ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre de la famille
ARRET DU 14 MARS 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 23/01709 - N° Portalis DBVK-V-B7H-PYVQ
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 15 février 2023
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PERPIGNAN
N° RG 22/00660
APPELANTS :
Monsieur [R], [T],[B] [J]
[Adresse 14]
[Adresse 14]
[Localité 5]
Représenté par Me Marie Camille PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER assisté à l'audience par Me Olivier COHEN, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
Madame [W] [J] épouse [C]
[Adresse 6]
[Localité 2]
Représentée par Me Marie camille PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER assistée à l'audience par Me Olivier COHEN, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
INTIMEE :
Madame [M] [J] épouse [S]
née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 12]
Représentée par Me Jean-louis DEMERSSEMAN, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 28 Septembre 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 janvier 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre
Mme Sandrine FEVRIER, Conseillère
Mme Anne FULLA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Asnia BENKABA adjointe administrative faisant fonction de greffier
En présence de Mme Marine GRANERO, greffière stagiaire.
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre, et par Mme Asnia BENKABA, Adjointe administrative faisant fonction de greffier.
*
* *
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [L] [V] [J], divorcé de sa seconde épouse et non remarié, a rédigé un testament authentique reçu le 12 décembre 2017 par Me [E] [U]-[O], notaire établissant que son héritage se répartisse comme suit :
- 1/2 revenant à [M] [J] épouse [S] enfant issue de son union avec sa première épouse Mme [N] [P] [Y] [D],
- 1/4 revenant à [W] et 1/4 revenant à [R], enfants issus de son union avec Mme [H] [Z], sa seconde épouse.
[L] [V] [J] est décédé à [Localité 9], le [Date décès 3] 2018 à l'âge de 86 ans pour être né le [Date naissance 8] 1931 à [Localité 13].
Il laisse pour lui succéder ses trois enfants :
- [M] [J] épouse [S]
- [W] [J] épouse [C]
- [R] [T] [J],
[M] [S], légataire universelle, a exprimé le choix de voir la réduction de son legs s'exécuter en nature conformément aux dispositions de l'article 924-1 du code civil.
La déclaration de succession établie le 29 décembre 2018 fait état d'un actif brut s'élevant à 192 138,19 euros pour l'essentiel composé d'un bien immobilier si [Adresse 4] à [Localité 16] (66), vendue le 29 décembre 2018, au prix de 179 000 euros, outre un forfait mobilier forfaitairement évalué à 9 149, 44 euros ainsi que diverses liquidités, pour un passif d'un montant de 1 500 euros au titre des frais funéraires.
L'actif net successoral s'élevant ainsi à 190 638,19 euros est demeuré bloqué en la comptabilité de Me [E] [U]-[O], notaire.
Par acte d'huissier du 15 septembre 2022, Mme [M] [J] épouse [S] a fait assigner Mme [W] [J] épouse [C] et M. [R] [T] [J] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Perpignan aux fins de voir :
- désigner Me [X] [G], notaire à [Localité 12] et subsidiairement le président de la [10] avec faculté de délégation à tout notaire à l'exception de Me [E] [U]-[O], afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J]
- dire que le notaire désigné se fera remettre l'ensemble des éléments détenus par Me [E] [U]-[O] notaire à [Localité 15], ainsi que l'intégralité des fonds disponibles
- ordonner le versement de la somme de 90 000 euros entre les mains de Mme [M] [S] à titre d'avance sur ses droits dans la succession de feu [L] [J]
- réserver les dépens.
Par ordonnance de référé du 15 février 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Perpignan, a notamment :
- désigné Me [X] [G], notaire à [Localité 12], afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J],
- dit que Me [X] [G], notaire à [Localité 12] se fera remettre l'ensemble des éléments détenus par Me [E] [U]-[O] notaire à [Localité 15], ainsi que l'intégralité des fonds disponibles.
- ordonné au notaire le versement par provision des sommes de :
- 90 000 euros entre les mains de Mme [M] [S],
- 25 000 euros pour Mme [W] [J],
- 25 000 euros pour M. [R] [J] à titre d'avance sur leurs droits dans la succession de feu [L] [J].
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné solidairement Mme [W] [J] et M. [R] [J] aux dépens,
- rappelé que la décision bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit.
Par déclaration au greffe du 30 mars 2023, M. [R] [J] et Mme [W] [J] ont interjeté appel limité de la décision en ce qu'elle a :
- désigné Me [X] [G], notaire à [Localité 12], afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J],
- dit que Me [X] [G], notaire à [Localité 12] se fera remettre l'ensemble des éléments détenus par Me [E] [U]-[O] notaire à [Localité 15], ainsi que l'intégralité des fonds disponibles.
- ordonné au notaire le versement par provision des sommes de :
- 90 000 euros entre les mains de Mme [M] [S],
- 25 000 euros pour Mme [W] [J],
- 25 000 euros pour M. [R] [J] à titre d'avance sur leurs droits dans la succession de feu [L] [J],
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné solidairement Mme [W] [J] et M. [R] [J] aux dépens,
- rappelé que la décision bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit.
Les appelants, dans leurs conclusions du 5 juillet 2023, demandent à la cour de :
- réformer l'ordonnance déférée
Statuant à nouveau,
à titre principal
- juger qu'il existe des contestations sérieuses,
- débouter Mme [S] de toutes ses demandes, notamment provisionnelles et sa demande de voir désigner Me [G] en qualité de notaire à la succession,
- désigner M. le Président de la [10] avec faculté de délégation à tout notaire, afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J].
Reconventionnellement :
- ordonner une expertise avec mission classique en pareille matière et afin notamment que :
- soient recherchés toutes donations, assurances-vie, dons manuels ou prêts réalisés par le défunt,
- soient analysées les opérations bancaires sur les comptes du défunt ; en donner le nom du ou des bénéficiaires et en déterminer la cause,
- soient déterminés la consistance des actifs et passifs successoraux ; d'en évaluer le montant,
- soient donnés tout élément permettant d'apprécier les droits des parties,
- déterminer l'existence d'un éventuel recel successoral.
Subsidiairement :
- autoriser le déblocage de la somme de 100 000 euros sur le fruit de la vente séquestre au bénéfice de l'ensemble de la fratrie,
- allouer une provision à l'ensemble de la fratrie à hauteur de 100 000 euros provenant du fruit de la vente de la maison ventilée comme suit :
- 50 000 euros au bénéfice de Mme [M] [S] née [J],
- 25 000 euros au bénéfice de Mme [W] [K] née [J],
- 25 000 euros au bénéfice de M. [R] [T] [J].
- ordonner une expertise avec mission classique en pareille matière et afin notamment que :
- soient recherchés toutes donations, assurances-vie, dons manuels ou prêts réalisés par le défunt,
- soient analysées les opérations bancaires sur les comptes du défunt ; en donner le nom du ou des bénéficiaires et en déterminer la cause,
- soient déterminés la consistance des actifs et passifs successoraux ; d'en évaluer le montant,
- soient donnés tout élément permettant d'apprécier les droits des parties.
- déterminer l'existence d'un éventuel recel successoral.
- débouter Mme [S] de ses demandes contraires, et de sa demande de voir désigner Me [G] en qualité de notaire à la succession,
- désigner M. le Président de la [10] avec faculté de délégation à tout notaire, afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J].
A titre infiniment subsidiaire :
Si la somme de 90 000 euros demandée par Mme [S] devait lui être allouée à titre provisionnel, la somme de 45 000 euros serait dans le même temps allouée à chacun des appelants :
- allouer la somme provisionnelle de :
- 90 000 euros au bénéfice de Mme [M] [S],
- 45 000 euros au bénéfice de Mme [W] [K],
- 45 000 euros au bénéfice de M. [R] [T] [J].
- ordonner une expertise avec mission classique en pareille matière et afin notamment que :
- soient recherchés toutes donations, assurances-vie, dons manuels ou prêts réalisés par le défunt,
- soient analysées les opérations bancaires sur les comptes du défunt; en donner le nom du ou des bénéficiaires et en déterminer la cause,
- soient déterminés la consistance des actifs et passifs successoraux ; d'en évaluer le montant,
- soient donnés tout élément permettant d'apprécier les droits des parties.
- déterminer l'existence d'un éventuel recel successoral,
- débouter Mme [S] de ses demandes contraires, et de sa demande de voir désigner Me [G] en qualité de notaire à la succession,
- désigner M. le Président de la [10] avec faculté de délégation à tout notaire, afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J].
En tout état de cause :
- condamner Mme [S] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ; avec droit de recouvrement direct, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
L'intimée, dans ses conclusions du 17 mai 2023, demande à la cour de :
- confirmer en tout point l'ordonnance du 15 février 2023
Subsidiairement,
- désigner M. le Président de de la [10] avec faculté de délégation à tout notaire à l'exception de Me [E] [U]-[O], afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J],
- condamner solidairement [W] et [R] [J] à payer à [M] [S] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre celle de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 28 septembre 2023.
A l'audience du 18 janvier 2024, les parties ont été invitées à produire en cours de délibéré leurs observations sur l'irrecevabilité soulevée d'office par la cour sur la demande de versement d'une somme au titre d'une avance sur les droits dans la succession présentée devant le juge des référés au lieu et place du président du tribunal statuant selon la procédure accélérée au fond visée à l'article 815-11 du code civil et sur la compétence du juge des référés quant à la désignation d'un notaire chargé de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision successorale.
SUR CE LA COUR
Sur les irrecevabilités soulevées par la cour
Par note en délibéré, le conseil de Mme [S] a, au visa de l'article 76 alinéa 2 du code de procédure civile, rappelé que la cour ne peut pas relever d'office son incompétence hors les cas visés par le texte.
L'article 76 énonce que sauf application de l'article 82-1, l'incompétence peut être prononcée d'office en cas de violation d'une règle de compétence d'attribution lorsque cette règle est d'ordre public ou lorsque le défendeur ne comparaît pas. Elle ne peut l'être qu'en ces cas.
Devant la cour d'appel et devant la Cour de cassation, cette incompétence ne peut être relevée d'office que si l'affaire relève de la compétence d'une juridiction répressive ou administrative ou échappe à la connaissance de la juridiction française.
Ainsi, conformément à cet article, sont déclarées recevables devant la cour les demandes tendant à voir désigner un notaire aux fins de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J] et les demandes de provisions.
Sur la demande de provision présentée par Mme [M] [J]
L'article 835 alinéa 2 énonce que le président du tribunal judiciaire, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Il convient qu'il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant, qui n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.
Une contestation sérieuse survient lorsque le juge est contraint de trancher une question de fond pour justifier la mesure sollicitée, qu'il existe une incertitude quant à l'interprétation et à la portée des dispositions légales, qu'il a à prendre parti sur les droits ou obligations revendiqués ou invoqués. Il y a également contestation sérieuse lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond. La contestation est sérieuse lorsqu'elle paraît susceptible de prospérer au fond.
En l'espèce, Mme [M] [J] sollicite la somme de 90 000 euros à titre d'avance sur la succession de son père se prévalant de ses droits dans la succession et de l'actif successoral résultant de la vente du domicile du défunt séquestré chez le notaire. Les appelants s'opposent à titre principal au versement de cette provision estimant qu'il existe une contestation sérieuse.
Les droits de chacun dans la succession de M. [L] [V] [J] ne sont pas contestés.
Pour s'opposer au versement de la provision sollicitée, les appelants versent aux débats les relevés de comptes de leur père sur une période comprise entre mai 2015 et février 2019. Ils surlignent en jaune et en bleu les mouvements qui leur apparaissent suspects.
S'agissant des chèques, Mme [S] a produit 14 copies de chèques sur les années 2015 et 2018 démontrant ne pas en avoir été bénéficiaire, ce qui n'est pas contesté par la partie adverse. Les appelants déplorent l'absence de versement des copies de chèque qu'il estiment litigieux, sur les années 2016 et 2017. Néanmoins, il n'incombe pas à la seule Mme [S] d'apporter justificatif de l'encaissement de divers chèques pointés par M. Et Mme [J] alors même qu'il n'est pas contesté que [M] [S] n'a jamais eu de procuration et n'a jamais été détentrice de la carte bancaire de son père. Il appartient aux appelants de démontrer l'existence de la contestation sérieuse qu'ils avancent pour s'opposer au versement de la provision.
S'agissant des retraits d'espèces énumérés dans les conclusions des appelants et surlignés sur les relevés de compte, se poursuivant au-delà du décès de M. [L] [J], il n'est pas démontré que Mme [M] [J] épouse [S] en aurait été bénéficiaire alors qu'il n'avait aucune procuration et n'était pas en possession de la carte bleue. Il doit être rappelé que M. [J] est demeuré autonome jusqu'en mai 2027, qu'il avait signé une procuration en faveur de Mme [I] [A] à partir du 17 octobre 2016, aide ménagère ( pièce 15 intimée), et que sa fille [M] vivait à 160 km de son père. Il ne peut être déduit, comme le font les appelants, de l'absence de justification de ce que [M] [J] a donné les meubles meublants à Emmaus, ainsi qu'un vélo d'appartement et un ordinateur à Mme [A] la preuve que [M] [J] aurait bénéficié des retraits d'espèce qu'ils estiment suspects.
De même, il n'est produit aucune pièce venant corroborer l'existence d'un éventuel héritage dont aurait bénéficié M. [L] [J] provenant de sa belle-mère. Les appelants s'interrogent sur l'existence de deux appartements qui auraient pu faire l'objet d'une donation en faveur de l'intimée, mais ne produisent aucun relevé cadastral au soutien de leurs dires.
Ainsi, à la lecture des conclusions des appelants et de leurs pièces produites, la cour relève qu'il n'est apporté aucune contestation sérieuse à la demande de provision alors que l'actif successoral est bloqué depuis la fin de l'année 2018.
En conséquence, l'ordonnance querellée sera confirmée s'agissant du montant de la provision allouée à Mme [M] [J] épouse [S].
