Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 07 JUILLET 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 17/01634 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NCWQ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 14 février2017
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
N° RG 14/04399
APPELANTS :
Monsieur [A] [B] [O]
né le 08 Janvier 1954
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 4]
et
Madame [T] [N] [W] [I] épouse [O]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représentés par Me Jean -François REYNAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEES :
SCI ROSALIE
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 7]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Eva FOURNIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
(ordonnance du 05/09/2019 d'irrecevabilité des conclusions)
SCP LHUBAC CABANIS PRADAL & LHUBAC
[Adresse 2]
B.P. 07
[Localité 5]
Représentée par Me Gilles LASRY de la SCP SCP D'AVOCATS BRUGUES - LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 23 Mars 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 AVRIL 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, chargé du rapport et M. Fabrice DURAND, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre
M. Fabrice DURAND, Conseiller
Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président du 1er décembre 2021
Greffier, lors des débats : Mme Camille MOLINA
ARRET :
- contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour fixée au 16 juin 2022 prorogée au 7 juillet 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.
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EXPOSE DU LITIGE :
Le 22 octobre 2013, Monsieur [A] [O] et Madame [T] [I] épouse [O] ont régularisé avec la SCI Rosalie un compromis de vente portant sur un bâtiment situé au [Adresse 3] ; à cette occasion, ils ont consigné un dépôt de garantie d'un montant de 12 200 euros auprès de la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lhubac, notaire et rédacteur de l'acte.
Au vu d'un rapport établi en février 2014 par Monsieur [X] [H], expert immobilier, sur l'état de l'immeuble faisant l'objet du compromis de vente, les époux [O] ont renoncé à leur achat et ont mis la SCI Rosalie en demeure de leur restituer leur dépôt de garantie.
La SCI Rosalie n'ayant pas accédé à cette demande, les époux [O] ont assigné les 17 et 18 juillet 2014 la SCI Rosalie et la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lhubac afin d'obtenir la restitution de leur dépôt de garantie.
Par un jugement en date du 14 février 2017, le tribunal de grande instance de Montpellier a :
- dit que la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 5 septembre 2016 est devenue sans objet ;
- dit que le bâtiment objet du litige n'est affecté d'aucun vice caché ;
- rejeté la demande au titre du vice caché et la demande de restitution du dépôt de garantie ;
- rejeté la demande de restitution du dépôt de garantie formée par les époux [O] ;
- condamné les époux [O] à payer la somme de 12 200 euros à la SCI Rosalie au titre de la clause pénale ;
- ordonné à la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lhubac de libérer la somme de 12 200 euros, consignée au titre du dépôt de garantie, entre les mains de la SCI Rosalie pour paiement de la clause pénale due par les époux [O] ;
- condamné les époux [O] à payer la somme de 3 000 euros à la SCI Rosalie sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné les époux [O] à payer la somme de 1 500 euros à la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lhubac sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- rejeté pour le surplus ;
- condamné les époux [O] aux entiers dépens de l'instance.
Les époux [O] ont interjeté appel de ce jugement le 21 mars 2017 à l'encontre de la SCI Rosalie et de la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lhubac.
Par ordonnance du magistrat de la mise en état du 5 septembre 2018, les conclusions remises au greffe par la SCI Rosalie ont été déclarées irrecevables sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile.
Par requête remise au greffe le 3 juin 2019, les époux [O] ont saisi le conseiller de la mise en état d'une demande d'expertise.
Par ordonnance du 10 décembre 2019, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné une expertise et désigné pour y procéder Monsieur [D] [S] avec mission de :
- convoquer les époux [O] et la SCI Rosalie (et pas la SCP de notaires) ainsi que leurs avocats par lettres recommandées avec accusés de réception 8 jours à l'avance au moins et au plus tard dans les 8 jours de l'avis de consignation ;
- se faire remettre sans délai par les parties ou par tout tiers détenteur les documents qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission et, notamment, les rapports d'expertise amiable d'août 2018 et mai 2019 ainsi que toute photographie du bâtiment antérieure ou concomitante à la vente d'octobre 2013 ;
- recueillir les déclarations des parties ainsi que celles de toute personne informée et, notamment, des entreprises intervenues, le cas échéant, sur le bâtiment à la demande de la SCI Rosalie avant la vente d'octobre 2013 ;
- se rendre sur les lieux [Adresse 3] (34) ;
- examiner les restes du bâtiment vendu aux époux [O] le 22 octobre 2013 par la SCI Rosalie ainsi que ses fondations et dire si l'immeuble était affecté d'un vice structurel rendant l'ouvrage impropre à sa destination ou portant atteinte à sa solidité à l'époque de la vente ;
- rechercher, en cas de vice structurel rendant l'ouvrage impropre à sa destination ou portant atteinte à sa solidité, si celui-ci était apparent pour un acquéreur profane à l'époque de la vente en octobre 2013 en recherchant, notamment, si les fissures visibles à l'époque sur le bâtiment étaient révélatrices, de manière évidente, du vice structurel ;
- rechercher si la SCI Rosalie connaissait l'existence de ce vice au moment de la vente en reconstituant la chronologie des étapes de la construction de l'ouvrage et des travaux de reprise éventuellement mis en 'uvre par la SCI sur le bâtiment avant la vente ;
- donner son avis sur les préjudices ;
- constater l'éventuelle conciliation des parties sans manquer dans ce cas de nous en aviser ;
- faire toutes observations utiles au règlement du litige.
