Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
5e chambre civile
ARRET DU 18 OCTOBRE 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/02383 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OTFP
Décisions déférées à la Cour : Jugement du 16 SEPTEMBRE 2019 et jugement portant rectification d'erreur en date du 21 OCTOBRE 2019 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
Ordonnance de jonction en date du 29 septembre 2020 des numéros RG 19/6570 ET RG 20/2383 sous RG 20/2383
APPELANTE :
S.A.S. BESSON CHAUSSURES Société par Actions Simplifiée au capital de 19.932.360 €, immatriculée au RCS de CLERMONT-FERRAND sous le n° 304.318.454, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège social
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Marie pierre VEDEL SALLES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
assistée de Astrid BOURGOGNE, avocat au barreau de PARIS substituant Me Séverine VALADE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 19/06570 (Fond)
INTIMEE :
S.A.S.U. FINANCIERE INTERNATIONALE MONCEAU au capital de 10.000 euros immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 842.708.778 (venant aux droits de la SOCIETE FONCIERE ET FINANCIERE MONCEAU RCS PARIS 340.040.294) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
assistée de Me Yvan VIAL, avocat au barreau de GRASSE substituant Me Christophe SANTELLI-ESTRANY, avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant
Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 19/06570 (Fond)
Ordonnance de clôture du 22 Août 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 SEPTEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre
Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller
M. Emmanuel GARCIA, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sylvie SABATON, greffier.
*
**
Par acte du 15 avril 1998, la société Centre Chaussures à laquelle vient aux droits la SASU Financière Internationale Monceau a donnée à bail un local commercial à la SAS Besson Chaussures.
Pas un avenant du 29 janvier 2007, le preneur devient propriétaire des équipements et matériels spécifiques à son activité, le bail se limitant aux bâtiments et terrains à l'exclusion de tout autre élément.
Un arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 7 mars 2012 a fixé le loyer annuel à la somme de 299 000 € hors-taxes hors charges à compter du 15 mai 2007, et une valeur locative de la partie habitation à payer en plus de 6000 € par an.
Par acte du 8 février 2016, le preneur a signifié une demande de renouvellement pour le 15 mai 2016. À la suite du désaccord des parties sur le montant du loyer, le preneur a assigné le bailleur par acte du 2 mars 2017 aux fins de fixation du loyer du bail renouvelé.
Un jugement mixte du 26 octobre 2017 dit que le parking de 5135 m² doit être intégré dans le calcul de la surface pondérée, et avant dire droit ordonne une mesure d'expertise avec un loyer annuel par provision à 342 998,44 €.
L'expert a déposé son rapport le 4 janvier 2019.
Le jugement rendu le 16 septembre 2019 par le tribunal de Grande instance de Perpignan énonce dans son dispositif :
Dit que le loyer plafonné du bail renouvelé correspond à la valeur locative.
Fixe le prix du bail renouvelé à la somme de 342 988,44 € par an hors-taxes hors charges.
Condamne la SAS Besson Chaussures à payer à la SASU Financière Internationale Monceau (dénomination actuelle) la somme de 3500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SAS Besson Chaussures aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
Le jugement fait une description de l'état des lieux constaté par l'expert, qui relève une surface hors mezzanine de 1856 m² 46 et une surface utile pondérée de 2419 m² 87, selon des calculs qui ne sont pas contestés.
L'expert observe que le preneur acquitte les taxes foncières et retient que cela ne justifie pas un abattement pour charges exorbitantes, ce transfert de charges étant couramment pratiqué dans le secteur. Il retient que la baisse d'activité de l'ordre de 15 % de 2008 à 2017 n'est pas imputable à des éléments nouveaux intervenus pendant le bail précédent.
L'expert fixe une valeur locative moyenne dans le secteur de 144 € m²/an. Il observe que la valeur moindre obtenue pour le magasin Décathlon résulte d'un bail conclu postérieurement au renouvellement, que les éléments de comparaison produits par le preneur ne sont pas probants.
Un jugement en date du 21 octobre 2019 a rectifié le montant du loyer annuel à la somme de 342 998,44 €.
La SAS Besson Chaussures a relevé appel des deux jugements par déclaration au greffe du 16 juin 2020.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 22 août 2022.
Les dernières écritures pour la SAS Besson Chaussures ont été déposées le 16 juillet 2020.
Les dernières écritures pour la SASU Financière Internationale Monceau ont été déposées le 28 septembre 2020.
Le dispositif des écritures pour la SAS Besson Chaussures énonce en termes de prétention :
Infirmer le jugement du 16 septembre 2019.
Fixer à 209 400 € par an le loyer du bail renouvelé.
Dire que la SASU Financière Internationale Monceau devra rembourser le trop-perçu de loyer depuis le 15 mai 2016, avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 4 février 2019, puis à compter de chaque échéance trimestrielle.
Condamner la SASU Financière Internationale Monceau au paiement de la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.
La SAS Besson Chaussures constate que la limite maximale du loyer plafonné compte tenu de la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux au cours du bail expiré s'élève à 342 998,44 € par an, mais que l'expert a estimé la valeur locative réelle à une somme de 242 000 € par an sans déduire l'impôt foncier facturé au preneur.
