ARRÊT No307
R.G. : 07/02616
SB
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON
29 mai 2007
GROUPAMA SUD
S.A. ADVANTOP
C/
S.C.I. CHATEAU VAL JOANIS
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère Chambre A
ARRÊT DU 28 AVRIL 2009
APPELANTES :
GROUPAMA SUD, Caisse Régionale de Réassurance Mutuelle Agricole,
poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social
Maison de l'Agriculture
Place Chaptal Bt 2
34621 MONTPELLIER CEDEX 02
représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour
assistée de Me VERNHET, avocat au barreau de MONTPELLIER
APPELANTE ET INTIMÉE
S.A. ADVANTOP,
prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social situé :
94, rue Alain Barjac
ZAC Terre du Fort,
84120 PERTUIS
représentée par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour
assistée de Me Laurent CARETTO, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
S.C.I. CHATEAU VAL JOANIS
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social
Le Val Joanis
84120 PERTUIS
représentée par la SCP M. TARDIEU, avoués à la Cour
assistée de la SCP BOLLET ET ASSOCIES, avocats
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 06 Février 2009
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Dominique BRUZY, Président,
Mme Christine JEAN, Conseiller,
M. Serge BERTHET, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Véronique VILLALBA, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
à l'audience publique du 03 Mars 2009, où l'affaire a été mise en délibéré au 28 Avril 2009
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Dominique BRUZY, Président, publiquement, le 28 Avril 2009, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour
* * *
La société VAL JOANIS exploite un domaine viticole pour lequel elle a fait édifier un hangar de stockage isotherme dont la couverture a été confiée à la SARL JOSEPH COMPOSITES, aux droits de laquelle vient la société ADVANTOP. Le bâtiment a été livré en février 1999. Des problèmes d'étanchéité non résolus ont conduit la société VAL JOANIS à saisir le juge des référés du tribunal de commerce d'Avignon, qui a ordonné le 17 février 2004 une expertise confiée à Monsieur Pierre B.... L'expert a établi son rapport en date du 4 avril 2005, concluant à l'existence de plusieurs désordres empêchant l'utilisation normale du hangar. Une transaction a été signée le 2 novembre 2006 entre VAL JOANIS et ADVANTOP, mais subordonnée à l'accord de GROUPAMA qui n'a pas accepté.
La société VAL JOANIS a fait assigner, en paiement du coût des travaux de reprise des désordres et en réparation de son préjudice d'exploitation, la société ADVANTOP et son assureur GROUPAMA devant le tribunal de commerce d'Avignon qui, par jugement du 31 mars 2006, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance d'Avignon ; celui-ci, par jugement du 29 mai 2007, a :
constaté qu'il n'y avait pas eu d'accord transactionnel entre les parties;
dit que la compagnie GROUPAMA SUD était tenue de garantir la responsabilité décennale de son assurée la SA ADVANTOP, venant aux droits de la SARL JOSEPH COMPOSITES, pour les garanties obligatoires;
dit que la compagnie GROUPAMA SUD n'était pas tenue de garantir les dommages immatériels résultant de la responsabilité décennale de son assurée;
condamné en solidarité la sa ADVANTOP et la compagnie GROUPAMA SUD à payer à la société civile CHÂTEAU VAL JOANIS la somme de 80.251,16 € au titre du coût des travaux de reprise des désordres ;
condamné la sa ADVANTOP à payer à la société civile CHÂTEAU VAL JOANIS la somme de 49.465,10 € en réparation de son préjudice d'exploitation antérieur au 1 er juillet 2005 ;
condamné la sa ADVANTOP à payer à la société civile CHÂTEAU VAL JOANIS la somme de 18.270,16 € par an à compter du 1er juillet 2005, en réparation de son préjudice d'exploitation, jusqu'à la date du versement effectif de l'indemnité allouée ci-dessus au titre du coût des travaux de reprise des désordres ;
condamné la compagnie GROUPAMA SUD à relever et garantir la sa ADVANTOP de cette condamnation;
condamné la compagnie GROUPAMA SUD à payer à la société civile CHÂTEAU VAL JOANIS la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ;
condamné la compagnie GROUPAMA SUD à payer à la sa ADVANTOP la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ;
condamné la compagnie GROUPAMA SUD aux dépens comprenant les frais de référé et d'expertise judiciaire ;
ordonné l'exécution provisoire du jugement.
La Caisse régionale de réassurance mutuelle agricole GROUPAMA SUD et la société ADVANTOP ont relevé appel de ce jugement.
Par conclusions du 12 octobre 2007 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et de ses moyens, la Caisse GROUPAMA SUD demande à la Cour de :
Réformer le jugement dont appel en ce qui concerne la somme de 80 251 € et celle de 18 270 €.
Dire et juger que GROUPAMA ne doit pas couvrir la société ADVANTOP pour sa responsabilité décennale.
Dire et juger que GROUPAMA n'a commis aucune faute sur le terrain de l'article 1382 du Code Civil au regard de la société VAL JOANIS.
Le confirmer pour le surplus sauf à condamner VAL JOANIS ou ADVANTOP à payer à la concluante la somme de 2 000€ sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que les entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP GUIZARD SERVAIS, Avoués.
Ordonner le remboursement de la somme de 102.521.32€ réglée par GROUPAMA le 2 octobre 2007 avec intérêts de droit à compter de cette date.
Par conclusions du 19 septembre 2008 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et de ses moyens, la SA ADVANTOP demande à la Cour de :
Au principal,
REFORMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON a par un jugement en date du 29 mai 2007 et, DIRE ET JUGER que la transaction passée entre les parties est parfaite du fait des signatures et acceptations des sociétés CHATEAU VAL JOANIS et ADVANTOP mais également acceptation et règlement intervenu du fait de la compagnie GROUPAMA.
Et par voie de conséquence, HOMOLOGUER la transaction susvisée.
Dans un cadre très subsidiaire,
CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a été retenu la couverture de la société GROUPAMA sur le préjudice matériel.
Par contre, INFIRMER celui-ci en ce que la garantie sur les dommages immatériels a été écartée.
FAIRE droit aux sollicitations de la concluante et condamner la compagnie GROUPAMA à prendre à sa charge, la totalité du préjudice immatériel, et plus généralement toutes condamnations qui pourraient être mises à la charge de la société ADVANTOP de ce chef.
A titre infiniment subsidiaire,
CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a été retenu la carence de la compagnie GROUPAMA et sa faute, telles que retenues par les juges de première instance avec toutes les conséquences y afférentes et la condamner de plus fort, à relever et garantir la société ADVANTOP de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, sans aucune exception.
CONDAMNER la compagnie GROUPAMA à prendre à sa charge, la totalité du préjudice immatériel, et plus généralement toutes condamnations qui pourraient être mises à la charge de la société ADVANTOP de ce chef.
CONDAMNER la compagnie GROUPAMA à payer à la société ADVANTOP une somme de 5.000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
LA CONDAMNER aux entiers dépens tant de 1ère instance que d'appel distraits au profit de la SCP PERICCHI qui y a pourvu sous ses affirmations de droit.
Par conclusions du 30 octobre 2008 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et de ses moyens, la société civile CHATEAU VAL JOANIS demande à la Cour de :
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement GROUPAMA SUD et ADVANTOP à payer à la concluante:
-la somme de 80.251,16 € au titre du coût des travaux de reprise des désordres
-la somme de 18.270,16 € par an à compter du 1er juillet 2005 au titre du préjudice d'exploitation
et condamner ADVANTOP à payer à la concluante :
-la somme de 49.465,10 € au titre du préjudice d'exploitation antérieur au 1er juillet 2005
-la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
et condamner GROUPAMA SUD à payer à la concluante :
-la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
-les dépens, y compris les frais d'expertise
Infirmer pour partie le jugement entrepris et, statuant à nouveau :
- condamner solidairement ADVANTOP et GROUPAMA SUD ou l'une à défaut de l'autre au titre du préjudice d'exploitation antérieur au 1er juillet 2005
- dire et juger que le préjudice d'exploitation doit être réparé jusqu'à la fin du mois d'avril 2007 sur la base de 18.270,16 € l'an prorata temporis
- condamner solidairement ADVANTOP et GROUPAMA SUD ou l'une à défaut de l'autre à payer à la concluante la somme de 8.970 € au titre des réparations provisoires
- condamner solidairement ADVANTOP et GROUPAMA SUD ou l'une à défaut de l'autre à payer à la concluante une indemnité complémentaire de 3.000 € au titre de l'article 700 du NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ; et aux entiers dépens ; ceux d'appel distraits au profit de la SCP TARDIEU, avoués.
La mise en état a été clôturée par ordonnance du 6 février 2009.
SUR QUOI, LA COUR :
Attendu que l'accord transactionnel n'a pas été signé par GROUPAMA ; que nonobstant une correspondance ambiguë, aucun paiement n'est intervenu avant le jugement entrepris ; que le règlement intervenu au titre de l'exécution provisoire du jugement ne vaut pas acquiescement.
Attendu que GROUPAMA, avisée par l'assuré, était représentée à l'expertise par son conseil technique ; que l'expertise judiciaire lui est donc opposable ; qu'au demeurant, elle ne conteste ni les constatations matérielles de l'expert ni le caractère décennal des désordres constatés ni le cadre contractuel de l'intervention de son assuré qui a reçu la commande de la fourniture et pose des panneaux en cause et qui en a sous-traité la pose ; que l'expert B... a constaté une déformation généralisée des panneaux-sandwichs métalliques fabriqués par JOSEPH COMPOSITES et formant la couverture du hangar, avec infiltration d'eau au droit de tous les raccordements entre ces panneaux, l'absence de bavette le long du bardage métallique fermant la partie haute de la façade Nord, entraînant une infiltration au pied du mur en maçonnerie, le pliage et la déformation de la couverture métallique assurant la liaison entre les toitures de l'ancien et du nouveau bâtiment ; que ce sinistre rend l'ouvrage impropre à sa destination et engage la responsabilité décennale du constructeur en vertu des articles 1792 et suivants du Code civil.
Attendu que l'assureur répond de l'information reçue par les tiers auxquels l'attestation délivrée à l'assuré sera présentée par celui-ci ; que l'attestation d'assurance du 12 février 1998 mentionne diverses activités dont "S010 – Autres activités : Bâtiments modulaires en panneaux sandwichs isothermes" ; que la police d'assurance ne comporte aucune disposition, que ce soit sous le titre des DÉFINITIONS, sous le titre de l'OBJET ET ETENDUE DE L'ASSURANCE ou encore sous celui de l'OBJET DE LA GARANTIE, subordonnant la garantie des prestations sous-traitées à la condition que le sous-traitant soit lui-même assuré en décennal ; que GROUPAMA produit un document hors pagination du contrat, présentant l'apparence d'une fiche de renseignements sur laquelle figure cette mention :
2 – Fourniture et pose des éléments fabriqués (Joseph Composites) sachant que la pose est effectuée uniquement par des entreprises sous-traitantes assurées en R.C. Décennale
que ce document ne suffit pas à démontrer que sa garantie était contractuellement subordonnée à la condition que les sous-traitants soient assurés en décennal ; que c'est à juste titre, outre ses atermoiements pertinemment tancés par le tribunal, que le jugement entrepris a retenu son obligation de garantie des dommages matériels dont l'évaluation est exempte de critique.
Attendu que la police fabricant souscrite le 23 décembre 1998 avec effet au 1er janvier 1999 couvre les dommages immatériels ; que cependant il résulte de l'expertise de Monsieur B... que les désordres n'ont pas pour origine un défaut de fabrication des panneaux sandwiches, mais uniquement de graves erreurs de mise en œuvre ; que toutefois, ainsi que l'ont exactement relevé les premiers juges, GROUPAMA a entretenu l'équivoque par des correspondances qui devaient conduire le tiers lésé à différer la remise en état des lieux, en annonçant le règlement de l'indemnité sur la base du protocole d'accord sans y procéder pour ensuite dénier sa garantie, en réclamant à son assuré, par lettre du 22 janvier 2007 le montant de la franchise prétendant avoir procédé au règlement du sinistre dont elle allait en fait refuser la prise en charge, en demandant au tiers lésé de ne pas remplacer la toiture en vue d'une action contre le sous-traitant ; que le tribunal a retenu à juste titre sa responsabilité à raison de ce comportement fautif dont il a tiré les exactes conséquences, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, en condamnant GROUPAMA à relever et garantir ADVANTOP des pertes postérieures à celle relevant de la seule responsabilité de l'assuré.
Attendu que le jugement entrepris doit donc être confirmé en toutes ses dispositions, sauf à y ajouter le coût des réparations provisoires dont VAL JOANIS justifie, qui ont permis, ce qui était l'intérêt commun des parties, de mettre fin au préjudice d'exploitation et qui se sont élevés à la somme de 8970 € TTC ; que GROUPAMA SUD qui succombe au principal doit supporter les dépens ; que pour défendre sur son appel, le CHATEAU VAL JOANIS a dû exposer des frais non compris dans les dépens, au titre desquels il doit lui être alloué la somme de 3000 € ; qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la SA ADVANTOP la charge de ses frais hors dépens.
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Par ces motifs,
LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile, en dernier ressort,
En la forme, reçoit la CAISSE RÉGIONALE DE RÉASSURANCE MUTUELLE AGRICOLE GROUPAMA SUD et la société ADVANTOP en leur appel et le dit mal fondé.
Confirme le jugement déféré ; y ajoutant :
Condamne in solidum la SA ADVANTOP et la Caisse régionale de réassurance mutuelle agricole GROUPAMA SUD à payer à la société civile CHATEAU VAL JOANIS, au titre des réparations provisoires, la somme de 8970 € avec intérêts au taux légal à compter de ce jour.
Condamne la Caisse régionale de réassurance mutuelle agricole GROUPAMA SUD à payer à la société civile CHATEAU VAL JOANIS la somme de 3000 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la SA à ADVANTOP.
Condamne la Caisse régionale de réassurance mutuelle agricole GROUPAMA SUD aux dépens et alloue à la SCP Michel TARDIEU le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Arrêt qui a été signé par Monsieur BRUZY, président, et par Madame VILLALBA, greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,