L'expert a déposé son rapport le 19 novembre 2020.
Vu les conclusions des époux [O] remises au greffe le 1er décembre 2020 ;
Vu les conclusions de la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lhubac remises au greffe le 10 juillet 2017 ;
MOTIFS DE L' ARRÊT :
Sur l'existence d'un vice caché :
L'article 1641 du code civil dispose ' Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus '.
Aux termes de l'article 1642 du code civil ' Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même '.
L'action en garantie prévue par l'article 1641 du code civil n'est donc ouverte que si, lors de la conclusion du contrat, le vice était caché .
En l'espèce, il résulte de l'expertise judiciaire, ordonnée à l'initiative des appelants, que les fissures litigieuses sont typiques d'un tassement différentiel et ont pour origine une mauvaise réalisation des fondations par rapport au sol (soit de dimensions, profondeurs, ferraillages, qualité du béton ou réalisation).
L'expert expose que ces fissures ont progressé dans le temps pour arriver à quelques 5 cm. Elles sont aggravées par les aléas du temps (épisode orageux du 29 septembre 2014 : inondations et coulées de boue et sécheresse du 1er juillet 2017 au 30 septembre 2017 : mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse).
Il impute l'origine de ce sinistre à la mauvaise réalisation des fondations par rapport au sol aggravée par les catastrophes naturelles.
Par ailleurs, en réponse au chef de mission ' Rechercher, en cas de vice structurel rendant l'ouvrage impropre à sa destination ou portant atteinte à sa solidité, si celui-ci était apparent pour un acquéreur profane à l'époque de la vente en 2013 en recherchant notamment si les fissures visibles à l'époque sur le bâtiment étaient révélatrices, de manière évidente, du vice structurel, ' l'expert judiciaire indique très clairement que les fissures, d'ordre structurelle, étaient présentes lors de la signature du compromis de vente le 22 octobre 2013, ajoutant même que ce constat a poussé les époux [O] à faire réaliser une étude, concluant qu'il est peu probable qu'elles n'étaient pas visibles en 2013.
En effet, suite au constat des fissures litigieuses en octobre 2013, Monsieur [O] a demandé à Monsieur [X] [H], ingénieur conseil-expert immobilier, d'expertiser le bâtiment.
Or, l'expert amiable, comme l'expert judiciaire, fait état de l'existence de fissures d'ordre structurelle, s'expliquant très certainement par la faiblesse des fondations et leur faible profondeur, rendant le sol sensible au retrait gonflement.
Par ailleurs, il résulte des photographies annexées à son rapport l'existence de fissures parfois très conséquentes (façade Sud, façade côté Ouest, façade Nord) qui n'ont pu échapper, par leur importance et leur étendue, à un acquéreur normalement diligent, étant rappelé que l'expertise amiable a été réalisée en février 2014, soit seulement quatre mois après la signature du compromis de vente, ce qui exclu une aggravation significative du sinistre en si peu de temps.
En tout état de cause, Monsieur et Madame [O] ne peuvent soutenir devant la cour l'existence d'un vice caché alors même qu'ils ont mandaté un expert amiable afin de décrire et d'examiner les différentes fissures qu'ils avaient constaté sur la façade et qui n'ont pu toutes apparaître, compte tenu de leur nombre et de leur importance, postérieurement à la signature du compromis de vente.
Par conséquent, il ressort tant du rapport d'expertise amiable que de l'expertise judiciaire que lors de la signature du compromis de vente, les fissures en façade, de par leur nombre et leur importance, étaient visibles et connues des acquéreurs et qu'il appartenait à ces derniers, dès avant la signature du compromis et non après comme en l'espèce, de faire poursuivre toutes mesures d'investigations pour en connaître l'exacte étendue et leurs conséquences prévisibles.
Les époux [O] ne peuvent donc se prévaloir de la réalisation de la condition suspensive relative à l'existence de vices non révélés, pouvant grever l'immeuble et en diminuer sensiblement la valeur ou le rendre impropre à sa destination et de la caducité du compromis de vente.
Il seront donc déboutés de leur demande de restitution du dépôt de garantie ainsi que de leur demande de dommages et intérêts.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la clause pénale :
Les époux [O] n'ayant pas régularisé l'acte authentique de vente, c'est à juste titre que le tribunal a fait application de la clause pénale prévue au compromis de vente et a modéré cette dernière, considérant qu'elle était manifestement excessive.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame [O] à payer à la SCI Rosalie la somme de 12 200 euros au titre de la clause pénale et ordonné à la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lubac de libérer cette somme , consignée au titre du dépôt de garantie, entre les mains de la SCI Rosalie.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Condamne Monsieur [A] [O] et Madame [T] [I] épouse [O] aux entiers dépens d'appel ;
Condamne Monsieur [A] [O] et Madame [T] [I] épouse [O] à payer à la SCP Lhubac Cabanis Pradal & Lubac la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en appel.
Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président de chambre,