Grosse + copie délivrées le à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2o chambre
ARRET DU 13 MAI 2014
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/ 00603
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 JANVIER 2014 TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER No RG 2013 06590
APPELANT :
Monsieur Mohammed X...né le 01 Janvier 1966 à MAROC de nationalité Marocaine ......34080 MONTPELLIER représenté par Me Jean Claude ALLE de la SCP ALLE ET ASSOCIES AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant
INTIMES :
Monsieur Vincent Y......34000 MONTPELLIER représenté par Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant
LE COMPTABLE DES FINANCES PUBLIQUES DU SIE Hôtel des Finances 40 avenue de Louvois 34181 MONTPELLIER CEDEX 4 représenté par Me Jean Michel CASANOVA de la SCP CASANOVA ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant assisté de Me Christelle CLEMENT, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant la SCP CASANOVA ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 01 Avril 2014
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 AVRIL 2014, en chambre du conseil, Monsieur Daniel BACHASSON, président, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :
Monsieur Daniel BACHASSON, président Monsieur Hervé CHASSERY, conseiller Madame Brigitte OLIVE, conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON
Ministère public :
L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.
ARRET :
- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Daniel BACHASSON, président, et par Madame Sylvie SABATON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS et PROCEDURE ¿ MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES
Sur assignation du comptable du service des impôts des entreprises de Montpellier du 2 avril 2013, le tribunal de commerce de Montpellier, par jugement contradictoire du 10 janvier 2014, s'est déclaré compétent et, constatant l'état de cessation des paiements de M. X..., a ouvert sa liquidation judiciaire en nommant M. Y... liquidateur judiciaire.
M. X...a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 24 janvier 2014, intimant le comptable service des impôts entreprises Montpellier et « M. Vincent Y...¿ ......34000 Montpellier ».
Il a conclu à l'infirmation du jugement entrepris, demandant à la cour :- à titre principal, de déclarer la demande irrecevable,- subsidiairement, d'annuler le jugement et de renvoyer le demandeur à mieux se pouvoir ou, pour le cas où la cour souhaiterait évoquer le litige au fond, de mettre les parties en demeure de conclure,- plus subsidiairement, de constater que la créance invoquée est affectée d'un sursis à paiement,- de condamner les intimés à lui payer 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient que :
- M Y..., qui n'était pas partie en première instance n'a été intimé que pour satisfaire aux dispositions de l'article R. 661-6 du code de commerce,
- concernant le liquidateur judiciaire, sa déclaration d'appel n'est susceptible d'aucune confusion,
- en dépit de son inscription du registre du commerce et des sociétés, il exerce une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural, si bien que la demande était irrecevable en application de l'article 640-5, dernier alinéa, du code de commerce,
- c'est en violation de ses droits que le tribunal, rejetant son exception d'incompétence, a statué au fond sans l'inviter préalablement à conclure au fond,
- en application de l'article 568 du code de procédure civile, si la cour entendait évoquer le fond du litige, elle devrait d'abord mettre les parties en demeure de conclure au fond,
- la créance invoquée par l'administration fiscale étant contestée depuis le 8 novembre 2011, elle est assortie d'un sursis à paiement, et donc non exigible.
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M. Y..., ès qualités, a conclu à titre principal, à l'irrecevabilité de l'appel, et, subsidiairement, à la confirmation du jugement entrepris.
Il fait valoir que :
- l'appel n'est pas dirigé contre lui ès qualités, mais à titre personnel, si bien qu'il n'a pas été régulièrement intimé comme l'exige l'article R. 661-6 1o du code de commerce,
- M. X...est inscrit au registre du commerce et des sociétés ce qui prouve qu'il exerce une activité commerciale.
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Le comptable du service des impôts des entreprises de Montpellier a conclu à ce qu'il soit statué ce que de droit sur la nullité soulevée par M. X...et, au fond, à la confirmation du jugement entrepris.
Il fait valoir que :
- la cour, quelle que soit la position sur la nullité invoquée, devra statuer au fond,
- M. X...ne peut prétendre exercer une activité agricole alors qu'il est inscrit au registre du commerce et des sociétés et ne justifie pas être immatriculé auprès de la Chambre de l'agriculture,
- M. X...déclare exercer une activité de soutien aux cultures, si bien qu'il se livre à des prestations de service pour le compte de tiers et ne tire pas ses revenus de la mise en valeur de biens ruraux,
- un contrôle fiscal de l'activité de M. X...diligenté fin 2010 a entraîné des rectifications sur ses revenus au titre du régime des bénéfices industriels et commerciaux,
- il justifie d'une créance certaine liquide et exigible d'un montant de 74 477, 52 euros, qui n'a pu être recouvrée.
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Le ministère public a donné, le 31 janvier 2014, son avis consistant à s'en rapporter.
