soins qui sera à minima garanti par le docteur B... et, en deuxième lieu, l' expertise ne retenant pas la tierce personne, le dépassement d' honoraires du docteur B... n' ayant pas à être supporté par elle et les demandes au titre des frais d' aménagement, fondées sur les seules doléances du patient, n' ayant pas fait l' objet d' un chiffrage contradictoire, que l' indemnité provisionnelle ne peut être envisagée que globalement et ne saurait excéder 20 000 euros.
La SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH demande en conséquence à la Cour de :
Dire que son obligation à paiement est sérieusement contestable et rejeter en conséquence les prétentions à indemnisation provisionnelle des consorts X... à son encontre en les invitant à mieux se pourvoir au fond ;
Constater qu' en l' absence de faute imputable à l' établissement de soins les dommages résultant d' infections nosocomiales qui y sont contractées ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale dés lors que ces dommages correspondent à un taux d' incapacité supérieur à 25 % ;
Dire en conséquence et en l' absence des manquements caractérisés aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales imputables à l' établissement de soins, que c' est l' ONIAM qui doit supporter la charge de l' indemnisation desdits dommages, le taux d' IPP de Norbert X... étant de 40 % ;
Subsidiairement constater que les rapports d' expertise stigmatisent les fautes du docteur B... dans la prise en charge du phénomène infectieux, fautes directement en relation avec l' ampleur et la pérennisation des dommages subis ;
Dire en conséquence que le docteur B... et son assureur doivent la garantir des condamnations susceptibles d' être prononcées à son encontre ;
Très subsidiairement, dire que la provision allouée à Norbert X... et consorts ne saurait excéder la somme de 20 000 euros ;
Vu les quittances régularisées par les consorts X... au titre de l' exécution provisoire de l' ordonnance, dire y avoir lieu à remboursement des sommes indûment réglées ;
Statuer ce que de droit sur les dépens dont distraction.
Norbert X..., Raymonde Z... épouse X... et Armelle X... séparée Y..., formant appel incident, demandent à la Cour, aux termes de leurs dernières écritures, signifiées le 11 février 2008, au visa de l' article 809 du NCPC et des articles L 1142- 1 et suivants du Code de la santé publique, de :
Constater qu' il n' est plus contesté que Norbert X... a contracté une maladie nosocomiale à l' occasion ou dans les suites immédiates de l' intervention qu' il a subie le 22 octobre 2002 dans les locaux de la Polyclinique SAINT ROCH à MONTPELLIER ;
Constater que Norbert X..., qui n' a pas été régulièrement informé des risques encourus par lui par le docteur B... a vu celui- ci, dés lors que l' infection nosocomiale a été avérée en décembre 2002, faire preuve de manquements dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique de l' infection provoquant la pérennisation de celle- ci ;
Constater que la conséquence de l' affection nosocomiale et de mauvais soins apportés a induit la perte irrémédiable de la fonctionnalité de la jambe droite, perte de fonctionnalité acquise quelle que soit la solution (amputation ou arthrodèse) qui aurait pu être appliquée ;
Constater qu' il est admis par les rapports d' expertise que la solution de l' arthrodèse, outre qu' elle ne changeait rien à la perte de fonctionnalité, comportait des risques vitaux, nonobstant un déséquilibre fonctionnel définitif de sa jambe non opérée ;
Constater l' évidence et le caractère indiscutable de l' origine des faits dommageables subis par Norbert X... et, en conséquence, de l' obligation de réparation conjointe et solidaire à son égard de la Polyclinique SAINT ROCH et du docteur B... ;
Retenir, par infirmation, cette obligation à réparation ;
Statuer ce que de droit sur les revendications de la CPAM en terme de remboursement des débours de celle- ci, sollicités par Norbert X... en tant que de besoin en sus de son indemnisation ;
Condamner sous la même solidarité ladite polyclinique et le docteur B... à payer à la CPAM les sommes par elle revendiquées ;
Attribuer aux concluants les provisions suivantes :
· A monsieur X... :
Au titre de l' ITT : 8 100 euros Au titre de l' IPP : 51 800 euros Au titre du pretium doloris : 35 000 euros Au titre du préjudice esthétique : 10 500 euros Au titre du préjudice d' agrément 21 000 euros Au titre des débours non- remboursés par la CPAM : 3 433, 38 euros Au titre de l' aménagement de la maison (après subvention) : 8 566, 77 euros Au titre de l' aménagement du véhicule : 5 364, 67 €.
