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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1ère Chambre A
ARRET DU 25 JANVIER 2018
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/04342
Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 AVRIL 2016
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
N° RG 15/07003
APPELANTE :
SA SMA anciennement dénommée SAGENA
et pour elle son représentant légal domicilié ès qualités
[Adresse 1]
[Adresse 2]
représentée par Me Jean-Philippe DOMMEE de la SCP CASCIO ORTAL DOMMEE MARC avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Madame [N] [Q] épouse [W]
née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 1] - de nationalité française
[Adresse 3]
[Adresse 4]
représentée par Me Thierry VERNHET de la SCP SCHEUER VERNHET & Associés, avocat au barreau de MONTPELLIER
Monsieur [E] [F]
né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 2] - de nationalité française
[Adresse 5]
[Adresse 4]
représenté par Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame [K] [H] épouse [F]
née le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 3] - de nationalité française
[Adresse 5]
[Adresse 4]
représentée par Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER
Monsieur [A] [J]
né le [Date naissance 4] 1948 à [Localité 4] - de nationalité française
[Adresse 6]
[Adresse 7]
représenté par Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame [M] [S] épouse [J]
née le [Date naissance 5] 1950 à [Localité 5] (Algérie)
de nationalité française
[Adresse 6]
[Adresse 7]
représentée par Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER
SA AMTRUST INTERNATIONAL UNDERWRITERS représentée en France par la société EUROPE AN INSURANCE SERVICES LIMITED 'EISL' dont le siège social est [Adresse 8]
et pour elle son représentant légal domicilié ès qualités
[Adresse 9]
[Adresse 10]
représentée par Me Laure D'HAUTEVILLE de la SELARL MBA & Associés, avocat au barreau de MONTPELLIER
SARL [H] [V] ARCHITECTE
et pour elle son représentant légal domicilié ès qualités
[Adresse 11]
[Adresse 12]
représentée par Me Paul-Antoine SAGNES de la SCP LEVY BALZARINI SAGNES SERRE, avocat au barreau de MONTPELLIER
SAMCV MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
et pour elle son représentant légal domicilié ès qualités
[Adresse 13]
[Adresse 14]
représentée par Me Paul-Antoine SAGNES de la SCP LEVY BALZARINI SAGNES SERRE, avocat au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 31 Octobre 2017
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 NOVEMBRE 2017, en audience publique, Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :
Madame Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY, Président
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth RAMON
le délibéré prononcé au 11/01/2018 est prorogé au 25/01/2018
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Madame Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY, Président, et par Madame Elisabeth RAMON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
**********
FAITS ET PROCEDURE
[N] [W] a confié la réalisation d'un ensemble immobilier de quatre villas et d'un immeuble collectif de six logements à la société Cotebat ,assurée auprès de la société Sagena, aux droits de laquelle vient la société SMA, sous la maîtrise d''uvre de la SARL [G] [V], assurée auprès de la société MAF.
Une assurance dommages ouvrage a été souscrite auprès de la société Amtrust international Underwriters.
Par acte notarié du 19 mars 2013 [N] [W] a vendu aux époux [J], en l'état futur d'achèvement, une maison d'habitation constituant le lot n° 4 dont ils ont pris possession le
2 août 2013.
Par acte notarié du 16 avril 2013 elle a vendu aux époux [F] une maison d'habitation constituant le lot n° 3 dont ils ont pris possession le 15 juillet 2013.
[N] [W], par lettre du 26 novembre 2013 à effet au 11 septembre 2013, a résilié le marché conclu avec la société Cotebat.
Par ordonnances des 9 janvier et 23 octobre 2014 le juge des référés du tribunal de grande instance de Montpellier, à la demande de l'entreprise, a ordonné une mesure d'expertise confiée à Monsieur [Y].
En lecture de deux rapports déposés les 31 mars et 1er avril 2015, [N] [W], par différents exploits en date du 3 décembre 2015 a assigné devant le tribunal de grande instance de Montpellier la société Amtrust international Underwriters, la SARL [G] [V], la société Maf, la société Sagena, les époux [F] et les époux [J] pour se voir indemniser des différents préjudices subis pendant le déroulement du chantier et obtenir paiement par les acquéreurs du solde des marchés.
