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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 10 MAI 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 19/03856 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OF37
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 15 MAI 2019
TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER
N° RG 2017013582
APPELANT :
Monsieur [W] [F]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représenté par Me Emily APOLLIS de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Xavier VAHRAMIAN de la SELAS CMS FRANCIS LEFEBVRE LYON AVOCATS, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant
INTIMES :
Monsieur [H] [I]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substitué par Me Jean Baptiste GINIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Maître [A] [U] en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARLU OIKOS PATRIMOINE
[Adresse 5]
[Adresse 1]
Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substitué par Me Jean Baptiste GINIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Maître [L] [S] agissant en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL OIKOS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substitué par Me Jean Baptiste GINIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
SARL OIKOS PATRIMOINE représentée par son liquidateur, Maître [A] [U], sis [Adresse 5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substitué par Me Jean Baptiste GINIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
SARL OIKOS représentée par son liquidateur, Maître [L] [S], sis [Adresse 1]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substitué par Me Jean Baptiste GINIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Ordonnance de clôture du 22 Février 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 MARS 2022, en audience publique, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre, conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Jean-Luc PROUZAT, président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, conseiller
Mme Marianne ROCHETTE, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Hélène ALBESA
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, greffier.
FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :
La SARL Oikos, ayant pour objet l'exercice de la profession d'agent immobilier et le conseil et/ou le courtage d'assurances et de produits financiers, a été créée selon statuts établis le 21 mai 2002 par [W] [F], qui en était le gérant et l'associé unique détenteur des 100 parts sociales.
Par acte sous seing privé du 30 avril 2013, M. [F] a cédé à une SARL holding Oikos représentée par son gérant, [H] [I], 98 des 100 parts de la société Oikos au prix de 441 000 euros payable au moyen d'un crédit vendeur sur une durée de huit ans au taux de 3,5% ; par acte du même jour, M. [F] a cédé à M. [I] une part sociale de la société Oikos au prix de 4500 euros payable comptant ; une garantie d'actif et de passif a été stipulée dans ces actes relativement à tout amoindrissement ou diminution de la valeur de l'actif ou de tout accroissement du passif social ayant une origine ou une cause antérieure aux actes de cession et résultant soit d'un acte, d'une omission, d'un fait quelconque accompli, réalisé ou survenu en violation ou en contradiction avec les déclarations qui précèdent, soit d'une réclamation, revendication, obligation ou évaluation à l'encontre de la société n'ayant pas fait l'objet d'une provision dans l'arrêté de comptes à la date de ce jour, soit des comptes à établir postérieurement à la cession, de répartition au prorata entre vendeur et acquéreur, notamment pour les taxes, impôts, factures, droits, sans que cette liste soit limitative ; M. [I] est devenu gérant de la société Oikos à cette même date du 30 avril 2013.
Par acte sous seing privé du 13 novembre 2014, M. [F] a cédé à la société holding Oikos l'unique part sociale, dont il était resté détenteur, au prix de 4500 euros payable comptant ; la société holding Oikos a ensuite pris la dénomination de Oikos patrimoine.
Entre temps, par actes des 23 mai et 30 juin 2011, M. et Mme [P] et la société Bisinvest, qui avaient acquis en 2008 d'une société [K], dans le cadre d'une opération de défiscalisation propre aux loueurs en meublés professionnels, et par l'intermédiaire de la société Oikos, divers appartements dépendant d'une résidence de tourisme « Appart'hôtel Victoria Garden » situés à [Localité 6] exploités en vertu d'un bail commercial par une société Madéo, ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Montpellier leur vendeur, la caisse régionale de Crédit Agricole mutuel du Languedoc auprès de laquelle ils avaient souscrit un prêt destiné à financer l'opération, ainsi que la société Oikos, en annulation de la vente et du prêt ; ils reprochaient notamment à la société [K] et à la société Oikos de les avoir trompés en leur dissimulant les difficultés financières de la société Madéo, laquelle avait fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, le 1er juillet 2009, avant d'être placée en liquidation judiciaire le 18 mai 2011 ; par exploit du 11 juin 2012, les demandeurs ont également mis en cause devant le tribunal le liquidateur judiciaire de la société [K], après avoir déclaré à la procédure collective une créance de restitution du prix et des frais inhérents à la vente.