· A Madame Raymonde X..., au titre de son préjudice non- économique par ricochet : 21 000 euros ;
· A Madame Armelle X... : Au titre de son préjudice économique par ricochet : 5 419 Euros ; Au titre de son préjudice non- économique par ricochet : 5 600 euros ;
Condamner les intimés à leur payer la somme de 2 000 euros au titre de l' article 700 du NCPC ;
Confirmer la condamnation aux entiers dépens comprenant les frais d' expertise dont distraction.
Le docteur Pierre B... et son assureur, la société MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED soutiennent pour leur part, aux termes de leurs dernières conclusions, signifiées le 18 février 2008, en premier lieu, d' une part, que le docteur B... n' a commis aucune faute, les experts qui ont conclu dans leur rapport, que Monsieur X... avait souffert d' une infection nosocomiale contractée à la clinique ST ROCH, n' en ayant retenu aucune à son égard qui soit à l' origine de la survenue de l' infection, d' autre part, que les établissements de soins sont tenus de réparer les conséquences dommageables de l' infection d' origine nosocomiale à l' exclusion des médecins, de troisième part, qu' aucune certitude n' existe quant à l' origine de cette affection et, de dernière part, que l' établissement de soins a commis une faute quant à la préparation de l' opéré de sorte que la clinique ne peut prétendre que le docteur B... aurait commis une faute constitutive d' une cause étrangère l' exonérant de sa responsabilité.
Prétendant que les experts n' avaient pas pris en compte les antécédents médicaux de Monsieur X..., lesquels ne sont « certainement » pas étrangers à la survenue de l' infection comme à l' extrême prudence dont il a fait montre quant à l' indication de nouvelles interventions chirurgicales, ils font valoir que le docteur B... n' a commis aucune faute directement en relation avec l' ampleur et la pérennisation des dommages subis, que, si un retard devait être retenu dans le prise en charge de l' infection, ce prétendu retard n' a entraîné, au plus, qu' une perte de chance de guérison plus rapide perte de chance qui, au vu du rapport des experts ne présente aucun caractère certain.
Sur l' imputabilité de la réparation ils soutiennent, sur le fondement de l' article L 1142- 1 I alinéa 2 du Code de la santé publique que la clinique ne rapporte pas la preuve positive d' une faute commise par le docteur B... lors de l' intervention du 22 octobre 2002 et que dans ces conditions la demande de garantie de la polyclinique ne peut qu' être rejetée.
Ils soutiennent également sur la prise en charge des éventuelles conséquences financières du sinistre, que, au vu de la loi du 30 décembre 2002 prévoyant désormais que c' est la première réclamation et non plus le fait générateur qui détermine l' assureur tenu de prendre en charge les conséquences éventuelles d' un sinistre, du régime transitoire qu' elle institue, de son analyse exégétique, des travaux préparatoires et de diverses décisions de jurisprudence, la réclamation de Norbert X... ayant été formulée le 24 mars 2005, postérieurement à la date de publication de la loi nouvelle et dans le délai de 5 ans institué par le législateur et le fait générateur étant survenu pendant la période de validité du contrat conclu avec la société AREAS CMA, qu' il appartient bien à cet assureur de prendre à sa charge les éventuelles conséquences financières du sinistre en cause.
Ils demandent par suite à la Cour de :
Confirmer l' ordonnance déférée en ce qu' elle a rejeté la demande de provision à l' encontre du docteur B... ;
Débouter la SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH de l' ensemble de ses demandes à l' encontre du docteur B... ;
Infirmer l' ordonnance déférée en ce qu' elle a rejeté la demande de mise hors de cause de la société MIC Ltd ;
Prononcer sa mise hors de cause pure et simple ;
Dire qu' il appartient à la société AREAS CMA de gérer le présent sinistre et de garantir ses éventuelles conséquences dommageables ;
Condamner la SA POLYCLINIQUE SAINT ROCH à verser au docteur B... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l' article 700 du NCPC ;
La condamner aux entiers dépens dont distraction.
Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées le 6 février 2008, la Compagnie d' Assurances AREAS DOMMAGES, Caisse Mutuelle d' Assurances et de Prévoyance, demande à la Cour, au visa de la loi du 30 décembre 2002 et de l' article L 251- 2 nouveau du Code des assurances, de :
Infirmer l' ordonnance dont appel en ce qu' elle a rejeté sa demande de mise hors de cause ;
Constater que la Compagnie AREAS ASSURANCES n' était plus l' assureur responsabilité civile professionnelle du docteur B... au jour de la première réclamation formée par Monsieur X... le 24 mars 2005 ;
Dire et juger que conformément à la loi no 2002- 1577 du 30 décembre 2002 et plus particulièrement l' article L 251- 2 alinéa 7 nouveau du Code des assurances elle n' est pas tenue à garantir le docteur Pierre B... des conséquences pécuniaires du présent sinistre ;
Prononcer sa mise hors de cause pure et simple ;
Dire et juger qu' il appartient à la société MIC Ltd de gérer le présent sinistre et de garantir ses éventuelles conséquences dommageables ;
A titre subsidiaire,
Confirmer l' ordonnance en ce qu' elle a considéré qu' il existait une contestation sérieuse à la mise en oeuvre de sa garantie ;
Débouter en conséquence les demandeurs de leurs demandes dirigées contre elle en l' état de cette contestation sérieuse et renvoyer le débat devant les juges du fond ;
En tout état de cause,
Condamner solidairement les demandeurs, le docteur B... et la MIC Ltd à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l' article 700 du NCPC ainsi qu' aux entiers dépens dont distraction.
