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15/05/2023 | FRANCE | N°23/00238

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 15 mai 2023, 23/00238


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 23/00238 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P2IX



O R D O N N A N C E N° 2023 - 239

du 15 Mai 2023

SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur [P] [Y]

né le 03 Janvier 1985 à [Localité 2] (LIBYE)

de nationalité Libyenne



retenu au centre de rétention de [Localité 5] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,



Comparant et assisté de Maître Laurence GROS, avocat commis d'office,



Appelant,



et en présence de M. [H] [O], interprète assermenté en langue ar...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 23/00238 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P2IX

O R D O N N A N C E N° 2023 - 239

du 15 Mai 2023

SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur [P] [Y]

né le 03 Janvier 1985 à [Localité 2] (LIBYE)

de nationalité Libyenne

retenu au centre de rétention de [Localité 5] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant et assisté de Maître Laurence GROS, avocat commis d'office,

Appelant,

et en présence de M. [H] [O], interprète assermenté en langue arabe,

D'AUTRE PART :

1°) Monsieur LE PREFET DES ALPES MARITIMES

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Monsieur [U] [M], dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC :

Non représenté

Nous, Jonathan ROBERTSON conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Sophie SPINELLA, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l'arrêté du 08 mai 2023 de Monsieur LE PREFET DES ALPES MARITIMES portant obligation de quitter le territoire national sans délai pris à l'encontre de Monsieur [P] [Y].

Vu la décision de placement en rétention administrative du 08 mai 2023 de Monsieur [P] [Y], pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Vu l'ordonnance du 11 Mai 2023 à 13h23 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours.

Vu la déclaration d'appel faite le 12 Mai 2023, par Maître Laurence GROS, avocat, agissant pour le compte de Monsieur [P] [Y], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour, à 11h19.

Vu les télécopies et courriels adressés le 12 Mai 2023 à Monsieur LE PREFET DES ALPES MARITIMES, à l'intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 15 Mai 2023 à 09 H 00.

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de l'accueil de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 09 H 00 a commencé à 09h28.

PRETENTIONS DES PARTIES

Assisté de M. [H] [O], interprète, Monsieur [P] [Y] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : ' Je suis né le 3 janvier 1985 à [Localité 2] en Lybie. J'habite à [Adresse 3], dans un quartier. J'ai fait appel car je souhaite être libéré. Je n'ai rien fait c'est la première fois, je n'ai pas de papiers. J'ai personne en France. J'ai de la famille en Allemagne, mais pas en France. '

L'avocat Me Laurence GROS développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

Monsieur le représentant de Monsieur LE PRÉFET DES ALPES MARITIMES demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience : ' Pour le défaut de pièce utile, le billet de garde à vue n'est pas une pièce utile. Pour le certificat médical, on voit parfaitement que le médecin a coché la case état de santé compatible avec la garde à vue. Pour la tardiveté de la notification des droits, il faut environ 4h à 5h pour dégriser. Monsieur tenait des propos incohérents, la notification est intervenue dans un délai raisonnable. Pour le défaut d'interprète, on constate dans la procédure que la lecture a été effectuée par M. [Y] lui même.'

Assisté de M. [H] [O], interprète, Monsieur [P] [Y] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : ' Je n'ai rien fait, c'est la première fois que je suis devant vous. J'ai perdu tous mes papiers en Libye à cause de la guerre. J'ai une attestation d'hébergement, c'est un collègue de travail qui accepte de m'héberger .'

Le conseiller indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel :

Le 12 Mai 2023, à 11h19, Maître Laurence GROS, avocat, agissant pour le compte de Monsieur [P] [Y] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Montpellier du 11 Mai 2023 notifiée à 13h23, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R 743-11 du CESEDA.

Sur l'appel :

Monsieur [P] [Y] soutient, dans un premier temps, que la requête du préfet tendant à son placement en rétention administrative ne comporte pas toutes les pièces justificatives utiles dans la mesure où le billet de garde à vue est vide et le certificat médical est illisible, méconnaissant dès lors les dispositions de l'article R.743-2 du CESEDA.

Force est néanmoins de constater, avec le premier juge, que Monsieur [P] [Y] ne démontre pas en quoi ces deux pièces - au demeurant effectivement produites aux débats - seraient des pièces utiles au sens des dispositions précitées, étant au demeurant précisé, comme le souligne le représentant du préfet à l'audience, que le billet de garde à vue est un document interne au commissariat et qu'il ressort en toute hypothèse du certificat médical que l'état de santé de Monsieur [P] [Y] était compatible avec une mesure de garde à vue.

Ainsi l'irrecevabilité opposée par l'appelant ne saurait prospérer.

Monsieur [P] [Y] fait valoir, dans un deuxième temps, que la procédure de garde-à-vue est irrégulière aux motifs que les droits attachés à la garde à vue lui ont été notifiés tardivement (début de la garde à vue à 3h45 le 7 mai 2023, notification des droits à 12h47 le même jour).

Toutefois, il ressort des pièces de la procédure que Monsieur [P] [Y] est dans un état d'ivresse manifeste lorsqu'il a été interpellé, ainsi que le procès-verbal d'interpellation, le procès-verbal de notification du début de garde-à-vue et le certificat médical dressé à 4h57 le mentionnent - aucun test d'alcoolémie n'étant requis pour vérifier l'état d'ébriété de l'intéressé.

La notification des droits de Monsieur [P] [Y] ayant été faite après dégrisement de l'intéressé, aucun grief ne saurait être tiré de la notification des droits à 12h47 le 7 mai 2023.

Ce moyen de nullité ne pourra qu'être rejeté.

Monsieur [P] [Y] fait valoir, dans un troisième temps, que la procédure de rétention est irrégulière aux motifs que ses droits lui ont été notifiés tardivement et qu'il a sollicité vainement un interprète.

Le premier juge a justement relevé que les droits ont été notifiés deux fois à l'appelant, une première fois suite à la décision de placement en rétention administrative (18h08) et une seconde fois à son arrivée au centre de rétention (22h10 et 22h15), ce, effectivement sans interprète mais alors que l'intéressé comprenait manifestement le français, ce qui transparaissait de ses auditions, qu'aucune difficulté n'avait été soulevée à cet égard, ce, alors même que Monsieur [P] [Y] a pu être entendu en présence d'un avocat.

Cet autre moyen de nullité sera également rejeté.

SUR LE FOND

L'article L742-3 du ceseda : 'Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L. 741-1.'

En application des dispositions de l'article L612-2 du ceseda: 'Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :

1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ;

2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;

3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.'

Et selon l'article L 612-3 du ceseda: 'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.'

En l'espèce, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure, dès lors qu'il est dans l'impossibilité de quitter immédiatement la France, qu'il est démuni de tout document d'identité et qu'il ne justifie d'aucune adresse sur le territoire national, sauf celle d'un collègue de travail qui n'a pas fait l'objet de vérification, à supposer que ce seul élément suffise à garantir la représentation de l'appelant.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Déclarons l'appel recevable,

Rejetons les exceptions et moyens de nullité et la demande d'assignation à résidence,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 15 Mai 2023 à 09h46.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 23/00238
Date de la décision : 15/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-15;23.00238 ?
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