Grosse + copie
délivrée le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re chambre sociale
ARRET DU 07 SEPTEMBRE 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/01716 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OB22
ARRET n°
Décision déférée à la Cour : Arrêt du 09 JANVIER 2019 de la COUR D'APPEL DE MONTPELLIER - N° RG15/3445 rendu sur appel formé contre un jugement du 31 mars 2015 du Conseil de Prud'hommes de Carcassonne
DEMANDEUR À L'OPPOSITION :
Monsieur [A] [X], demeurant :
[Adresse 3]
[Localité 2]
Exerçant anciennement sous le nom de SIP SECURITE puis sous l'enseigne KYVEO, entreprise individuelle inscrite au moment des faits au répertoire des métiers de l'Aude sous le n° 501 695 894
Représentant : Me Gérard BOUISSINET de la SCP BOUISSINET-SERRES, avocat au barreau de CARCASSONNE
Autre qualité : Intimé dans 15/03445 (Fond)
DÉFENDERESSE À L'OPPOSITION :
Madame [N] [S]
[Adresse 4]
Représentant : Me Sylvain RECHE de la SCP SCP RECHE-GUILLE MEGHABBAR, avocat au barreau de CARCASSONNE
Autre qualité : Appelant dans 15/03445 (Fond)
En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 JUIN 2022,en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Pascal MATHIS, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Pascal MATHIS, Conseiller, faisant fonction de président de l'audience
Madame Florence FERRANET, Conseillère
Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Marie BRUNEL
ARRET :
- contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Pascal MATHIS, Conseiller, faisant fonction de président de l'audience et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.
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EXPOSÉ DU LITIGE
M. [A] [X], exerçant en nom personnel une activité de sécurité privée sous l'enseigne SIP SECURITE devenue KYVEO a embauché Mme [N] [H] épouse [S] en qualité d'agent de sécurité suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 10 mars 2009 à effet au 9 mars 2099 à 20 h.
La salariée a été placée en arrêt maladie à compter du 12 février 2010 au 14 mars 2010 puis à compter du 14 juin 2010 pour ne plus reprendre le travail dans l'entreprise.
La salariée a été reconnue travailleur handicapée à compter du 13 juillet 2010 jusqu'au 12 juillet 2015 par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées réunie le 13 juillet 2010.
Suivant première visite de reprise du 6 septembre 2010 le médecin du travail notait :
« Inapte temporaire à revoir dans 15 jours. L'origine de l'inaptitude et l'organisation du travail ne permettent pas de proposer de mesures individuelles de transformation de poste dans l'entreprise, pas de reclassement professionnel dans l'entreprise à prévoir. »
Suivant seconde visite de reprise du 21 septembre 2010, le médecin du travail concluait :
« Inapte à son poste et aux postes de l'entreprise. »
Le 8 octobre 2010, l'employeur écrivait au médecin du travail en ces termes :
« Au terme de ses arrêts de travail, vous avez reçu Mme [S] [N] en 1er visite de reprise le 06/09/2010. La fiche médicale qui lui a été délivrée mentionne : « Son état de santé ne lui permet pas de reprendre son poste de travail habituel. Elle est inapte temporaire à ce jour. L'origine de l'inaptitude et l'organisation du travail ne permettent pas de proposer des mesures individuelles de transformation de poste dans l'entreprise. » Nous nous sommes entretenus au téléphone le 06/09/2010 à 18h30 après la 1er visite de reprise avec Mme [S] [N], pour vous exposer l'organisation de l'entreprise et ses contraintes de travail, et envisager ensemble d'éventuelles possibilités de reclassement. Mme [S] [N] a passé sa 2e visite de reprise le 21/09/2010 et la fiche médicale qui lui a été délivrée constate : « Inapte à son poste et aux postes de l'entreprise ». Une mesure de reclassement sur un poste d'agent de sécurité ' agent d'accueil va être proposée à Mme [S] [N]. Ce poste consiste en la surveillance des locaux de l'agence, l'accueil des clients et la réception du courrier et des colis. Les horaires de travail sont les suivants : 9h00 ' 12h00 et 14h00 ' 17h00 Pas de travail de nuit et les week-ends. Nous vous remercions de nous confirmer si ce type de poste est compatible avec l'état de santé de Mme [S] [N]. »
Le médecin du travail a répondu à l'employeur le 14 octobre 2010 que :
« Suite à votre courrier du 08.10.2010, concernant Mme [S] [N], agent de sécurité, je vous confirme son inaptitude à son poste et aux postes de l'entreprise. En raison de ses problèmes de santé, le reclassement professionnel ne peut s'envisager qu'en dehors de votre entreprise. »
La salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 27 octobre 2010 ainsi rédigée :
« Lors de notre entretien du 22/10/2010, nous vous informions des motifs pour lesquels nous envisagions de prononcer votre licenciement pour inaptitude, ces motifs sont ceux exposés ci-après. Au terme de vos arrêts de travail, vous avez été reçue en 1re visite de reprise le 06/09/2010 par le Dr [R] [O], médecin du travail. La fiche médicale qui vous a été délivrée mentionne : « Son état de santé ne lui permet pas de reprendre son poste de travail habituel. Elle est inapte temporaire à ce jour. L'origine de l'inaptitude et l'organisation du travail ne permettent pas de proposer des mesures individuelles de transformation de poste dans l'entreprise. » Nous nous sommes entretenus au téléphone le 06/09/2010 à 18h30 à la suite de votre visite de reprise, avec le Dr [R] [O], pour lui exposer l'organisation de l'entreprise et ses contraintes de travail et envisager ensemble d'éventuelles possibilités de reclassement. Vous avez été reçue en 2e visite de reprise le 21/09/2010 et la fiche médicale qui vous a été délivrée constate : « Inapte à son poste et aux postes de l'entreprise ». Nous souhaitions vous proposer une mesure de reclassement sur un poste d'agent de sécurité ' agent d'accueil. Ce poste consiste en la surveillance des locaux de l'agence, l'accueil des clients et la réception du courrier et des colis. Les horaires de travail sont les suivants : 9h00 ' 12h00 et 14h00 ' 17h00. Pas de travail de nuit et les week-ends. Nous avons donc sollicité le Dr [R] [O] par lettre recommandée avec AR du 08/10/2010 afin de nous confirmer si ce type de poste était compatible avec votre état de santé. Par lettre recommandée avec AR du 14/10/2010, le Dr [R] [O] nous a confirmé votre inaptitude à votre poste et aux postes de l'entreprise. Par ailleurs, elle nous a précisé qu'« en raison de ses problèmes de santé, le reclassement professionnel ne peut s'envisager qu'en dehors de votre entreprise. » Ces motifs constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement, nous sommes donc au regret de devoir vous notifier par la présente votre licenciement pour inaptitude non-professionnelle. La date de première présentation de cette lettre recommandée par la Poste constituera la date de début de votre préavis de un mois au terme duquel votre contrat de travail sera définitivement rompu. Dans la mesure où vous êtes dans l'incapacité d'exécuter ce préavis, aucune indemnité ne vous sera versée à ce titre. Au terme de votre contrat de travail nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail, votre attestation Assedic et le montant des sommes vous restant éventuellement dues. Nous vous informons par ailleurs que votre droit individuel à la formation (DIF) s'élève à 15 heures. Conformément à l'article L. 6323-18 du code du travail, vous avez la possibilité de demander à effectuer durant la période de préavis une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation. »
La salariée a répondu à l'employeur par lettre du 30 novembre 2010 en ces termes :
« Suite à notre entretien du 22 octobre 2010 confirmé par votre courrier du 27 octobre 2010 concernant un licenciement inaptitude non-professionnelle à ce jour le 30 novembre 2010, je n'ai toujours rien malgré mon déplacement effectué le 24 novembre 2010 ainsi la semaine d'avant. Je suis de même étonnée du reclassement comme agent d'accueil alors qu'à la maison territoriale me convenait très bien ainsi qu'à [Localité 6] (LA RAQUE) dont les contrats sont toujours en vigueur avec votre société, tout en sachant que le poste d'agent d'accueil a été effectué sans poste aménagé (pas de siège) et je ne suis pas habilité à faire la réception du courrier ni des colis. »
Contestant son licenciement, Mme [N] [H] épouse [S] a saisi le 11 septembre 2013 le conseil de prud'hommes de Carcassonne, section activités diverses, lequel, par jugement rendu le 31 mars 2015, a :
dit que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de reclassement ;
dit que le licenciement est valable ;
débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes ;
débouté l'employeur du surplus de ses demandes ;
condamné la salariée aux entiers dépens ;
rappelé qu'en cas d'exécution forcée de la décision, le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du créancier, prévu par l'article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996, que l'huissier peut recouvrer, n'est pas dû pour les créances nées de l'exécution d'un contrat de travail ni pour les créances alimentaires, en application de l'article 11 du même décret.
