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07/12/2022 | FRANCE | N°19/03530

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 07 décembre 2022, 19/03530


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1re chambre sociale



ARRET DU 07 DECEMBRE 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/03530 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OFIG



Arrêt n° :



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 MAI 2019 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE - N° RG F 18/00185





APPELANT :



Monsieur [V] [R]

[Adre

sse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Cyril CAMBON, avocat au barreau de NARBONNE







INTIMEE :



Société ORANO CHIMIE ENRICHISSEMENT, venant aux droits de la Société ORANO Cycle, anciennement AREVA NC

[Adresse 1]

[Adresse 1]...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 07 DECEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/03530 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OFIG

Arrêt n° :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 MAI 2019 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE - N° RG F 18/00185

APPELANT :

Monsieur [V] [R]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Cyril CAMBON, avocat au barreau de NARBONNE

INTIMEE :

Société ORANO CHIMIE ENRICHISSEMENT, venant aux droits de la Société ORANO Cycle, anciennement AREVA NC

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Pascale DELL'OVA de la SCP ROZE, SALLELES, PUECH, GERIGNY, DELL'OVA, BERTRAND, AUSSEDAT , SMALLWOOD, avocat au barreau de MONTPELLIER (postulant) et par Me VINOT, avocat au barreau de Nîmes (plaidant)

Ordonnance de clôture du 26 Septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 OCTOBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Marie BRUNEL

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [V] [R] a été engagé à compter du 1er décembre 2009 par la société Comurhex en qualité d'« opérateur de fabrication », catégorie « ouvrier », coefficient 175 de la convention collective nationale des industries chimiques moyennant une rémunération mensuelle brute de base de 1690 euros, une gratification annuelle sous forme de treizième mois payable en décembre ainsi qu'une prime de vacances versée en juin d'un montant de base annuel de 1400 euros (valeur au 1er janvier 2009).

Le contrat de travail a par la suite été transféré à la société Orano Cycle puis à la société Orano Chimie Enrichissement.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 4 mai 2018 l'employeur adressait au salarié une convocation à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement.

Par lettre lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 13 juin 2018 l'employeur notifiait au salarié une mise à pied disciplinaire de quatre jours du 25 juin au 28 juin 2018 au motif d'une insubordination caractérisée le 25 mars 2018.

Contestant le bien-fondé de la sanction, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Narbonne par requête du 24 août 2018 aux termes de laquelle il sollicitait la condamnation de l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

'475,94 euros au titre de la retenue indue pour mise à pied disciplinaire, outre 47,59 euros au titre des congés payés afférents,

'5000 euros à titre de dommages-intérêts compte tenu du caractère nul et abusif de la mise à pied disciplinaire,

'1800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il réclamait également la publication de la condamnation dans les journaux, le Midi-Libre, l'Indépendant et la Dépêche du Midi.

Par jugement du 13 mai 2019 le conseil de prud'hommes de Narbonne a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes et il l'a condamné à payer à l'employeur une somme de 100 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [V] [R] a relevé appel de la décision du conseil de prud'hommes le 22 mai 2019.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 26 juillet 2022, Monsieur [V] [R] conclut à la réformation du jugement du conseil de prud'hommes, à titre principal à la nullité de la mise à pied disciplinaire notifiée le 13 juin 2018 et subsidiairement à son caractère injustifié. Il sollicite en toute hypothèse la condamnation de l'employeur à lui payer les sommes suivantes:

'475,94 euros au titre de la retenue indue pour mise à pied disciplinaire, outre 47,59 euros au titre des congés payés afférents,

'5000 euros à titre de dommages-intérêts compte tenu du caractère nul et abusif de la mise à pied disciplinaire,

'1800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 31 octobre 2019, la société Orano Cycle aux droits de laquelle vient la société Orano Chimie Enrichissement conclut à la confirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes, au débouté du salarié de ses demandes et elle sollicite reconventionnellement la condamnation de ce dernier à lui payer une somme de 1500 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail outre une somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture était rendue le 26 septembre 2022.

SUR QUOI

Le salarié fait valoir à titre principal qu'il a interpellé son chef de poste en qualité d'élu au CHSCT alors qu'il relevait la volonté de son chef de poste d'outrepasser une consigne ayant des répercussions environnementales.

Il prétend que l'employeur feint d'ignorer la question alors que celle-ci était au c'ur de l'entretien préalable à la sanction disciplinaire et que la sanction prononcée en connaissance de cause par l'employeur doit être annulée en ce qu'elle est discriminatoire.

Il soutient ensuite que la sanction lui a été infligée en raison de l'alerte qu'il a lancée relativement au respect des obligations de rejets Nox, et qu'à ce titre il bénéficie de la protection prévue aux articles L 1351-1 et L4133-5 du code du travail si bien que la sanction est nulle.

Il expose enfin que la nullité est encore encourue car il ne pouvait être sanctionné pour avoir exprimé une opinion à laquelle les restrictions apportées par l'entreprise n'étaient pas proportionnées.

Il réclame enfin des dommages-intérêts sur le fondement du caractère injustifié de la sanction.

Le courrier de notification de mise à pied est ainsi libellé :

«'Monsieur,

La présente fait suite à l'entretien préalable à sanction qui s'est tenu le 16 mai 2018, au cours duquel nous vous avons exposé les raisons nous conduisant à envisager une sanction disciplinaire, ceci en présence de Messieurs [T] [Z], élu au comité d'établissement et [Y] [X], élu au CHSCT.

Nous avons eu le regret de constater des propos injurieux vis-à-vis de votre responsable hiérarchique et une insubordination caractérisée le 25 mars dernier.