Par jugement du 8 avril 2016 ce tribunal a :
' condamné in solidum [N] [W] et la société SMA à payer aux époux [J] la somme de 31'085,44 € TTC au titre des réparations à effectuer et des prestations à achever,
' condamné la société SMA à garantir [N] [W] de cette condamnation,
' condamné in solidum [N] [W], la SARL [G] [V], la société Maf et la société SMA à payer aux époux [J] :
la somme de 10'000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi résultant du défaut d'obtention du label TPHE
la somme de 15'000 € à titre du préjudice subi résultant de la suppression de la plate-forme pour les personnes à mobilité réduite
la somme de 20'000 € à titre de dommages intérêts pour préjudice subi résultant du non achèvement de l'ensemble immobilier, y compris le préjudice de jouissance subi et à subir du fait des travaux
la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
' condamné la SARL [G] [V] garantie par la société Maf et la société SMA à garantir [N] [W] des condamnations qui précèdent dans les proportions de 85 % pour la société SMA et de 15 % pour la SARL [G] [V] et la société Maf
' dit que dans leur recours entre eux les constructeurs et/ou leurs assureurs seront tenus dans les mêmes proportions
' condamné in solidum [N] [W] et la société SMA à payer aux époux [F] la somme de 40'362,57 € TTC au titre des réparations effectuées et des prestations à achever
' condamné la société SMA à garantir [N] [W] de cette condamnation
' condamné in solidum [N] [W], la SARL [G] [V], la société Maf et la société SMA à payer aux époux [F] :
la somme de 15'000 € au titre du préjudice subi résultant de la suppression de la plate-forme pour les personnes à mobilité réduite
la somme de 20'000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi résultant du non achèvement de l'ensemble immobilier y compris le préjudice de jouissance subi et à subir du fait des travaux
la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
' condamné la SARL [G] [V] garantie par la société Maf et la société SMA à garantir [N] [W] des condamnations qui précèdent dans les proportions de 85 % pour la société SMA et de 15 % pour la SARL [G] [V]
' dit que dans leur recours entre eux les constructeurs et/ou leurs assureurs seront tenus dans les mêmes proportions
' condamné les époux [J] à payer à [N] [W] la somme de 67'600 € à titre de solde du marché
' condamné les époux [F] à payer à [N] [W] la somme de 66'374 € à titre de solde du marché
' condamné in solidum la SARL [G] [V], la société Maf et la société SMA à payer à [N] [W] la somme de 18'129,98 € TTC à titre de dommages et intérêts pour le préjudice lié au retard du chantier
' dit que dans les recours entre eux les constructeurs et/ou leurs assureurs la SMA sera garantie de cette condamnation à proportion de 10 %
' condamné la société SMA à payer à [N] [W] la somme de 71'364,26 € TTC au titre du préjudice subi lié au surcoût des travaux
' condamné in solidum la SARL [G] [V] et la société Maf à payer à [N] [W] la somme de 89'276,64 € TTC au titre du préjudice subi lié au dépassement du budget
' dit opposables les franchises et plafonds de garantie prévus au contrat liant la société SMA à son assuré
' rejeté tout autre demande
' ordonné l'exécution provisoire
' condamné la SARL [G] [V], la société Maf et la société SMA à payer à [N] [W] la somme de 6000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
' condamné [N] [W] à payer à la société Amstrust international Underwriters la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
' condamné in solidum la SARL [G] [V], la société Maf et la société SMA aux dépens, en ce compris les frais des deux rapports d'expertise dans la proportion de 85 % pour la société SMA et de 15 % pour la société [G] [V] et la société Maf.
La société SMA a relevé appel de cette décision le 1er juin 2016.
Vu les conclusions de l'appelante remises au greffe le 22 décembre 2016,
Vu les conclusions de [N] [W] remises au greffe le 26 octobre 2016,
Vu les conclusions de la SARL [G] [V] et de la société Maf remises au greffe le 28 septembre 2016,
Vu les conclusions de la société Amstrust international Underwriters remises au greffe le 24 octobre 2016,
Vu les conclusions des époux [F] et des époux [J] remises au greffe le 24 octobre 2016,
Vu l'ordonnance de clôture du 31 octobre 2017,
MOTIFS
- Sur la réception des travaux et la livraison des immeubles :
Madame [W], maître de l'ouvrage, et les constructeurs, la SARL [G] [V] et la société Cotebat, n'ont signé aucun procès-verbal de réception des travaux et aucun ne demande le prononcé de la réception judiciaire.
Un procès-verbal de constat d'huissier a été dressé le 11 septembre 2013 à la requête de Madame [W] et de la SARL [V] mentionnant que les logements collectifs sont en cours de construction et que les parties communes et les parties privatives des quatre villas comportent de très nombreux inachèvements et non conformités.
Ces immeubles n'étaient donc pas en état d'être reçus et Madame [W] n'a manifesté aucune volonté de les recevoir dans ces conditions.
Cette dernière ne peut donc rechercher la responsabilité des constructeurs que sur le fondement contractuel.
Il en est de même pour les acquéreurs de deux villas, les époux [F] et les époux [J] qui ont refusé, ainsi que le souligne l'expert [Y], de signer les procès-verbaux de livraison.
Il ressort des courriers adressés à Madame [W] par les époux [F] le 5 août 2013 et par les époux [J] le 27 août 2013 que ces derniers ont été contraints de prendre possession des lieux puisqu'ils vivaient depuis de nombreux mois dans un camping, mais qu'ils n'ont pas eu la volonté de prendre livraison des immeubles pour lesquels ils font la liste des inachèvements et des malfaçons tant dans les parties communes que dans les parties privatives : absence d'interphone et de boîtes aux lettres, absence de mur d'enceinte compromettant la sécurité de la résidence, abandon du chantier, présence d'une grue empêchant l'accès aux garages, nombreux malfaçons et inachèvements en terrasse, WC, placards, séjour, escalier et garage.
Les acquéreurs ont encore fait constater l'inachèvement des parties communes rendant l'ouvrage difficilement utilisable par constat d'huissier du 2 février 2016, notamment un chemin d'accès pentu et dérapant difficilement praticable car encombré de gravats, absence de plate-forme élévatrice pour accès handicapés, escalier extérieur d'accès aux maisons encombré de matériaux de chantier.
Ces ouvrages et éléments d'équipement sont indispensables à l'utilisation normale et sécurisée de l'immeuble qui n'est donc pas achevé au sens de l'article R261'1 du code de la construction et de l'habitation et les consorts [F] et [J] n'ont pas manifesté leur intention de recevoir la livraison des immeubles dans de telles conditions.
C'est donc à juste titre qu'ils recherchent la responsabilité contractuelle de leur vendeur en l'état futur d'achèvement, Madame [W], d'autant que celle-ci n'a procédé à aucune réception contradictoire avec les constructeurs.
- Sur les préjudices subis par les époux [F] et les époux [J] :
Les époux [F] et [J] ne discutent pas le jugement en ce qu'il leur a alloué les sommes de 40'362,57 € et de 26'531,44 € au titre de la levée des réserves et celles de 20'000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi résultant du non achèvement des immeubles y compris le préjudice de jouissance subi et à subir du fait des travaux et ces dispositions seront donc confirmées.
En revanche ils demandent la somme de 25'000 € de dommages et intérêts, au lieu des 15'000 € accordés par le premier juge, en raison de la suppression définitive de la plate-forme pour accès handicapés.
Le descriptif de division prévoyait la pose d'un ascenseur handicapés sous la forme d'une plate-forme élévatrice mentionnée également dans le plan de masse.
Le règlement de copropriété, concernant les charges spéciales, mentionnait des tantièmes pour la plate-forme accès handicapés.
L'expert [Y] ajoute que le permis de construire délivré le 11 octobre 2010 comportait un volet « accès handicapés » devant être respecté par la mise en place d'un ascenseur pour personnes à mobilité réduite.
Or le constat d'huissier dressé le 2 février 2016 relève l'absence de cette plate-forme et l'obturation de l'emplacement prévu à cet usage, ce que ne conteste pas Madame [W].
Les époux [F] et [J] sont retraités et Madame [F] est bénéficiaire d'une pension d'invalidité catégorie 2 (perte des deux tiers de la capacité de travail).
Monsieur [J] a été hospitalisé au mois de janvier 2016 sans que le motif de cette hospitalisation soit précisé.
Certes cet élément d'équipement était déterminant dans la volonté des acquéreurs ainsi que le démontrent les courriels échangés avec l'agence immobilière chargée de la commercialisation, mais le premier juge a justement évalué à la somme de 15'000 € l'indemnisation de ce préjudice.
Les époux [F] et [J] réclament également l'indemnisation d'un préjudice de jouissance puisqu'ils ont du vivre dans un ensemble immobilier inachevé, sur un chantier au milieu de matériaux abandonnés et où ils ont dû accéder à leur maison par un escalier inachevé et insécurisé.
Ils relèvent également l'absence de boîtes aux lettres, de sonnette, d'antenne.
Ils notent enfin l'existence d'infiltrations et la mauvaise pose du carrelage.
Le premier juge leur a alloué la somme de 20'000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice résultant du non achèvement de l'ensemble immobilier y compris le préjudice de jouissance subi et à subir du fait des travaux en relevant les problèmes affectant l'absence d'interphone, de sonnette, les difficultés d'utilisation du chemin d'accès et des escaliers, l'insécurité de l'immeuble et ce, au regard des conclusions de l'expert qui a proposé une indemnisation du préjudice de jouissance jusqu'à la terminaison des travaux en fonction de la valeur locative des immeubles.
La demande complémentaire de dommages-intérêts doit être écartée puisqu'elle est destinée à réparer un préjudice de jouissance identique à celui déjà indemnisé par l'allocation de la somme de 20'000 €.
Les époux [F] et [J] demandent encore l'indemnisation de leur préjudice moral lié à leur sentiment de honte de vivre dans des conditions indécentes depuis plus de trois ans ce qui a généré un état dépressif.
S'ils ne versent pas au débat de documents médicaux, il est indéniable que les acquéreurs ont supporté un stress psychologique important pendant plusieurs années dans la mesure où ils ont vécu dans des immeubles en chantier et où ils ont dû admettre de renoncer à des prestations importantes pour eux telle l'installation d'une plate-forme d'accès pour personnes à mobilité réduite, tenant notamment à l'invalidité de Madame [F], et la délivrance du label THPE.
Ils ont également dû subir de longues années de procédure coûteuse pour faire reconnaître leurs droits.
En conséquence il convient d'allouer aux époux [F] et aux époux [J] la somme de 8000 € chacun en réparation de leur préjudice moral.
Enfin les époux [J] demandent une somme supplémentaire de 5062 € au titre des levées de réserves.
Cependant le premier juge a pris en compte une partie de cette somme lorsqu'il leur a alloué 31'085,44 € au titre des réparations effectuées et des prestations à achever (1550 € pour la porte placard-miroir, 775 € pour la porte-miroir parents et 1470 € pour la porte de garage).
Seule la somme de 508,30 € concernant le chauffage n'a pas été retenue à juste titre puisque l'expert n'a pas constaté de défaut de fonctionnement.
En conséquence cette demande de condamnation à une somme supplémentaire de 5062 € doit être écartée.
Les époux [F] et les époux [J] ne contestent pas qu'ils doivent à Madame [W], au titre du solde du prix restant dû, les sommes respectives de 66'374 € et de 67'600 €.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
- Sur l'indemnisation des préjudices des époux [F] et des époux [J] :
I/ Madame [W], venderesse en l'état futur d'achèvement, demande la confirmation du jugement et ne conteste donc pas sa responsabilité contractuelle à l'égard des acquéreurs.
II/ La SMA, assureur de la société Cotebat, conclut à l'absence de garantie puisque les conditions particulières et générales de la police excluent la responsabilité civile de l'assuré pour les dommages matériels subis par les travaux et affectant l'ouvrage réalisé par ce dernier.
En réponse Madame [W] et les acquéreurs soulèvent l'absence de signature de ces conditions particulières et générales ainsi que la teneur de l'attestation d'assurance qui ne mentionne aucune restriction de garantie.
L'attestation d'assurance délivrée le 26 novembre 2011 stipule que le contrat garantit la responsabilité civile encourue vis-à-vis des tiers par l'assuré du fait de ses activités professionnelles que ce soit en cours ou après exécution de ses travaux.
Cependant les conditions générales de cette police d'assurance précisent que les dommages matériels subis par les travaux, les ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés par l'assuré ne sont pas garantis de même que les conséquences pécuniaires découlant d'un retard dans l'exécution du marché ou de réserves à la réception de l'ouvrage.
La charge de la preuve d'une exclusion de garantie incombe à l'assureur.
Ce dernier produit la photocopie des conditions particulières qui portent le numéro de contrat figurant sur l'attestation ainsi que la référence des conditions générales versées également aux débats en photocopie.
Or le contrat d'assurance est un contrat consensuel parfait dès la rencontre des volontés de l'assureur et de l'assuré. La société Cotebat, en produisant au maître de l'ouvrage son attestation d'assurance comportant les mêmes références que les conditions particulières et générales, a bien manifesté sa volonté de souscrire cette police avec toutes ses conditions d'application.
La SMA justifie donc de l'exclusion de garantie concernant les dommages affectant les ouvrages exécutés par son assuré ainsi que les conséquences pécuniaires découlant de l'exécution du chantier.
Si l'attestation d'assurance doit être fiable et apporter des informations sur la nature et l'étendue des garanties, elle ne reproduit pas toutes les clauses du contrat d'assurance, notamment les clauses d'exclusion et de limitation de garantie.
L'attestation produite par la société Cotebat précisait d'ailleurs qu'elle ne pouvait engager l'assureur au-delà des clauses et conditions du contrat auquel elle se référait.
Enfin l'assurance de responsabilité civile est une assurance de dommages non obligatoire souscrite au bénéfice exclusif de l'entrepreneur et non une assurance de responsabilité pour le compte du maître de l'ouvrage ou de ses ayants droits.
En conséquence la SMA est bien-fondée à opposer une absence de garantie des dommages intervenus avant toute réception des travaux et à demander sa mise hors de cause.
Toutes les condamnations de la SMA prononcées par le jugement entrepris seront infirmées.
III/ le contrat d'architecte signé entre Madame [W] et la SARL [G] [V] ne concerne pas la conception ni la consultation des entreprises et la mise au point des marchés de travaux.
Ainsi seule Madame [W], après la défection d'une première entreprise, a attribué le marché de travaux à l'entreprise Cotebat.
En conséquence la SARL [V] ne peut être tenue pour responsable de la mauvaise exécution des travaux et de leur inachèvement en raison de l'absence de compétences et de références de l'entreprise pour exécuter ce marché.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a exclu toute condamnation de l'architecte au paiement des réparations à effectuer et des prestations à achever.
Concernant les dommages et intérêts alloués en réparation du préjudice subi résultant du défaut d'obtention du label THPE (très haute performance énergétique), il appartenait à Madame [W] de prendre contact avec un organisme certificateur pour valider l'étude thermique initiale.
Cependant, dans la mesure où la mission de l'architecte comprenait la remise des dossiers des ouvrages exécutés, il lui appartenait de conseiller le maître de l'ouvrage en lui rappelant cette obligation.
Le défaut de respect par la SARL [V] de cette obligation de conseil justifie que soit retenue à son encontre une responsabilité à hauteur de 15 %.
De même, tenue d'une obligation de conseil dans la direction de l'exécution des travaux, l'architecte devait attirer l'attention de Madame [W] sur les conséquences de la suppression de la plate-forme pour les personnes à mobilité réduite.
Une responsabilité à proportion de 15 % doit être également retenue à son encontre à ce titre.