Cette décision a été notifiée le 13 avril 2015 à Mme [N] [H] épouse [S] qui en a interjeté appel suivant déclaration du 6 mai 2015.
L'employeur a été cité à comparaître par assignation du 25 octobre 2018 convertie en procès-verbal de recherches infructueuses.
Suivant arrêt de défaut du 9 janvier 2019, la cour a :
confirmé le jugement entrepris sur les demandes relatives à l'indemnité de licenciement et à des dommages et intérêts pour préjudice moral ;
infirmé le jugement déféré pour le surplus ;
condamné l'employeur à payer à la salariée les sommes suivantes :
'2 751,29 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
'8 253,88 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
' 800,00 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination ;
'4 867,43 € à titre de rappel de salaire au titre de la requalification du contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en temps complet ;
'1 000,00 € au titre des frais irrépétibles ;
ordonné la remise par l'employeur à la salariée de l'attestation Pôle Emploi et d'un bulletin de salaire récapitulatif conformes à l'arrêt ;
condamné l'employeur aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par l'État conformément aux dispositions des articles 124 et suivants du décret du 19 décembre 1991 sur l'aide juridictionnelle.
Cet arrêt a été signifié à M. [A] [X] le 21 février 2019 qui a formé opposition le 6 mars 2019.
Vu les écritures déposées à l'audience et soutenues par son conseil aux termes desquelles Mme [N] [H] épouse [S] demande à la cour de :
rejeter l'intégralité des demandes de l'employeur,
confirmer l'arrêt du 9 janvier 2019 en ses dispositions qui infirment le jugement entrepris ;
constater que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement ;
constater que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ;
condamner l'employeur à lui verser les sommes suivantes :
'2 751,29 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
'8 253,88 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
' 800,00 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination ;
'4 867,43 € à titre de rappel de salaires au titre de la requalification de contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en temps complet ;
enjoindre l'employeur de lui délivrer les documents de rupture rectifiés :
'attestation Pôle Emploi ;
'bulletin de salaire récapitulatif ;
condamner l'employeur au paiement de la somme de 1 000 € au titre des frais irrépétibles ;
condamner l'employeur aux dépens de première instance et d'appel.