L' ONIAM soutient essentiellement que l' article L 1142- 1- 1 du Code de la santé publique, issu de la loi du 30 décembre 2002, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, ne s' applique qu' aux dommages résultant d' infections nosocomiales contractées depuis le 1er janvier 2003 et ne saurait rétroagir, la loi ne le prévoyant pas, aux actes de soins survenus antérieurement à cette date ce qui est le cas en l' espèce la maladie nosocomiale ayant été contractée suite à l' intervention du 22 octobre 2002 et que seul s' applique l' article L 1142- 1 I du même code tiré de la loi du 4 mars 2002, lequel prévoit, en son alinéa 2, qu' un établissement de santé est responsable de plein droit des conséquences dommageables résultant d' infections nosocomiales sauf pour lui à rapporter la preuve d' une cause étrangère, ce qu' elle ne fait pas en l' espèce. Il fait également valoir que, en tout état de cause, une indemnisation par lui doit être exclue en raison des fautes commises par le docteur B....
Il demande en conséquence à la Cour, aux termes de ses dernières conclusions, signifiées le 13 décembre 2007, de :
Confirmer l' ordonnance dont appel en ce qu' elle a rejeté son appel en cause ;
Constater que les responsabilités du docteur B... et de la Polyclinique ST ROCH sont engagées sur le fondement de l' article L 1142- 1 I du Code de la santé publique ;
Constater que l' infection nosocomiale alléguée a été contractée à la suite de l' intervention du 22 octobre 2002 soit antérieurement au 1er janvier 2003 ;
Dire et juger que les dispositions de l' article L 1142- 1- 1 issues de la loi du 30 décembre 2002 ne sont pas applicables ;
Dire et juger que seules les dispositions de l' article L 1142- 1- I alinéa 2 issues de la loi du 4 mars 2002 sont applicables ;
Constater que n' est pas rapportée la cause d' une preuve étrangère par l' établissement de santé concerné ;
Dire et juger, en conséquence, que la demande formulée par la Polyclinique ST ROCH à son encontre se heurte à une contestation sérieuse ;
Rejeter toute prétention émises à son encontre et débouter la Polyclinique ST ROCH de ses demandes à son égard tant à titre principal qu' en garantie ;
Subsidiairement,
Constater qu' il n' était ni présent ni représenté lors des opérations d' expertise ;
Dire et juger que le rapport d' expertise déposé par le Professeur H... lui est inopposable ;
Débouter les parties de toute demandes indemnitaires formulées à son encontre sur la base de ce rapport ;
Ordonner une mesure d' expertise, aux frais avancés de Norbert X... avec la mission spécifiée aux écritures ;
Condamner la Polyclinique ST ROCH à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l' article 700 du NCPC ainsi qu' aux entiers dépens dont distraction.
La CPAM de MONTPELLIER demande quant à elle à la Cour, par ses dernières conclusions, signifiées le 11 octobre 2007, de :
Statuer ce que de droit quant à la responsabilité et l' imputabilité de l' accident dont a été victime Norbert X... ;
Lui donner acte de ce que le montant de son recours s' établit définitivement, selon attestation jointe aux présentes, comme suit :
· Prestations en nature … … 86 628, 28 euros · Frais futurs …. … … … …. 39 810, 88 euros
TOTAL 126 439, 16 euros
Inclure dans le montant du préjudice soumis à recours tel qu' il sera arbitré au bénéfice de Norbert X... le montant des prestations en nature servies par elle ;
L' autoriser à prélever par préférence et à dus concurrence du montant de ce préjudice le montant de son recours tel qu' arrêté à la somme de 124 439, 16 euros ;
Dire que la condamnation dont elle bénéficiera sera assortie des intérêts de droit à compter de l' acte introductif et jusqu' à complet paiement ;
Dire qu' en application des dispositions des article 9 et 10 de l' ordonnance du 24 janvier 1996 relative aux mesures urgentes tendant au rétablissement de l' équilibre financier de la sécurité sociale, qu' une indemnité forfaitaire, qui sera égale à 1 / 3 des sommes allouées dans les limites d' un montant maximum de 926 euros et d' un montant minimum de 93 euros soit la somme de 926 euros, lui sera réglée ;
Lui allouer une somme de 800 euros au titre de l' article 700 du NCPC « ainsi qu' aux entiers dépens » (SIC) dont distraction ;
Le tout avec intérêts de droit au taux légal et anatocisme à compter des présentes.
