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07/10/2022 | FRANCE | N°22/00390

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 07 octobre 2022, 22/00390


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 22/00390 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PSEV



O R D O N N A N C E N° 2022 - 395

du 07 Octobre 2022

SUR TROISIEME PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER

[Adresse 5]

[Localité 2]



Appelant,

représenté par Madame Nathalie BANY, substitut du procureur



D'AUTRE PART :

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1°) Monsieur [T] [Y]

né le 02 Juillet 1985 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne



retenu au centre de rétention de [Localité 6] dans les locaux ne re...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 22/00390 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PSEV

O R D O N N A N C E N° 2022 - 395

du 07 Octobre 2022

SUR TROISIEME PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER

[Adresse 5]

[Localité 2]

Appelant,

représenté par Madame Nathalie BANY, substitut du procureur

D'AUTRE PART :

1°) Monsieur [T] [Y]

né le 02 Juillet 1985 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

retenu au centre de rétention de [Localité 6] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant, assisté de Maître Laetitia BERRY, avocat commis d'office.

2°) Monsieur LE PREFET DE L'HERAULT

[Adresse 1]

[Localité 2]

Non représenté

Nous, Pascal MATHIS conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Marion CIVALE, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Montpellier en date du 06 mai 2021 ayant prononcé une interdiction de territoire français envers Monsieur [T] [Y],

Vu l'arrêté du 26 juillet 2022 de Monsieur LE PREFET DE L'HERAULT qui a fait obligation à Monsieur [T] [Y] de quitter le territoire français avec interdiction de retour de deux ans,

Vu la décision de placement en rétention administrative du 5 août 2022 de Monsieur [T] [Y], pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Vu l'ordonnance du 8 août 2022 notifiée le même jour, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours,

Vu l'ordonnance du 5 septembre 2022 notifiée le même jour, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de trente jours,

Vu la saisine régulière de Monsieur LE PREFET DE L'HERAULT pour obtenir une troisième prolongation de la rétention de cet étranger,

Vu l'ordonnance du 05 octobre 2022 à 12h41 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de ne pas prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de quinze jours,

Vu la déclaration d'appel faite le 05 Octobre 2022 par Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER, transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 15h30,

Vu les télécopies et courriels adressés les 05 et 06 Octobre 2022 à Monsieur [T] [Y], Monsieur LE PREFET DE L'HERAULT, à Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER, à Maître BERRY, et à Monsieur le Procureur Général les informant que l'audience sera tenue le 07 Octobre 2022 à 09 H 00,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans la salle d'audience de la cour d'appel de Montpellier dédiée aux audiences du contentieux des étrangers, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 09 H 00 a commencé à 09 H 17.

PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [T] [Y] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [T] [Y]. Je suis né le 02 Juillet 1985 à [Localité 3], en ALGERIE'

Madame [P] [R], représentant à l'audience Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention.

Elle indique à l'audience : 'Je vais vous demander d'infirmer la décision attaquée.'

Monsieur le représentant de Monsieur LE PREFET DE L'HERAULT ne comparait pas.

Maître [G] [X] indique à l'audience : 'L'OQTF est-elle exécutoire, oui. La procédure en appel n'est pas suspensive.

Sur le bref délai: il est vrai que les autorités françaises n'ont pas d'injonction sur les autorités consulaires, sauf que l'autorité préfectorale doit apporter la preuve que les autorités consulaires vont délivrer un laissez passer à bref délai. Or ce n'est pas le cas en l'espèce. La dernière diligence date du 26 septembre. Maintenir mon client en rétention sans que l'on soit certains d'une telle délivrance est impossible à mon sens. Je vous demande la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Montpellier.'

Elle dépose à l'audience des justificatifs de domicile de Monsieur [Y].

