Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRET DU 22 MAI 2020
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04764 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJZG
Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 AOUT 2017
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
N° RG 15/02889
APPELANTE :
SA BANQUE POPULAIRE DU SUD LA SA BANQUE POPULAIRE DU SUD
Société Anonyme Coopérative de Banque Populaire à capital variable, régie par les articles L512-2 et suivants du Code Monétaire et Financier et l'ensemble des textes relatifs aux Banques Populaires et aux établissements de crédits, immatriculée au RCS de PERPIGNAN sous le Numéro B 554 200 808, dont le siège social est à [Localité 1], et pour elle son représentant légal, domicilié es-qualité audit siège social
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Marjorie AGIER substituant Me Harald KNOEPFFLER de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat postulant et plaidant, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
INTIMEE :
S.C.I. EMALINE
prise en la personne de son gérant en exercice domicilié es-qualité au siège social sis
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat postulant - présent, avocat au barreau de MONTPELLIER et par Me Jean-François CECCALDI, avocat au barreau d'Avignon, avocat plaidant non présent
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 MARS 2020,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Frédéric DENJEAN, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre
Monsieur Frédéric DENJEAN, Conseiller
Madame Myriam BOUZAT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Henriane MILOT
L'affaire a été mise en délibéré au 22 avril 2020. A ladite date, le délibéré a été prorogé au 22 mai 2020.
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, et par Madame [I] [T].
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTION DES PARTIES
Par acte notarié en date du 5 août 2011 la BANQUE POPULAIRE DU SUD a consenti à la SCI EMALINE représentée par son gérant monsieur [O] [V], un prêt d'équipement destiné au financement de travaux d'un immeuble situé à SAINT ESTEVE, d'un montant de 213.000 € remboursable sur 180 mois au taux nominal de 5,05 % et au taux effectif global de 5,133181 % l'an ; et au titre des clauses particulières et garanties, il a été stipulé la caution personnelle et solidaire de monsieur [O] [V] et de madame [J] [U] [V] à hauteur de la somme de 276.900 €; avec la souscription au profit de la banque d'une assurance décès invalidité à hauteur de 100 % sur la tête de chaque caution ;
Par assignation du 15 juillet 2015 la SCI EMALINE a sollicité la nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel en application des articles 1907 du code civil et L 313-2 du code de la consommation, avec fixation du taux applicable à hauteur du taux d'intérêt légal, remboursement des intérêts indûment perçus, et notification d'un nouveau tableau d'amortissement ;
Par jugement en date du 17 août 2017 le tribunal de grande instance de PERPIGNAN a prononcé la nullité de la stitpulation d'intérêt conventionnel, et substitué le taux d'intérêt légal au jour du jugement ; a condamné la banque à restituer les intérêts indûment perçus ; a dit que la banque devra adresser à la SCI EMALINE un nouveau tableau d'amortissement établi sur la base du taux d'intérêt légal ; et l'a condamnée aux dépens ; ainsi qu'à payer la somme de 1.200 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
En date du 30 août 2017 la BANQUE POPULAIRE DU SUD a interjeté appel ;
Vu les conclusions en date du 12 avril 2018 de la BANQUE POPULAIRE DU SUD, auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif, aux fins de réformer en totalité le jugement ; de débouter la SCI EMALINE de l'intégralité de ses demandes ; et de la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel ; ainsi qu'au paiement de la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile;
Vu les conclusions en date du 22 janvier 2018 de la SCI EMALINE, auxquelles il est expréssément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif, aux fins de confirmer la décision entreprise ; de juger recevable l'action de l'emprunteur ; outre de condamner le prêteur à payer la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ; ainsi que les entiers dépens ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 26 décembre 2019 ;
SUR CE
SUR L'ACTION EN NULLITE
L'article L 312-33 du code de la consommation applicable aux faits, indique que le prêteur qui ne respecte pas l'une des obligations prévues aux articles L312-7 et L312-8, à l'article L312-14, deuxième alinéa, ou à l'article L 312-26 pourra être déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge ;
Et il s'évince des dispositions de cet article dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 mars 2014, que la seule sanction civile possible de l'inobservation de ces dispositions est la perte, en totalité ou partie, du droit aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge ; cette déchéance étant une sanction civile dont la loi laisse à la discrétion du juge tant l'application que la détermination ;
Alors que ces dispositions sont d'ordre public, l'erreur entachant le taux effectif global d'un prêt immobilier peut être donc sanctionnée exclusivement par la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels dans la proportion laissée à l'appréciation du juge, sans qu'il soit possible, en cette matière, de fonder utilement une action de nullité du TEG sur le fondement des dispositions de l'article 1907 du code civil ;
En effet, en vertu du principe selon lequel les lois spéciales dérogent aux lois générales, et dés lors que la nullité automatique est une sanction plus sévère que la déchéance (laquelle peut être totale mais aussi partielle), les dispositions de droit spécial du code de la consommation seraient vidées de leur sens si l'on pouvait les contourner pour se fonder sur les dispositions générales du code civil ;
Dés lors le premier juge a visé à tort l'article 1907 du Code civil ;
SUR LA DEMANDE DE DECHEANCE DES INTERETS CONVENTIONNELS
L'article L 313-1 du code de la consommation dispose que, dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels';
Et l'article R 313-1 du même code précise que le résultat du calcul est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale';
En l'espèce, comme l'a justement mentionné le premier juge, les frais d'assurance doivent être pris en compte pour le calcul du TEG dés lors que la souscription de l'assurance conditionne l'octroi du prêt, puisqu'il est précisé que la cessation du paiement des primes ou la résiliation du contrat entrainera l'exigibilité du prêt ; tout en ajoutant que la SCI EMALINE qui soutient que le TEG réel est de 5,594 % ne s'explique pas clairement sur ses modalités ;
Cependant, le premier juge a affirmé à tort que force est de constater que la Banque Populaire, qui ne présente pas elle-même d'explication, ne conteste pas ce taux ; tandis que, non seulement la SCI EMALINE ne justifie nullement d'une prétendue erreur de plus d'une décimale du TEG réel, mais en sus ne rapporte aucun élément probant établissant son allégation ;
En effet, elle produit en pièce 3 de ses conclusions une simulation du coût de l'assurance selon laquelle son coût total ressort à 22.678,19 € ; mais ce qui est manifestement faux puisque la pièce produite à l'entête ALLIANZ mentionne une liste des prêts avec un PRET 1 et un PRET 2, alors que le présent prêt est unique ; les emprunteurs n'apportant donc aucun élément permettant d'établir d'une façon certaine le montant des frais réellement réglés ;
Ainsi il n'apparaît nullement établi que l'erreur engendrée par l'omission des frais d'assurance, à la supposer établie ce que conteste la banque, est supérieure à la décimale prescrite par l'article ci-dessus rappelé';
En conséquence le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions;
L'article 696 du code de procédure civile énonce que la partie perdante est condamnée aux dépens ; il conviendra donc de condamner la SCI EMALINE qui succombe aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Selon l'article 700 du même code le Juge condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, et en l'espèce il n'apparait pas inéquitable de dire n'y avoir lieu à condamner sur ce fondement ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR statuant contradictoirement ;
Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau ;
Déboute la SCI EMALINE de l'intégralité de ses demandes ;
Condamne la SCI EMALINE aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Dit n'y avoir lieu à condamner sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
LE GREFFIERLE PRESIDENT