Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 15 DECEMBRE 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 17/06335 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NNM3
Jonction des RG n° 17/6335 et n° 17/6544
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 13 OCTOBRE 2017
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE RODEZ
N° RG 15/00024
APPELANTS :
Monsieur [G] [L]
né le 29 Mars 1963 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 17/06544 (Fond)
et
Madame [D] [A]
née le 06 Juillet 1965 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentés par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur [X] [C]
né le 18 mars 1976 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 1]
et
Madame [M] [W]
née le 13 mars 1977 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentés par Me Elian GAUDY de la SCP GAUDY GALANDRIN, avocat au barreau de l'AVEYRON
Ordonnance de clôture du 27 Septembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 OCTOBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Gilles SAINATI, Président de chambre
M. Fabrice DURAND, Conseiller
Mme Emmanuelle WATTRAINT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL
ARRET :
- contradictoire,
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Gilles SAINATI, Président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE
Par acte notarié du 25 novembre 2010, M. [X] [C] et Mme [M] [W] ont acheté à M. [G] [L] et à Mme [D] [A] une maison d'habitation située sur la commune de [Localité 4] (12) au prix de 190 000 euros, outre 10 000 euros représentant le prix des meubles garnissant l'immeuble.
Cet acte a été reçu en réitération d'une promesse synallagmatique de vente conclue par les mêmes parties le 16 juillet 2010.
Une contre-lettre signée par les parties le même jour 25 novembre 2010 stipulait : « Je soussigné M. [L] [G] (') certifie avoir reçu de M. [C] [X] et de Mme [W] [M] la somme en espèce de 18 000 euros, dix-huit mille euros, en complément des 200 000 euros versés pour l'achat de notre maison. »
Cette maison a été édifiée courant 1993 par M. [L] et Mme [A] sur une parcelle de 2 046 m² cadastrée section [Cadastre 5] lieudit [Localité 6] sur la commune de [Localité 4] postérieurement à son acquisition par les vendeurs le 22 avril 1993.
M. [L] a assuré la maîtrise d''uvre du projet et a lui-même participé à la construction aux côtés de plusieurs artisans en bâtiment.
Se plaignant de divers désordres affectant le bien et cachés au moment de la vente, M. [C] et Mme [W] ont saisi par acte d'huissier du 12 février 2013 le juge des référés du tribunal de grande instance de Rodez d'une demande d'expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 6 juin 2013, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire et a commis pour y procéder M. [V] [H].
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 15 mars 2014.
Par acte d'huissier signifié le 5 janvier 2015, M. [C] et Mme [W] ont fait assigner M. [L] et Mme [A] devant le tribunal de grande instance de Rodez aux fins d'annulation de la vente et de la contre-lettre pour dol et subsidiairement aux fins de mise en 'uvre de la garantie des vices cachés, outre l'octroi de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.
Par jugement contradictoire du 13 octobre 2017, le tribunal de grande instance de Rodez a :
' ordonné le rabat de l'ordonnance de clôture du 4 mai 2017 ;
' déclaré recevables les conclusions déposées postérieurement par les parties ;
' déclaré opposables aux parties le rapport d'expertise du 11 septembre 2014 de M. [U] ainsi que le devis de M. [Z] ;
' rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de publicité foncière de l'assignation ;
' dit que M. [L] et Mme [A] avaient commis un dol ayant eu pour effet de vicier le consentement de M. [C] et de Mme [W] ;
' prononcé la nullité du contrat de vente du 25 novembre 2010 ;
' condamné solidairement M. [L] et Mme [A] à restituer à M. [C] et à Mme [W] le prix de vente de l'immeuble, soit la somme de 200 000 euros ;
' dit que M. [C] et Mme [W] restitueraient l'immeuble objet du contrat de vente du 25 novembre 2010 en l'état où il se trouvait lors de la vente dans un délai de 3 mois suivant le présent jugement et en tout état de cause après restitution du prix de vente par M. [L] et Mme [A] ;
' condamné solidairement M. [L] et Mme [A] à payer à M. [C] et à Mme [W] la somme de 2 000 euros au titre de leur préjudice moral ;
' condamné solidairement M. [L] et Mme [A] à payer à M. [C] et à Mme [W] la somme de 4 881 euros au titre du remboursement des taxes foncières ;
' débouté M. [C] et Mme [W] de leurs demandes de réparation des autres chefs de préjudices ;
' débouté M. [L] et Mme [A] de leur demande de versement d'une indemnité d'occupation ;
' prononcé la nullité de la contre-lettre du 25 novembre 2010 ;
' condamné solidairement M. [L] et Mme [A] à payer à M. [C] et à Mme [W] le prix fixé par la contre-lettre soit la somme de 18 000 euros ;
' condamné solidairement M. [L] et Mme [A] à payer à M. [C] et à Mme [W] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' rejeté la demande de M. [L] et Mme [A] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision ;
' condamné solidairement M. [L] et Mme [A] au paiement des entiers dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire.
