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17/04/2019 | FRANCE | N°15/06418

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4ème a chambre sociale, 17 avril 2019, 15/06418


BA/VD



















































4ème A chambre sociale



ARRÊT DU 17 Avril 2019





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/06418 - N° Portalis DBVK-V-B67-MG5Y



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 JUILLET 2015 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER

N° RGF 14/00044



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APPELANTE :



SARL FACE

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Philippe GARCIA de la SELARL CAPSTAN PYTHEAS, avocat au barreau de MONTPELLIER - Représentant : M. [K] [C] (Gérant)





INTIMEE :



Madame [D] [N]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me Luc KIRKYACH...

BA/VD

4ème A chambre sociale

ARRÊT DU 17 Avril 2019

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/06418 - N° Portalis DBVK-V-B67-MG5Y

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 JUILLET 2015 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER

N° RGF 14/00044

APPELANTE :

SARL FACE

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Philippe GARCIA de la SELARL CAPSTAN PYTHEAS, avocat au barreau de MONTPELLIER - Représentant : M. [K] [C] (Gérant)

INTIMEE :

Madame [D] [N]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me Luc KIRKYACHARIAN de la SELAS ALTEO, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 FEVRIER 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Georges LEROUX, Président de chambre

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Mme Martine DARIES, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte ALARCON

ARRÊT :

- Contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Georges LEROUX, Président de chambre, et par Madame Brigitte ALARCON, Greffier.

*

**

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon contrat de travail du 12 octobre 2009, Mme [D] [N] a été engagée par la SARL Face à temps complet en qualité d'assistante comptable, niveau IV, coefficient hiérarchique 280.

La convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes du 9 décembre 1974 est applicable.

Mme [D] [N] a été placée en arrêt de travail à trois reprises :

- du 11 au 16/02/2011,

- du 19/03 au 8/04/2011, et a été déclarée apte à la reprise le 11/04/2011,

- du 12/04/2011 au 16/11/2013, et a été déclarée apte à la reprise le 18/11/2013.

Entre-temps, par courrier du 17 novembre 2011, Mme [D] [N] a fait part à son employeur de son mécontentement par rapport au non-respect de ses engagements en matière de formation et de paiement de primes ; la SARL Face a répondu par lettre du 21 septembre 2011 sur chacun des points.

Par lettre du 23 novembre 2013 remise en main propre le 25 novembre 2013, Mme [D] [N] a été convoquée à un entretien préalable fixé le 4 décembre 2013.

À compter du 25 novembre 2013, elle a été de nouveau placée en arrêt de travail.

Par lettre du 10 décembre 2013, Mme [D] [N] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse.

Le 13 janvier 2014, faisant valoir que son employeur lui devait un rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires, qu'elle avait fait l'objet d'une 'placardisation' et que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, Mme [D] [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier le 13 janvier 2014.

Par jugement du 24 juillet 2015, le conseil de prud'hommes a

- dit et jugé que le licenciement de Mme [D] [N] était sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SARL Face à payer à Mme [D] [N] la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [D] [N] du surplus de ses demandes,

- condamné la SARL Face à payer à Mme [D] [N] la somme de 950 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la SARL Face aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration du 25 août 2015, la SARL Face a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

La SARL Face demande à la Cour de

- constater l'acquisition de la prescription concernant le rappel d'heures supplémentaires sollicité ;

- constater l'absence de toute placardisation et mise à l'écart ;

- constater l'absence de tout élément permettant de justifier l'étendue des préjudices subis par Mme [N] tant au niveau de la relation de travail que de sa rupture ;

- dire et juger le licenciement de Mme [N] bien-fondé sur le fond et la forme ;

- infirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Montpellier ;

- débouter Mme [N] de l'ensemble de ses prétentions et demandes ;

- la condamner à lui payer la somme de 2.850 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la SARL Face expose pour l'essentiel que

- la demande au titre des heures supplémentaires se heurte à la prescription triennale, et en tout état de cause, la salariée n'étaye pas sa demande, d'autant qu'elle a modifié les paramètres de son ordinateur professionnel pour faire croire le contraire,