SUR CE :
Attendu que l' appel, interjeté dans les formes et le délai de la loi, avant toute signification avérée, est recevable ; Que l' appel incident des consorts X... l' est également ;
Attendu qu' il ressort du rapport de l' expert judiciaire, le Professeur H..., comme de celui du sapiteur infectiologue, le Professeur I..., dont l' expert judiciaire a sollicité l' avis, que l' infection de la prothèse du genou dont Norbert X... a été victime est une infection nosocomiale contractée à la clinique SAINT ROCH dans les suites de l' intervention du 22 octobre 2002, la prothèse ayant pu être infectée lors du geste proprement dit mais également lors des soins durant l' hospitalisation à la clinique ; Que le caractère nosocomial de l' infection n' est d' ailleurs discuté par aucune des parties ; Que les experts n' ont pas retenu à la charge de l' établissement de soins de faute dans les soins et les précautions septiques, le protocole de soins de la clinique et en particulier la préparation du site opératoire étant conforme au consensus actuels des règles d' hygiène et le rapport d' activité du CLIN ne révélant aucune anomalie dans le service de chirurgie dans lequel Norbert X... a été opéré, les experts ne retenant pas les rasages par rasoir jetable, évoqués par Norbert X... pour les interventions pratiquées à la polyclinique ST ROCH, à la clinique BEAUSOLEIL et au CHU de NÎMES, comme avérés, en considérant, cette technique de rasage étant formellement proscrite par les divers protocoles en usage la matière, qu' il était peu probable que les infirmières de ces établissements aient toutes transgressé ces directives ; Que, selon les experts, ni le centre de rééducation ni la clinique BEAUSOLEIL ne sont impliqués dans l' acquisition de l' infection nosocomiale ;
Attendu que si, dans ses conclusions, l' expert H... mentionne, ainsi que l' a relevé le premier juge, que le docteur B... a été attentif et consciencieux auprès de son patient il indique cependant aussi « qu' on peut lui reprocher de ne pas avoir été d' emblée plus agressif vis à vis de l' état inflammatoire et infectieux traînant du genou de M. X..., de ne pas avoir procédé plus tôt à l' ablation de cette prothèse infectée et de ne pas avoir d' emblée sollicité l' aide d' un infectiologue » ; Que le sapiteur, le Professeur I..., est plus explicite encore puisqu' il indique que la prise en charge de l' infection de prothèse de M. X... semble avoir été insuffisante et inadaptée : L' état inflammatoire clinique et biologique signalé dans le premier mois postopératoire par le centre de rééducation n' a pas fait déclencher des explorations complémentaires ; Le premier épisode d' abcèdation deux mois après la mise en place de la prothèse a été insuffisamment traité. Toute infection, même superficielle, survenant dans les suites de la mise en place d' un implant prothétique doit faire suspecter une infection de la prothèse qui nécessite alors une prise en charge diagnostique et thérapeutique agressive : réalisation de prélèvements multiples, nettoyage chirurgical de l' implant voire son ablation, antibiothérapie par voie générale avec des antibiotiques guidé par l' antibiogramme et ayant une pénétration osseuse et articulaire ; L' antibiothérapie par Pyostacine prescrite par le docteur B... n' était pas adaptée (prescription trop tardive, aucune recommandation actuelle pour l' utilisation de cet antibiotique dans les infections ostéoarticulaires). Par ailleurs ce traitement a été maintenu pour une durée anormalement prolongée (de janvier 2003 jusqu' en mai 2004) sans être réévalué malgré une situation d' échec thérapeutique manifeste ; Retard du premier lavage chirurgical sous anesthésie générale du 1 / 7 / 2003 qui aurait dû avoir lieu déjà fin décembre 2002 lors du premier abcès ; Retard dans la mise en place d' une antibiothérapie adaptée. Celle- ci a été débutée par un infectiologue du CHU de NÎMES seulement un an et demi après les premiers signes infectieux. L' existence de services de maladies infectieuses dans la proximité immédiate (Nîmes, Montpellier, Marseille) aurait dû inciter le docteur B... à prendre un avis spécialisé dès fin 2002 ; L' ablation de la prothèse infectée n' a été réalisée qu' après un an d' infection chronique signalant l' échec manifeste de la prise en charge thérapeutique. Une fenêtre thérapeutique avant l' ablation de la prothèse aurait permis de redocumenter de façon fiable cette infection. En effet seulement une antibiothérapie adaptée aux résultats des prélèvements peropératoires aurait pu stériliser définitivement ce foyer infectieux et permettre de réimplanter une prothèse ou de réaliser une arthrodèse ;
