La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2022 | FRANCE | N°19/00741

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 10 mai 2022, 19/00741


ARRÊT N°



N° RG 19/00741 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HIHM



YRD/ID



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORANGE

27 septembre 2018



RG :17/00046





[V]

[U]





C/



[W] DIVORCÉE [D]

[W]

[W]





































COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 1

0 MAI 2022







APPELANTS :



Madame [N] [V]

née le 09 Janvier 1947 à [Localité 8]

[Adresse 12]

[Localité 8]



Représentée par Me Anne-france BREUILLOT de la SELARL BREUILLOT & AVOCATS, avocat au barreau de CARPENTRAS



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/012034 du 30/01/2019 accordée par...

ARRÊT N°

N° RG 19/00741 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HIHM

YRD/ID

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORANGE

27 septembre 2018

RG :17/00046

[V]

[U]

C/

[W] DIVORCÉE [D]

[W]

[W]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 10 MAI 2022

APPELANTS :

Madame [N] [V]

née le 09 Janvier 1947 à [Localité 8]

[Adresse 12]

[Localité 8]

Représentée par Me Anne-france BREUILLOT de la SELARL BREUILLOT & AVOCATS, avocat au barreau de CARPENTRAS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/012034 du 30/01/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

Monsieur [T] [U] intervenant volontaire à la procédure comme personne habilitée à représenter et assister sa mère Madame [N] [V]

né le 04 Juin 1970 à [Localité 10]

[Adresse 11]

[Localité 7]

Représenté par Me Anne-france BREUILLOT de la SELARL BREUILLOT & AVOCATS, avocat au barreau de CARPENTRAS

INTIMÉS :

Madame [A] [W] DIVORCÉE [D] divorcée [X]

née le 13 Décembre 1958 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandra BOUIX, avocat au barreau de CARPENTRAS

Madame [Y] [W] épouse [X]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Sandra BOUIX, avocat au barreau de CARPENTRAS

Monsieur [R] [W]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Sandra BOUIX, avocat au barreau de CARPENTRAS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 06 Janvier 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Virginie HUET, Conseillère

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

À l'audience publique du 20 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Mai 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 10 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Par requête reçue au greffe le 2 avril 2015, Mme [N] [V] a saisi le conseil de prud'hommes d'Orange aux fins de voir juger qu'elle a été salariée de [R] [W] selon contrat de travail non écrit à durée indéterminée à temps complet depuis le 2 janvier 2013 et qu'elle a été licenciée sans cause réelle et sérieuse de sorte que son employeur doit l'indemniser à ce titre.

L'affaire a été radiée du rôle dans l'attente du jugement correctionnel du tribunal judiciaire de Carpentras ayant à décider si [R] [W] avait été victime d'abus de faiblesse de la part de Mme [V].

Par jugement en date du 24 novembre 2016, Mme [V] a été relaxée et a demandé le réenrolement de l'affaire.

Par jugement en date du 27 septembre 2018, le conseil de prud'hommes d'Orange a :

- débouté Mme [V] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté M.[W] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Mme [V] aux entiers dépens de l'instance.

Mme [V] a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 18 février 2019.

Par courrier en date du 26 mars 2021, le conseil de [R] [W] a informé la juridiction du décès de ce dernier survenu le 17 février 2020.

Aux termes des écritures transmises au greffe le 6 janvier 2022, Mme [V] et M. [T] [U], intervenant volontaire à la procédure suite à sa désignation par le juge du contentieux de la protection d'Avignon, le 20 février 2020, comme personne habilitée à représenter et assister sa mère Mme [N] [V], demandent à la cour de :

- Donner acte à M. [T] [U], personne habilitée à représenter sa mère, de son intervention volontaire à la procédure ;

- Infirmant en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- Dire et juger qu'elle était salariée de [R] [W] selon contrat de travail verbal à durée indéterminée à temps complet depuis le 2 janvier 2013 ;

- Dire et juger qu'elle occupait le poste d'assistante de vie 1, classée niveau II de la convention collective du particulier employeur ;

- Dire sans cause réelle et sérieuse son licenciement;

- Constater que sa créance à l'encontre de la succession de [R] [W] s'élève aux sommes suivantes ;

- 20.627,52 euros à titre de rappel de salaire du 2 janvier 2013 au 31 mars 2014

- 2.062,75 euros au titre des congés payés correspondants ;

- 9.427,32 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé prévue par l'article L.8223-1 du Code du travail ;

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des agissements constitutifs de harcèlement sexuel

- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de [R] [W] à son obligation de surveillance médicale ;

- 6.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- 445,17 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement prévue par les articles L. 1234-9 et R.1234-2 du code du travail ;

- 1.571,22 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 157,12 euros au titre des congés payés correspondants ;

- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier

- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non remise d'une attestation pôle emploi ;

- Intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

- Remise de bulletins de salaires rectifiés, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi conforme sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la notification de la décision à intervenir.

- Condamner Mme [Y] [X] et Mme [A] [W] prises en leur qualité d'héritière de M. [R] [W] à lui payer les sommes précitées ;

- Dire Mme [Y] [X] et Mme [A] [W] irrecevable et mal fondées en leur appel incident et en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire ;

- Se déclarer incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle de Mme [Y] [X] et Mme [A] [W] de leur demande à son encontre tendant en remboursement de la somme de 4800 euros correspondant à l'achat du véhicule Renault Twingo au profit du Tribunal Judiciaire d'Orange;

- Condamner Mme [Y] [X] et Mme [A] [W] , prise en leur qualité d'héritière de M.[R] [W] à payer à la SELARL Breuillot & avocats la somme de 2.000euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi qu'aux entiers dépens ;

- Les condamner au dépens.

Ils soutiennent que :

- Mme [V] était employée jours et nuits selon contrat verbal passé avec le couple [W],

- Mme [V] a été relaxée des fins de la poursuite concernant les faits d'abus de faiblesse,

- La voiture n'est pas une compensation financière des salaires non payés,

- Mme [V] s'occupait des courses et avait une procuration générale sur les comptes pour faciliter les achats pour le couple,

- [R] [W] a eu des gestes déplacés à son égard.

Aux termes de leurs écritures déposées au greffe le 11 avril 2022, Mme [Y] [W] épouse [X] et Mme [A] [W] prises en leur qualité d'héritières de [R] [W] demandent à la cour de :

A titre liminaire :

- écarter l'irrecevabilité des écritures et pièces versées par les intimées au soutien de leurs demandes qui pourrait être soulevée d'office injustement ;

- déclarer leurs écritures et pièces recevables et bien fondées ;

- débouter Mme [V] de l'ensemble de ses demandes et prétentions ;

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Orange le 27/09/2018 en toutes ses dispositions, sauf concernant la situation du véhicule Renault Twingo ;

- condamner, au surplus, Mme [V] à payer la somme de 4.800 euros correspondant à l'achat du véhicule Renault Twingo à leur profit ;

- Confirmer que la présence de Mme [V] au domicile des époux [W] ne saurait, en aucun cas, être assimilée à une activité salariée ;

- condamner Mme [V] à verser la somme de 3.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- condamner Mme [V] aux entiers dépens.

Par arrêt du 22 mars 2022 la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 20 avril 2022 à 14h afin de recueillir les observations des parties sur l'irrecevabilité relevée d'office par la cour des pièces et conclusions des intimés et réservé pour le surplus.

MOTIFS

Sur la recevabilité des conclusions d'intimé

La cour, dans son arrêt du 22 mars 2022, a rappelé que selon l'article 908 du code de procédure civile, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour remettre ses conclusions au greffe, que l'article 909 du même code prévoit que l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué, que Mme [V] a interjeté appel par acte en date du 18 février 2019, que ses conclusions d'appelante ont été notifiées par RPVA en date du 16 mai 2019 de sorte que l'intimé, alors [R] [W], avait jusqu'au 16 août 2019 pour remettre les siennes. Or Mme [Y] [W] épouse [X], venant aux droits de [R] [W] décédé, n'a conclu que le 23 décembre 2021, la signification de la déclaration d'appel ayant été effectuée les 1er et 2 avril 2019 à [R] [W] et à sa curatrice, Mme [Y] [W] épouse [X].

Il est rappelé que [R] [W] est décédé le 17 février 2020, que la notification faite en application des dispositions de l'article 370 du code de procédure civile est en date du 29 mars 2021, ces événements étant bien postérieurs à l'expiration du délai pour conclure de l'article 909.

Il en résulte que les conclusions prises par les intimées, en leur qualité d'héritières et en représentation de [R] [W], et non comme intervenantes, sont irrecevables.

Sur l'existence d'un contrat de travail

L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait, dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements et l'intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le cocontractant.

En l'espèce, l'existence d'un contrat de travail ne peut être sérieusement contestée en l'état des déclarations faites par [R] [W] devant les services enquêteurs dans le cadre de l'enquête pénale pour abus de faiblesse, celui-ci ayant effectivement indiqué : « J'ai cherché à trouver une personne qui pourrait dormir à notre domicile la nuit et s'occuper de nous à temps complet... J'ai voulu la déclarer mais elle ne le voulait pas, disant qu'elle était assurée, je lui ai fourni le gite, le couvert. Elle pouvait disposer de la maison à son gré, et au début elle m'a réclamé10 € par jour surtout pour payer ses cigarettes, j'ai au moins deux témoins Madame [Z] [J] mon infirmière et [M] [P] une amie, qui peuvent attester que je voulais la déclarer mais qu'elle a insisté pour ne pas l'être ».

Lors de cette même enquête ont été entendues :

- Mme [L], infirmière : « J'ai fait la connaissance de Madame [V] il y a un an environ. C'est M. [W] qui me l'a présentée comme quelqu'un qui pouvait les aider, veiller sur eux et dormir sur place, en qualité de « dame de compagnie », 

- Mme [Z] [C], voisine, parlant de Mme [V] qui « apportait sa compagnie à M. [W], allait faire les courses courantes du ménage et faisait la cuisine », « je ne sais pas quels étaient leurs arrangements par contre je saisis qu'au début, quand elle venait juste leur rendre visite et services, il lui donnait 10 euros par jour (') »

Lors de son audition suite au dépôt de plainte de Mme [V] pour agression sexuelle, [R] [W] avait déclaré : « Comme je vous l'ai expliqué précédemment au cours de mes auditions et suite à la plainte que j'ai déposée contre Mme [V] [N] pour des faits d'abus de faiblesse, cette personne a travaillé chez moi pendant cette période en qualité de dame de compagnie et cela dans les conditions que j'ai décrit au cours de la procédure enregistrée sous le N°2014/1727. »

Il en résulte que Mme [V] était salariée de [R] [W] de janvier 2013 à fin mars 2014 soit 15 mois, et non 16 comme indiqué par l'appelante.

Au regard de la convention collective du particulier employeur du 24 novembre 1999, alors applicable, Mme [V] pouvait prétendre à l'emploi d'assistante de vie 1 (niveau II) dont la fonction est d'assurer "une présence auprès des personnes âgées ou handicapées en veillant à leur confort physique et moral, et en exécutant les tâches ménagères courantes." dans la mesure où elle s'occupait de Mme [W], personne âgée atteinte de la maladie d'Alzheimer mais aussi de [R] [W], personne âgée qui n'était plus en état de conduire.

En application des articles 5 et 6 de cette même convention collective nationale, Mme [V] peut prétendre au paiement des sommes suivantes :

- montant du salaire mensuel brut de 1571,22 euros dont il convient de déduire le coût des 60 repas/mois pris en charge par les époux [W] estimé à 4,70 euros selon les articles 1er et 2 du dernier avenant étendu relatif au salaire du 9 juillet 2009 soit la somme mensuelle de 282 euros à ce titre

- soit la somme de 1.571,22 - 282 x 15 = 19.338,30 euros dont doit être déduite la somme nette de 4.800 euros versée en octobre 2013.

- outre la somme de 1.933,83 euros au titre des congés payés correspondants.

Sur l'existence du travail dissimulé

L'article L.8221-5 du code du travail dispose :

"Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales."

L'article L.8223-1 du Code du travail dispose :

"En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire."

Mme [V] rappelle avoir été employée par [R] [W] en qualité d'employée de maison sans faire l'objet d'aucune déclaration préalable auprès de l'URSSAF, sans recevoir de bulletin de paye et sans bénéficier d'un salaire autre qu'en nature alors qu'elle travaillait à temps complet.

Quand bien même [R] [W] aurait soutenu devant les services enquêteurs que Mme [V] aurait « refusé d'être déclarée » au motif qu'elle ne « voulait pas perdre ses droits à la retraite », il n'en demeure pas moins qu'une telle position ne l'exonérait pas de ses obligations impératives de déclarer sa salariée.

Mme [N] [V] est dès lors bien fondée à solliciter la condamnation de son employeur au paiement de la somme de 9.427,32 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L.8223-1 du Code du travail.

Sur la relaxe prononcée par le Tribunal correctionnel de Carpentras du chef d'abus de

faiblesse

Les développements de l'appelante sur ce point ne présentent aucun intérêt dès lors que les conclusions des intimées ont été déclarées irrecevables.

Sur le harcèlement sexuel subi par Mme [N] [V]

Selon l'article L.1153-1 du code du travail dispose :

« Aucun salarié ne doit subir des faits :

1°Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

2°Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers. »

L'article L.1154-1 poursuit «Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.» 

Mme [V] soutient avoir été victime d'un comportement incorrect de la part [R] [W] durant toute la durée des relations contractuelles l'ayant amenée à porter plainte pour des faits d'agression sexuelle et de harcèlement sexuel le 28 janvier 2014.

Or, outre ses seules déclarations réitérées devant les services de police, elle produit une attestation du12 août 2014 du Docteur [H] [B], son médecin traitant, indiquant : " Je soussigné Dr [B], médecin de Mme [V] [N], âgée de 67 ans depuis le mois de mai, certifie qu'elle présente un syndrome anxio-dépressif nécessitant une prise d'anti-dépresseur et de somnifère depuis le début de l'année 2014. Son état anxieux s'est aggravé ces derniers jours."

Ces éléments sont insuffisants pour permettre de présumer l'existence d'un harcèlement sexuel.

Sur l'absence de visite médicale d'embauche

Mme [V] soutient que [R] [W] s'est soustrait à l'obligation prévue à l'article 22 de la convention collective en matière de visite médicale d'embauche et d'examen médical périodique, que ce manquement lui a causé un préjudice alors qu'elle était elle-même âgée et en mauvaise condition physique, et qui s'est trouvée dans l'obligation de vivre une situation éprouvante.

Ce faisant, Mme [V] ne fait la démonstration d'aucun préjudice.

Sur la rupture des relations contractuelles

Il n'est pas discutable que la relation de travail a pris fin alors qu'il n'est ni démontré ni même allégué que Mme [V] ait démissionné de son emploi, aucune procédure de licenciement n'ayant été mise en oeuvre.

Mme [V] avance sans être utilement contredite que [R] [W] l'a chassée de son domicile pour aller ensuite déposer plainte à son encontre pour abus de faiblesse, plainte qui donnera lieu par la suite à un jugement de relaxe à présent définitif.

Il en résulte que la rupture s'analyse en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

Pour faire la démonstration de son préjudice, Mme [V] fait état des conséquences du dépôt de plainte et de la procédure pénale qui s'en est suivie ayant fortement dégradé son état de santé, alors que l'indemnité allouée sur le fondement de l'article L.1235-3 ancien est destinée à réparer le préjudice causé par l'absence de cause légitime au licenciement. Il sera donc alloué à Mme [V] qui bénéficiait déjà de sa retraite la somme de 1.500,00 euros à ce titre.

Mme [V], qui présentait une ancienneté de 15 mois peut prétendre au paiement de la somme de 1.571,22 euros représentant un mois de salaire au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, en application de l'article 12 de la convention collective du particulier employeur, outre la somme de 157,12 euros au titre des congés payés correspondants.

Elle est en outre fondée à solliciter la somme de 445,17 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement prévue par les articles L. 1234-9 et R.1234-2 du code du travail.

Mme [V] ajoute que [R] [W] n'a pas respecté la procédure de licenciement prévue à l'article 12 de la convention collective applicable et qu'elle n'a pas bénéficié d'un entretien préalable. Il lui sera alloué la somme de 100,00 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef.

Enfin, Mme [V] indique qu'aucune attestation Pôle Emploi ne lui a été remise ce qui lui cause nécessairement un préjudice, qui peut être évalué à la somme de 500 euros. Or, Mme [V] ne pouvant percevoir des allocations chômage pour bénéficier d'une retraite, et qui ne soutient du reste pas qu'elle pouvait en bénéficier, ne justifie donc d'aucun préjudice à ce titre.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner les intimées à payer à Mme [V] la somme de 2.000,00 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort,

- Donne acte à M. [T] [U], personne habilitée à représenter sa mère, de son intervention volontaire à la procédure,

- Dit irrecevables les conclusions des intimées des 23 décembre 2021 et 5 janvier 2022,

- Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,

- Dit que Mme [V] était salariée de [R] [W] selon contrat de travail verbal à durée indéterminée à temps complet de janvier 2013 à fin mars 2014,

- Dit que Mme [V] occupait le poste d'assistante de vie 1, classée niveau II de la convention collective du particulier employeur,

- Dit le licenciement de Mme [V] dénué de cause réelle et sérieuse,

- Constate que la créance de Mme [V] à l'encontre de la succession de [R] [W] s'élève aux sommes suivantes ;

- 19.338,30 euros à titre de rappel de salaires dont doit être déduite la somme nette de 4800 euros versée en octobre 2013

- 1.933,83 euros au titre des congés payés correspondants,

- 9.427,32 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L.8223-1 du code du travail

- 1.500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse

- 100,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement

- 1.571,22 euros d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 157,12 euros au titre des congés payés correspondants

- 445,17 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- Condamne Mme [Y] [X] et Mme [A] [W] prises en leur qualité d'héritière de [R] [W] à payer à Mme [V] les sommes précitées,

- Ordonne la remise de bulletins de salaires, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi conformes à la présente décision et dit n'y avoir lieu de prononcer une astreinte,

- Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, et à défaut de demande initiale, à compter de la date à laquelle ces sommes ont été réclamées, que s'agissant des créances salariales à venir au moment de la demande, les intérêts moratoires courent à compter de chaque échéance devenue exigible, et qu'ils courent sur les sommes à caractère indemnitaire, à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

- Déboute Mme [V] de toutes ses autres demandes,

- Condamne Mme [Y] [X] et Mme [A] [W] à payer à Mme [V] la somme de 2.000,00 euros par application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

- Condamne Mme [Y] [X] et Mme [A] [W] aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame DELOR, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/00741
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;19.00741 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award