- Mme [D] [N] a repris le travail le 18 novembre 2013 et a été mise à pied à titre conservatoire le 25 novembre 2013, ce qui laisse peu de temps pour une 'placardisation' ou mise à l'écart, et en tout état de cause aucune preuve de cette allégation n'est rapportée,

- il lui a été demandé de restituer les clefs de l'entreprise au cours de la semaine du 19 au 22 novembre 2013 et non le jour de sa reprise, et ce en raison des nombreux manquements commis par elle en trois jours de travail et ayant entraîné sa convocation à un entretien préalable ainsi que sa mise à pied à titre conservatoire,

- les manquements de la salariée au cours des trois jours suivant la reprise de travail sont établis et justifiaient le licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Mme [D] [N] demande à la Cour de

- réformer la décision sur le préjudice spécifique lié à l'éviction professionnelle et lui allouer la somme de 15.000 € à ce titre ;

- confirmer la décision sur le principe du licenciement mais la réformer sur le montant et lui allouer la somme de 40.000 € pour réparer l'intégralité de son préjudice ;

- réformer la décision sur les heures supplémentaires et faire droit à sa demande de rappel de salaire à hauteur de 968,60 € outre 96,86 € de congés payés afférents ;

- condamner la SARL Face à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, Mme [D] [N] expose pour l'essentiel que :

- la SARL Face ne lui a pas payé les heures supplémentaires accomplies en 2010,

- elle a été mise à l'écart et, du fait du non-respect des engagements contractuels (formation, versement d'une prime variable et d'une prime de bilan) par la SARL Face alors qu'elle avait démissionné de son précédent emploi pour occuper ce poste et que ces engagements avaient été déterminants dans sa décision d'accepter ce poste, son état de santé s'est dégradé ; ce qui justifie la réparation d'un préjudice spécifique à ce titre,

- son licenciement était programmé dès sa reprise de travail le 18 novembre 2013 puisque son employeur lui a demandé dès le 19 novembre 2013, de restituer les clefs du site qu'elle détenait,

- son licenciement n'est pas justifié, les griefs allégués n'étant pas fondés.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la Cour se réfère aux conclusions écrites auxquelles les parties ont expressément déclaré se rapporter lors des débats.

MOTIFS

Sur la prescription de la demande en rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.

L'article L3245-1 du Code du travail applicable jusqu'au 17 juin 2013 prévoyait que la prescription de l'action en paiement du salaire se prescrivait par cinq ans.

Ce même article issu de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 dispose désormais que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Ces nouvelles dispositions s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la promulgation de la loi, le 17 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée totale prévue par la loi antérieure.

En l'espèce, Mme [D] [N] sollicite le paiement d'heures supplémentaires accomplies en 2010. Elle a saisi le conseil de prud'hommes le 13 janvier 2014. En conséquence, la prescription triennale s'applique et les demandes salariales relatives aux mois antérieurs à janvier 2011 sont prescrites.

Sur la violation des engagements contractuels par l'employeur et le préjudice spécifique professionnel.

1) Les primes.

Il ressort du contrat de travail du 12 octobre 2009 que la rémunération de Mme [D] [N] est composée d'une partie fixe (2.100 € par mois) et d'une partie variable composée de deux primes :

- une 'prime ponctuelle pour apport de nouveaux clients égale à 8% des honoraires HT annuel du client, cette prime sera payable par trimestre sur les honoraires encaissés',

- une 'prime de bilan en fonction des résultats du cabinet'.

Ces éléments avaient été précisés à Mme [D] [N] par e-mail du 7 août 2009 à la suite d'un entretien fixé à la suite de sa candidature spontanée.

Si, contrairement à ce qui est soutenu par la salariée, la première prime est clairement définie, il n'est ni démontré ni allégué que Mme [D] [N] aurait apporté de nouveaux clients à la SARL Face.

Quant à la seconde prime, il est constant qu'elle n'était pas précisément déterminée.

Le courrier de l'employeur daté du 21 septembre 2011, en réponse à la lettre du 17 septembre 2011 de Mme [D] [N], mentionne que la prime de bilan n'a été versée à aucun salarié en 2010 et en 2011, les résultats ne le permettant pas et que 'les bilans sont disponibles sur le site info greffe'.

Or, la SARL Face ne produit aucun élément permettant de connaître ses résultats.

Il y a lieu de fixer à 100 € les dommages et intérêts dus à Mme [D] [N] au titre de son préjudice résultant du manquement de l'employeur.

2) La formation.

Mme [D] [N] soutient ne pas avoir reçu de formation en 'social' alors que son employeur s'y était engagé au moment de son embauche.

Il résulte en effet de l'e-mail adressé par M. [K] [C] après l'entretien fixé à la suite de la candidature spontanée de Mme [D] [N] que son profil correspondait à celui recherché, qu'il était souhaitable que la personne occupant le poste puisse 'exercer une fonction de collaborateur comptable et aussi dans le domaine social' et qu'il s'avérait au vu des résultats de son test 'qu'une formation et aussi une adaptation au poste (était) à prévoir (encadrement par la responsable social du cabinet)'.

Le contrat de travail ne précise rien sur ce point.

Il est constant qu'entre octobre 2009 et février 2011, la salariée n'a pas bénéficié de la formation que l'employeur s'était engagé à lui faire suivre et qu'il a manqué à ses engagements pris avant la signature du contrat de travail.

En conséquence, il y a lieu de fixer à 200 € la somme due par la SARL Face à la salariée à titre de dommages et intérêts.

3) La mise à l'écart ou 'placardisation'.

Le fait que l'employeur n'ait pas déterminé le calcul de la prime de bilan et qu'il n'ait pas fait suivre la formation promise à la salariée ne suffit pas à établir que la salariée aurait été mise à l'écart. Il n'est d'ailleurs pas établi que Mme [D] [N] aurait dû accomplir des tâches ne correspondant pas à sa qualification professionnelle avant ses arrêts de travail et lors de la semaine du 18 novembre 2013.

Ce préjudice allégué n'est pas caractérisé.

Ainsi, il convient de condamner l'employeur à payer la somme totale de 300 € à la salariée au titre du 'préjudice spécifique professionnel' conséquence des manquements de l'employeur au titre de la prime de bilan et de la formation.

Sur le licenciement pour cause réelle et sérieuse.

L'article L 1232-1 du Code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à une cause réelle et sérieuse.

L'article L 1235-1 du même Code prévoit que le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 10 décembre 2013, qui fixe les limites du litige, est rédigée comme suit :

'A la suite de notre entretien du 04 décembre 2013, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier en raison de :

o votre comportement désinvolte et irrespectueux à l'égard de votre employeur et de l'ensemble du personnel salarié auxquels vous avez porté des accusations et des propos irrespectueux,

' Accusation de « bidouille » de la part de votre employeur et collègues sur votre ordinateur pendant votre absence, laissant entendre qu'ils avaient supprimé certains de vos fichiers informatiques.

A cet effet, M. [W] [L], Collaborateur Comptable ayant utilisé l'ordinateur portable mis à votre disposition, a attesté par écrit (copie vous a été remise) avoir emprunté les 20 et 21 novembre 2013 à compter de 18 heures au lendemain 9 heures afin d'effectuer à son domicile des travaux comptables.

' Mise en doute des affirmations de votre employeur concernant la non remise des documents de travail relatifs à la collecte d'informations fiscales qu'il vous avait demandée.

' Accusation d'acheter les collaborateurs afin d'agir contre votre personne et je vous cite : « vous êtes payés pour aller contre moi ».

' Propos irrespectueux, votre employeur vous a demandé de stationner votre véhicule hors des parkings réservés au Clients, conformément aux règles imposées par le bailleur. Ce que le propriétaire a renouvelé lors d'une réunion avec l'ensemble des salariés.

Mécontente et contrariée par cette demande vous avez répondu de manière agressive «Je Fais comment moi ' »

Nous vous avons répondu que vous deviez prendre vos dispositions comme l'ensemble des salariés du cabinet.

A quoi vous avez répondu : « vous savez ce que vous avez à faire »

' Attitude désinvolte et provocatrice : au lieu de travailler sur les notes fiscales demandées, vous avez, et ce pendant toute une après-midi, consulté et lu les journaux mis à la disposition de la clientèle dans le hall d'entrée :

- le 7 Officiel

- le Magazine Challenge

- le journal l'Hérault Juridique

Les explications recueillies lors votre entretien n'ont pas permis de modifier cette appréciation.