Infirmant le jugement du 25 mars 2014, qui avait débouté M. et Mme [P] et la société Bisinvest de l'ensemble de leurs demandes, la cour d'appel de Montpellier (1ère chambre A) a notamment, par un arrêt du 8 juin 2017, dit que la société [K] et son mandataire, la société Oikos, ont commis un dol ayant eu pour effet de vicier leur consentement, annulé en conséquence l'acte de vente sous seing privé du 29 janvier 2008 et l'acte de vente authentique du 30 septembre 2008, fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société [K] la créance de restitution du prix de la société Bisinvest, soit 540 000 euros outre 38 000 euros de frais, ordonné à la société Bisinvest de restituer les immeubles dès l'encaissement de la créance de restitution du prix, dit que la société Oikos a engagé sa responsabilité délictuelle envers la société Bisinvest, condamné la société Oikos à payer à celle-ci la créance de restitution du prix et des accessoires en cas d'insolvabilité de la société [K], annulé le contrat de prêt immobilier souscrit auprès du Crédit Agricole, condamné la société Bisinvest à restituer à la banque le montant de l'emprunt reçu en capital, soit 650 000 euros après déduction des règlements effectués, annulé la convention d'ingénierie signée avec la société Oikos le 2 février 2008, condamné la société Oikos à restituer à la société Bisinvest la somme de 71 760 euros correspondant aux honoraires versés et à payer la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires, condamné la société Oikos à rembourser à la société [K] la somme de 20 000 euros perçue à titre de commission pour la vente annulée et condamné in solidum la société [K] et la société Oikos aux dépens, ainsi qu'à payer à M. et Mme [P] et la société Bisinvest la somme de 5000 euros et au Crédit Agricole la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Reprochant à M. [F] d'avoir dissimulé cette procédure lors des cessions de parts intervenues en 2013 et 2014, se livrant ainsi à une réticence dolosive, et d'avoir, comme gérant de la société Oikos, commis une faute de gestion, M. [I], la société Oikos et la société Oikos patrimoine l'ont fait assigner, par exploit du 18 août 2017, devant le tribunal de commerce de Montpellier en annulation des cessions de parts et indemnisation de leurs préjudices.
La société Oikos a fait l'objet, sur la déclaration de cessation de paiements de son dirigeant, d'une liquidation judiciaire ouverte à son égard par jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 4 septembre 2017 ; ultérieurement, par un jugement du 28 mai 2018, le même tribunal a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Oikos patrimoine ; M. [S] et M. [U], désignés comme liquidateurs de ces deux sociétés, sont intervenus à l'instance.
Le tribunal, par jugement du 15 mai 2019, a notamment :
- dit les requérants, en ceux compris la société Oikos et la société Oikos patrimoine, recevables et bien fondés en leur action et en leurs demandes,
- dit l'action sociale de la société Oikos non prescrite,
- prononcé la mise en 'uvre de la garantie de passif,
- condamné M. [F] à payer à M. [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos, la somme de 694 760 euros outre les intérêts, anatocisme et la somme de 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens au titre des condamnations dont la société Oikos a fait l'objet dans l'arrêt du 8 juin 2017,
- débouté M. [S] ès qualités, M. [I] et M. [U] ès qualités de toutes leurs demandes au titre de préjudices,
- prononcé la déchéance du terme du crédit vendeur consenti à la société Oikos patrimoine,
- dit que M. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos patrimoine, doit payer à M. [F] la somme de 226 703,17 euros au titre du prêt restant dû,
- fixé à la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la société Oikos patrimoine la créance de M. [F] pour la somme totale de 226 703,17 euros, dont 68 555,50 euros de créance échue,
- rejeté la demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral de M. [F] à l'encontre de M. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos patrimoine, et de M. [I],
- laissé à la charge des parties les frais non compris dans les dépens qu'elles ont engagés,
- partagé par quatre le paiement des dépens entre les parties.