Le conseiller indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel :

Le 05 Octobre 2022, à 15h30, Monsieur LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MONTPELLIER a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Montpellier du 05 Octobre 2022 notifiée à 12h41, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

SUR LE FOND

M. [Y] [T], né le 2 juillet 1985 à [Localité 3] (Algerie), de nationalité algérienne, a été écroué au centre pénitentiaire de [Localité 4] le 11 janvier 2021 et condamné le 6 mai 2021 par la cour d'appel de Montpellier à 2 ans d'emprisonnement dont 6 mois avec sursis probatoire pendant 2 ans pour des faits de violence aggravée par trois circonstances suivie d'incapacité n'excédant pas 8jours et violence suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité.

L'intéressé a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai assorti d'une interdiction de retour de deux ans prononcé par le préfet de l'Hérault le 26 juillet 2022 notifié le 28 juillet 2022 et confirmée par le tribunal administratif de Montpellier le 4 août 2022 ;

A la suite de sa libération de centre pénitentiaire, il a été placé en rétention administrative au centre de [Localité 6], par arrêté du 5 août 2022 pour une durée de 48 heures, soit jusqu'au 7 août 2022.

Suivant ordonnance du 8 août 2022, le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Montpellier a prolongation la rétention pour une durée de 28 jours, soit jusqu'au 4 septembre 2022, mesure confirmée par la cour d'appel de Montpellier le 10 août 2022.

Le 5 septembre 2022 le juge des liberté et de la détention a encore prolongé de rétention de l'intéressé jusqu'au 4 octobre 2022, décision confirmée par ordonnance du 8 septembre 2022, le conseiller délégué retenant que :

" Le recours contre une mesure administrative ne fait pas obstacle au placement en rétention administrative de l'étranger dont l'éloignement ne peut avoir lieu avant que le tribunal administratif de Montpellier, saisi de son recours contre l'arrêté portant refus de titre de séjour déposé le 31 août 2022 à 19h06, enregistrée par le greffe administratif le 1er septembre 2022 à 5h15, ait statué ; la contestation du dépassement du délai de 96 heures pour statuer du juge administratif ne relève pas de la compétence d'attribution du juge judiciaire et la prétention du dépassement du délai pour statuer par le juge administratif ne constitue pas une voie de fait, puisque l'éloignement ne peut être mis à exécution sans que le juge administratif se soit prononcé et que selon le relevé d'enregistrement du recours formé le délai pour statuer est de 2 mois. D'une part, le placement en rétention administrative s'il constitue une ingérence dans la vie privée et de famille de l'étranger en situation irrégulière est prévu par la loi et d'autre part, l'étranger a usé de son droit à recours contre une décision administrative de rejet de sa demande de titre de séjour, en conséquence, il n'y a eu violation d'aucun des articles 8 et 13 de la CESDH.

Pour Voir accueillir sa demande de nouvelle prolongation, 1'administration devra non seulement démontrer qu'elle se trouve dans l'un des cas de figure visés à l'article L. 742-4 du CESEDA mais justifier des diligences accomplies pour organiser le départ de l'étranger. Or l'autorité administrative justifie de la reconnaissance par l'Algérie de l'étranger le 26 août 2022, de sa demande de routing le 30 août 2022 avec date sollicitée à quatre jours du vol pour récupérer le laisser-passer consulaire. Qu'étant dans l'attente de la délivrance du laisser-passer consulaire, il convient constater que l'autorité administrative justifie des deux conditions imposées pour voir accueillir sa requête en deuxième prolongation. Le moyen de nullité sera rejeté. "

Par ordonnance du 5 octobre 2022 signifiée le jour même à 12h41 le juge des libérés et de détention a rejeté la requête en troisième prolongation de la rétention administrative aux motifs suivants :

" Attendu que par application de l'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi

aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L. 611-3 ou du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Dans ces cas, l'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué, Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours ;

Que depuis la précédente décision du juge des libertés et de la détention du 5 septembre 2022, ayant autorisé la seconde prolongation de la rétention administrative de M. [Y] pour une période d'un mois, ce qui a été confirmé par ordonnance de la cour d'appel de Montpellier le 8 septembre 2022, l'autorité préfectorale justifie avoir effectué les démarches suivantes :

- le 12 septembre : une demande de modification de routing à destination de l'Algérie par voie maritime ;

- le 21 septembre 2022 : une demande de délivrance d'un laissez-passer consulaire en vue d'un départ bateau le 27 septembre 2022 ;

- le 23 septembre 2022 : une relance auprès du consulat algérien, en l'absence de réponse de leur part : annulation du départ du 27 septembre 2022 à destination de l'Algérie ;

- le 26 septembre 2022 : nouveau routing sollicité à destination de l'Algérie.

Si l'administration justifie ainsi avoir réalisé les diligences nécessaires pour obtenir un laissez-passer et un routing afin de mettre à exécution la mesure d'éloignement, elle n'établit pas que les autorités algériennes, qui n'ont donné aucune réponse à la demande de laissez-passer depuis le 21 septembre 2022, soit depuis 15 jours, alors que la reconnaissance de la nationalite est effective depuis le 26 août délivreront ce document à bref délai. De plus, comme le souligne le conseil de l'intéressé aucune date d'audience sur le recours de son client contre le refus de délivrance d'un titre de séjour devant le tribunal administratif n'a encore été fixée à ce jour ; or la perspective que l'audience soit fixée a bref délai est également faible.

Dès lors, les conditions pour obtenir une prolongation exceptionnelle de la rétention administrative de M. [Y] pour un nouveau délai de 15 jours, au visa de l'article L. 742-5 du CESEDA ne sont pas remplies. "

Monsieur le Procureur Général fait valoir à l'appui de son appel que si le recours devant le tribunal administratif contre une OQTF est suspensif, l'appel dirigé contre le jugement du TA ne l'est pas et qu'en l'espèce le recours contre l'OQTF a été rejeté par le tribunal administratif et que l'OQTF est exécutoire sans délai qu'ainsi il ne peut sérieusement être excipé, sans commettre d'erreur de droit, que l'absence de date d'audience dans le contentieux du refus de titre de séjour constituerait un obstacle à la mise à exécution de l'OQTF validée par le TA.

L'appelant ajoute que M. [Y] a été reconnu par les autorités algériennes comme ressortissant algérien et qu'il ne peut être demandé au préfet de prouver avec précision la date à laquelle le consulat d'Algérie produira le laissez passer, preuve impossible dans la mesure où ledit préfet ne dispose d'aucun pouvoir sur les autorités consulaires, qu'aux termes de l'article L742-5 du CESEDA, il lui appartient seulement d'établir que cette délivrance interviendra à bref délai et que tel est le cas dès lors qu'il n'existe aucun obstacle juridique ou consulaire (du fait de la reconnaissance de nationalité qui implique nécessairement la délivrance ultérieure d'un laissez passer) pour la mise à exécution de cette OQTF.

Pour conférer à cet appel un effet suspensif, le délégué du premier président de la cour a retenu que M. [Y], contrairement à ce que soutient son avocat dans ses observations, ne justifie d'aucun domicile sur le sol français, aucune pièce (bail, attestation hébergement) n'étant produite aux débats, le simple fait qu'il ait trois enfants de nationalité française et qu'il soit marié à une française ne permettant pas de se convaincre de la réalité de ses garanties de représentation alors que son casier judiciaire porte trace de 11 condamnations, notamment pour des faits de violences aggravées sur conjoint ou concubin (décision du 6 mai 2021).

Au vu de l'ensemble des pièces produites déjà énumérées par le premier juge dans la décision critiquée, ensemble auquel ni l'autorité préfectorale ni le parquet général n'apportent de complément ou d'actualisation, l'autorité administrative n'établit pas que la délivrances des documents de voyage doivent intervenir à bref délai dès lors qu'un nouveau routing a été sollicité le 26 septembre 2022 sans réponse ni relance.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons la décision déférée,

Ordonnons la remise en liberté de M. [T] [Y].

Lui rappelons qu'il a l'obligation de quitter le territoire national,

Ordonnons la notification immédiate de la décision au Procureur Général,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 07 Octobre 2022 à 10h03.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 22/00390
Date de la décision : 07/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-07;22.00390 ?
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