Vu les écritures déposées à l'audience et reprises par son conseil selon lesquelles M. [A] [X] demande à la cour de :
déclarer son opposition recevable ;
mettre l'arrêt rendu par défaut à néant et statuer à nouveau ;
constater que le défendeur à l'opposition ne peut reprendre les prétentions dont il a été débouté par la décision rendue par défaut et le débouter à ce titre des demandes formées :
'au titre de la demande de classification différente ;
'au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral ;
'au titre de l'indemnité de licenciement ;
confirmer le jugement entrepris ;
dire qu'il n'a aucunement manqué à son obligation de reclassement ;
dire que le licenciement est parfaitement valable ;
débouter la salariée purement et simplement de ses demandes indemnitaires consécutives à la contestation de son licenciement ainsi que de sa demande tendant à la délivrance de documents de rupture rectifiés ;
débouter la salariée de ses demandes de dommages et intérêts complémentaires pour discrimination ;
débouter la salariée de sa demande de rappel de salaire ;
débouter plus largement la salariée de l'ensemble de ses demandes ;
à titre subsidiaire, si la cour disait que le licenciement ne reposait sur aucune cause réelle ni sérieuse,
dire que le montant des dommages et intérêts alloués à ce titre ne saurait être supérieur à 2 mois de salaire, soit une somme de 2 750 € (salaire brut moyen : 1 375 €) ;
à titre reconventionnel,
condamner la salariée à lui verser la somme de 2 500 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur la demande de requalification du contrat de travail
La salariée sollicite la requalification de contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en temps complet. Elle fait valoir qu'elle a été embauchée pour un total de 100 heures de travail mensuelles à raison de 23,08 heures par semaine pour une rémunération brute de 906,70 € avec possibilité d'effectuer des heures complémentaires dans la limite de 10 heures par mois, le contrat de travail prévoyant que le planning d'activité journalière devait être remis dans les 15 jours précédant la semaine de travail et qu'en cas de modification de la répartition des heures de travail, elle devait en être informée au moins 7 jours avant son entrée en vigueur par lettre recommandée avec avis de réception.
La salariée soutient qu'à compter du mois de novembre 2009 ses bulletins de salaire n'ont plus fait mention d'un horaire de base de 100 heures, mais de 120 heures sans qu'elle ait consenti à cette modification du contrat. Elle ajoute qu'elle a effectué, pendant plusieurs mois, un nombre d'heures aléatoire et supérieur à un temps partiel, qu'ainsi au mois de juillet 2009, elle a effectué 149 heures, avec plusieurs semaines consécutives à plus de 35 heures, de même au mois de janvier 2010, elle a effectué 140 heures dans le mois alors qu'il ne lui était pas possible de prévoir ses horaires de travail et son amplitude horaire ce qui la contraignait à se tenir à la disposition pleine et entière de l'employeur.
La salariée sollicite la somme de 4 867,43 € au titre du rappel de salaires à temps complet pour la période d'octobre 2009 à octobre 2010 sur la base de salaire brut de 1 471,19 €.
L'employeur répond en discutant une demande portant sur une somme de 7 555,87 € qui n'est pas soutenue par la salariée et il ne s'explique nullement sur les dépassements des 100 heures contractuelles de plus de 10 heures par mois dont se plaint la salariée. Au vu de l'ensemble des pièces produites, ces dépassements apparaissent établis en sorte qu'il convient de requalifier le contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet à compter du mois d'octobre 2009.
L'employeur conteste encore la demande de rappel de salaire en faisant valoir que la salariée a été placée en arrêt maladie du 12 février au 14 mars 2010 puis à compter du 14 juin 2010. Mais les arrêts maladie de la salariée n'apparaissent pas de nature à exonérer l'employeur de son obligation contractuelle résultant de la requalification. Dès lors, il sera fait droit à la demande de la salariée pour le montant sollicité.
2/ Sur la recherche de reclassement
Il appartient à l'employeur de justifier qu'il a cherché loyalement, sérieusement et activement à reclasser la salariée.
L'employeur fait valoir que l'entreprise dont il produit le registre du personnel ne comportait que 7 salariés et qu'il ne disposait que d'un poste de reclassement qu'il a soumis au médecin du travail, lequel lui a répondu qu'en raison des problèmes de santé de la salariée, son reclassement professionnel ne pouvait s'envisager qu'en dehors de l'entreprise.
La salariée reproche à l'employeur de lui avoir proposé un seul poste de reclassement, qui était celui auquel elle était affectée au moment du licenciement et qui était inadapté à son handicap alors même qu'il existait à [Localité 6] et à la maison départementale de [Localité 5] des postes qui convenaient parfaitement à son handicap et qui étaient en accord avec les prescriptions du médecin du travail, dès lors qu'il suffisait de lui fournir une chaise et de l'autoriser à s'asseoir.
