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08/04/2008 | FRANCE | N°06/02288

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 08 avril 2008, 06/02288


ARRÊT No 486

R. G. : 06 / 02288



CONSEIL DE PRUD' HOMMES D' ANNONAY
10 mai 2006
Section : Commerce


X...


Z...


C /


Y...




COUR D' APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 08 AVRIL 2008

APPELANTS :

Monsieur Georges X...

né le 04 Mars 1938 à MARSEILLE (13000)

...


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représenté par Maître Jean- Paul POLLEUX, avocat au barreau de VALENCE

Madame Geneviève Z... épouse X...

née le 19 Juin 1943 à TROYES (10000)<

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représentée par Maître Jean- Paul POLLEUX, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉ :

Monsieur Philippe Y...

né le 25 Octobre 1962 à LYON

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représenté par Maître Dominique C...

ARRÊT No 486

R. G. : 06 / 02288

CONSEIL DE PRUD' HOMMES D' ANNONAY
10 mai 2006
Section : Commerce

X...

Z...

C /

Y...

COUR D' APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 08 AVRIL 2008

APPELANTS :

Monsieur Georges X...

né le 04 Mars 1938 à MARSEILLE (13000)

...

...

représenté par Maître Jean- Paul POLLEUX, avocat au barreau de VALENCE

Madame Geneviève Z... épouse X...

née le 19 Juin 1943 à TROYES (10000)

...

...

représentée par Maître Jean- Paul POLLEUX, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉ :

Monsieur Philippe Y...

né le 25 Octobre 1962 à LYON

...

...

représenté par Maître Dominique CHAMBON, avocat au barreau de PRIVAS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Régis TOURNIER, Président,
Monsieur Olivier THOMAS, Conseiller,
Monsieur Christian LERNOULD, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision,

DÉBATS :

à l' audience publique du 05 Février 2008, où l' affaire a été mise en délibéré au 08 Avril 2008,

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 08 Avril 2008, date indiquée à l' issue des débats,

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur Philippe Y... a été employé, en qualité de cuisinier, entre le 29 avril 1987 et le 30 avril 2004, par Madame Geneviève Z..., épouse X... qui exploite à Lalouvesc (Ardèche) un fonds de commerce hôtel restaurant dénommé ...

Considérant qu' il n' avait pas été payé de ses salaires pour la période du 1er octobre 1987 au 30 avril 2004, Monsieur Y... a saisi le Conseil de Prud' hommes d' Annonay, statuant en matière de référé, aux fins d' obtenir la condamnation de son employeur d' avoir à lui régler la somme de 275. 309, 10 € au titre de rappel de salaire.

Par une ordonnance rendue le 22 décembre 2004, la juridiction prud' homale a fait application de la prescription quinquennale et a condamné Madame X... à payer à Monsieur Y... la somme de 70. 742, 29 € au titre des salaires des cinq dernières années.

Sur appel de Madame X..., la Cour d' Appel de Nîmes, dans un arrêt du 25 septembre 2005, a infirmé l' ordonnance de référé, estimant que les conditions d' une instance en référé n' étaient pas réunies.

Monsieur Y... a, alors, saisi au fond le Conseil de Prud' hommes aux fins d' obtenir la condamnation de son employeur d' avoir à lui régler un arriéré de salaires portant sur cinq années soit la somme de 83. 427 €, outre les congés payés soit 8. 342, 70 €, des heures supplémentaires et congés payés sur heures supplémentaires, des dommages intérêts pour préjudice moral ainsi qu' une somme de 1. 000 € sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 10 mai 2006 le Conseil de Prud' hommes a condamné solidairement Madame X... et son époux Monsieur Georges X... à payer à Monsieur Y... les sommes suivantes :

- 67. 704, 85 € brut au titre de rappel de salaire du 1er décembre 1999 au 30 avril 2004,
- 6. 770, 48 € brut au titre d' indemnité de congés payés sur rappel de salaire,
- 11. 184, 15 € bruts au titre d' heures supplémentaires,
- 1. 128, 41 € bruts au titre d' indemnité de congés payés sur heures supplémentaires,
- 15. 000 € à titre de dommages intérêts pour préjudice moral,
- 1. 000 € sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile.

Les époux X... ont relevé appel de cette décision.

Ils demandent à la cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré.

Ils font valoir que les pièces qu' ils produisent aux débats, notamment les bulletins de salaire et les divers documents comptables, établissent sans contestation possible que le salaire était bien payé en espèces à Monsieur Y....

Ils ajoutent que la demande de paiement d' heures supplémentaires n' est pas fondée dans la mesure où Monsieur Y... résidait en permanence dans l' hôtel où il était logé chauffé, nourri et blanchi ce qui explique que des témoins pouvaient penser qu' il travaillait au- delà d' un horaire normal alors qu' il assurait son service sans dépassement de son horaire normal.

Considérant avoir subi du fait d' une procédure qu' ils estiment abusive un préjudice moral important Monsieur X... demande à la cour de condamner Monsieur Y... à lui payer la somme de 5. 000 € à titre de dommages intérêts, Madame X... réclamant elle la somme de 15. 000 €, outre les sommes respectives de 1. 000 et 3. 000 € en application de l' article 700 du code de procédure civile.

Monsieur Y... a conclu à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation des appelants au paiement des sommes de 5. 000 € à titre de dommages intérêts et 3. 000 € sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile.

Il affirme qu' à compter du 1er octobre 1987 il a cessé de percevoir son salaire, les époux X... lui ayant promis qu' il serait payé sur le prix de vente du fonds de commerce.

Il fait valoir qu' il appartient à l' employeur d' apporter la preuve du paiement des salaires qu' il a versés ce qu' il ne fait pas les documents comptables produits aux débats étant insuffisants à rapporter une telle preuve.

Il soutient, produisant à l' appui de ses dires de nombreux témoignages, qu' il effectuait à minima une journée de travail supplémentaire par semaine ce qui correspond à quatre jours par mois.

Il considère que l' hôtel était exploité conjointement par Monsieur et Madame X... ceux- ci ayant créé une société de fait ce qui justifie leur condamnation solidaire au paiement des sommes qu' il réclame.

MOTIFS

Sur le rappel de salaires

Il revient à l' employeur débiteur de l' obligation de rapporter la preuve du paiement des salaires afférents au travail effectivement accompli, et en cas de contestation de produire les pièces comptables.

La délivrance par l' employeur de bulletins de paie n' emporte pas la présomption de paiement des sommes mentionnées.

La seule mention sur les bulletins de paie d' un règlement en espèce ne permet pas à l' employeur de se libérer de son obligation de paiement du salaire.

En l' espèce, Madame X... verse aux débats des extraits du journal de paie pour les années 1999 à 2004 (période non couverte par la prescription) sur lesquelles sont effectivement portés les montants des salaires de Monsieur Y....

Elle produit également des extraits du grand livre général sur lesquels apparaissent très précisément les salaires figurant sur les bulletins de paie de ce salarié.

L' URSSAF a effectué un contrôle des documents comptables de l' Hôtel du Vivarais pour la période du 1 janvier 2001 au 30 avril 2004 et n' a décelé aucune anomalie.

Des salariés ayant travaillé avec Monsieur Y... et de nombreux clients attestent que ce salarié ne s' est jamais plaint du fait qu' il ne percevait pas son salaire.

Monsieur Y... a été affilié par son employeur à tous les organismes sociaux.

Les déclarations annuelles de salaire ont été régulièrement faites et les charges sociales payées.

Messieurs Lionel et César A..., experts comptables, attestent dans un courrier adressé à Madame X... le 2 février 2005 que bien que ses bulletins de salaire indiquaient le règlement par chèque Monsieur Y... était payé en espèce " comme le confirment les mouvements du livre de caisse ".

Ainsi, au vu de l' examen des pièces comptables, l' employeur établit le paiement du salaire à son salarié par versement d' espèces pour la période de 1999 à 2004.

Il convient sur ce point de réformer le jugement entrepris.

Sur les heures supplémentaires

L' article L. 212- 1- 1 du code du travail énonce que : « en cas de litige relatif à l' existence ou au nombre d' heures de travail effectuées, l' employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ce fourni par le salarié est à l' appui de sa demande le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d' instruction qu' il estime utiles. »

S' il résulte de cette disposition légale que la preuve des heures de travail effectuées n' incombe spécialement à aucune des parties et que l' employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Monsieur Y... produit aux débats prés de 25 témoignages émanant non seulement de clients mais également de salariés ayant travaillé pour le compte de Madame X... démontrant que ce salarié se trouvait en permanence sur son lieu de travail, tous les jours de la semaine, qu' il effectuait non seulement son travail de cuisinier mais qu' il participait également à des travaux d' entretien et de réfection des chambres, qu' il était disponible en permanence, prêt à intervenir à la demande de son employeur.

C' est ainsi que par exemple un client de l' établissement Monsieur Jacques E... a déclaré dans un témoignage écrit fait le 14 novembre 2005 : « Pendant de nombreuses années, j' ai pu constater que Monsieur Philippe Y... ne vivait pas pour lui mais pour son travail jusqu' à en oublier sa famille... Il était très serviable et très gentil trop gentil. Je pense que ses employeurs ont bien profité de cette gentillesse. Il travaillait tout le temps ne sortait jamais et c' est en grande partie grâce à lui que le restaurant hôtel a pu tourner ainsi. »

Les témoins déclarent également que pendant la fermeture de l' établissement pour congé le salarié restait présent pour garder l' établissement.

Monsieur Y... a comptabilisé dans un cahier toutes les heures effectuées.

Ce document, s' ajoutant aux nombreux témoignages établit la réalité des heures supplémentaires effectuées par ce salarié.

Madame X... ne verse quant à elle aucun document précisant les horaires de travail auxquels selon elle Monsieur Y... était astreint.

Elle ne justifie pas de l' affichage d' un horaire de travail du salarié dans l' établissement.

Dans ces conditions c' est à bon droit que la juridiction prud' homale a retenu que Monsieur Y... avait effectué des heures supplémentaires.

Comme l' ont souligné les premiers juges, il est établi au vu des témoignages et éléments produits par Monsieur Y... que celui- ci accomplissait des heures supplémentaires sur la base de deux journées de travail supplémentaire par semaine.

Dans ces conditions il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu' il a alloué au salarié dans la limite de la prescription la somme de 11. 184, 15 € au titre d' heures supplémentaires et celle de 1. 128, 41 € au titre des congés payés afférents.

Sur les dommages intérêts

L' absence de paiement des heures supplémentaires effectuées par le salarié pendant une période longue d' au moins cinq années justifient la condamnation de l' employeur à payer des dommages et intérêts.

La somme de 15. 000 € allouée au salarié, en première instance, est cependant d' un montant excessif.

Au regard du préjudice subi, il convient de fixer l' indemnisation du préjudice subi par Monsieur Y... à la somme de 1. 000 €.

Sur la demande reconventionnelle des époux X...

La procédure engagée par le salarié devant le conseil de prud' hommes ne présente pas un caractère abusif et injustifié.

Dès lors la demande de dommages- intérêts présentés au conventionnellement par les époux X... doit être rejetée.

Sur la demande complémentaire de dommages- intérêts pour procédure abusive formulée par Monsieur Y...

L' appel des époux X... ayant partiellement abouti l' exercice d' un recours ne présente pas un caractère abusif ou excessif.

Il convient de rejeter la demande de dommages intérêts présentée par Monsieur Y...

Sur la demande de condamnation solidaire des époux X...

Il résulte des témoignages produits aux débats que l' établissement « hôtel du Vivarais " était exploité depuis plusieurs années aussi bien par Madame X... que par son époux qui était à la retraite.

Ils travaillaient tous deux dans l' établissement et le géraient de façon conjointe.

Ils ont d' ailleurs signer conjointement l' acte de vente du fonds de commerce.

Il a donc existé une société de fait constituée entre les deux époux qui justifient leur condamnation solidaire au paiement des sommes allouées à Monsieur Y....

Il convient sur ce point de confirmer le jugement déféré.

Sur l' application des dispositions de l' article 700 du code de procédure civile

En l' état de la réformation partielle du jugement déféré il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie la totalité des frais qu' elle a exposée.

Il n' y a pas lieu dès lors à faire application des dispositions de l' article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en ce qui concerne les condamnations solidaires de Monsieur Georges X... et de Madame Geneviève Z..., épouse X..., au paiement des sommes de 11. 184, 15 € au titre des heures supplémentaires, de 1. 128, 41 € au titre des congés payés sur heures supplémentaires et de 1. 000 € sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile,

Réforme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

Déboute Monsieur Philippe Y... de ses demandes de rappel de salaire pour la période du 1 décembre 1999 au 30 avril 2004 et d' indemnité de congés payés sur rappel de salaire,

Condamne solidairement Monsieur Georges X... et Madame Geneviève Z..., épouse X..., à payer à Monsieur Philippe Y... la somme de 1. 000 € au titre de dommages- intérêts pour préjudice moral,

Déboute Monsieur Philippe Y... de ses autres demandes,

Déboute les époux X... de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Dit n' y avoir lieu à faire application des dispositions de l' article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement Monsieur Georges X... et Madame Geneviève Z... épouse X... aux dépens de première instance d' appel.

Arrêt signé par Monsieur TOURNIER, Président et par Madame SIOURILAS, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Numéro d'arrêt : 06/02288
Date de la décision : 08/04/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Annonay


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-04-08;06.02288 ?
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