Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 17/03506 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NG5C
ARRET N°
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 29 mai 2017
TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS
N° RG 2016 002856
APPELANTE :
SARL M-CAMPUS
RCS de Béziers n°795 062 439, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Bernard BORIES de la SCP MAGNA BORIES CAUSSE CHABBERT CAMBON AQUILA BARRAL, avocat au barreau de BEZIERS, substitué à l'audience par Me Christian CAUSSE de la SCP MAGNA BORIES CAUSSE CHABBERT CAMBON AQUILA BARRAL, avocat au barreau de BEZIERS
INTIMEE :
EURL ATELIER 1
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Jérémy BALZARINI de la SCP LEVY, BALZARINI, SAGNES, SERRE, LEFEBVRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Rémy LEVY, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 03 Mai 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 MAI 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice DURAND, Conseiller, chargé du rapport et Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre
M. Fabrice DURAND, Conseiller
Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président du 20 avril 2022
Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.
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EXPOSE DU LITIGE
La SARL M Campus exerce une activité de promotion immobilière. Elle a acquis les 17 et 18 octobre 2013 auprès de la SEBLI un terrain à bâtir cadastré section [Cadastre 4] de la ZAC de « [Adresse 5] » sur la commune de [Localité 2] (34).
La SARL M Campus a construit sur ce terrain un ensemble immobilier d'une emprise foncière de 3 743m² abritant un campus multi-entreprises.
Le promoteur a conclu le 3 janvier 2013 avec l'EURL Atelier 1 représentée par M. [R] [U], un contrat de mission complète d'architecte pour un montant total d'honoraires de 107 596,94 euros TTC calculés sur un montant prévisionnel de travaux de 2 511 000 euros TTC.
En décembre 2013, l'architecte maître d'oeuvre a adressé une demande de raccordement des eaux du bâtiment à la Lyonnaise des Eaux.
L'examen de cette demande par le concessionnaire du réseau a révélé une erreur d'implantation des fondations du bâtiment rendant nécessaire le déplacement de la conduite du réseau d'eau potable.
L'EURL Atelier 1 n'a jamais répondu aux demandes de la SARL M Campus en vue de la prise en charge des frais de déplacement du réseau d'eau potable.
Par acte d'huissier signifié le 3 mai 2015, la SARL M Campus a fait assigner l'EURL Atelier 1 devant le tribunal de commerce de Béziers aux fins de la voir condamner à lui verser 23 722 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.
Par jugement du 29 mai 2017, le tribunal de commerce de Béziers a :
' dit et jugé que l'EURL Atelier 1 était à l'origine d'une faute ayant consisté à omettre de respecter les obligations découlant d'une servitude sur l'emprise du terrain servant d'assiette à la construction ;
' condamné l'EURL Atelier 1 à payer à la SARL M Campus la somme de 23 727 euros correspondant à la somme que la SARL M Campus a dû régler à CABM ;
' dit et jugé que cette somme porterait intérêts au taux légal à compter de la délivrance de la présente assignation jusqu'à parfait paiement ;
' condamné la SARL M Campus à payer à la l'EURL Atelier 1 une somme de 18 502,27 euros au titre du solde des honoraires réclamés ;
' ordonné la compensation entre les deux sommes ;
' ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;
' condamné la l'EURL Atelier 1 à payer à la SARL M Campus une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de la présente décision ;
' rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires tenues pour injustes ou mal fondées.
Le 23 juin 2017, la SARL M Campus a relevé appel du jugement en sa seule disposition l'ayant condamnée à payer à l'EURL Atelier 1 la somme de 18 502,27 euros en paiement du solde de ses honoraires.
Vu les dernières conclusions de la SARL M Campus remises au greffe le 25 septembre 2017 ;
Vu les dernières conclusions de l'EURL Atelier 1 remises au greffe le 18 janvier 2022 ;
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 mai 2022.
MOTIFS DE L'ARRÊT
L'action reconventionnelle en paiement exercée par l'EURL Atelier 1 contre la SARL M Campus est fondée sur deux notes d'honoraires :
' n°08-12-565/11 établie le 3 juillet 2014 pour 10 281,60 euros TTC ;
' n°08-12-565/12 DGD établie le 7 janvier 2015 pour 8 220,67 euros TTC ;
soit un montant total de 18 502,27 euros TTC.
La note d'honoraires du 3 juillet 2014 a donné lieu à une lettre de change tirée le 4 février 2015 par l'EURL Atelier 1 avec échéance au 30 avril 2015. Cette lettre de change a été acceptée le 4 février 2015 par la SARL M Campus.
En application de l'article L.511-78 du code de commerce, l'action du tireur résultant de la lettre de change contre le tiré accepteur se prescrit par trois ans à compter de la date d'échéance.
En l'espèce, l'action cambiaire de l'EURL Atelier 1 contre la SARL M Campus se prescrit donc au 30 avril 2018.
Cette demande a été formée par l'EURL Atelier 1 lors de l'audience du 20 février 2017 du tribunal de commerce, date à laquelle la prescription de trois ans n'était pas acquise. Cette action est donc recevable.
L'acceptation de cette lettre de change par la SARL M Campus ne la prive cependant pas du droit de combattre la présomption de provision énoncée par l'article L. 511-7 du code de commerce aux fins d'écarter l'action du tireur.
La SARL M Campus se prévaut de l'inexécution du contrat d'architecte formant la cause de la lettre de change pour écarter l'action cambiaire exercée contre elle par l'EURL Atelier 1.
La SARL M Campus fait valoir contre l'EURL Atelier 1 les griefs et manquements contractuels suivants :
' absence de remise du dossier des ouvrages exécutés et du dossier d'intervention ultérieure sur l'ouvrage :
Ce chef de mission est prévu par l'article 7.9 du contrat d'architecte et rémunéré à hauteur de 1 071 euros HT, soit 1 285,20 euros TTC.
Conformément à l'article 1315 ancien du code civil, il appartient à celui qui se prétend libéré d'une obligation d'en justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
En l'espèce, l'EURL Atelier 1 n'apporte aucune preuve de la remise du DOE et du DIUO au maître de l'ouvrage et ne répond pas à ce moyen dans ses écritures d'appel.
En conséquence, le jugement déféré doit être infirmé en ce qu'il a accordé à l'EURL Atelier 1 le montant de 1 285,20 euros d'honoraires demandés pour cette prestation.
' non réalisation de l'achèvement de la mission :
Ce chef de mission est prévu par les articles 7-8 (assistance aux opérations de réception) et 7-10 du contrat d'architecte.
L'EURL Atelier 1 ne verse pas aux débats les procès-verbaux de chantiers et de réunions contradictoires afférents au suivi des réserves formées lors de la réception des ouvrages. Cette carence est notamment établie par le courrier recommandé avec avis de réception envoyé le 29 avril 2015 par la SARL M Campus et auquel l'architecte maître d'oeuvre n' jamais répondu.
Cette carence de l'architecte justifie une réfaction des honoraires dus pour la mission AOR (totalité 1 285,20 euros TTC) à hauteur de la moitié soit 642,60 euros TTC.
' les autres manquements reprochés à l'architecte par la SARL M Campus concernent :
- le raccordement tardif de l'immeuble au réseau EDF (courrier du 28 novembre 2014) et location nécessaire d'un compteur de chantier
- problème de drainage des bâtiments ayant entraîné l'inondation du local n°0.
Les seuls éléments de preuve versées aux débats par la SARL M Campus sont un courrier du 28 novembre 2014 et diverses factures de location de matériels et de consommation électrique ainsi qu'un constat d'huissier du 22 avril 2015 relatifs à des désordres imputés à l'entreprise Ineo chargée du lot électricité.
Par ailleurs, le fait que la SARL M Campus ait accepté le 20 mars 2015 la lettre de change émise à partir de la note d'honoraires de 10 281,60 euros du 3 juillet 2014 établit que les griefs reprochés aujourd'hui par le maître d'ouvrage à l'architecte ne l'étaient pas à la date du 20 mars 2015.
Il résulte de ces développements que la preuve n'est pas rapportée par la SARL M Campus de la survenue de ces préjudices et de leur imputabilité à l'architecte maître d'oeuvre justifiant le non paiement des honoraires qui lui sont dus.
Le jugement sera donc partiellement infirmé en ce qu'il a fait intégralement droit à l'action en paiement formée par l'EURL Atelier 1 contre la SARL M Campus.
Cette action en paiement sera accueillie à hauteur de la somme suivante :
18 502,27 euros ' 1 285,20 euros ' 642,60 euros = 16 574,47 euros TTC.
Les dispositions de l'article 8 du contrat d'architecte stipulent que tout retard de paiement au-delà du délai maximum de 21 jours par le maître de l'ouvrage ouvre droit au paiement d'une indemnité de retard de 3,5/10 000ème du montant HT de la facture par jour calendaire.
Dans ses écritures, la SARL M Campus ne reconnaît pas avoir reçu les deux factures établies par l'EURL Atelier 1 le 3 juillet 2014 et le 7 janvier 2015.
L'EURL Atelier 1 n'apporte pas la preuve de la réception de la facture du 7 janvier 2015 par la SARL M Campus. Sa demande de pénalités de retard concernant le règlement de cette facture ne pourra donc qu'être rejetée.
S'agissant de la facture datée du 3 juillet 2014, l'EURL Atelier 1 n'établit pas que la SARL M Campus l'a reçue avant le 4 février 2015 date à laquelle le maître de l'ouvrage a accepté la lettre de change.
Toutefois, la SARL M Campus n'est pas tenue de payer les pénalités contractuelles de retard après 21 jours écoulés (soit à partir du 25 février 2015) dans la mesure où la cour d'appel fait partiellement droit aux moyens en défense opposés par la SARL M Campus.
Par ailleurs, l'absence de réponse de l'EURL Atelier 1 au maître de l'ouvrage à partir du 29 avril 2014 (date d'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception demeurée sans réponse) constitue une négligence fautive de la part de l'EURL Atelier 1 qui fait obstacle à l'application de la clause pénale de l'article 8 du contrat en sa faveur.
L'EURL Atelier 1 sera tenue aux entiers dépens.
L'équité commande en l'espèce de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré à l'exception de sa disposition ayant condamné la SARL M Campus à payer à l'EURL Atelier 1 la somme de 18 502,27 euros représentant le solde des honoraires du contrat d'architecte ;
Statuant à nouveau sur l'unique chef infirmé,
Condamne la SARL M Campus à payer à l'EURL Atelier 1 la somme de 16 574,47 euros représentant le solde des honoraires du contrat d'architecte ;
Y ajoutant,
Dit que les dépens d'appel seront supportés par l'EURL Atelier 1 ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs plus amples demandes.
Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,