M. [F] a régulièrement, le 4 juin 2019, relevé appel de ce jugement en vue de sa réformation.
Par arrêt du 14 décembre 2021 auquel il convient de se reporter, la cour a :
- réformé le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 15 mai 2019 en ce qu'il prononce la mise en 'uvre de la garantie de passif et condamne sur ce fondement M. [F] à payer à M. [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos (en réalité M. [U], liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Oikos patrimoine) la somme de 694 760 euros outre intérêts capitalisés et la somme de 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, au titre des condamnations découlant de l'arrêt rendu le 8 juin 2017, et statuant à nouveau de ces chefs,
- rejeté les demandes indemnitaires de M. [U], pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Oikos patrimoine, fondées sur la garantie de passif prévue dans l'acte de cession du 30 avril 2013,
- confirmé, par ailleurs, le jugement entrepris en ce qu'il déboute M. [I] et M. [U] ès qualités de leurs demandes fondées sur le dol et visant à l'annulation des actes de cession en date des 30 avril 2013 et 13 novembre 2014, à la restitution des sommes versées en paiement des prix convenus, au remboursement des sommes payées en exécution du crédit vendeur résultant de l'acte de cession conclu entre M. [I] et la société holding Oikos devenue Oikos patrimoine et au paiement de dommages et intérêts compensatoires des préjudices, notamment financiers, allégués par la société Oikos patrimoine et M. [I],
- confirmé également le jugement entrepris en ce qu'il dit, après avoir prononcé la déchéance du terme du crédit vendeur consenti à la société Oikos patrimoine, que M. [U], en sa qualité de liquidateur de la société Oikos patrimoine, doit payer à M. [F] la somme de 226 703,17 euros au titre du prêt restant dû et fixé la créance de ce dernier au passif de la procédure collective pour la somme de 226 703,17 euros, dont 68 555,50 euros de créance échue,
- avant de statuer sur le surplus des dispositions du jugement, relevé d'office le moyen tiré du non-cumul des actions en responsabilité fondées sur les articles L. 223-22 et L. 651-2 du code de commerce,
- ordonné la réouverture des débats à l'audience du mardi 1er mars 2022 à 14 heures afin de permettre aux parties de présenter leurs explications sur le moyen ainsi relevé d'office et les conséquences à en tirer,
- dit que la clôture de l'instruction interviendra sept jours calendaires avant l'audience,
- sursis à statuer sur le surplus des demandes formulées notamment par M. [F] dans le cadre de son appel incident en paiement de dommages et intérêts pour préjudice moral et procédure abusive, ainsi que sur le sort des dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [F], dont les dernières conclusions ont été déposées le 21 février 2022 via le RPVA, demande à la cour, s'agissant de l'action sociale de M. [S] ès qualités de liquidateur de la société Oikos, de :
- dire et juger que la cour ne peut pas se saisir d'office en application de l'article L. 651-2 du code de commerce et qu'elle ne peut pas substituer le fondement et faire application de l'article L. 651-2,
- dire et juger irrecevable l'action en insuffisance d'actif au titre l'article L. 651-2 du code de commerce, en ce que l'action a été initiée par assignation du 18 août 2017, antérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Oikos, alors que cette dernier était encore in bonis,
- dire et juger prescrite l'action en insuffisance d'actif au titre l'article L. 651-2 du code de commerce, pour n'avoir pas été exercée par M. [S], ès qualités de liquidateur, en tant qu'organe de la procédure collective de la société Oikos,
- rejeter, en tout état de cause, toute demande fondée sur l'article L. 651-2, faute de preuve de l'existence d'une insuffisance d'actif, et faute de preuve de l'existence d'une faute commise par lui,
- dire et juger irrecevable l'action sociale au titre de l'article L. 222-23 du code de commerce poursuivie par M. [S] ès qualités de liquidateur de la société Oikos, du fait du principe du non-cumul des actions en responsabilité fondées sur le droit commun des sociétés et sur l'article L. 651-2 du code de commerce,
- dire et juger que l'action sociale de la société Oikos à son encontre est prescrite.
Il demande, par ailleurs, de :
- condamner solidairement M. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos patrimoine, et M. [I] à lui régler la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral subi,
- condamner solidairement M. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos patrimoine, et M. [I] à lui régler la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamner solidairement M. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos patrimoine, et M. [I] à lui régler la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- fixer au passif des sociétés Oikos et Oikos patrimoine les créances suivantes à son bénéfice :
' 50 000 euros au titre du préjudice moral subi,
' 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
' 20 000 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement les mêmes aux entiers dépens,
- ordonner la compensation légale entre toutes sommes qui seraient mises à sa charge avec toutes sommes lui étant dues.