Qu' en conclusion de son avis le Professeur I... précise, en ce qui concerne la prise en charge de l' infection nosocomiale par le docteur B..., que celle- ci n' a pas été tout à fait appropriée, qu' en effet, une reprise chirurgicale précoce associée à une antibiothérapie adaptée auraient probablement pu « sauver » cette prothèse infectée, que les manquements dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique de cette infection ont provoqué une pérennisation de celle- ci, ce qui a abouti à l' amputation et que le préjudice actuel doit être considéré comme imputable à la complication infectieuse ;
Que selon les conclusions de l' expert comme celles de son sapiteur le choix de l' amputation qui a été fait leur a paru exagéré, l' expert indiquant que « l' amputation du membre droit au tiers moyen de la cuisse est en partie imputable aux interventions et aux soins … Nous nuançons cette imputabilité car l' amputation ne nous semble pas avoir été, à la date et dans les circonstances où elle a été pratiquée, l' unique et dernier recours thérapeutique » ;
Que les conclusions de ces expert et sapiteur ne sont pas sérieusement discutées le docteur B..., qui procède par simples affirmations, ne pouvant soutenir ni que les antécédents du malade ne sont « certainement » pas étrangers à la survenue d' une infection alors que, d' une part, la preuve d' un lien entre l' hypercholestérolémie et l' hypertension artérielle invoquées et une infection par staphylocoque doré reste à faire et que, d' autre part, les experts, qui ont minutieusement examiné tous les documents médicaux et qui font état de tous les antécédents du malade, ont expressément écarté tout lien de causalité entre l' état antérieur du malade et l' infection dont il a été victime, ni que les antécédents cardiaques du malade, dont les experts font également état et dont ils ont donc tenu compte, l' auraient conduit à une extrême prudence dans l' indication de nouvelles interventions chirurgicales alors que, selon le rapport d' expertise les anesthésistes et cardiologue qui ont vu le malade avant l' opération qu' il a pratiqué le 22 octobre 2002 n' ont mentionné aucune contre- indication opératoire et que, l' état du malade ne s' améliorant pas, il est finalement intervenu mais tardivement ; Qu' il ne peut pas plus prétendre que l' infection présentée était « difficilement diagnostiquable » alors que, selon les commémoratifs de l' expertise, les analyses pratiquées avaient mis en évidence la présence de staphylocoques dés le mois de décembre 2002 ni que « à l' époque des faits le traitement antibiotique était laissé à la charge des anesthésistes » alors que c' est lui le médecin prescripteur d' un traitement antibiotique jugé inapproprié ;
Que les conclusions précitées font manifestement apparaître que le docteur B..., à qui il ne peut être rien reproché au stade de l' intervention elle- même, n' a pas, dans les suites de l' intervention et après l' apparition de l' infection, satisfait à son obligation de fournir des soins attentifs et consciencieux conformes aux données acquises de la science, ce manquement étant manifestement en relation causale, au moins pour partie, avec le dommage subi par Norbert X... puisque, selon l' expertise, il a contribué à la pérennisation de l' infection ayant conduit à l' amputation ; Que dés lors l' obligation d' indemnisation du docteur B... n' apparaît pas comme sérieusement contestable ;
Attendu que, aux termes du I de l' article L 1142- 1 du Code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l' article 98 de la loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d' un défaut d' un produit de santé, les professionnels de santé ainsi que tout établissement service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d' actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu' en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d' infections nosocomiales, sauf s' ils rapportent la preuve d' une cause étrangère » ; Que, selon le II de ce même article, lorsque la responsabilité d' un professionnel, d' un établissement service ou organisme mentionné au I ou d' un producteur de produits n' est pas engagée, les victimes d' un accident médical, d' une affection iatrogène ou d' une infection nosocomiale peuvent prétendre à la réparation de leurs préjudices au titre de la solidarité nationale dans des conditions tenant au degré de leur invalidité et précisés par décret ; Que l' article L. 1142- 22 du même code a chargé l' Office National d' Indemnisation des Accidents Médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) de cette indemnisation au titre de la solidarité nationale ;
Attendu qu' en vertu de l' article 101 de la loi du 4 mars 2002, confirmé expressément en cela par l' article 3 de la loi du 30 décembre 2002 relative à la responsabilité médicale, ces dispositions sont applicables aux infections nosocomiales consécutives à des soins réalisés à compter du 5 septembre 2001 ;
