ARRÊT N°
N° RG 20/02484 - N° Portalis DBVH-V-B7E-H2BK
LM
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES
08 septembre 2020 RG :19/00706
[Z]
C/
[B]
Grosse délivrée
le
à Me Manchet
SCP CHATELAIN...
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 28 JUILLET 2022
APPELANT :
Monsieur [Y] [Z] ayant élu domicile au siège de la SAS CAMILLERI GESTION, immatriculée au RCS de NIMES sous le n° 792 170 946, pris en la personne de son Représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au dit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Sabine MANCHET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉ :
Monsieur [F] [B]
né le 08 Juin 1959 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Adresse 8]
[Localité 3]
Représenté par Me Magali CHATELAIN de la SCP CHATELAIN GUTIERREZ, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 17 Mars 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Laure Mallet, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre
Mme Catherine Ginoux, conseillère
Madame Laure Mallet, conseillère
GREFFIER :
Mme Céline Delcourt, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
à l'audience publique du 07 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 Juin 2022, prorogé à ce jour,
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre et Mme Céline Delcourt, greffière le 28 juillet 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DU LITIGE
Suivant contrat de bail professionnel en date du 28 décembre 1987, M. [Y] [Z] a donné à bail à M. [B] et M. [O], un appartement situé [Adresse 6].
Un procès-verbal de constat d'état des lieux d'entrée en date du 6 janvier 1988 a été dressé.
Lors de la libération des lieux le 30 mars 2018, deux procès-verbaux contradictoires ont été établis par un huissier mandaté par le bailleur d'une part et par un huissier mandaté par le preneur d'autre part à la même heure et au contradictoire des parties.
Soutenant que M. [B] a souscrit une obligation d'entretenir les locaux loués dans un bon état d'entretien et de réparation par rapport à l'état neuf dans lequel ils lui ont été remis et qu'il résulte du procès-verbal de constat d'état des lieux de sortie en date du 30 mars 2018 que les locaux ont été restitués sans aucun entretien réel depuis 30 ans et en mauvais état d'entretien et de réparation, M. [Y] [Z] a, par acte d'huissier en date du 12 février 2019, fait assigner M. [B] devant le tribunal de grande instance de Nîmes aux fins notamment de le condamner à lui payer la somme de 9 494,93 euros au titre des travaux de remise en état du local professionnel .
Par jugement contradictoire du 8 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Nîmes a :
- condamné M. [B] à payer à M. [Z] la somme de 608,51 euros TTC au titre des frais de remise en état du local situé [Adresse 6], assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 février 2019,
- rappelé que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit,
- débouté M. [Z] du surplus de ses demandes au fond,
- condamné M. [B] à payer à M. [Z] la somme de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [B] au paiement des entiers dépens.
Par déclaration du 6 octobre 2020, M. [Z] a relevé appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 18 décembre 2020, auxquelles il est expressément référé, M. [Z] demande à la cour de :
-infirmer le jugement du 8 septembre 2020 en ce qu'il a limité la condamnation de M. [B] à la seule somme de 608,51 euros TTC,
et statuant à nouveau,
- condamner M. [B] à payer à M. [Z],
* au titre des travaux de remise en état effectués par MB Travaux 30, la somme de 9 494,93 euros qui sera augmentée des intérêts légaux en matière civile à compter de la mise en demeure du 5 juillet 2018,
* au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 1 000 euros,
- condamner le défendeur aux dépens qui comprendront les frais du constat d'huissier de sortie qui seront recouvrés par Me Sabine Manchet-Frontin dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 31 décembre 2020, auxquelles il est expressément référé, M. [B] demande à la cour de:
Vu l'article 1755 du code civil,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* débouté M. [Z] du surplus de ses demandes au fond, reconnaissant ainsi que les travaux entrepris par ce dernier ont été rendu nécessaires par vétusté,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* condamné M. [B] à payer à M. [Z] la somme de 608,51 euros au titre des frais de remise en état du local situé [Adresse 6], assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 février 2019,
* condamné M. [B] au paiement des entiers dépens,
* condamné M. [B] à payer à M. [Z] la somme de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
et, statuant à nouveau :
- rejeter l'ensemble des demandes de M. [Z],
- dire et juger que M. [Z] devra restituer le dépôt de garantie d'un montant de 762,15 euros entre les mains de M. [B],
- subsidiairement, dire que le montant du dépôt de garantie, soit 762,15 euros viendra en compensation des éventuelles sommes dues par M. [B],
- condamner M. [Z] au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [Z] au paiement des entiers dépens.
La clôture de la procédure est intervenue le 17 mars 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
Selon l'article 1755 du code civil aucune des réparations réputées locatives n'est à la charge des locataires, quand elles ne sont occasionnées que par vétusté ou force majeure.
Seule une clause expresse du bail peut mettre à la charge du locataire les réparations résultant de la vétusté.
En l'espèce, le bail ne stipule pas une telle clause.
Au contraire, selon l'article 5.1.2 : charges et conditions concernant le preneur « Il les entretiendra (les lieux) pendant tout le cours du présent bail en bon état de réparations locatives et d'entretien, notamment les peintures, fermetures, ferrures, plomberie et autres.
Il prendra en charge l'entretien courant du local et des équipements mentionnés au contrat, les menues réparations et l'ensemble des réparations locatives définies par le décret n°82/1164 du 30 décembre 1982, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas de force majeure.
Il supportera également toutes les réparations qui seraient rendues nécessaires par suite du défaut d'exécution des réparations locatives ou d'entretien, ou de dégradations résultant de son fait ou de celui de sa clientèle ou de son personnel.
A l'expiration du bail, il rendra le tout en bon état de réparation d'entretien et de fonctionnement. »
L'appelant soutient que le locataire avait souscrit clairement et de manière non équivoque une obligation d'entretenir les locaux loués à neuf en 1988 et de les restituer dans le même état neuf à son départ alors qu'il résulte du procès-verbal de constat de sortie des lieux en date du 30 mars 2018 que les locaux ont été restitués sans aucun entretien réel depuis 30 ans et en mauvais état d'entretien et de réparation.
Il sollicite la somme de 9 494,93 € au titre des travaux de remise en état selon facture de la société MB Travaux correspondant en la réfection des peintures des plafonds et des murs, la réfection des menuiseries intérieures, la dépose du standard et remise en état après dépose, débarrassage de la cave, remplacement du meuble sous évier et robinetterie, enlèvement des posters, dépose tableau électrique.
Sur la réfection des peintures et des menuiseries,
Il convient de constater que si le bail indique que les lieux sont livrés entièrement refaits à neuf, le procès-verbal d'entrée dans les lieux du 6 janvier 1988 mentionne :
« Ces constatations faites, je m'adresse à Mademoiselle [T] et lui déclare qu'après avoir procédé à l'état des lieux que je viens de terminer, j'ai pu constater que ces locaux se trouvaient à l'état neuf et que je n'avais trouvé aucune anomalie, chose en mauvais état ou hors d'état de fonctionnement si ce n'est que j'avais noté devant elle et ce que je n'avais pu vérifier, à savoir le fonctionnement des appareils et installation électrique vu l'absence d'alimentation en électricité pour l'instant ;
Mademoiselle [T] sur mon interrogation me déclare qu'effectivement tout est en parfait état et qu'elle n'a aucune observation à faire autre que ce que j'ai pu noter, et que je viens de lui rappeler, à savoir :
-De l'humidité sur certains murs.
-Un carreau fissuré et un carreau ébréché dans la pièce principale
-Quelques effritements de peinture ou taches d'humidité en quelques endroits.
-Un carreau de menuiserie fêlé en un endroit.
-L'évier présentant des éclats d'émail.
Mademoiselle [T] me déclare faire toutefois des réserves quant au bon fonctionnement des installations et appareils électriques et me déclare tenir à signaler que le compteur EDF n'a pas été posé à ce jour...».
Ainsi, si effectivement les lieux étaient en bon état général, quelques désordres étaient néanmoins relevés.
L'analyse du procès-verbal de constat de sortie dressé à la requête du bailleur et des photographies prises par l'huissier révèle que les menuiseries et les peintures sont à l'état d'usage et que certaines sont de couleur blanche en bon état.
Des constatations quasi similaires ont été faites par l'huissier mandaté par le preneur qui note que, d'une manière générale, le local professionnel est dans un état usagé mais propre.
Or, l'obligation du locataire d'entretenir les lieux et d'effectuer les réparations locatives ne s'étend pas à la remise à neuf des papiers peints, peintures et revêtements de sol, atteints par la vétusté après plusieurs années d'occupation.
Comme l'a justement relevé le premier juge, entre l'entrée dans les lieux du local loué par M. [B] selon le procès-verbal de constat d'état d'entrée dans les lieux en date du 6 janvier 1988 et le procès-verbal de constat de sortie établi le 30 mars 2018, il s'est écoulé plus de 30 ans d'occupation du local, de sorte que l'usure avec le temps des peintures et menuiseries résulte d'un usage normal et légitime de la chose louée par le preneur, l'appelant ne versant au dossier aucun élément établissant que M. [B] n'aurait pas occupeé les lieux conformément à leur destination professionnelle.
Le bailleur n'établit pas la négligence ou un défaut d'entretien du preneur, les photographies de l'état des lieux de sortie ne mettant en évidence aucune dégradation concernant les peintures et les menuiseries autres que l'usure du temps.
Par ailleurs, l'obligation du preneur aux réparations locatives ne peut être exigée qu'en fin de bail par le propriétaire.
L'intimé verse aux débats :
-un devis du 12 février 2018 et une facture en date du 25 avril 2018 de l'association Passerelle concernant la rénovation de l'installation électrique et de peinture pour un montant total de 2665,52 euros ;
-une attestation de M.[J] [U] indiquant :
« J'atteste par la présente m'être rendu dans l'après-midi du 19 mars 2018 dans les locaux de mon agent d'agent d'assurance M.[F] [B] situé [Adresse 6]. J'ai pu constater que les locaux étaient vides et en réfection de peinture.J'ai donc pu constater que le cabinet avait été transféré quelques mètres plus loin » ;
-une attestation de M. [J] [X] indiquant :
« être le gérant de la société [Adresse 5] et rendu chez mon assureur dont les locaux sont contigus aux miens [Adresse 6] dans la journée du 20 mars 2018 et avoir constaté ce jour là que ces locaux faisaient l'objet de travaux de peinture de rénovation et donc vides. J'ai par ailleurs pu constater que les travaux se sont poursuivis jusqu'à la fin de la semaine. » ;
-un courriel en date du 10 septembre 2018 de [N] [I] confirmant la réalisation de travaux de peinture au sein des locaux professionnels situés [Adresse 6] et se plaignant d'avoir reçu un appel téléphonique d'un individu se présentant comme le propriétaire des locaux et remettant en cause la réalité des travaux de rénovation desdits locaux entrepris par l'association gérée par M. [I].
À défaut de preuve d'une défaillance du locataire dans son obligation d'entretien, le bailleur doit prendre à sa charge les désordres ayant pour seule origine la vétusté.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [Y] [Z] de sa demande au titre des peintures et des menuiseries.
Sur le standard et le tableau électrique.
Les procès-verbaux d'entrée comme de sortie ne comportent aucune mention sur le standard téléphonique et aucune dégradation électrique n'a été constatée, les équipements étant en état de fonctionnement et des travaux ayant été réalisés de ce chef par l'intimé.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de ces chefs de demandes.
Sur le remplacement du meuble sous évier et robinetterie
L'appelant sollicite la somme de 246, 95 € TTC au titre du remplacement du meuble sous l'évier, hors évier, et le remplacement de la robinetterie de type mélangeur mono standard d'un montant de 114, 62 € TTC.
Il résulte du procès-verbal de constat d'entrée dans les lieux que le placard sous évier, à deux portes, en stratifié, est en bon état ainsi que la robinetterie.
Les deux procès-verbaux de sortie démontrent que l'intérieur du placard sous évier est en très mauvais état.
Dès lors, peu importe l'origine de cette dégradation, il appartenait au preneur d'y remédier. L'état de vétusté concernant les tuyauteries allégué par l'intimé n'est pas démontré.
Infirmant le jugement déféré, M. [B] sera condamné à payer à l'appelant la somme de 246, 95 € TTC au titre du remplacement du placard.
Le jugement déféré sera en revanche confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande au titre de la robinetterie, aucune dégradation n' ayant été constatée.
Sur la demande de restitution du dépôt de garantie,
Il ressort du contrat de bail qu'un dépôt de garantie d'un montant de 762, 15 € a été versé qu'il convient de déduire de la créance locative de l'appelant.
En conséquence, l'intimé sera condamné à verser la somme de 93,31€ [(608,51+246, 95 €) - 762, 15 € ] au titre de la remise en état des lieux avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, constitutif de la créance de dommages et intérêts.
Sur le débarrassage de la cave et l' enlèvement des posters,
Le jugement déféré sera confirmé par des motifs que le cour adopte, en ce qu'il a condamné l'intimé à payer à l'appelant la somme de 608,51 € TTC de ce chef.
Par ailleurs, l'intimé se contente de critiquer le caractère excessif de la prestation sans apporter d'éléments probants permettant de la remettre en cause.
Sur les demandes accessoires,
En application de l'article 696 du code de procédure civile, l'intimé supportera les dépens de première instance et d'appel, à l'exclusion des frais de constat d'huissier de sortie eu égard aux circonstances que deux constats ont été dressés le même jour et à la même heure et en présence des parties.
Il n'est pas équitable de laisser supporter à l'appelant ses frais irrépétibles de première instance et d'appel . Il lui sera alloué la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est rappelé que le droit de recouvrement direct n'a plus d'objet du fait de la suppression de tout tarif de l'avocat au regard de la date du jugement déféré du 8 septembre 2020, rendu postérieurement au 8 août 2015, date de l'entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Infirme partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleur compréhension et y ajoutant,
Condamne M. [B] à payer à M. [Z] la somme de 93,31€, déduction faite du dépôt de garantie au titre de la remise en état des lieux avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Déboute M. [Z] de ses demandes au titre des peintures, des menuiseries, du standard, tableau électrique et de la robinetterie,
Condamne M. [B] à payer à M. [Z] la somme de 800 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
Condamne M. [B] aux dépens de première instance et d'appel, à l'exclusion du procès-verbal de constat d'huissier de sortie du 30 mars 2018,
Dit sans objet la demande de distraction des dépens.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière .
La greffière, la présidente,