C'est en cet état que la procédure a été clôturée par ordonnance du 1er avril 2014.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que si, dans sa déclaration d'appel du 24 janvier 2014, M. X...a intimé « M. Vincent Y...» sans autre précision, il reste que cette irrégularité a été couverte par ses conclusions du 8 mars 2014 et du 1er avril 2014 qui visent, en tant qu'intimé, M. Y... « ès-qualité (sic) de liquidateur désigné par le jugement dont appel ¿ » et par celles dudit liquidateur judiciaire, du 26 mars 2014, qui conclut « ès-qualité (sic) de liquidateur judiciaire de Mr Mohamed X...» ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 123-7 du code de commerce, l'immatriculation d'une personne physique au registre du commerce et des sociétés emporte présomption de la qualité de commerçant, et que les tiers et administrations ne sont pas admis à se prévaloir de cette présomption s'ils savaient que la personne immatriculée n'était pas commerçante ;
Qu'il s'en déduit que la personne immatriculée audit registre qui conteste sa qualité de commerçant invoquée par des tiers ou des administrations au nom de la présomption précitée, doit prouver que ces derniers savaient qu'elle n'était pas commerçante ;
Attendu que M. X...est inscrit au registre du commerce et des sociétés de Montpellier sous le no 485 001 523 depuis le 16 novembre 2005 pour une activité de soutien aux cultures ;
Que s'il conteste sa qualité présumée de commerçant, il ne soutient pas ni a fortiori n'établit que l'administration fiscale savait qu'il n'était pas commerçant ;
Qu'il rapporte d'autant moins cette preuve que le comptable des finances publiques des impôts des entreprises de Montpellier rappelle qu'un contrôle fiscal de l'activité de M. X...diligenté en 2010 a mis en évidence la nature et les montants de ses revenus déclarés et que les rectifications opérées sur ces derniers relèvent du régime des bénéfices industriels et commerciaux ;
Qu'il s'ensuit que M. X...a bien la qualité de commerçant et que la demande d'ouverture de la liquidation judiciaire relève du tribunal de commerce ;
Attendu qu'alors que M. X...s'était borné à soulever l'incompétence du tribunal de commerce de Montpellier, celui-ci, en retenant sa compétence, ne pouvait statuer au fond du litige sans le mettre préalablement en demeure de conclure sur le fond, les dispositions de l'article R. 662-6 du code de commerce ne dérogeant pas au principe posé par l'article 76 du code de procédure civile ;
Que cette méconnaissance du principe de la contradiction que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même, entraîne l'annulation du jugement ;
Attendu que lorsque l'appel porte sur la nullité du jugement et non sur celle de l'acte introductif d'instance, la cour d'appel, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, est tenue de statuer sur le fond quelle que soit la décision sur la nullité, sans que l'appelant ait à recevoir une injonction d'avoir à conclure au fond ;
Qu'au demeurant, M. X...a conclu que la créance invoquée par l'administration fiscale est affectée d'un sursis à statuer depuis le 8 novembre 2011, et qu'elle ne pouvait justifier son assignation en liquidation judiciaire ;
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article R. 640-2 du code de commerce que la cour d'appel qui annule un jugement statuant sur l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ou son prononcé peut, d'office, ouvrir la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ;
Attendu que l'administration fiscale détient envers l'appelant une créance de 267 368, 52 euros au titre de la TVA pour la période de janvier 2006 à juin 2012, outre 5 717 euros d'intérêts de retard ;
Que cette créance, d'un montant total de 273 085, 52 euros, a fait l'objet d'une réclamation le 8 novembre 2011 pour la somme de 198 608 euros, de sorte que M. X...bénéficie du sursis de paiement pour ce montant contesté devant le tribunal administratif de Montpellier ;
Qu'en revanche, la partie non contestée de cette créance, soit 74 477, 52 euros, est exigible ;
Attendu que les diverses mesures mises en ¿ uvre pour son recouvrement, soit huit avis de mise en recouvrement (les 14 mars 2011, 14 juin 2011, 14 septembre 2011, 14 novembre 2011, 3 janvier 2012, 26 février 2012, 9 octobre 2012) et les mises en demeure correspondantes, et trois avis à tiers détenteur des 20 décembre 2011, sont restées vaines ;
Attendu que l'ancienneté de cette créance ¿ qui n'a pas fait l'objet d'une réclamation fiscale ¿ et son montant établissent l'impossibilité de M. X...de faire face à ce passif exigible avec son actif disponible, dont les avis à tiers détenteur montrent qu'il est quasiment inexistant ;
Attendu que M. X...est donc en état de cessation des paiements ;
Qu'en l'absence de toute information sur son activité actuelle et ses possibilités de redressement, il convient d'ouvrir son redressement judiciaire et de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Montpellier en vue de la désignation des organes de la procédure et des formalités de publicité légales ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective ;
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après débats en chambre du conseil,
Déclare l'appel recevable.
Dit que la demande ressortit au tribunal de commerce.
Annule le jugement entrepris.
Et, statuant par l'effet dévolutif de l'appel et en application de l'article R. 640-2 du code de commerce,
Constate l'état de cessation des paiements de M. Mohammed X...(... 34080 Montpellier), inscrit au registre du commerce et des sociétés de Montpellier sous le no 485 001 523.
Prononce son redressement judiciaire conformément aux dispositions des articles L. 631-1 et suivants du code de commerce.
Fixe provisoirement la date de cessation des paiements au jour de la présente décision.
Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce de Montpellier pour qu'il soit procédé à la désignation des organes de la procédure et du mandataire chargé de dresser l'inventaire prévu à l'article L. 622-6 du code de commerce (auquel renvoie l'article L. 631-14), à la fixation des délais prévus aux articles L. 621-3 (auquel renvoie l'article L. 631-7) et L. 624-1 (auquel renvoie l'article L. 631-18) et à l'accomplissement des formalités légales.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
D. B.