Attendu que la loi du 30 décembre 2002 a effectivement ajouté au code de la santé publique un article L. 1142- 1- 1, dont la rédaction, issue de l' article 1er de cette loi, est la suivante « Sans préjudice des dispositions du septième alinéa de l' article L 1142- 17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale : / 1o Les dommages résultant d' infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l' article L. 1142- 1 correspondant à un taux d' incapacité permanente supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que le décès provoqué par ces infections nosocomiales (…) ; Que si ces dispositions, distinctes de celles issues de la loi précitée du 4 mars 2002, ont effectivement créé un nouveau régime de prise en charge par la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales à la seule condition qu' elles aient entraîné un taux d' incapacité permanent supérieur à 25 % ou le décès du patient, il ne résulte ni des termes de cette loi ni des travaux préparatoires que le législateur, ait entendu conférer à ces nouvelles dispositions, à la différence avec d' autres, qui sont dissociables, contenues dans le même loi, une portée rétroactive en sorte que ce nouveau régime n' est entré en vigueur qu' à la date de publication de cette loi au journal officiel, le 3 janvier 2003 ; Qu' il en résulte que la charge de l' indemnisation des infections nosocomiales consécutives à des soins réalisés entre le 5 septembre 2001 et le 3 janvier 2003 ne peut incomber à l' ONIAM qu' à la double condition que l' établissement de soins ait apporté la preuve d' une cause étrangère à l' infection et que le taux de l' incapacité permanente de la victime soit supérieur au taux fixé par décret à savoir 25 % ;
Attendu que si le taux d' incapacité de la victime retenu par les experts a été fixé à 40 % il reste que les conséquences dommageables de l' infection nosocomiale contractée à la Polyclinique SAINT ROCH dans les suites de l' intervention pratiquée le 22 octobre 2002 ne peuvent manifestement pas être à la charge de la solidarité nationale dés lors que ni la faute retenue ci- dessus à l' encontre du docteur B... ni celle, qui pourrait le cas échéant l' être à l' encontre du CHU de NÎMES du fait d' une amputation considérée par les experts comme prématurée, ne peuvent constituer des causes étrangères déchargeant l' établissement de soins précité de son obligation légale d' indemnisation dés lors qu' elles sont postérieures à ladite infection et qu' elles sont donc sans lien avec sa survenance ;
Qu' il suit de l' ensemble de ces éléments et appréciations que c' est à raison que le premier juge a, de première part, mis l' ONIAM hors de cause et, de seconde part, considéré que l' obligation pour la Polyclinique SAINT ROCH d' indemniser les préjudices subis par les consorts X... n' apparaissait pas comme sérieusement contestable mais que c' est en revanche à tort qu' il a considéré que la demande formée contre le docteur B... échappait à sa compétence alors que les manquements retenus à l' encontre de ce praticien comme ayant contribué à la réalisation du dommage apparaissent comme manifestes à la lecture des conclusions des experts ; Que dés lors, par réformation de la décision sur ce dernier point il y a lieu de mettre la charge de la provision ci- après allouée, in solidum, à la charge de ce médecin et de la clinique appelante, le juge des référés et, partant, la Cour en appel des décisions de ce magistrats, n' ayant pas le pouvoir de se prononcer, notamment par la voie de l' appel en garantie, sur la répartition de la charge finale de l' indemnisation entre les responsables du dommage, cette question, qui suppose une appréciation sur la part de responsabilité de chacun dans la réalisation dudit dommage, relevant du seul pouvoir d' appréciation des juges du fond ;
Attendu qu' il résulte des pièces versées aux débats que le docteur B... a été assuré, au titre de sa responsabilité civile professionnelle, auprès de la société AREAS CMA jusqu' au 1er octobre 2003, date à laquelle le contrat d' assurances a été résilié par l' assureur ; Que, postérieurement à cette date et encore à ce jour, ce médecin est assuré, au même titre, auprès de la société MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED ;
Attendu que l' article L 251- 2 du Code des assurances, tel qu' il résulte de l' article 4 de la loi du 30 décembre 2002, dispose : « Constitue un sinistre, pour les risques mentionnés à l' article L. 1142- 2 du code de la santé publique, tout dommage ou ensemble de dommages causés à des tiers, engageant la responsabilité de l' assuré résultant d' un fait dommageable ou d' un ensemble de faits dommageables ayant la même cause technique, imputable aux activités de l' assuré garanties par le contrat et ayant donné lieu à une ou plusieurs réclamations. / Constitue une réclamation toute demande en réparation amiable ou contentieuse formée par la victime d' un dommage ou ses ayants droits et adressée à l' assuré ou à son assureur » ;