Par déclaration au greffe du 7 décembre 2017, M. [L] et Mme [A] ont relevé appel de ce jugement à l'encontre de M. [C] et de Mme [W].
Par nouvelle déclaration au greffe du 19 décembre 2017, M. [L] et Mme [A] ont complété leur déclaration d'appel initiale afin d'y inclure le chef de jugement afférent à l'indemnité d'occupation.
Par ordonnance du 7 octobre 2021, le conseiller de la mise en état a joint ces deux appels sous le RG n°17-06335.
Vu les dernières conclusions de M. [L] et de Mme [A] remises au greffe le 2 septembre 2019 ;
Vu les dernières conclusions de M. [C] et de Mme [W] remises au greffe le 4 mars 2022 ;
La clôture de la procédure a été prononcée le 27 septembre 2022.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la recevabilité de l'action en nullité de la vente,
La cour relève que l'assignation introductive d'instance du 5 janvier 2015 a été régulièrement publiée au fichier immobilier le 3 mars 2017 ainsi que le démontre la pièce n°25 produite par les intimés.
Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a déclaré l'action exercée par M. [C] et Mme [W] recevable.
Sur le dol invoqué par M. [C] et Mme [W],
L'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable en l'espèce au regard de la date du contrat de vente du 25 novembre 2010, dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Le dol ne se présume pas et doit être prouvé.
La démonstration du dol suppose donc de caractériser l'intention dolosive de l'une des parties, c'est-à-dire la volonté de celle-ci de tromper l'autre en pratiquant des man'uvres ou en retenant sciemment des informations qui, si elles avaient été connues de cette autre partie, auraient dissuadé celle-ci de contracter.
Il convient de rappeler en préalable que les parties sont admises à verser aux débats toutes pièces ou documents, y compris un rapport d'expertise amiable non contradictoire ou un devis d'entreprise, sous réserve que ces documents soient soumis à la libre discussion des parties.
Il est également rappelé que M. [L] et Mme [A] ont été invités à participer à l'expertise amiable réalisée par M. [U] du cabinet Ixi le 24 octobre 2012 mais qu'ils n'ont pas jugé utile de participer ni de se faire représenter lors de ces opérations d'expertise.
Lors des opérations d'expertise judiciaire, M. [L] et Mme [A] ont été mis en mesure de visiter la maison, de prendre la mesure des différents désordres, de critiquer les éléments rapportés par M. [U] dans ses deux rapports d'expertise amiable du 17 janvier 2013 et du 11 septembre 2014 et de formuler des observations sur le devis de l'entreprise [Z].
Par ailleurs, les deux expertises de M. [U] et le devis [Z] ne sont pas les seuls éléments fondant la décision du tribunal qui a largement pris en compte les éléments contenus dans le rapport d'expertise judiciaire parfaitement contradictoire déposé le 15 mars 2014 par M. [H].
La cour, confirmant le jugement déféré sur ce point, n'écartera donc pas ces pièces des débats ainsi que le demandent M. [L] et Mme [A] dans leurs écritures.
Les enduits de la façade ouest
Les opérations d'expertise ont établi que les enduits de la façade ouest de la maison présentaient une défectuosité généralisée affectant l'imperméabilité de la paroi :
' présence de micro-fissures et de fissures risquant de progresser dans l'épaisseur de l'enduit et ainsi conduire à des infiltrations d'eau. Ces désordres d'origine mécanique affectent la fonction première de l'enduit extérieur qui est l'imperméabilisation ;
' présence de micro-organismes, en l'espèce des algues rouges qui secrètent des acides organiques agissant chimiquement sur le support. L'expert précise que le traitement au karcher de l'enduit par M. [L] a favorisé le développement de ces algues.
Les vendeurs avaient connaissance de ce défaut puisqu'ils ont nettoyé la façade à haute pression et tenté de l'imperméabiliser avant de vendre la maison ainsi qu'ils le reconnaissent dans leurs premières conclusions d'appel.
M. [L] n'a jamais versé la facture du produit hydrofuge utilisé qui aurait permis d'établir la date précise de son intervention mais il est établi que cette intervention sur la façade visait précisément à réparer le défaut d'étanchéité de l'enduit.
Ce traitement superficiel a masqué, au moins jusqu'à la date de la vente du 25 novembre 2010, le défaut d'étanchéité de l'enduit de façade fragilisé encore davantage par le nettoyage à haute pression appliqué par les vendeurs et ayant détruit son imperméabilité.
Les vendeurs avaient connaissance de ce désordre d'infiltration et en ont fait part à M. [C] et à Mme [W] qu'ils ont induits en erreur en mentionnant dans la promesse de vente du 16 juillet 2010 qu'ils s'obligeaient « à réparer avant la signature de l'acte authentique la fuite du bac à douche » présentée comme la cause unique de la seule trace d'écoulement visible se situant à l'intérieur du garage.
Cette fausse information a également été donnée par Mme [A] à Mme [Y] [N], agent immobilier intervenue lors de la mise en vente de la maison en 2010 ainsi qu'elle en fait part dans son attestation.
Durant les 17 années d'occupation de leur maison, il n'a pas pu échapper à M. [L] et à Mme [A] que la manifestation de cette humidité était directement corrélée à l'action de la pluviosité extérieure contre la façade et aucunement à l'usage de la douche, ainsi que l'a constaté sans difficulté l'expert judiciaire.
Les cinq attestations versées aux débats ont toutes été établies par des amis et parents des appelants, ce qui réduit considérablement leur valeur probatoire. En outre, ces attestations évoquent l'absence d'humidité dans la salle de jeu qui est située contre la façade située à l'opposé de la façade ouest concernée par les infiltrations.
A l'inverse, ce vice n'était pas décelable par les acquéreurs du fait du nettoyage des algues au karcher et de l'absence de fissures bien visibles sur ce mur pignon à la date de la vente, ce dont témoigne notamment la photographie publiée par l'agence immobilière Orpi (pièce n°19 des appelants).
Les vendeurs n'ont pas informé leurs acquéreurs de ces travaux dans l'acte de vente qui stipule en page 9 « qu'aucune construction rénovation n'a été effectuée dans les dix dernières années ».
Le jour de l'expertise, seules des micro-fissures étaient apparentes ne traduisant qu'un désordre esthétique mineur sans gravité manifeste pour des acquéreurs profanes.
Ce désordre entraîne d'après l'expert judiciaire une « extrême humidité du mur pignon ouest » et génère un important risque d'infiltration d'eau à travers le mur et sa réparation est estimée par l'expert à la somme de 4 500 euros TTC.
Son degré de gravité et l'inquiétude qu'il a légitimement causée aux acquéreurs permettent d'établir que ces derniers n'auraient pas acheté la maison dans les mêmes conditions s'ils avaient été informés de l'existence de ce désordre susceptible de porter atteinte à l'étanchéité de la maison.
Ce caractère déterminant du dol est corroboré par l'attention portée par les acquéreurs dans le compromis de vente du 16 juillet 2010 au sujet de l'identification des causes de cette infiltration et à la réparation de ce désordre imposée à leurs vendeurs.
Il résulte des précédents développements que les vendeurs ont dissimulé à leurs acquéreurs l'origine et l'ampleur de ces désordres d'infiltration et qu'ils ont appliqué quelques années avant la vente un traitement superficiel qui a temporairement dissimulé les traces de ces désordres tout en fragilisant encore davantage l'enduit du mur pignon ouest.
Il en résulte, ainsi que des motifs du jugement déféré que la cour adopte expressément, que M. [C] et Mme [W] ont été victimes d'un dol de la part de leurs vendeurs concernant la présence de fissures en façade ouest.
Les venues d'eau dans le sous-sol
L'expertise judiciaire a aussi confirmé la présence de remontées d'eau sur un espace du sous-sol à l'endroit présentant une différence de niveau avec l'ensemble du dallage. L'eau pénètre à travers un tuyau en PVC laissé en attente dans cette réservation du dallage et alimenté en période de forte pluie par le caniveau de récupération d'eau de pluie situé devant l'entrée des garages.
L'expert a également constaté que l'eau pénétrait dans la réservation du dallage par la sous face de ce dallage.
Le coût de réparation de ce désordre est évalué par l'expert judiciaire entre 450 et 800 euros HT pour boucher le tuyau en PVC et rétablir la continuité du dallage avec une bonne connexion sur le mur vertical outre le coût d'installation d'une station de relèvement d'eaux de pluie évalué entre 1 700 et 2 050 euros HT.
Le mur ouest au droit de la réservation du dallage présente des écoulements d'eau dont la cause a été identifiée comme étant le drain construit par M. [L] qui n'est pas conforme aux règles de l'art. En effet, il s'agit d'un drain à usage agricole qui n'est pas adapté au drainage d'une maison d'habitation qui en outre a été posé sur un remblai de mauvaise qualité.
Le coût de réparation de ce drain est évalué entre 350 et 400 euros HT/m² de surface à traiter par l'installation d'un cuvelage intérieur.
L'expert précise que la seule solution définitive consisterait à remplacer le drain existant défectueux ou de nettoyer régulièrement ce drain, notamment grâce à la création de regards complémentaires permettant de vérifier les écoulements et d'introduire un hydrocureur aux fins de nettoyage. Cette solution technique représente un coût d'environ 20 000 euros TTC d'après l'expert privé M. [U] s'appuyant sur un devis de l'entreprise [Z].
En avril 2012, M. [L] a expliqué à M. [C] qu'il avait installé un vide-cave dans cette cavité qu'il a retiré par la suite.
L'expert a relevé en premier lieu que M. [L] était « très imprécis sur toutes les justifications qu'il a pu fournir » concernant ce vide-cave lors des opérations d'expertise judiciaire.
La réalité de ce fait a été confirmée par les opérations d'expertise judiciaire qui ont mis en évidence la présence d'une prise électrique et d'une connexion de petit diamètre à proximité du tuyau en PVC qui n'a pu servir qu'à un appareil similaire à un vide-cave, à défaut de présenter une quelconque autre utilité à cet endroit précis de l'immeuble.
L'expert privé M. [U] a également constaté que les vendeurs avaient enlevé les équipements existants et rebouché le trou formant le regard.
Les multiples attestations tardivement versées en cause d'appel par M. [L] et Mme [A] concernant l'absence de vide-cave dans la réservation de la maison ne sont pas probantes en ce qu'elles émanent toutes de membres de la famille ou de l'entourage amical et présentent un contenu très peu circonstancié et stéréotypé, certains de ces témoignages étant strictement identiques comme s'ils avaient été écrits sous la dictée.
De même, le devis d'un entrepreneur se trouvant être le beau-frère de M. [L] et attestant de la conformité des travaux aux normes en vigueur en 1993 ne renforce pas la crédibilité de ces divers témoignages.
Dès sa seconde visite, l'expert judiciaire a constaté la présence d'importantes quantités d'eau drainées dans cette réservation. Durant 17 ans, la présence régulière de telles quantités d'eau n'a pas pu être ignorée par les propriétaires de la maison qui ont dû installer un vide-cave.
L'expert judiciaire a écrit dans son rapport : « Il est très clair pour nous que ces venues d'eau étaient connues du vendeur, en effet lors de la deuxième visite les quantités d'eau drainées dans cette réservation étaient notoires ».
L'importance des désagréments subis par M. [C] et Mme [W] du fait de l'humidité et des infiltrations d'eau, de même que l'importance des travaux de réparation nécessaires, qui ne suffiront pas pour faire entièrement disparaître le risque de réapparition de tels désordres, caractérisent amplement la gravité de ce vice de l'immeuble.
En effet, la réalisation des travaux nécessaires ne supprimera jamais la contrainte de toujours surveiller et d'entretenir une station de relevage installée dans leur cave dans une fosse à deux mètres de profondeur. Cet ouvrage entraînera des frais de fonctionnement et la pompe devra être régulièrement changée. Une telle contrainte est toujours prise en compte lors d'un achat immobilier et affecte nécessairement la valeur vénale de l'immeuble.
Les acquéreurs n'étaient pas en mesure de déceler l'existence de ce vice alors surtout que M. [L] et Mme [A] les ont induits en erreur en déclarant que la réservation dans le dallage était destinée à la création d'une cave à vin. A la date de la vente, du fait de l'efficacité du vide-cave installé par les vendeurs, le sous-sol apparaissait sain et la réservation du dallage n'était pas encore inondée.
L'inondation de la réservation a été constatée par l'expert judiciaire après une période de pluie. Les appelants contestent la réalité du constat de l'expert sans apporter aucun élément concret face aux évidences factuelles contenues dans ce rapport.
Le dol est donc parfaitement caractérisé concernant le vice d'inondation du sous-sol, ce en quoi le jugement déféré, dont la cour adopte expressément les motifs, sera confirmé.
Les fuites au niveau de la toiture
Ainsi que l'a relevé le jugement déféré dont les motifs sont adoptés par la cour, il n'est pas démontré que M. [L] et Mme [A] avaient connaissance d'un défaut de réalisation de l'arêtier et de la présence de fuites d'eau venant de la couverture.
La pose du film polyane a pallié temporairement les conséquences de la mauvaise réalisation de l'arêtier et de la souche de cheminée. Ce seul manquement aux règles de l'art lors de la construction est insuffisant pour établir l'élément intentionnel du dol ou la mauvaise foi faisant échec à la clause de non garantie des vices cachés.
Le seul fait que M. [L] et Mme [A] aient construit eux-mêmes la toiture sans recours à une entreprise de construction ne suffit pas établir l'existence de man'uvres dolosives de leur part au sens de l'article 1116 ancien du code civil.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que le dol n'était pas établi concernant les fuites en toiture et que les vendeurs ignorant l'existence du vice lors de la vente pouvaient se prévaloir de la clause de non garantie des vices cachés.
Désordres affectant le carrelage des terrasses
Ainsi que l'a exactement relevé le jugement déféré, l'expertise judiciaire et les éléments versés aux débats ne permettent pas de caractériser les éléments constitutifs d'un dol ou l'existence d'un vice caché affectant le carrelage des terrasses connu des vendeurs.
Les vices affectant les carrelages n'étaient pas connus des vendeurs et relèvent à la fois d'une réalisation imparfaite (mauvaise qualité de la dalle en béton et des armatures métalliques) et d'une dégradation liée aux aléas climatiques et à la nécessité d'entretenir l'ouvrage.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que le dol n'était pas établi concernant les désordres affectant le carrelage et que les vendeurs ignorant l'existence du vice lors de la vente pouvaient se prévaloir de la clause de non garantie des vices cachés.
Désordre affectant la charpente
L'expert judiciaire a constaté que des morceaux de bois ont été rajoutés pour créer des jambes de force et que ces morceaux ont légèrement fléchi sous le poids de la couverture.
Ces rajouts ont permis de renforcer la charpente fragilisée par une erreur commise par M. [L] dans le sens de pose des fermettes. Cette intervention démontre que M. [L] avait connaissance de ce vice, qu'il a procédé à une réparation de fortune et qu'il n'en a pas fait part aux acquéreurs.
Les acquéreurs n'ont pas été en mesure de déceler l'existence de ce vice lors de la visite des combles de la maison.
Pour autant, l'existence de ce vice est de nature à avoir trompé leur consentement dans la mesure où il touche une partie d'ouvrage essentielle de la maison dont il affecte la solidité et dont l'expert relève (page 46) : « Cette réparation de fortune a évité des désordres plus importants mais il est important et urgent d'agir rapidement ».
Le jugement, qui a retenu le dol concernant ce dommage, sera donc confirmé de ce chef.
Sur la demande d'annulation de la vente pour dol,
Il résulte des précédents développements que le dol de M. [L] et de Mme [A] est parfaitement établi concernant la présence de fissures en façade ouest, la venue d'eau en sous-sol et le défaut de structure de la charpente.
Sans la dissimulation des vendeurs au sujet de la nature de ces désordres, de leur gravité, de leur impact et du coût des travaux nécessaires pour y remédier, M. [C] et Mme [W] auraient renoncé à acquérir l'immeuble ou l'auraient acquis dans des conditions financières différentes.
En effet, il a été démontré que les mensonges et les man'uvres déployées par M. [L] et Mme [A] concernaient des parties d'ouvrage et des vices fragilisant l'ouvrage ou générant d'importants désagréments et dont le montant des réparations s'élèvent à environ 25 000 euros avec un risque subsistant que des désordres puissent réapparaître un jour à la faveur de l'usure des ouvrages ou de l'aggravation des phénomènes météorologiques.
Ces mensonges et ces man'uvres ont donc été déterminants pour l'obtention du consentement de M. [C] et de Mme [W].
Ainsi, M. [L] et Mme [A] se sont rendus auteurs d'un dol au préjudice de M. [C] et de Mme [W] en omettant de mentionner dans l'acte et en déployant des man'uvres destinées à dissimuler la présence d'un enduit non étanche et d'infiltrations sur le mur pignon ouest, la présence d'eau dans la cave ainsi que les vices affectant la structure de la charpente.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation pour dol de la vente du 25 novembre 2010.
Du fait de la nullité du contrat de vente, celui ci est censé ne jamais avoir existé et les parties doivent être remises en l'état où elles se trouvaient avant la vente, chacune des parties devant restituer à l'autre ce qu'elle a reçu en vertu de la vente.
M. [L] et Mme [A] seront condamnés solidairement à restituer à M. [C] et à Mme [W] la somme de 200 000 euros qui devront en retour leur restituer l'immeuble et les meubles le garnissant dans le même état que lors de la vente du 25 novembre 2010 présentement annulée.
La restitution de l'immeuble interviendra dans le délai de trois mois après que le présent arrêt sera devenu définitif et au plus tard un mois après consignation du prix par M. [L] et Mme [A] entre les mains du notaire instrumentaire.
Les dispositions en ce sens du jugement déféré seront donc confirmées, sauf à ajouter que cette somme de 200 000 euros sera assortie de l'intérêt au taux légal appliqué à compter du 12 février 2013 jour de la demande en justice équivalant à la sommation de payer exigée par l'article 1153 alinéa 3 ancien du code civil.
Sur les autres demandes formées par M. [C] et Mme [W],
Le dol est par ailleurs constitutif d'une faute engageant la responsabilité du vendeur sur le fondement de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, applicable en l'espèce.
Sur la demande de remboursement des émoluments du notaire,
La faute commise par M. [L] et Mme [A] ont conduit M. [C] et Mme [W] à supporter en pure perte les honoraires du notaire ayant reçu l'acte de vente annulé.
Le jugement déféré sera donc partiellement infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement de la totalité des frais de mutation de 12 824,37 euros, y compris les émoluments du notaire.
En cause d'appel, les intimés ont limité leur demande aux émoluments du notaire et ont abandonné le surplus afférent aux taxes de publicité foncière dont le Trésor public leur doit remboursement par ailleurs, ainsi que l'a pertinemment relevé le tribunal.
Lors de la vente du 25 novembre 2010, M. [C] et Mme [W] ont payé en pure perte les émoluments du notaire à hauteur de 2 917,37 euros.
M. [L] et Mme [A] seront donc condamnés à rembourser à M. [C] et à Mme [W] cette somme de 2 917,37 euros représentant les émoluments du notaire qui a reçu l'acte authentique de la vente présentement annulée.
Sur la demande de remboursement des taxes foncières,
La faute commise par M. [L] et Mme [A] a conduit M. [C] et Mme [W] à supporter en pure perte des taxes foncières qui constituent des charges exclusivement supportées par les propriétaires du bien immobilier.
Cette demande est recevable dans la mesure où les intimés en ont demandé paiement aux appelants par assignation du 5 janvier 2015 et par conclusions subséquentes de sorte que la prescription alléguée par les appelants n'est acquise pour aucune de ces taxes foncières dont la plus ancienne était exigible le 17 octobre 2011.
Par ailleurs, le versement à la procédure des avis de taxe foncière établis à leur nom entre 2011 et 2021 suffit à démontrer que M. [C] et Mme [W] ont été contraints de verser ces sommes à l'administration fiscale.
M. [C] et Mme [W] sont donc fondés à solliciter une indemnisation au titre des taxes foncières qu'ils ont dû acquitter à hauteur de 4 881 euros entre 2011 et 2016, conformément au dispositif du jugement déféré qui sera confirmé de ce chef.
Il sera en outre fait droit à la demande d'actualisation du préjudice formée par M. [C] et Mme [W]. Il leur sera donc alloué la somme complémentaire de 4 690 euros représentant le montant des taxes foncières qu'ils ont payées entre 2017 et 2021.
Sur la demande afférente au préjudice de jouissance,
Les agissements dolosifs de M. [L] et de Mme [A] ont conduit M. [C] et Mme [W] à acquérir une maison dont ils n'ont pas été en mesure de jouir paisiblement en raison d'une forte humidité et des risques permanents d'inondation de la cave en cas de forte pluie.
Toutefois, en application de l'article 1234 ancien du code civil et en raison de l'effet rétroactif de l'annulation de la vente, ce contrat est censé ne jamais avoir existé.
Il en résulte que les acquéreurs ne sont pas fondés à obtenir une indemnité en réparation d'un trouble affectant un droit de jouissance qui n'a rétroactivement jamais existé.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande formée par les intimés en réparation de ce chef de préjudice.
Sur la demande afférente au préjudice moral,
M. [C] et Mme [W] ont également dû affronter les désagréments et les tracas d'une longue procédure judiciaire à l'issue de laquelle ils devront se séparer de la maison achetée le 25 novembre 2010 et se lancer dans de nouvelles démarches aux fins d'acquisition de leur résidence principale.
Durant l'instance judiciaire et alors que cette acquisition représentait pour eux un lourd investissement moral et financier, les acquéreurs n'ont pas pu jouir pleinement de l'immeuble acheté ni se projeter durablement dans leur maison dans l'attente de la décision judiciaire définitive.
Au regard de ces éléments, le préjudice moral est fixé par la cour à hauteur de 6 000 euros, ce en quoi le jugement déféré ayant alloué seulement 2 000 euros sera infirmé.
Sur la demande de réparation formée par M. [L] et Mme [A],
Dans la mesure où ils ne démontrent pas l'existence de détériorations imputables à M. [C] et à Mme [W] durant leur période d'occupation de l'immeuble, les appelants ne sont pas fondés à exiger d'eux qu'ils réalisent des travaux de réparation.
En particulier, les appelants ne démontrent pas que M. [C] et Mme [W] auraient dégradé le portail, le seuil du portail et sali le mur pignon étant précisé que ces derniers ne sont pas tenus de remédier à l'usure normale ou à la vétusté de l'immeuble restitué.
Sur la demande d'indemnité d'occupation formée par M. [L] et Mme [A],
En application de l'article 1234 ancien du code civil et en raison de l'effet rétroactif de l'annulation de la vente, le vendeur n'est pas fondé à obtenir une indemnité correspondant à la seule utilisation de la chose par l'acquéreur.
La demande d'indemnité d'occupation formée par les appelants sur le fondement de l'enrichissement sans cause sera donc rejetée et le jugement déféré confirmé de ce chef.
Sur l'annulation de la contre-lettre,
Sur la recevabilité de la demande,
Cette demande d'annulation a été formée par M. [C] et Mme [W] par conclusions déposées au greffe du tribunal le 24 novembre 2015.
M. [L] et Mme [A] n'apportent aucune preuve de ce que cette contre-lettre serait datée du 16 juillet 2010 alors que le document écrit mentionne expressément la date du 25 novembre 2010, ce que reconnaissent les appelants eux-mêmes dans leurs conclusions responsives n°3 de première instance.
L'action en annulation engagée le 24 novembre 2015 par M. [C] et Mme [W] n'est donc pas prescrite.
Sur le bien-fondé de la demande,
L'article 1321-1 du code civil dans sa rédaction en vigueur le 25 novembre 2010 dispose:
« Est nulle et de nul effet toute contre-lettre ayant pour objet une augmentation du prix stipulé dans le traité de cession d'un office ministériel et toute convention ayant pour but de dissimuler partie du prix d'une vente d'immeubles ou d'une cession de fonds de commerce ou de clientèle ou d'une cession d'un droit à un bail ou du bénéfice d'une promesse de bail portant sur tout ou partie d'un immeuble et tout ou partie de la soulte d'un échange ou d'un partage comprenant des biens immeubles, un fonds de commerce ou une clientèle. »
M. [C] et Mme [W] versent aux débats une contre-lettre datée du 25 novembre 2010, jour de l'acte authentique de vente, et faisant état d'un complément de 18 000 euros au prix mentionné à l'acte notarié.
Le texte de cette contre-lettre établit que les parties ont convenu le 25 novembre 2010 d'un prix global de 218 000 euros et non d'un prix de 200 000 euros dont 18 000 euros payés en espèce, contrairement à la position soutenue par M. [L] et Mme [A].
En application de l'article 1321-1 précité, cette contre-lettre doit être annulée.
M. [L] et Mme [A] sont en conséquence tenus de restituer cette somme de 18 000 euros à M. [C] et à Mme [W].
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a fait droit à ces demandes.
Sur les demandes accessoires,
Le jugement frappé d'appel étant confirmé sur le fond, il le sera également en ce qu'il a condamné M. [L] et Mme [A] aux dépens et au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [L] et Mme [A], qui succombent en cause d'appel, seront condamnés aux dépens d'appel et à payer à M. [C] et à Mme [W] la somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés en appel.
Les appelants seront déboutés de leur propre demande tendant à être indemnisés de ce chef.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de :
' celle ayant condamné M. [G] [L] et Mme [D] [A] à payer à M. [X] [C] et à Mme [M] [W] la somme de 2 000 euros en réparation de leur préjudice moral ;
' et de celle ayant débouté M. [X] [C] et à Mme [M] [W] de leur demande de paiement de la somme de 2 917,37 euros représentant les émoluments du notaire ;
Statuant à nouveau sur les deux chefs infirmés,
Condamne in solidum M. [G] [L] et Mme [D] [A] à payer à M. [X] [C] et à Mme [M] [W] :
' une indemnité de 6 000 euros en réparation de leur préjudice moral ;
' une indemnité de 2 917,37 euros représentant les émoluments du notaire afférents à la vente annulée ;
Y ajoutant,
Condamne in solidum M. [G] [L] et Mme [D] [A] à payer à M. [X] [C] et à Mme [M] [W] la somme de 4 690 euros représentant le montant des taxes foncières payées entre 2017 et 2021 ;
Dit que les deux créances de restitution du prix de 200 000 euros et de 18 000 euros correspondant à la contre-lettre seront assorties de l'intérêt au taux légal à compter du 12 février 2013 ;
Dit que le prix de 218 000 euros à restituer par M. [L] et Mme [A] sera consigné entre les mains du notaire instrumentaire préalablement à la restitution du bien par M. [C] et Mme [W] ;
Dit que la restitution du bien immobilier par M. [C] et Mme [W] se fera dans le délai de trois mois après que le présent arrêt sera devenu définitif et au plus tard un mois après consignation du prix par M. [L] et Mme [A] entre les mains du notaire instrumentaire ;
Condamne in solidum M. [G] [L] et Mme [D] [A] à supporter les entiers dépens d'appel ;
Condamne in solidum M. [G] [L] et Mme [D] [A] à payer à M. [X] [C] et à Mme [M] [W] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs plus amples demandes.
Le greffier, Le président,