Dans le contexte de redémarrage des installations, eu égard au respect des obligations de rejets NOx, vous contredites les consignes d'exploitation communiquées par le chef de poste.

Cette divergence d'interprétation des consignes de conduite des installations est apparue alors que vous étiez affecté au poste Etiluents sans aucun lien direct avec la conduite «'voie sèche'». Vous avez notamment prévenu votre chef de poste qu'il «'finirait en prison'».

Le ton de la discussion a dégénéré. Les propos injurieux, insultants que vous avez tenu à l'encontre de votre chef de poste sont inacceptables dans une relation de travail normale.

De plus, toujours le 25 mars à la fin du poste, vous avez refusé de répondre aux sollicitations de votre chef de poste concernant les données nécessaires à la relève. Vous avez refusé de répondre au téléphone, les sollicitations répétées via le talkie-Walkie sont demeurées sans réponse et lorsque vous croisez votre chef de poste vous déclarez « je ne veux pas te parler ''.

Nous devons malheureusement constater que les relations de travail avec votre hiérarchie sont nettement dégradées. Nous considérons votre comportement inadéquat en milieu professionnel et constitutif d'une faute.

Les explications que vous nous avez fournies n'ont pas modifié notre appréciation de la situation. Aussi nous vous signifions par la présente une mise à pied de 4 jours, ces éléments constituant un manquement caractérisé et une insubordination manifeste.

Elle commencera le 25 juin et prendra fin le 28 juin. Durant cette période, vous ne serez pas rémunéré.

Nous attendons une réaction notable de votre part pour retrouver au plus vite un comportement adéquat caractéristique du respect dû aux collègues et à la hiérarchie dans le cadre du travail.

Nous tenons à vous rappeler fermement que si de tels agissements devaient se renouveler, nous pourrions être amenés à envisager une sanction disciplinaire plus grave pouvant aller jusqu'à votre licenciement.

Aussi, nous vous demandons une attention de premier ordre sur votre conduite et votre comportement que nous attendons exemplaire...'»

$gt;

En l'espèce, si le salarié invoque avoir été sanctionné en raison de l'alerte qu'il aurait donnée relativement à un non-respect des obligations de rejets Nox par l'entreprise, il ne justifie par aucun élément de ses allégations alors qu'en sa qualité de représentant du personnel au comité d'hygiène et de sécurité il lui appartenait, en application des articles L 4133-1 à L 4133-4 et D 4133-1 à D 4133-3 applicables au litige de consigner par écrit le prétendu risque grave pour la santé publique ou l'environnement qui aurait pu, selon lui, exister.

S'il prétend ensuite avoir été discriminé en raison de son appartenance syndicale l'extrait partiel de procès-verbal de réunion ordinaire du comité d'hygiène et de sécurité des conditions de travail du 10 avril 2018 qu'il produit aux débats, n'est signé de quiconque tandis que les entretiens d'évaluation se réfèrent à des éléments objectifs tirés de l'activité du salarié dont celui-ci a pris acte après le commentaire retour de son N+2.

Enfin, les courriels établis a posteriori courant juin 2018, pas plus que les différents documents relatifs à une condamnation de la société en 2011 ou à une procédure initiée en 2014 par une association, voire à des alertes sur des faits distincts, pas davantage que l'attestation rédigée en août 2018 par un salarié qui l'a assisté ne sont susceptibles de relier les faits objets du débat à une alerte prétendue alors que les faits reprochés se rattachent à un non-respect des consignes.

Monsieur [R] ne présente par conséquent aucun élément de fait permettant de présumer qu'il a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d'un délit ou qu'il a signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 si bien qu'ils ne permettent pas non plus de laisser présumer une quelconque discrimination à son égard.

Enfin, la prohibition de l'injure ou d'un comportement préjudiciables au bon fonctionnement de l'entreprise, sous réserve qu'ils soient établis, ne constituent pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression.

Partant, aucune cause de nullité n'était susceptible d'affecter la validité du prononcé de la sanction de mise à pied.

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Au soutien de celle-ci l'employeur produit un compte rendu détaillé du chef de poste expliquant qu'après accord confirmé des astreintes de redémarrage de l'atelier fluoration le 25 mars 2018, le salarié, avait proféré de nombreuses injures à son égard, si bien que le fait que l'intégralité des injures ne soient pas expressément citée dans le courrier de mise à pied qui s'y réfère, n'est pas de nature à faire disparaître le caractère probant du grief de propos injurieux à l'égard d'un supérieur hiérarchique résultant de cette attestation tandis que le salarié ne produit lui-même aucun élément à cet égard.

L'attestation du chef de poste se réfère encore au refus du salarié de répondre aux sollicitations de son chef de poste concernant les données nécessaires à la relève sans lien avec la panne de réseau imprimante invoquée par le salarié au moyen d'une attestation d'un salarié l'ayant assisté, si bien que l'employeur établit au moyen de l'attestation précise et circonstanciée du chef de poste l'existence d'un comportement d'insubordination préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise.

Il en résulte que la sanction de mise à pied prononcé par employeur, n'était ni injustifiée ni disproportionnée à la faute commise.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [R] de ses demandes de dommages-intérêts et de rappel de salaire.

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L'existence de la faute commise par le salarié ne suffit pas à établir l'existence du préjudice en résultant pour l'employeur sur le fondement d'une exécution déloyale du contrat de travail. Il convient par conséquent de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Orano Chimie Enrichissement de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts.

Compte tenu de la solution apportée au litige au litige Monsieur [V] [R] supportera la charge des dépens.

En considération de l'équité, il convient de dire n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition greffe,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Narbonne le 13 mai 2019;

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne Monsieur [V] [R] aux dépens;

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/03530
Date de la décision : 07/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-07;19.03530 ?
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