Que selon l' article 5 alinéa 1 de la loi précitée du 30 décembre 2002 cet article L 251- 2 s' applique aux contrats conclus ou renouvelés à compter de la date de la publication de ce texte ; Que cette publication est intervenue le 31 décembre 2002 ; Que l' alinéa 2 de ce même article dispose : « Sans préjudice de l' application des clauses contractuelles stipulant une période de garantie plus longue, tout contrat d' assurance de responsabilité civile garantissant les risques mentionnés à l' article L 1142- 2 du code de la santé publique, conclu antérieurement à cette date, garantit les sinistres dont la première réclamation est formulée postérieurement à cette date et moins de cinq ans après l' expiration ou la résiliation de tout ou partie des garanties, si ces sinistres sont imputables aux activités garanties à la date d' expiration ou de résiliation et s' ils résultent d' un fait dommageable survenu pendant la période de validité du contrat » ;
Attendu que ces dernières dispositions sont éclairées par les travaux législatifs ; Que selon le rapport fait au nom de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur la proposition de loi adoptée par la Sénat relative à la responsabilité civile médicale par son rapporteur (Rapport No 464 Page 26), le deuxième alinéa de l' article L 251- 2 du code des assurances « rend applicable aux contrats d' assurance actuellement en vigueur la garantie subséquente de cinq ans prévue pour les nouveaux contrats afin de garantir une continuité de couverture assurancielle et des effets juridiques au moins aussi protecteur que ceux nouvellement imposés par la loi … / A titre rétroactif, tout contrat d' assurance en responsabilité civile médicale est donc réputé garantir tous les sinistres dont la première réclamation interviendra dans les cinq ans suivant l' entrée en vigueur de la loi dés lors que l' activité médicale à l' origine du dommage était couverte et que le fait générateur est survenu pendant la période de validité du contrat » ; Que, dans l' exposé des motifs de cette proposition de loi, fait devant le Sénat Nicolas K..., Sénateur, auteur de la proposition, indiquait, en ce qui concerne l' article 4 de la proposition, relatif à l' entrée en vigueur de l' article L 251- 2 du Code des assurances « celui- ci s' applique aux contrats conclu à compter de la date de publication de la loi. S' agissant des contrats en cours à cette date, ils continuent à s' appliquer, sous réserve de la clause de garantie subséquente, prévue au quatrième et cinquième alinéa de l' article L 215- 2, c' est- à- dire qu' ils devront en tout état de cause garantir les réclamations formulées postérieurement à cette même date et jusqu' à cinq ans après la fin du contrat dés lors que le fait générateur sera survenu pendant le contrat » ;
Qu' il résulte donc des dispositions précitées à la lumière des travaux parlementaires, que c' est à l' assureur dont le contrat était en cours à la date d' entrée en vigueur de la loi qu' il incombe de prendre en charge le sinistre dés lors que le fait générateur de celui- ci est intervenu pendant la période de validité du contrat et que la première réclamation a été formulée dans les cinq ans après la fin du contrat ; Qu' il convient d' ailleurs de relever que cette interprétation est celle qui a été faite par l' arrêté du ministère de l' économie, des finances et de l' industrie du 31 octobre 2003 portant sur la notice d' information délivrée en application des nouvelles dispositions sur le déclenchement de la garantie de responsabilité civile dans le temps dans les contrats d' assurance, interprétation dont la société MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED se prévaut, puisque cet arrêté indique que, en cas de changement d' assureur, « si le fait dommageable s' est produit pendant la période de validité de l' ancienne garantie c' est l' ancien assureur qui doit traiter la réclamation portant sur les dommages qui résultent de ce fait dommageable » ;
