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27/09/2022 | FRANCE | N°19/01644

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 27 septembre 2022, 19/01644


ARRÊT N°



N° RG 19/01644 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HKQB



YRD/ID



CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES

09 mars 2017



RG :F 16/00157





[I]

[B]

AGS-CGEA [Localité 7]





C/



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COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH



ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2022<

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APPELANTS :



Monsieur [V] [I]

né le 28 Mai 1968 à [Localité 8] ([Localité 8])

[Adresse 2]

[Localité 6]



Représenté par Me Emmanuelle JONZO de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES



Maître [F] [B],

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]



Représenté par Me Emmanuelle JONZO de...

ARRÊT N°

N° RG 19/01644 - N° Portalis DBVH-V-B7D-HKQB

YRD/ID

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES

09 mars 2017

RG :F 16/00157

[I]

[B]

AGS-CGEA [Localité 7]

C/

[I]

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2022

APPELANTS :

Monsieur [V] [I]

né le 28 Mai 1968 à [Localité 8] ([Localité 8])

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Emmanuelle JONZO de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

Maître [F] [B],

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Emmanuelle JONZO de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

AGS-CGEA [Localité 7]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représenté par Me Jean-charles JULLIEN de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉ :

Monsieur [N] [I]

né le 14 Septembre 1984 à

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Coralie GARCIA BRENGOU de la SCP TOURNIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 15 Juin 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Virginie HUET, Conseillère

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

À l'audience publique du 29 Juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 Septembre 2022

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 27 Septembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [N] [I] soutenant avoir été engagé par son oncle, M. [V] [I] qui exploitait une activité de taxi en nom personnel sous l'enseigne Taxis [I] à compter du mois de juillet 2014, sauf durant sa période de formation du 4 septembre au 24 octobre 2014, et avoir été contraint de prendre acte de la rupture de son contrat de travail le 26 juin 2015, a saisi par requête du 2 mars 2016 le conseil de prud'hommes de Nîmes afin de voir requalifier son contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée et voir condamner M. [V] [I] à lui verser diverses sommes.

Par jugement contradictoire en date du 09 mars 2017, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :

- dit que le contrat de M. [N] [I] est requalifié en contrat à durée indéterminée du 1er juillet 2014 au 17 mars 2015 (courrier de M. [N] [I] et daté du 26 juin 2015 mettant fin à son contrat de travail) ;

- condamné M. [V] [I] exploitant de la société Taxi [I] à payer à M. [N] [I] les sommes suivantes :

* 8206,94 euros au titre de paiement de salaires du 1er juillet 2014 au 17 mars 2015,

* 820,69 euros au titre des congés payés y afférents,

* 1457,55 euros au titre d'indemnité de requalification

* 8745,30 euros au titre d'indemnité pour travail dissimulé

* 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- rappelé l'exécution provisoire de plein droit (article 1454-28 du code du travail)

- ordonné la remise des documents rectifiés de fin de contrat ;

- débouté M. [N] [I] du surplus de ses demandes ;

- condamné M. [V] [I] aux dépens de l'instance.

Par jugement du tribunal de commerce en date du 5 juin 2018, M. [V] [I], exploitant sous l'enseigne Taxi [I], était placé en liquidation judiciaire. Me [F] [B] était désigné ès qualités de mandataire liquidateur.

Par acte du 16 mars 2017, M. [V] [I] a régulièrement interjeté appel de la décision du 09 mars 2017.

Par un arrêt en date du 26 mars 2019, la chambre sociale de la cour d'appel de Nîmes a :

- ordonné la radiation de l'affaire et son retrait du rang des affaires en cours,

- subordonné le rétablissement de l'affaire au rôle au dépôt au greffe :

* du présent arrêt

* de la justification de la mise en cause du mandataire liquidateur et des AGS.

- dit que la durée de la péremption commencera à courir à compter de la date du présent arrêt et qu'en application de l'article 445 du code de procédure civile n'ont aucun effet les conclusions reçues au greffe entre la date d'audience et celle de la mise en forme pour le prononcé du présent arrêt à la date ci dessus.