Ces faits causent du désordre au sein de l'entreprise et nuisent à la sérénité et l'ambiance d'équipe, celle que nous entretenons avec l'ensemble des collaborateurs.

Votre comportement est inadmissible et insupportable, vous faites preuve de manque de motivation et d'intégration et vous ne recherchez que le conflit.

Votre préavis que nous vous dispensons d'effectuer débutera le 13 décembre 2013 et se terminera le 12 janvier 2014.

Nous vous informons que vous avez acquis 33 heures au titre du droit individuel à formation. Vous pouvez demander pendant votre préavis, à utiliser ces heures pour bénéficier notamment d'une action de formation, de bilan de compétences ou de validation des acquis de l'expérience.

Nous vous rappelons qu'à compter de la rupture de votre contrat, vous pouvez conserver le bénéfice du régime de prévoyance en vigueur au sein de notre entreprise

Le jour de votre départ de l'entreprise, vous pourrez vous présenter au sein de l'entreprise pour retirer votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi.

(...)'.

La SARL Face reproche à Mme [D] [N] cinq griefs :

- 1) d'avoir mis en doute les propos du responsable relatifs à la non-remise de documents,

- 2) de l'avoir accusé d'avoir fait disparaître son travail sur son ordinateur,

- 3) d'avoir dit à d'autres salariés qu'ils étaient payés pour être contre elle,

- 4) d'avoir tenu des propos agressifs et désobligeants après une remarque du gérant sur l'interdiction de se garer sur le parking,

- 5) lu des magasines pendant tout un après-midi au lieu de travailler.

Pour établir la matérialité des propos tenus par Mme [D] [N], la SARL Face verse aux débats trois attestations régulières en la forme de salariés :

- Mme [O] [A], assistante comptable dont le poste de travail est situé dans le même bureau que la salariée du mardi 19 novembre au vendredi 22 novembre 2013, indique qu'alors que le gérant avait demandé à cette dernière d'effectuer une étude pour un client sur la TVA intra-communautaire, elle a constaté 'la nonchalance de Mme [N] dans l'exécution de son travail. Elle feuilletait des magasines mis à la disposition des clients au lieu de se pencher sur la documentation fiscale, comptable et sociale nécessaire à notre travail, puis se rapprochait de nous pour nous demander le fonctionnement de la TVA intra-communautaire'.

Elle ajoute : 'Le jeudi, Monsieur [C] est venu dans notre bureau lui demander où en était sa synthèse. Madame [N] l'a accusé d'avoir 'trafiqué son ordinateur afin d'effacer son travail' et lui a rétorqué de manière provocatrice à plusieurs reprises 'de toute façon vous savez ce qu'il vous reste à faire'. Monsieur [C] est ensuite sorti du bureau. Madame [N] a recherché notre soutient par rapport à son attitude, nous ne sommes pas allés dans son sens. Elle nous a alors accusé 'd'être payé pour être contre elle'. Il y a eu là encore des propos irrespectueux, cette fois ci envers nous auxquels [T] a répondu que 'nous étions payés pour effectuer le travail de comptabilité et rien d'autre' ',

- M. [T] [G], comptable dont le poste de travail est situé dans le même bureau, confirme avoir, du 20 au 22 novembre 2013, 'assisté à la provocation et à l'agressivité de madame [N] envers monsieur [C] sur les faits suivants :

. Son désaccord sur le stationnement des véhicules

. Son désaccord sur le travail à réaliser, madame [N] a accusé monsieur [C] d'avoir 'trafiqué son ordinateur et effacé son travail' (celui-ci avait été emprunté la veille par un collaborateur monsieur [L] [W]), elle a aussi ajouté à plusieurs reprises 'vous savez ce qu'il vous reste à faire !'

. Suite à cela elle m'a dit 'vous êtes tous payés pour être contre moi'. Auquel j'ai répondu ' je suis exclusivement payé pour mon travail de collaborateur',

- M. [X] [J], comptable, dont le poste de travail est situé dans un autre bureau, témoigne notamment de ce que pendant ses quatre jours de présence, Mme [D] [N] ne faisait pas le tour des bureaux pour saluer l'équipe à son arrivée et à son départ, contrairement à l'habitude des autres salariés.