Sur la base de la surface pondérée correctement évaluée par l'expert, elle conteste le prix au mètre carré retenu par l'expert supérieur aux valeurs locatives du marché dans le secteur.
Elle soutient contrairement à l'affirmation du juge que le paiement des taxes foncières normalement à la charge du bailleur constitue une charge exorbitante, même si les baux du voisinage comportent la même clause conformément à la jurisprudence au travail, dont il convient de déduire le montant remboursé au bailleur pour 32 601 €.
Le dispositif des écritures pour la SASU Financière Internationale Monceau énonce en termes de prétention :
Confirmer le jugement rendu le 16 septembre 2019 rectifié par le jugement du 21 octobre 2019 (par suite d'une erreur matérielle sur le prix du bail renouvelé).
Condamner la SAS Besson Chaussures à payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, les dépens d'appel distrait au profit de l'avocat.
La SASU Financière Internationale Monceau demande de valider les motifs pertinents dont elle reprend les termes dans ses écritures d'évaluation du loyer du bail précédent par l'arrêt de la cour d'appel du 7 mars 2012 qui retenait sur la base du rapport du même expert judiciaire une valeur locative de 141,94 € par m², et rejetait l'application d'un abattement pour charges exorbitantes dans le cadre d'une référence à une valeur moyenne du secteur dans lequel la pratique du paiement de la taxe foncière par le preneur était d'usage, conformément à de nombreuses jurisprudences.
Elle relève l'absence d'éléments dans les critères de l'article L 145-33 du code de commerce de nature à démontrer une valeur locative moindre du plafond légal résultant de la variation de l'indice.
Concernant la référence au prix couramment pratiqué dans le voisinage, elle critique le prix unitaire limité de 100 €/mètre carré retenu par l'expert, alors que la situation du secteur n'a pas subi de variations significatives depuis le rapport précédent de l'expert.
MOTIFS
Un arrêt de cette cour d'appel en date du 7 mars 2012 statuant sur le prix du bail renouvelé à l'échéance de la période précédente du 15 mai 2007 a fixé le loyer à la somme hors taxes et hors charges de 299 000 € par an.
L'appréciation de la cour s'était fondée sur le rapport du même expert judiciaire que celui dont le rapport est déposé dans cette instance pour l'évaluation du loyer du bail renouvelé à la nouvelle échéance du 15 mai 2016.
La première expertise proposait une valeur locative de 141,94 €/mètre carré. L'arrêt de la cour avait rejetée la demande d'un abattement pour charges exorbitantes au motif du paiement de la taxe foncière alors que les commerces de référence supportaient également cette charge.
Le rapport déposé par le même expert dans cette instance pour la nouvelle échéance du bail renouvelé propose un loyer hors taxes et hors charges notablement moindre, de 242 000 € par an, soit une valeur locative de 100 €/mètre carré, au motif énoncé dans la réponse aux dires du bailleur :
« retenir de façon brute la moyenne des baux de comparaison ne me paraît pas suffisant dès lors que l'on constate une diminution des loyers pratiqués pour les baux les plus récents ; les nouveaux loyers tendent vers une moyenne de 100 € le mètre carré ce qui fonde mon choix ; il convient de constater que depuis mon précédent rapport d'expertise en 2011 le marché des valeurs locatives dans le secteur a sensiblement baissé ; ».
Cependant, les critères de modification de la valeur locative doivent en droit s'apprécier exclusivement pendant la période du bail précédent venu à échéance le 15 mai 2016.
La cour constate comme le premier juge que le montant particulièrement bas obtenu par l'enseigne décathlon par rapport aux autres montant de commerces équivalent correspond à un bail renouvelé postérieurement à cette échéance, que les termes de comparaison proposée par le preneur ont été à juste titre écartés par l'expert comme étant seulement des offres par ailleurs nécessairement postérieures à l'échéance de 2016, que la baisse activité n'est pas démontrée en lien de causalité à des éléments nouveaux intervenus pendant la période du bail précédent.
Les motifs énoncés de l'appréciation de l'expert judiciaire d'écarter les critères légaux d'évaluation de la valeur locative en ne retenant pas la moyenne des baux de comparaison, et en s'appuyant sur des loyers et des offres de loyers postérieurs à la période du bail précédent, n'ont pas été retenus à juste titre par le premier juge, et ne le seront pas davantage par la cour en application des dispositions du code de commerce.
La cour confirme également le rejet de la demande d'abattement en considération de la charge pour le preneur de la taxe foncière, pour le motif pertinent du premier juge que les termes de comparaison retenus par l'expert correspondent justement à des baux avec taxe foncière à la charge du preneur.
Des jurisprudences retenant dans d'autres situations un caractère de charges exorbitantes n'ont aucune incidence sur le motif particulier de l'appréciation dans l'espèce au regard des termes de comparaison.
Il est équitable de mettre à la charge du preneur appelant qui succombe une part des frais non remboursables exposés en appel par le bailleur, pour un montant de 4000 €.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition greffe ;
Confirme le jugement rendu le 16 septembre 2019 par le tribunal de Grande instance de Perpignan ;
Condamne la SAS Besson Chaussures à payer à la SASU Financière Internationale Monceau la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;
Condamne la SAS Besson Chaussures aux dépens de l'appel en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, les dépens d'appel distrait au profit de l'avocat.
Le GreffierLe Président