S'agissant du montant de la provision sollicitée par les appelants, ils sollicitent la somme de 45 000 euros chacun, somme correspondant à leur droit dans la succession de leur père. Il sera fait droit à cette demande et la décision dont appel sera infirmée sur ce point.
Sur la demande d'expertise
Les appelants sollicitent une mesure d'expertise que les sommes provisionnelles soient débloquées ou non. Ils critiquent la décision dont appel qui a rejeté cette demande reconventionnelle sur le fondement des articles 145 et suivants et fondent leur demande sur l'article 834 du code civil. Ils estiment que les mouvements bancaires post décès justifient l'existence d'un expertise, que l'expert aura la possibilité de demander aux parties la production de leurs propres relevés bancaires qu'il pourrait aussi demander de justifier leur emploi du temps les jours et heures où ont eu lieu les retraits douteux, qu'il pourra enquêter aussi sur le dépôt de tout le mobilier garnissant la maison à Emmaüs et sur la vente de la voiture. Ils estiment que l'expertise judiciaire est nécessaire à la manifestation de la vérité et qu'elle sera réalisée à charge et à décharge.
L'intimée réplique que l'expertise ne doit pas servir à suppléer la carence des parties, qu'il n'existe aucun intérêt à voir ordonner une expertise dès lors que l'expert ne pourrait pas mieux faire que d'obtenir de la banque les relevés de compte la copie des chèques déjà produits ; que l'expert ne pourra pas déterminer qui a procédé aux retraits d'espèces par carte bancaire au distributeur.
Selon les termes de l'article 834 du code civil, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
L'appelant précisant fonder sa demande exclusivement sur l'article précité à l'exclusion de l'article 145 du code de procédure civile, la cour rappelle qu'il appartient dès lors aux appelants de justifier d'une urgence.
Il y a urgence toutes les fois qu'un retard dans la décision qui doit être prise serait de nature à compromettre les intérêts légitimes du demandeur.
Or, les appelants, demandeurs à l'expertise, ne justifient pas de l'existence de l'urgence au cas d'espèce, étant précisé que M. [J] est décédé depuis le [Date décès 3] 2018, que seuls des retraits d'espèce demeurent inexpliqués, qu'il n'est pas contesté que Mme [M] [J] n'était pas en possession de la carte bancaire ou d'une procuration sur le compte de son père, et qu'un expert judiciaire n'est pas un enquêteur au sens pénal du terme.
En conséquence, la demande d'expertise ne peut qu'être rejetée et la décision dont appel confirmée sur ce point.
Sur la désignation d'un notaire
[R] et [W] [J] demandent de voir désigner M. le Président de la [10] avec faculté de délégation à tout notaire, afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J].
Ils s'opposent à la désignation de Me [G], en lieu et place de Me [U], considérant qu'une telle désignation relève de l'iniquité car il s'agit du notaire choisi par Mme [S] dès lors impartial.
Mme [S] fait remarquer que les appelants impute à Me [G] la responsabilité des difficultés qu'ils créent eux-mêmes.
Réponse de la cour
Par acte du 15 septembre 2022, Mme [S] a sollicité du juge des référés qu'il désigne Me [X] [G], notaire à [Localité 12] et subsidiairement le président de la [10] avec faculté de délégation à tout notaire à l'exception de Me [E] [U]-[O], afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J].
Le juge des référés dans la décision dont appel a désigné Me [X] [G], notaire à [Localité 12], afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision faisant suite au décès de [L] [J], et dit que ce dernier se fera remettre l'ensemble des éléments détenus par Me [E] [U]-[O] notaire à [Localité 15], ainsi que l'intégralité des fonds disponibles.
En cause d'appel, les parties demeurent en désaccord sur la désignation du notaire pouvant être en charge des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision successorale suite au décès de [L] [J].
Mais, les appelants n'évoquent aucun dommage imminent ou trouble manifestement illicite, aucune urgence pour voir désigner un autre notaire que Me [G] qui est désormais détenteur de la somme séquestrée.
En conséquence, cette demande doit être rejetée et la décision dont appel confirmée sur ce point.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Eu égard à la nature du litige, chaque partie conservera la charge de ses dépens et il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour
INFIRME l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a ordonné au notaire le versement par provision des sommes de :
- 25 000 euros pour Mme [W] [J],
- 25 000 euros pour M. [R] [J] à titre d'avance sur leurs droits dans la succession de feu [L] [J].
Statuant à nouveau,
DIT que le notaire détenteur du séquestre versera une provision de 45 000 euros à chaque appelant à titre d'avance sur leurs droits dans la succession de feu [L] [J] ;
CONFIRME l'ordonnance entreprise pour le surplus des dispositions critiquées,
DIT que chacune des parties supportera ses propres dépens d'appel,
DIT n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente