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28/12/2022 | FRANCE | N°21/05531

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 28 décembre 2022, 21/05531


Grosse + copie

délivrées le

à



















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1re chambre sociale



ARRET DU 28 DECEMBRE 2022







Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05531 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PEQY



ARRET N°



Décisions déférées à la Cour : Jugement n° 102 du 19 Septembre 2017 enregistrée sous le n ° RG F 16/00489 du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON, infirmé par arrêt n

° 757 de la Cour d'Appel de NIMES en date du 19 Novembre 2019, enregistrée sous le n° RG 17/03815, cassé et annulé en toutes ses dispositions par arrêt n° 816 F-D de la Cour de Cassation de PARIS en date du 23 Juin 20...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 28 DECEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05531 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PEQY

ARRET N°

Décisions déférées à la Cour : Jugement n° 102 du 19 Septembre 2017 enregistrée sous le n ° RG F 16/00489 du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON, infirmé par arrêt n° 757 de la Cour d'Appel de NIMES en date du 19 Novembre 2019, enregistrée sous le n° RG 17/03815, cassé et annulé en toutes ses dispositions par arrêt n° 816 F-D de la Cour de Cassation de PARIS en date du 23 Juin 2021, pourvoi n° M 20-10.969

Vu l'article 1037-1 du code de procédure civile ;

DEMANDEUR A LA SAISINE:

Monsieur [T] [B]

né le 23 Mars 1952 à [Localité 5] (54)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Marc LECOMTE de la SELARL ERGASIA LOUNIS LECOMTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

DEFENDERESSE A LA SAISINE

S.A.S DEFENSE CONSEIL INTERNATIONAL SERVICES & ASSISTANCE 'DCI'

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Iris RICHAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Sébastien RODRIGUEZ de la SELARL ALMENIDE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

Vu l'ordonnance de clôture en date du 18 janvier 2022 ;

Vu l'arrêt avant dire droit en date du 23 mars 2022 ordonnant la réouverture des débats ;

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 OCTOBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 805 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Madame Véronique DUCHARNE, Conseiller

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER,

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre et par Mme Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se référer à l'arrêt de la présente chambre en date du 23 mars 2022 qui a :

- dit que les contrats de travail avaient des liens plus étroits avec la France qu'avec l'Arabie Saoudite et le Qatar ;

- avant dire droit, invité les parties à :

- produire des certificats de coutume établissant les dispositions de la législation de l'Arabie Saoudite et du Qatar en vigueur applicables aux contrats de travail à durée déterminée ;

- conclure sur la question du caractère plus protecteur ou non des dispositions impératives de la loi française relatives aux contrats à durée déterminée et au licenciement par rapport aux lois choisies dans les contrats de travail ;

- conclure sur le fond du litige avec application des dispositions de la législation de l'Arabie Saoudite et du Qatar.

[T] [B] maintient ses demandes, sauf à solliciter l'octroi de la somme de 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société DÉFENSE CONSEIL INTERNATIONAL SERVICES ET ASSISTANCE (DCI SA) maintient ses demandes.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le caractère plus protecteur de la loi française :

Attendu, concernant la loi applicable au Qatar :

- que la durée légale du travail est fixée à 48 heures par semaine (à l'exclusion de la période du Ramadan), que le salarié n'a droit qu'à un jour de repos par semaine et qu'il n'existe pas de salaire minimum ;

- que les travailleurs étrangers ne doivent être employés qu'en cas de nécessité ;

- que le contrat à durée déterminée n'a pas de caractère subsidiaire ou de limite, que son recours n'est pas limité à des cas précis et que sa durée maximale est de cinq ans renouvelables ;

- que, sauf en cas de poursuite d'exécution sans accord de renouvellement, le contrat de travail ne peut donc être requalifié en contrat à durée indéterminée, sachant en outre que l'employeur peut mettre fin au contrat à durée indéterminée à tout moment, sans devoir justifier d'une cause réelle et sérieuse ;

Attendu, concernant le droit applicable en Arabie Saoudite :

- que les recours au contrat à durée déterminée ne sont pas limités et que leur durée, renouvellement compris, est de trente-six mois ;

- que les contrats conclus avec des salariés non-saoudiens sont réputés à durée déterminée pour une durée au plus égale à celle du permis de travail ;

- qu'il n'y a pas de requalification en contrat à durée indéterminée, sauf en cas de poursuite d'exécution sans accord de renouvellement ;

Attendu qu'il en résulte que les dispositions impératives de la loi française relatives aux contrats à durée déterminée sont globalement plus protectrices que celles des lois choisies par les parties et que, dès lors, il y a lieu d'appliquer la loi française ;

Sur la requalification :

Attendu que l'article L. 1242-1 du code du travail dispose que le contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ;

Attendu qu'en l'espèce :

- sous des intitulés différents, [T] [B] occupait des fonctions de même nature tendant toutes à une mission d'assistance technique dans les domaines de la logistique navale et aéronautique ;

- certains contrats ont été prorogés par avenants pour une ou deux années puis reconduits avec la même activité mais sous une appellation de fonctions différente ;

Qu'ainsi, l'analyse des postes occupés par [T] [B] révèle, d'une part, que ses fonctions ont toujours été très proches dans leur objet, voire identiques, d'autre part, qu'elles avaient pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise qui était 'd'accompagner la vente d'équipements militaires à des pays étrangers en fournissant une formation opérationnelle et une transmission du savoir-faire français sur les équipements vendus' ;

Qu'en outre, aucun des contrats ne comporte l'indication précise du motif pour lequel il a été conclu par référence aux cas de recours autorisés par référence à l'article L. 1242-2 du code du travail ;

Attendu qu'il en résulte que, par application de l'article L. 1245-1 du code du travail, l'ensemble de la relation contractuelle doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2005 et que le jugement dont appel sera infirmé ;

Attendu que lorsqu'elle fait droit à la demande de requalification formée par le salarié, la juridiction saisie doit, même d'office, condamner l'employeur à payer au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire ;

Attendu que bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée, [T] [B] ne pouvait être licencié sans que soit invoqué un motif autre que le terme du contrat de travail à durée déterminée ;

Que, dès lors, la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement qui, faute d'avoir été motivé et régulièrement notifié, est à la fois irrégulier en la forme et injustifié au fond ;

Attendu qu'en conséquence, la société DÉFENSE CONSEIL INTERNATIONAL SERVICES ET ASSISTANCE (DCI SA) sera condamnée à :

- la somme de 6 468€ à titre d'indemnité de requalification,

- la somme de 12 936€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- la somme de 1 293,60€ à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,

- la somme de 12 720€ à titre d'indemnité de licenciement ;

Attendu qu'au regard de l'ancienneté de [T] [B] au moment de la rupture, de son salaire et de la circonstance qu'eu égard à son âge il a été dans l'obligation de faire valoir ses droits à la retraite, sans espérer bénéficier d'une retraite pleine, il y a lieu de lui allouer la somme de 50 000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

Attendu que n'étant pas démontrée l'existence d'un préjudice résultant d'une exécution fautive du contrat, distinct de celui réparé par les dispositions qui précèdent, [T] [B] doit être débouté de sa demande à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et abus de droit ;

* * *

Attendu qu'il convient d'ordonner la délivrance par l'employeur d'une attestation destinée au Pôle emploi rectifiée, sans qu'il soit besoin d'assortir cette condamnation d'une astreinte ;

Attendu qu'enfin, l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour d'appel ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirmant le jugement et statuant à nouveau,

Dit la loi française applicable ;

Condamne la société DÉFENSE CONSEIL INTERNATIONAL SERVICES ET ASSISTANCE (DCI SA) à payer à [T] [B] :

- la somme de 6 468€ à titre d'indemnité de requalification,

- la somme de 12 936€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- la somme de 1 293,60€ à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,

- la somme de 12 720€ à titre d'indemnité de licenciement ;

- la somme de 50 000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- la somme de 3 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit qu'à l'exception de l'indemnité de requalification, des dommages et intérêts et de la somme allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dont les intérêts légaux courent à compter de la notification du présent arrêt, les sommes allouées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne la société DÉFENSE CONSEIL INTERNATIONAL SERVICES ET ASSISTANCE (DCI SA) à la délivrance d'une attestation destinée au Pôle emploi rectifiée ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la société DÉFENSE CONSEIL INTERNATIONAL SERVICES ET ASSISTANCE (DCI SA) aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/05531
Date de la décision : 28/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-28;21.05531 ?
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