Il résulte de ces témoignages que Mme [D] [N] a tenu des propos irrespectueux à l'encontre de son supérieur hiérarchique au cours de sa semaine de reprise du travail, mettant en cause son honnêteté en présence de deux autres salariés, qu'elle a ensuite tenu des propos désobligeants à l'égard des deux salariés qui avaient manifesté leur désapprobation quant à son attitude.

Certes, ces témoignages émanent de salariés de la SARL Face, non connus de Mme [D] [N] en raison de sa longue absence de l'entreprise pour maladie, mais contrairement à ce que soutient l'intimée, ce seul fait ne suffit pas à écarter ces pièces des débats du moment que ces personnes ont été témoins directs de ses propos et de son comportement.

Or, ces attestations sont circonstanciées, ne se contredisent pas et corroborent la majorité des griefs articulés par l'employeur dans sa lettre de licenciement.

La salariée conteste l'intégralité des faits contenus dans la lettre de licenciement mais son dossier ne contient aucune pièce susceptible de contredire ces éléments objectifs.

Il est ainsi justifié par la SARL Face que, dès sa reprise du travail après son arrêt maladie, Mme [D] [N] a adopté un comportement contraire à l'intérêt de l'entreprise en tenant des propos irrespectueux voire accusateurs à l'encontre de son supérieur hiérarchique et en accusant deux collègues de travail d'être payés pour être 'contre elle', propos qui ne pouvaient que détériorer rapidement l'ambiance générale de travail, d'autant que les deux salariés travaillaient dans le même bureau qu'elle.

Mme [D] [N] indique qu'il lui a été demandé de restituer les clefs du bureau le mardi 19 novembre 2013. Elle en déduit que son employeur l'a remplacée de manière anticipée.

La SARL Face rétorque en premier lieu que les clefs lui ont été demandées au cours de la semaine du 19 novembre 2013, du fait du comportement inadapté de Mme [D] [N] envers son employeur et les autres salariés, lequel a motivé la convocation à l'entretien préalable avec mise à pied conservatoire datée du samedi 23 novembre 2013, notifiée le lundi 25 novembre 2013.

Il est constant qu'en réalité, Mme [D] [N] a remis les clefs à la SARL Face le jour de l'entretien préalable qui s'est tenu le 4 décembre 2013 ; ce qui démontre que l'employeur ne lui a pas interdit l'accès à son lieu de travail avant cette date.

La SARL Face indique en second lieu que Mme [D] [N] n'a pas été remplacée de manière anticipée, que Mme [O] [A] a été embauchée en tant qu'assistante comptable le 7 octobre 2013 en remplacement de Mme [Z] [Y] qui a assuré pendant un mois le relais avec la nouvelle salariée et que M. [V] [R] a été engagé dans les même fonctions le 15 octobre 2013 en remplacement de M. [W] [L] qui a, lui aussi, assuré pendant un peu plus d'un mois le relais avec son remplaçant. Elle produit la copie du registre d'entrée et de sortie du personnel qui confirme ces éléments.

Enfin, le seul fait que la prime de bilan n'ait pas été déterminée par l'employeur ne peut justifier le comportement de la salariée.

Il s'ensuit que le licenciement fait suite au comportement de Mme [D] [N], inadapté et contraire aux intérêts de l'entreprise, constitutif d'une cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur les demandes accessoires.

La SARL Face sera tenue aux entiers dépens.

En revanche, il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS ;

La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe ;

DIT que l'action en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférente est prescrite ;

CONFIRME le jugement du 24 juillet 2015 du conseil de prud'hommes en ce qu'il a rejeté la demande en réparation du préjudice subi du fait de la 'placardisation' ou mise à l'écart de Mme [D] [N] ;

Le RÉFORME pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la SARL Face à payer à Mme [D] [N] la somme globale de 300 € à titre de dommages et intérêts du fait de l'absence de détermination contractuelle de la prime de bilan et de l'absence de formation;

DIT que le licenciement de Mme [D] [N] par la SARL Face est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

REJETTE les demandes de Mme [D] [N] au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile;

CONDAMNE la SARL Face aux entiers dépens de l'instance ;

LA GREFFIERE,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4ème a chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/06418
Date de la décision : 17/04/2019

Références :

Cour d'appel de Montpellier 04, arrêt n°15/06418 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-17;15.06418 ?
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