Le 23 avril 2019 M. [N] [I] a sollicité la réinscription de cette affaire.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 14 avril 2022, Me [F] [B], pris en sa qualité de mandataire liquidateur de M. [V] [I] demande à la cour de :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes du 09 mars 2017 en ce qu'il a reconnu l'existence d'une relation de travail salarié antérieurement au 3 mars 2015,

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes du 09 mars 2017 en ce qu'il a reconnu l'existence d'une situation de travail dissimulé,

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes du 09 mars 2017 en ce qu'il a requalifié le contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes du 09 mars 2017 en toutes ses autres dispositions,

- constater l'absence de toute relation de travail salariée antérieurement au 3 mars 2015,

- dire et juger l'infraction de travail dissimulé non constitué,

- prendre acte du terme de la relation de travail intervenu le 10 mars 2015,

En conséquence,

- débouter M. [N] [I] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [N] [I] au paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

- il n'est pas démontré de relation salariale entre le mois de juillet 2014 et le mois de février 2015,

- seule la période contractuelle courant du 3 au 10 mars 2015 est caractérisée, celle-ci ayant été intégralement rémunérée, M. [N] [I] ne peut prétendre à aucun rappel de salaire.

En l'état de ses dernières écritures en date du 14 juin 2022, contenant appel incident, M. [N] [I] demande à la cour de :

- le recevoir dans toutes ses demandes, fins et conclusions,

Y faisant droit,

- rejeter toutes prétentions adverses comme injustes et mal fondées,

- confirmer le jugement rendu le 9 mars 2017 par le conseil de prud'hommes de Nîmes qui a prononcé la requalification de son contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée, la période de travail visée par cette requalification étant cependant critiquée,

- confirmer alors l'inscription au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] le montant à lui payer de 1.457,55 euros au titre de l'indemnité de requalification,

- Par ailleurs, confirmer également l'inscription au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] la somme à lui payer de 8.745,30 euros au titre d'une indemnité pour travail dissimulé,

- infirmer pour le surplus,

- dire et juger que la période de la relation de travail entre les parties est celle du 1 er juillet 2014 au 26 juin 2015,

- inscrire en conséquence au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] les sommes suivantes à lui payer :

* 15.255,69 euros à titre de rappel de salaire,

* 903,67 euros au titre des congés payés y afférents,

- enjoindre en outre la remise des bulletins de paie pour la période de juillet 2014 à juillet 2015, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

S'agissant des conséquences financières liées à la rupture de la relation de travail,

A titre principal,

- dire et juger qu'il est fondé en sa demande de prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur,

- requalifier la prise d'acte en licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

- inscrire en conséquence au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] les sommes suivantes à lui payer :

* 1.457,55 euros au titre d'une indemnité de préavis,

* 145,75 euros au titre des congés payés y afférents,

* 1.457,55 euros au titre d'une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

* 8.745,30 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et injustifiée,

- ordonner également la remise d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

A titre subsidiaire,

- constater qu'il n'a pas démissionné de son poste,

- dire et juger que la la rupture de son contrat de travail est imputable à l'employeur et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- inscrire en conséquence au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] les mêmes sommes que ci-dessus, et ordonner la remise des mêmes documents dans les mêmes conditions,

Enfin, et par ailleurs,

- inscrire dès lors au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] le paiement de la somme à lui payer de 500 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la remise tardive de l'attestation Pôle Emploi,

- condamner enfin M. [V] [I] à lui payer la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ainsi qu'aux entiers dépens.

Il fait valoir que :

- la relation de travail avait débuté avant la signature du CDD, le 3 mars 2015, le contrat est nécessairement à durée indéterminée, le CDD ultérieur n'est pas non plus régulier, ce qui emporte également la requalification en CDI,

- il s'en déduit l'existence d'une situation de travail dissimulé,

- la prise d'acte de rupture s'analyse en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

L'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 7], reprenant ses conclusions transmises le 31 mai 2022, demande à la cour de :

- réformer la décision rendue,

- rejeter la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- constater que M. [N] [I] ne démontre pas avoir été salarié de M. [V] [I] avant le 3 mars 2015,

- débouter M. [N] [I] de sa demande de dommages et intérêts pour requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- rejeter les demandes de rappel de salaires formulées par M. [N] [I] ainsi que ses demandes de paiement d'indemnités compensatrices de congés payés sur rappel de salaires,

- débouter M. [N] [I] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- rejeter la demande de M. [N] [I] tendant à obtenir la remise de bulletins de salaires sous astreinte,

- confirmer la décision rendue par le conseil de prud'hommes qui a estimé que M. [I] avait démissionné de son emploi le 17 mars 2015,

- rejeter les demandes relatives à la rupture du contrat de travail telles que formulées par M. [I],

- débouter M. [I] de sa demande de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation ASSEDIC.

Subsidiairement,

- confirmer la décision rendue en ce qu'elle a alloué à M. [N] [I] des dommages et intérêts pour requalification du contrat de travail à durée déterminée signé en contrat de travail à durée indéterminée,

- dans l'hypothèse où la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produirait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, apprécier le bien fondé des demandes de M. [I] tendant au règlement d'une indemnité de préavis et de congés payés sur préavis,

- allouer à M. [N] [I] des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne sauraient être supérieurs à la somme de 1457,57 euros,

- en tout état de cause, dans l'hypothèse où une somme sera accordée à M. [N] [I] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, préciser que cette somme sera hors garantie AGS,

- faire application des dispositions législatives et réglementaires du code de commerce,

- donner acte à la Délégation UNEDIC et l'AGS de ce qu'ils revendiquent le bénéfice exprès et d'ordre public des textes légaux et décrets réglementaires applicables, tant au plan de la mise en 'uvre du régime d'assurance des créances des salariés, que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément les articles L.3253-8, L.3253-1 7 et D.3253-5 du code du travail.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 18 mars 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 15 juin 2022.

MOTIFS

Sur le début de la relation de travail

M. [N] [I] soutient qu'il a commencé à travailler pour son oncle, M. [V] [I] dès juillet 2014 sur la base d'un temps complet, sans signer de contrat de travail, sans même que ne lui soient remis des bulletins de paie et surtout sans qu'un salaire ne lui soit versé.

Il produit l'attestation de Mme [K], professeur, qui indique qu'il a assuré le transport d'un élève « matin et soir » pour toute la période « de janvier à mars 2015 » pour le compte de la société Taxi [I]. M. [V] [I] tente de minimiser la portée de cette déclaration en produisant l'attestation de son propre fils, M. [R] [I], qui témoigne que son cousin [N] «venait avec moi faire les tournées des enfants, et quand il n'y avait pas de place pour se garer, mon cousin récupérait les enfants, c'est à cette occasion qu'il était vu par les maîtresses».

Par ailleurs il est établi que M. [N] réalisait des travaux administratifs pour le compte de son oncle que ce dernier minimise également.

Ces déclarations sont également confortées par le témoignage de Mme [U], compagne de l'intimé.

Il en résulte que M. [N] [I] a bien commencé de travailler dès le mois de juillet 2014.

Sur le contrat à durée déterminée du 3 mars 2015

Si le contrat à durée déterminée conclu le 3 mars 2015 comportait comme motif un « surcroît de travail » lequel n'est pas démontré, il vient d'être décidé que les parties étaient liées par une relation de travail antérieure laquelle est réputée être conclue à durée indéterminée.

Il n'y a donc pas lieu d'examiner la relation de travail issue du contrat à durée déterminée du 3 mars 2015 s'agissant d'une seule et même relation de travail.

Sur les rappels de salaire

La rupture du contrat de travail est intervenue par la prise d'acte de rupture notifiée le 26 juin 2015.

M. [I] rappelle qu'aucun salaire ne lui a été réglé.

Il sollicite le paiement des sommes suivantes sur la base du salaire figurant sur le contrat à durée déterminée du 3 mars 2015 :

- Période du 01/07/2014 au 04/09/2014 : (1.457,55 euros x 2 mois) + (1.457,55 euros x 4/12) = 2.915,10 euros + 485,85 euros = 3.400,95 euros outre les congés payés y afférents de 340,09 euros.

- Période du 24/10/2014 au 02/03/2015 : (1.457,55 euros x 6/30) + (1.457,55 euros x 4 mois) + (1.457,55 euros x 2/30) = 291,51 euros + 5.830,20 euros + 97,17 euros = 6.218,88 euros .

- Période du 03/03/2015 au 17/03/2015 : 1.457,55 euros x 12/30 = 583,02 euros outre l'indemnité de congés payés de 10%, soit 58,30 euros.

- Période du 18/03/2015 au 26/06/2015 : (1.457,55 euros x 18/30) + (1.457,55 euros x 2 mois) + (1.457,55 euros x 26/30) = 874,53 euros + 2.915,10 euros + 1.263,21 euros = 5.052,84 euros, outre les congés payés y afférents, soit 5.052,84 euros x 10 % = 505,28 euros.

Il sera fait droit aux demandes formulées à ce titre.

Sur le travail dissimulé

Selon l'article L. 8221-5 du code du travail «Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales».

Selon l'article L.8223-1 «En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire».

Dès lors qu'est retenue l'existence d'une relation de travail antérieurement au 3 mars 2015, et ce dès le moins de juillet 2014, la situation de travail dissimulé est caractérisée par la volonté de M. [V] [I] de se soustraire à ses obligations déclaratives d'autant qu'aucun bulletin de paie n'a été remis au salarié même durant la période d'emploi sous contrat à durée déterminée.

M. [N] [I] est donc en droit de prétendre à l'indemnité forfaitaire de six mois, prévue par l'article L.8223-1 du code du travail pour travail dissimulé, représentant 1.457,55 euros x 6 mois = 8.745,30 euros.

Sur l'indemnité de requalification

Dès lors que le contrat de travail est qualifié de contrat à durée indéterminée ab initio, aucune requalification ne peut intervenir.

La demande en ce sens est en voie de rejet.

Sur la rupture du contrat de travail

Le contrat de travail a pris fin en raison de la prise d'acte de la rupture par laquelle M. [N] [I] constate que depuis le 17 mars 2015 son employeur refuse de poursuivre le contrat de travail, sans toutefois que l'employeur ne formalise une quelconque rupture.

Cette prise d'acte qui formalise le manquement par l'employeur à ses obligations s'analyse en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse dès lors que les faits reprochés sont suffisamment sérieux pour justifier une telle rupture étant rappelé que M. [N] [I] demande le paiement d'un rappel de salaire à concurrence de 8.206,94 euros.

M. [N] [I] relève fort justement que l'employeur ne peut se prévaloir d'une rupture de la période d'essai au double motif que cette rupture n'a pas été formalisée et qu'aucun délai de prévenance n'a été observé et, enfin, qu'à la date du 17 mars 2015 invoquée par l'employeur comme date de rupture, la période d'essai du contrat à durée déterminée était expirée.

M. [N] [I] est en droit de prétendre au paiement :

- d'une indemnité de préavis d'un mois de salaire : 1.457,55 euros

- des congés payés correspondants : 145,75 euros

- des dommages et intérêts pour rupture abusive et injustifiée à hauteur de 1.457,55 euros

En revanche, en cas de prise d'acte justifiée, le salarié ne peut prétendre à aucune indemnisation pour non-respect de la procédure de licenciement.

Sur le préjudice occasionné par la remise tardive de l'attestation ASSEDIC

M. [N] [I] n'articule aucun moyen de nature à établir l'existence d'un préjudice. Sa demande est en voie de rejet.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

- Confirme le jugement rendu le 9 mars 2017 par le conseil de prud'hommes de Nîmes

en ce qu'il a :

- dit que la relation de travail a débuté en juillet 2014,

- prononcé l'inscription au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] la somme à payer à M. [N] [I] de 8.745,30 euros au titre d'une indemnité pour travail dissimulé,

- L'infirme pour le surplus,

- juge que la période de la relation de travail entre les parties est celle du 1er juillet

2014 au 26 juin 2015, dit que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

- Fixe en conséquence la créance de M. [N] [I] à inscrire au passif de la procédure de liquidation judiciaire de M. [V] [I] aux sommes suivantes :

- 15.255,69 euros à titre de rappel de salaire,

- 903,67 euros au titre des congés payés y afférents,

- 1.457,55 euros au titre d'une indemnité de préavis,

- 145,75 euros au titre des congés payés y afférents,

- 1.457,55 à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et injustifiée,

- Enjoint au liquidateur de remettre à M. [N] [I] les bulletins de paie pour la période de juillet 2014 à juillet 2015, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail conformes, dit n'y avoir lieu de prononcer une astreinte,

- Déboute M. [I] du surplus de ses demandes,

- Dit qu'en application des articles L 622-28 et L 641-3 du Code de commerce, le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts au taux légal des créances salariales nées antérieurement,

- Donne acte à l'AGS - CGEA de son intervention et de ce qu'elle revendique le bénéfice exprès et d'ordre public des textes légaux et réglementaires applicables tant au plan de la mise en 'uvre du régime d'assurances des créances des salaires que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément des articles L 3253-8 , L 3253-17 et D 3253-5 du Code du travail,

-Dit que les dépens seront considérés comme frais privilégiés dans le cadre de la procédure collective.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame DELOR, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 5ème chambre sociale ph
Numéro d'arrêt : 19/01644
Date de la décision : 27/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-27;19.01644 ?
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