M. [I], la société Oikos patrimoine, M. [U], liquidateur à la liquidation judiciaire de cette société, la société Oikos et son liquidateur, M. [S], dans les conclusions qu'ils ont déposées le 18 février 2022 par le RPVA, sollicitent de voir :
'constater que le moyen relevé d'office par la cour, tiré du non-cumul des actions en responsabilité fondées sur les articles L. 223-22 et L. 651-2 du code de commerce, exclut la mise en 'uvre de l'action pour insuffisance d'actif fondée sur l'article L. 651-2,
'dire et juger que l'action en responsabilité fondée sur l'article L. 223-2 est recevable,
'débouter l'appelant de sa demande tendant à voir sa responsabilité limitée à certains postes seulement de condamnation de l'arrêt « [P] »,
'condamner M. [F] à réparer les préjudices en découlant pour la société Oikos représentée par son liquidateur, M. [S], selon détail et décomposition exposés en suivant :
' au titre des condamnations pécuniaires prononcées par l'arrêt « [P] », la somme en principal de 694 760 euros, outre les intérêts et anatocisme, ainsi que la somme de 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,
' au titre de la perte d'activité, sur la perte de valeur de son portefeuille de clientèle, la somme de 239 999 euros, montant actualisé en l'état de la cession du portefeuille de clientèle par le mandataire liquidateur en décembre 2017, (')
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré comme non prescrite l'action sociale de la société Oikos représentée par M. [S], ès qualités de mandataire liquidateur, (')
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par M. [F] à l'encontre de Monsieur [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Oikos et de Monsieur [I], (...)
- en tout état de cause, rejeter la demande indemnitaire aussi déraisonnable qu'infondée présentée par l'appelant sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner au paiement de la somme de 5000 euros à chacun des trois intimés et appelants incidents, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 22 février 2022.
MOTIFS de la DECISION :
Pour réclamer le paiement des sommes de 702 760 euros (694 760 euros + 8000 euros) au titre des condamnations pécuniaires prononcées aux termes de l'arrêt du 6 juin 2017 et 239 999 euros au titre de la perte de valeur du portefeuille de clientèle de la société Oikos, M. [S] ès qualités fonde principalement son action à l'encontre de M. [F], ancien gérant de la société, sur l'article L. 223-22 du code de commerce selon lequel les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.
Il est ainsi soutenu que la dissimulation dolosive des difficultés financières de la société [K] à M. et Mme [P] lors de l'acquisition par ces derniers de divers biens immobiliers, dans le cadre de l'opération de défiscalisation projetée, est directement imputable à M. [F] et constitue une faute de gestion de nature à engager la responsabilité de celui-ci à l'égard de la société Oikos, dont il était alors le gérant.
Il est cependant de principe qu'après l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire d'une SARL, une action engagée sur le fondement de l'article L. 223-22 du code de commerce ne peut être poursuivie par le liquidateur qu'en l'absence d'une insuffisance d'actif ; la sanction pécuniaire spécifique aux procédures collectives et découlant de l'application de l'article L. 651-2 du code de commerce exclut toute action concurrente, de la part du liquidateur, agissant ut singuli.
En relevant d'office le moyen tiré du non-cumul des actions en responsabilité fondées sur les articles L. 223-22 et L. 651-2 du code de commerce, la cour ne s'est pas saisie d'office en vue du prononcé d'une condamnation à l'encontre de M. [F] sur le fondement du second de ces textes, mais a seulement invité M. [S] ès qualités à se déterminer sur le fondement juridique de son action tenant la règle du non-cumul ; il convient également de rappeler qu'à l'origine, c'est la société Oikos qui a assigné M. [F] en responsabilité pour faute de gestion sur le fondement de l'article L. 223-22 et qu'à la suite de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de cette société, M. [S] est intervenu volontairement à l'instance et conclu devant la cour en sa double qualité de représentant de la société Oikos et de liquidateur judiciaire ; si l'action de l'article L. 651-2 est une action attitrée qui, en vertu de l'article L. 651-3, ne peut être exercée que par le liquidateur ou le ministère public, il ne peut être soutenu qu'en l'espèce, M. [S] ne serait pas recevable à l'exercer, alors qu'il figure à la procédure, non seulement comme représentant de la société, mais également comme organe de la procédure collective.