Attendu que à la date de l' entrée en vigueur de la loi précitée l' assureur, dont la garantie était fondée sur le fait générateur, était la Société AREAS CMA puisque cet assureur a mis fin au contrat qui la liait au docteur B... le 1er octobre 2003 ; Que le fait générateur engageant la responsabilité de celui- ci est survenu pendant la période de validité de ce contrat puisque le comportement fautif retenu par la Cour s' est produit, même s' il s' est prolongé après la fin du contrat, dans les mois qui ont suivi le 22 octobre 2002 ; Que, selon les parties, dont les écritures sont concordantes sur ce point, la première réclamation a été formulée le 24 mars 2005 soit avant l' expiration du délai de cinq ans prévu par l' article précité ; Qu' il suit manifestement de là que c' est cet assureur qui doit garantir le docteur B... et non la société MEDICAL INSURANCE COMPANY LIMITED, qu' il n' y a cependant pas lieu de mettre hors de cause, une telle décision étant du seul pouvoir d' appréciation des juges du fond et ce d' autant moins que le nouvel assureur peut être amené à compléter une insuffisance d' indemnisation à en croire la notice d' information précitée ;
Attendu que, dans ses conclusions, l' expert L..., retient :
Une ITT du 1er février 2003 au 21 avril 2005 : Une date de consolidation au 21 avril 205 ; Une IPP, liée à l' amputation du tiers moyen de la cuisse droite de 40 % ; Un pretium doloris important de 6 / 7 ; Un préjudice esthétique lié à la boiterie et à l' amputation de 4 / 7 ; L' existence d' un préjudice d' agrément ; L' existence d' un préjudice financier lié aux aménagements nécessaires de l' habitation et du véhicule ;
Attendu que, eu égard à ces conclusions et aux réserves formulées par les experts quant à l' imputabilité totale de l' amputation aux conséquences résultant directement de l' infection nosocomiale et des insuffisances dans sa prise en charge, il apparaît que les sommes allouées par le premier juge à titre de provision sont suffisantes sans être excessives, la répartition postes par postes des réparations en fonction de la nature de chaque préjudice ressortissant au seul pouvoir d' appréciation des juges du fond ;
Attendu que la demande de la CPAM de MONTPELLIER LODEVE, qui sollicite l' octroi de ses entiers débours, ne peut prospérer devant le juge des référés et partant devant la Cour statuant en appel des décisions de ce magistrat, le juge des référés ne pouvant allouer que des provisions et l' octroi des sommes pouvant revenir à ce tiers payeur au titre de son recours subrogatoire, lequel ne peut prospérer que dans les limites des sommes allouées à la victime en réparation des postes de préjudices soumis à recours, étant subordonné à la détermination préalable des sommes revenant à la victime au titre de ceux- ci qui est du seul pouvoir d' appréciation des juges du fond ;
Attendu que l' équité commande de faire application de l' article 700 du CPC au profit des consorts X..., de l' ONIAM et de la CPAM de MONTPELLIER LODEVE ;
Que la Polyclinique SAINT ROCH, le docteur B... et la Compagnie d' assurances AREAS CMA qui succombent principalement seront condamnées aux entiers dépens ; Que, par suite, ces parties ne peuvent prétendre au bénéfice de ces dispositions ;
PAR CES MOTIFS :
Déclare l' appel recevable.
Confirme la décision déférée en ce qu' elle a retenu que l' obligation à réparation de la Polyclinique SAINT ROCH du préjudice des consorts X... n' était pas sérieusement contestable.
La confirme également en ce qu' elle a mis l' ONIAM hors de cause.
La confirme encore en ses dispositions relatives au montant des sommes attribuées aux consorts X... tant à titre de provision que sur le fondement de l' article 700 du NCPC.
La réforme du surplus.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que l' obligation pour le docteur B... et son assureur initial, la société AREAS CMA, d' indemniser les consorts X... n' est pas sérieusement contestable.
Les condamne in solidum avec la Polyclinique SAINT ROCH à payer les sommes allouées à ceux- ci, tant à titre de provision qu' au titre des frais non- compris dans les dépens, par le premier juge.
Dit n' y avoir lieu a référé en ce qui concerne les demandes de la CPAM de MONTPELLIER LODEVE relatives à l' octroi de ses débours définitifs et à l' allocation de l' indemnité forfaitaire.
Condamne in solidum le docteur Pierre B... et la Compagnie d' assurances AREAS CMA, intimés à l' encontre desquels une condamnation est sollicitée de ce chef, à payer, sur le fondement de l' article 700 du CPC, aux consorts X..., au titre des frais non- compris dans les dépens exposés par eux en cause d' appel, la somme de 1 500 euros ;
Condamne la Polyclinique SAINT ROCH, le docteur B... et la Compagnie AREAS CMA à payer à la CPAM de MONTPELLIER LODEVE au titre de l' article 700 du CPC la somme de 800 euros.
Condamne la Polyclinique SAINT ROCH à payer à l' ONIAM, sur le même fondement, la somme de 1 500 euros.
Condamne la Polyclinique SAINT ROCH, le docteur Pierre B... et la Compagnie d' assurances AREAS CMA aux entiers dépens de première instance et d' appel, dont distraction pour ces derniers, dans les conditions de l' article 699 du même code, au profit des avoués de la cause qui en ont fait la demande.
Déboute les parties de leurs demandes, fins et conclusions autres, plus amples ou contraires.