Mais les postes que la salariée reproche à l'employeur de ne pas lui avoir proposé ne convenaient nullement à son état de santé lequel s'opposait à son reclassement dans l'entreprise selon l'avis du médecin du travail.
Dès lors, même si au temps du litige l'inaptitude de la salariée à tout poste dans l'entreprise ne dispensait pas l'employeur de son obligation de recherche de reclassement, il n'était pas pour autant autorisé à reclasser la salariée sur un poste malgré l'opposition du médecin du travail.
En l'espèce, l'employeur a bien proposé un poste de reclassement à la salariée dont il est vain de discuter les mérites réels dès lors qu'il n'a pas été accepté par le médecin du travail. Contrairement aux affirmations de la salariée, aucun autre poste dans l'entreprise ne permettait d'échapper à l'inaptitude générale posée par le médecin du travail.
Dès lors, il apparaît que l'employeur, qui produit son registre du personnel, et qui justifie d'un dialogue loyal et approfondi avec le médecin du travail, a bien cherché loyalement, activement et sérieusement à reclasser la salariée.
3/ Sur la discrimination
La salariée réclame la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination.
L'article L. 1134-1 du code du travail disposait, dans sa rédaction en vigueur du 29 mai 2008 au 20 novembre 2016, que :
« Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. »
La salariée reproche tout d'abord à l'employeur de l'avoir discriminée durant l'exécution du contrat de travail dès lors qu'elle occupait un poste à [Localité 6], en accord avec les prescriptions du médecin du travail et qui lui convenait parfaitement et que l'employeur a soudainement décidé de l'affecter sur un autre poste, à [Localité 7], transfert qui n'était justifié par aucun objectif légitime et proportionné au regard de son état de santé et qui ne correspondait pas aux préconisations du médecin du travail. Elle explique qu'à [Localité 7], elle se retrouvait seule, dans un bureau, sans siège, sans eau ni toilettes et totalement mise à l'écart. Elle produit en ce sens les attestations de M. [B] [Z] du 9 octobre 2010 et de M. [M] [V] du 12 septembre 2010. Le premier indique avoir vu travailler la salariée devant le bureau de la société SIP Sécurité, [Adresse 1], et que depuis il n'y a « personne qui garde devant ». Le second livre l'attestation suivante :
« Depuis mars 2009 travaillant en CDD pour surcroît de travail, j'atteste que suite aux divers déplacements effectués au bureau de SIP Sécurité ([Localité 7]) aucun agent n'était posté sur ce site. Ensuite on a affecté Mme [S] ' Et depuis son départ sauf erreur de ma part, je n'ai plus toujours vu aucun agent ! À savoir que je me suis déplacé pendant la période où Mme [S] était postée à l'extérieur du pavillon (bureau). J'ai constaté qu'aucun siège n'était en sa possession, (sans poste de travailleur isolé, important !) et que le bureau était fermé donc pas de toilettes pour l'employée qui est d'ailleurs reconnue travailleur handicapée. Son seul matériel de travail était son portable au cas où elle aurait eu un problème toute seule. J'ai été étonné que l'on ait placé une employée sur ce site. »
Au vu de ces éléments il appartient à l'employeur de prouver que sa décision d'affecter la salariée à [Localité 7] est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
L'employeur répond qu'il ignorait que la salariée était affectée d'un handicap lequel n'a été reconnu qu'à compter du 13 juillet 2010 qu'alors que le contrat de travail était suspendu pour la dernière fois depuis le 14 juin 2010. Il explique que l'affectation sur le poste de [Localité 6] à partir du mois de janvier 2010 n'a pas pris en compte le handicap de la salariée ou des préconisations médicales dont il n'avait pas connaissance mais résulte uniquement d'une mobilité contractuelle qui a amené la salariée à changer plusieurs fois d'affectation et à travailler sur le site de [Localité 6] dès le mois de novembre 2009. L'employeur ajoute que ce n'est qu'à la suite de la visite médicale effectuée par la salariée le 1er février 2010 qu'il a été informé de la nécessité pour la salariée, qui se trouvait déjà partiellement depuis plusieurs mois en poste à [Localité 6], de bénéficier d'un poste aménagé avec siège adapté.