Il importe peu que la juridiction ayant statué en première instance soit le tribunal de commerce dans sa composition classique (sic) de règlement des différends relatifs à une société commerciale, et non le tribunal de la procédure collective et si aucun rapport sur la situation patrimoniale du dirigeant n'a été établi en application de l'article L. 651-4, il ne peut en être tiré aucune conséquence sur le plan de la nullité d'une éventuelle condamnation, ce texte offrant en effet au président du tribunal une simple faculté pour désigner un juge-commissaire ou un membre de la juridiction en vue d'obtenir la communication de tout document ou information sur la situation patrimoniale du dirigeant.
Le principe a donc été rappelé selon lequel l'action doit obligatoirement être poursuivie sur le fondement de l'article L. 651-2 en cas d'insuffisance d'actif, même si elle a été introduite initialement sur le fondement du droit des sociétés ; il est évident qu'en ce cas, la procédure doit être communiquée au ministère public en application de l'article 425 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions, déposées après la réouverture des débats prescrite aux termes de l'arrêt du 14 décembre 2021, M. [S] maintient que l'action en responsabilité, qu'il forme à l'encontre de M. [F], en sa qualité de représentant de la société Oikos est bien l'action sociale de l'article L. 223-22 du code de commerce ; il lui appartient toutefois, pour poursuivre l'action sur ce fondement, de prouver l'absence d'une insuffisance d'actif dans le cadre des opérations de liquidation de la société Oikos.
Or, M. [S] ès qualités se borne à indiquer, en page 76 de ses conclusions, qu'en l'espèce, en l'état du dossier, il n'est produit aucune pièce de nature à démontrer une quelconque insuffisance d'actif dans le cadre de la procédure collective d'Oikos (sic) ; ce faisant, le liquidateur judiciaire est défaillant dans l'administration de la preuve qui lui incombe, ne fournissant aucune indication, ni justification sur le passif déclaré et/ou admis et le montant des actifs réalisés, de nature à établir l'existence d'une insuffisance d'actif certaine et d'un montant déterminé, M. [F] précisant, pour sa part, que la clientèle de la société Oikos a été cédée pour un prix de 360 000 euros et que les appartements, objet du contentieux Bisinvest/[K] vont être acquis par un tiers pour un prix de 286 500 euros devant être versé à la société Bisinvest dans des conditions de nature à diminuer la créance de cette société sur la société [K] et, par voie de conséquence, sur la société Oikos, dont le passif devrait être diminué de ce montant ; M. [S] ès qualités ne démontre donc pas l'absence d'une insuffisance d'actif, qui seule l'autoriserait à poursuivre l'action sur le fondement de l'article L. 223-22 du code de commerce, en sorte que ses demandes indemnitaires présentées de ce fondement ne peuvent qu'être rejetées en l'état, les autres moyens développés étant surabondants.
Le sentiment d'avoir été trahi, éprouvé par M. [F], du fait des relations amicales entretenues de longue date avec M. [I], n'est pas de nature à justifier que des dommages et intérêts lui soient alloués en réparation d'un préjudice moral, alors qu'il n'est pas établi en quoi l'action en justice engagée à son encontre par ce dernier, ainsi que par les sociétés Oikos et Oikos patrimoine, pour hasardeuse qu'elle soit, serait constitutive d'un abus de droit caractérisé de la part de intéressés ; le jugement entrepris doit ainsi être confirmé en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour préjudice moral et celui-ci doit également être débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, présentée devant la cour.
Au regard de la solution apportée au règlement du litige, M. [I], la société Oikos patrimoine, M. [U], liquidateur à la liquidation judiciaire de cette société, la société Oikos et son liquidateur, M. [S], doivent être condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à M. [F] la somme de 8000 euros au titre des frais non taxables que celui-ci a dû exposer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Vu l'arrêt du 14 décembre 2021,
Réforme le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 15 mai 2019 en ce qu'il a dit l'action sociale de la société Oikos non prescrite et statuant à nouveau de ce chef,
Dit que M. [S], pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Oikos, ne démontre pas l'absence d'une insuffisance d'actif, qui seule l'autoriserait à poursuivre l'action sur le fondement de l'article L. 223-22 du code de commerce,
Rejette en l'état ses demandes indemnitaires présentées sur ce fondement à l'encontre de M. [F],
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour préjudice moral,
Déboute également celui-ci sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Condamne in solidum M. [I], la société Oikos patrimoine, M. [U], liquidateur à la liquidation judiciaire de cette société, la société Oikos et son liquidateur, M. [S], aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à M. [F] la somme de 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
le greffier, le président,