Le préjudice lié au retard de chantier est dû à la défaillance de l'entreprise Cotebat choisie par Madame [W]. Cependant la SARL [V] n'a pas établi de planning contractuel détaillé qui aurait permis de valoriser ce retard de six mois dans l'avancement du chantier et de proposer l'application de pénalités en cours de chantier.
En conséquence elle doit là également supporter une responsabilité à hauteur de 15 %.
Il en sera de même concernant l'indemnisation du préjudice moral des époux [F] et [J].
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu dans cette proportion la responsabilité de la SARL [G] [V] à l'égard des époux [F] et [J] puisque l'action fondée sur une responsabilité contractuelle se transmet aux acquéreurs de l'immeuble.
Le contrat d'architecte dispose que «il ne peut être tenu responsable, de quelque manière que ce soit, et en particulier solidairement, des dommages imputables aux actions ou omissions du maître d'ouvrage ou des autres intervenants dans l'opération faisant l'objet du contrat ».
Si l'article L 111'20'1 du code de la construction et de l'habitation répute non écrite toute clause d'un contrat ayant pour objet de limiter la responsabilité légale de l'architecte, en revanche une telle clause est licite dans le cas d'une responsabilité contractuelle comme tel est le cas en l'espèce.
Le juge est tenu de respecter les stipulations contractuelles excluant les conséquences d'une responsabilité in solidum et solidaire de l'architecte en raison de dommages imputables à d'autres intervenants à la construction comme tel est le cas de la clause insérée dans le contrat d'architecte signé par la SARL [G] [V] qui interdit de retenir une responsabilité, de quelque manière que ce soit, pour les dommages imputables aux autres intervenants.
Cette clause d'exclusion de solidarité est opposable au maître de l'ouvrage et à ses ayants droits agissant à l'encontre de la société MAF qui n'est tenue de garantir son assuré que dans les limites du contrat d'architecte.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a prononcé des condamnations in solidum à l'encontre de la SARL [G] [V].
En l'absence de condamnation solidaire avec Madame [W], cette dernière supportera 85 % des condamnations relatives aux préjudices des acquéreurs résultant du défaut d'obtention du label, de la suppression de la plate-forme, du retard de chantier et de celle résultant de l'application de l'article 700 du code de procédure civile tandis que la SARL [G] [V] et la société MAF ensemble en supporteront 15 %.
En conséquence l'appel en garantie de [N] [W] à l'encontre de la SARL [G] [V] et de la société MAF est sans objet,chacun supportant sa propre part de responsabilité.
- Sur les demandes de Madame [W]':
L'expert estime que les pénalités de retard contractuelles d'un montant de 15'108,32 € hors-taxes, soit 18'129,98 € TTC couvrent le préjudice subi par Madame [W] dû au retard de chantier de 180 jours.
Ce retard est le résultat du manque de compétence de l'entreprise pour mener à bien ce chantier mais l'architecte qui devait assurer la direction des travaux n'a pas, comme il a été indiqué précédemment, établi de planning contractuel qui aurait permis de cadrer plus efficacement l'intervention de l'entrepreneur et de mettre à sa charge, en cours de chantier, des pénalités de retard.
La responsabilité contractuelle de l'architecte à ce titre doit être évaluée à 15 % et il doit donc être condamné à payer à Madame [W] la somme de 2719,50 €.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
L'expert a chiffré le surcoût résultant de la reprise des travaux par la société Cotebat à la somme TTC de 71'364,26 €.
Le premier juge a rejeté à juste titre cette demande dans la mesure où la mission de l'architecte ne comportait pas la consultation des entreprises et la conclusion des marchés et où seule Madame [W] a contracté avec la société Cotebat après la défection de la première entreprise. Ainsi l'architecte ne peut être tenu pour responsable du dépassement du prix résultant de l'absence de compétence de cette entreprise et du surcoût de son remplacement.
En revanche la responsabilité de la SARL [V] est engagée dans le dépassement des prix pour les paiements réalisés avec son visa à des fournisseurs et à des sous-traitants non déclarés pour un montant TTC de 89'276,64 €.
Certes, sur cette somme, Madame [W] a payé directement des factures, pour un montant de 29'255,64 € TTC sans recevoir l'accord préalable de l'architecte mais ce dernier a, par la suite, approuvé ces factures puisqu'il a établi postérieurement les certificats de paiement.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a condamné l'architecte à payer à Madame [W] la somme de 89'276,64 € TTC au titre du préjudice lié au dépassement de budget puisqu'il a sous-évalué le coût de la construction et a obligé le maître de l'ouvrage à engager des dépenses supplémentaires pour parvenir à l'achèvement des travaux.
- Sur la mise en cause de l'assureur dommages ouvrage :
Le premier juge a mis hors de cause l'assureur dommages ouvrage, la société Amstrust international underwriters, et aucune des parties ne demande en appel l'infirmation de cette disposition qui sera donc confirmée.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'encontre de la société SMA en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société Cotebat, en ce qu'il a rejeté les demandes au titre d'un préjudice moral, en ce qu'il a condamné la SARL [G] [V] in solidum avec [N][W] à payer des indemnités aux époux [F] et aux époux [J], en ce qu'il a condamné la SARL [G] [V] et la société MAF à garantir [N] [W] dans la proportion de 15 % , en ce qu'il a condamné la SARL [G] [V] et la société MAF in solidum avec la SMA à payer à [N] [W] la somme de 18'129,98 € en réparation du préjudice lié au retard de chantier et en ce qu'il a mis les dépens à la charge de la SARL [G] [V], de la société MAF et de la SMA.
Et statuant à nouveau sur les seuls chefs infirmés et y ajoutant,
Constate l'absence de réception des travaux entre [N] [W] et les constructeurs ainsi que l'absence de livraison contradictoire des immeubles entre [N] [W] et les époux [F] et [J].
Dit en conséquence que tant l'action de [N] [W] que celle des époux [F] et des époux [J] ont un fondement contractuel.
Met la société SMA hors de cause en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société Cotebat.
Dit que le préjudice moral des époux [F] ensemble et des époux [J] ensemble sera indemnisé par l'allocation de la somme de 8000 € chacun.
Déboute les époux [F] et les époux [J] de leur demande de dommages intérêts au titre d'un préjudice de jouissance complémentaire.
Déboute les époux [J] de leur demande au titre de la levée des réserves pour des sommes supplémentaires à celles déjà allouées pour les travaux de reprise et les prestations à achever.
Dit que la SARL [G] [V] et la société MAF ne peuvent être condamnées in solidum avec le maître de l'ouvrage et les autres constructeurs à payer aux époux [F] et aux époux [J] des dommages et intérêts en réparation de leurs préjudices.
Condamne [N] [W] à payer aux époux [F] et aux époux [J] 85 % des sommes qui leur ont été allouées au titre des préjudices résultant du défaut d'obtention du label THPE, de la suppression de la plate-forme pour les personnes à mobilité réduite, de leur préjudice de jouissance et du non achèvement de l'ensemble immobilier, au titre de leur préjudice moral et au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum la SARL [G] [V] et la société MAF à payer aux époux [F] et aux époux [J] 15 % des sommes qui leur ont été allouées à ces mêmes titres.
Déclare en conséquence sans objet l'appel en garantie de [N] [W] à l'encontre de la SARL [G] [V] et de la société MAF.
Condamne in solidum la SARL [G] [V] et la société MAF à payer à [N] [W] la somme de 2719,50 € au titre du préjudice lié au retard de chantier.
Condamne [N] [W] à payer aux époux [F] ensemble et aux époux [J] ensemble la somme de 4250 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en cause d'appel.
Condamne in solidum la SARL [G] [V] et la société MAF à payer aux époux [F] ensemble et aux époux [J] ensemble la somme de 750 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en cause d'appel.
Déboute les autres parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne [N] [W] aux dépens de première instance et d'appel relatifs à la mise en cause de la SMA.
Condamne au paiement des autres dépens de première instance et d'appel, y compris les frais de la procédure de référé et le coût taxé des deux expertises, [N] [W] dans la proportion de 85 % et la SARL [G] [V] ensemble avec la société MAF dans celle de 15 % et dit que ces dépens seront recouvrés par les avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
BD