L'employeur explique que la salariée n'a travaillé que onze jours sur le site de [Localité 7] sur la période du 1er au 9 juin 2010 et à raison de 3 à 6 heures par jour, de 8H30 à 11H30 et de 14H30 à 17H30. Il conteste la pénibilité de ce poste et produit en ce sens les attestations suivantes :
' M. [D] [G] :
« J'atteste sur l'honneur que pendant mon contrat dans l'entreprise SIP SECURITE, j'occupais le poste de cadre et mes fonctions étaient exercées au siège social de l'entreprise au [Adresse 1]. Les lieux bénéficiaient de toutes les commodités (toilettes/eau/électricité). Chaque matin quand Mme [S] a été en poste sur le site de [Localité 7], je lui ai servi à plusieurs reprises le café ainsi que de l'eau, les toilettes étaient à sa disposition sans souci de même que de quoi s'asseoir. »
' M. [J] [K] :
« Au cours de mon contrat de travail au sein de l'entreprise SIP Sécurité début 2009, j'ai eu l'occasion de me rendre à plusieurs reprises à l'agence de [Localité 7] située [Adresse 1], pour récupérer salaires et planning et j'ai pu constater que le bureau était une maison individuelle, il y avait sur place de l'électricité, de l'eau ainsi que des toilettes en fonction. L'endroit était bien entretenu et propre. »
L'employeur ajoute que le poste de LASBORDES était plus proche du domicile de la salariée à [Localité 8] (10 km) que celui de [Localité 7] (36 km) mais nullement plus adapté à son état de santé dès lors que la salariée a été placée en arrêt de travail alors qu'elle travaillait à [Localité 6] et que le médecin du travail l'a déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise, autant à ceux de [Localité 6] ou de [Localité 5] qu'à celui de [Localité 7].
Au vu de ces éléments et notamment des témoignages produits par l'employeur qui contredisent précisément les attestations moins détaillées apportées par la salariée, il apparaît que l'employeur justifie la mutation à [Localité 7], siège de l'entreprise, et premier lieu de travail contractuellement fixé, par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
La salariée reproche encore à l'employeur de l'avoir discriminée en la licenciant sans chercher à la reclasser. Mais comme il a été dit au point précédent, ce grief n'est pas fondé.
En conséquence, la salariée sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice souffert à raison d'une discrimination.
4/ Sur le licenciement
L'employeur n'ayant pas discriminé la salariée et ayant satisfait à son obligation de rechercher son reclassement, le licenciement se trouve fondé sur une cause réelle et sérieuse. Dès lors la salariée sera déboutée de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
5/ Sur les autres demandes
L'employeur délivrera à la salariée les documents de rupture rectifiés, soit l'attestation Pôle Emploi et un bulletin de salaire récapitulatif.
Il convient d'allouer à la salariée la somme de 1 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'employeur supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Reçoit M. [A] [X] en son opposition, laquelle met à néant l'arrêt de défaut du 9 janvier 2019.
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
dit que M. [A] [X] n'a pas manqué à son obligation de reclassement ;
dit que le licenciement est valable ;
débouté M. [A] [X] du surplus de ses demandes.
L'infirme pour le surplus.
Statuant à nouveau,
Condamne M. [A] [X] à payer à Mme [N] [H] épouse [S] la somme de 4 867,43 € au titre du rappel de salaires à temps complet pour la période d'octobre 2009 à octobre 2010.
Déboute Mme [N] [H] épouse [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour discrimination, d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que M. [A] [X] délivrera à Mme [N] [H] épouse [S] une attestation Pôle Emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes au présent arrêt.
Condamne M. [A] [X] à payer à Mme [N] [H] épouse [S] la somme de 1 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Condamne M. [A] [X] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT