RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/03512 - N° Portalis DBVH-V-B7E-H4SW
AV
TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES
20 novembre 2020 RG :2019J0160
[Y]
[Y]
[I]
[I]
C/
S.A. AIR FRANCE
Grosses envoyées le 09 novembre 2022 à :
- Me Georges POMIES RICHAUD
- Me Philippe REY
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
4ème chambre commerciale
ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de NIMES en date du 20 Novembre 2020, N°2019J0160
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Agnès VAREILLES, Conseillère, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Christine CODOL, Présidente de chambre,
Madame Claire OUGIER, Conseillère,
Madame Agnès VAREILLES, Conseillère.
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Novembre 2022.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
Monsieur [M] [Y] Gérant de société,agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils mineur [U], [Y], né le 24 juin 2016
né le 09 Janvier 1986 à [Localité 3] (13)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Ronny KTORZA, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame [O] [Y] Pharmacienne, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légaux de son fils mineur [U] [Y], né le 24 juin 2016 à [Localité 3]
née le 03 Décembre 1988 à [Localité 3] (13)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Ronny KTORZA, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [H] [I] Avocat, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de sa fille mineure [R] [I], née le 19 aout 2016 à [Localité 3], de nationalité francaise,
né le 19 Février 1985 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Ronny KTORZA, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame [N] [I] Directrice Régionale de Société, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de sa Fille mineure [R] [I], née le 19 aout 2016 à [Localité 3] de nationalité française,
née le 21 Mars 1988 à [Localité 9] (06)
[Adresse 2],
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Ronny KTORZA, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
S.A. AIR FRANCE Prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Philippe REY de la SCP REY GALTIER, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Fabrice PRADON du PARTNERSHIPS CLYDE & CO LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Christine CODOL, Présidente de chambre, le 09 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'appel interjeté le 30 décembre 2020 par Monsieur [Y] [M] et Madame [Y] [O], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fils [Y] [U] et, par Monsieur [I] [H] et Madame [I] [N], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fille [W] [I], à l'encontre du jugement prononcé le 20 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Nîmes, dans l'instance n°2019J0160,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 27 septembre 2021 par les appelants et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 3 mai 2021 par la société Air France, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu l'ordonnance en date du 24 mars 2022 de clôture de la procédure à effet différé au 29 septembre 2022,
Monsieur [Y] [M] et Madame [Y] [O], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fils [Y] [U], Monsieur [I] [H] et Madame [I] [N], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fille [W] [I] (les passagers), ont acheté auprès de la société Air France (la compagnie aérienne) des billets d'avion pour des vols aller/retour [Localité 3]/[Localité 8], via [11], pour les dates des 29 avril et 7 mai 2018.
Le 6 mai 2018 à 0 heure 15, les passagers ont été informés par la compagnie aérienne de l'annulation du vol retour [11]/[Localité 3] du 7 mai 2018 à 13 heures qu'ils devaient prendre et de ce qu'une proposition de ré-acheminement était à l'étude.
Les passagers ont alors le même jour à 2 heures 41 réservé des billets de train SNCF en première classe pour un trajet le 7 mai 2018, départ de [12] à 14 heures 37, arrivée à la gare de [7] à 18 heures.
Les tentatives de négociation amiable ayant échoué, les passagers ont saisi, par acte d'huissier du 9 avril 2019, le tribunal de commerce de Nîmes d'un demande d'indemnisation de leurs préjudices matériel et moral.
Par jugement du 20 novembre 2020, le tribunal de commerce de Nîmes a :
-Donné acte à la compagnie aérienne de sa proposition d'indemnisation forfaitaire et globale à hauteur de 1 700 euros,
-L'a déclarée satisfactoire
-Condamné la compagnie aérienne à payer forfaitairement et globalement aux appelants la seule somme de 1 700 euros
-Débouté les appelants de toutes leurs autres demandes
-Condamné les appelants aux dépens de l'instance, liquidés et taxés à la somme de 179,78 euros, en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, de la signification de la décision ainsi que tous autres frais et accessoires.
Le 30 décembre 2020, les passagers de la compagnie aérienne ont interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 septembre 2021, les appelants demandent à la cour, au visa des articles 5, 7, 8, 9, 12 et 14 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004, de :
-Constater que le vol censé les transporter, depuis [11]-[Localité 3], a été annulé pour un motif ne relevant pas de la notion de circonstances extraordinaires
-Constater que, près de trois ans après cette annulation, aucun versement n'a été effectué par la compagnie aérienne
-Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes en ce qu'il a :
Donné acte à la compagnie aérienne de sa proposition d'indemnisation forfaitaire et globale à hauteur de 1 700 euros, la déclarant satisfactoire ;
Condamné la compagnie aérienne à payer forfaitairement et globalement aux demandeurs la seule somme de 1 700 euros
Débouté les passagers de toutes leurs autres demandes
Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires
Par conséquent,
-Ordonner le remboursement de la somme globale de 163,99 euros aux passagers au titre du vol infructueux
-Ordonner l'indemnisation des passagers à hauteur de 3 600 euros au titre de l'indemnisation forfaitaire
-Ordonner le versement aux passagers de la somme de 528 euros au titre du préjudice matériel resultant de l'annulation du vol
-Ordonner le versement à chacun des passagers de la somme de 4 000 euros au titre du préjudice moral complémentaire
-Ordonner le versement à chacun des passagers de la somme de 200 euros pour absence de remise de la notice informative des droits des passagers
-Condamner la compagnie aérienne au paiement de la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procedure civile ;
-Condamner la compagnie aérienne aux entiers dépens des instances de premier degré et d'appeI.
Les appelants font grief au tribunal de commerce de Nîmes d'avoir déclaré l'offre de la compagnie aérienne satisfactoire alors qu'elle n'était composée que d'une indemnisation forfaitaire de 250 euros par passager correspondant à la seule annulation du vol de moins de 1 500 kilomètres Paris/Marseille et de 200 euros pour frais de procédure.
Au soutien de leurs prétentions, les appelants font valoir :
-que par son offre d'indemnisation, la compagnie aérienne reconnaît que les grèves de son personnel interne ne constituent pas une circonstance extraordinaire
-que l'annulation d'un vol ouvre le droit à un remboursement, à un ré-acheminement ou à un vol retour au sens de l'article 8 du règlement CE n° 261/2004 du 11 février 2004, le droit à une prise en charge au sens de l'article 9 du règlement et, en vertu de l'article 5, le droit à une indemnisation au sens de l'article 7 du règlement
-que la compagnie aérienne aurait du procéder au remboursement du vol infructueux de 163,99 euros
-que la Cour de justice de l'union européenne a rappelé que la notion de vol avec correspondances doit être comprise comme renvoyant à deux ou plusieurs vols constituant un ensemble aux fins du droit à indemnisation des passagers
-qu'il convient donc de prendre en considération la distance globale entre [Localité 8] et [Localité 3] permettant à chacun des passagers, enfants inclus, de prétendre à une indemnisation forfaitaire minimale de 600 euros
-que la compagnie aérienne doit payer les conséquences de l'absence de proposition de ré-acheminement en remboursant aux passagers les sommes déboursées pour le trajet en train et en taxi
-que le versement de l'indemnisation forfaitaire minimale s'applique sans préjudice du droit des passagers aériens à prétendre à une indemnisation complémentaire, conformément aux dispositions de l'article 12 du règlement
-que l'information donnée par la compagnie aérienne sur son site internet sur les droits de passagers en cas de refus d'embarquement ou d'annulation de vol n'est pas suffisante.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 3 mai 2021, l'intimée demande à la cour, au visa du règlement (CE) n° 261/2004, de :
-Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 20 novembre 2020
-Débouter les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions
-les Condamner à payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Rey Galtier, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
L'intimée réplique :
-qu'en application de l'article 5.3 du règlement (CE) n° 261/2004, le transporteur aérien effectif n'est pas tenu de verser l'indemnisation prévue à l'article 7 s'il est en mesure de prouver que l'annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n'auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises
-que le législateur communautaire ne fait aucune distinction entre une grève interne ou externe au transporteur aérien effectif
-qu'en France, la valeur constitutionnelle du droit de grève a été formellement reconnue par le Conseil Constitutionnel,
-que la compagnie aérienne ne peut donc pas juridiquement s'opposer au droit de grève de ses salariés
-qu'il n'y a aucune réelle limite au droit de grève du personnel navigant sauf aux salariés à informer préalablement leur employeur quarante-huit heures à l'avance
-que la compagnie aérienne n'a toutefois pas le droit d'utiliser cette information pour recomposer ses vols avec un équipage 'non gréviste'
-que la compagnie aérienne est en l'état actuel du droit et de la jurisprudence, juridiquement empêchée de prendre des mesures raisonnables pour éviter l'annulation d'un vol
-qu'en l'espèce, si la compagnie aérienne avait annulé le vol réservé [Localité 10]/[Localité 3], le contrat de transport n'était pas pour autant annulé, une proposition de ré-acheminement étant à l'étude
-que la proposition de 250 euros au titre de l'article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 est basée sur la seule annulation du vol domestique
-qu'il n'y a pas lieu de réparer distinctement un préjudice moral qui n'est ni démontré, ni établi, à fortiori pour deux jeunes enfants mineurs
-que la compagnie aérienne a toujours communiqué largement sur les droits à indemnisation des passagers en mettant à disposition des usagers des notices d'information et en publiant sur son site internet toute information utile en ce sens
-que les appelants ne rapportent pas la preuve d'une faute ayant causé un préjudice d'autant plus que deux enfants figurent parmi eux.
MOTIFS
1) Sur le droit à indemnisation
L'article 5 paragraphe 1 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004
établissant des règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important d'un vol, prévoit qu'en cas d'annulation d'un vol, les passagers concernés:
a) se voient offrir par le transporteur aérien effectif une assistance conformément à l'article 8;
b) se voient offrir par le transporteur aérien effectif une assis tance conformément à l'article 9, paragraphe 1, point a), et paragraphe 2, de même que, dans le cas d'un réacheminement lorsque l'heure de départ raisonnablement attendue du nouveau vol est au moins le jour suivant le départ planifié pour le vol annulé, l'assistance prévue à l'article 9, paragraphe 1, points b) et c), et
c) ont droit à une indemnisation du transporteur aérien effectif conformément à l'article 7, à moins qu'ils soient informés de l'annulation du vol :
i) au moins deux semaines avant l'heure de départ prévue
ii) de deux semaines à sept jours avant l'heure de départ prévue si on leur offre un réacheminement leur permet tant de partir au plus tôt deux heures avant l'heure de départ prévue et d'atteindre leur destination finale moins de quatre heures après l'heure d'arrivée prévue, ou
iii) moins de sept jours avant l'heure de départ prévue si on leur offre un réacheminement leur permettant de partir au plus tôt une heure avant l'heure de départ prévue et d'atteindre leur destination finale moins de deux heures après l'heure prévue d'arrivée.
Le paragraphe 3 précise qu'un transporteur aérien effectif n'est pas tenu de verser l'indemnisation prévue à l'article 7 s'il est en mesure de prouver que l'annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n'auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises.
Dans un arrêt du 23 mars 2021, la Cour de justice de l'Union européenne a considéré qu'une grève déclenchée dans le respect des conditions édictées par la législation nationale, et notamment du préavis, ne relève pas de la notion de circonstance extraordinaire.
En l'espèce, il résulte de la publication effectuée le 26 avril 2018 sur le site internet air-journal que la compagnie aérienne intimée s'est trouvée confrontée à une grève interne de ses pilotes lesquels avaient régulièrement déposé un préavis de grève, dans les délais réglementaires, pour les 3 et 4 mai puis pour les 7 et 8 mai 2018, afin de peser sur des négociations salariales en cours.
Si la grève est un droit constitutionnel et également un droit fondamental prévu à l'article 28 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, une grève de pilotes portant sur des revendications de salaire est inhérente à l'exercice normal de l'activité du transporteur aérien.
Par ailleurs, le déclenchement de la grève des 7 et 8 mai 2018, précédée d'un préavis déposé le 26 avril 2018, a été un événement prévisible pour la compagnie aérienne intimée qui avait les moyens d'en atténuer les conséquences par le dialogue social. En effet, en l'espèce, des discussions au sujet des revendications salariales étaient en cours depuis au moins le mois de février 2018 et la direction avait proposé une augmentation de 7% sur quatre ans, sous réserve de bons résultats, et ouvert une consultation à tous ses salariés, conservant ainsi la maîtrise du conflit collectif.
Dès lors, la compagnie aérienne intimée ne saurait s'exonérer de l'indemnisation prévue à l'article 7 en invoquant des circonstances extraordinaires.
2) Sur le montant de l'indemnité forfaitaire
Les appelants ont été informés moins de sept jours avant l'heure de départ prévue de l'annulation de leur vol [Localité 10]/[Localité 3]. La compagnie aérienne ne rapporte pas la preuve de leur avoir proposé un ré-acheminement vers leur destination finale par le vol suivant du 7 mai 2018 à 15 heures 10 alors même qu'ils ne l'avaient pas informée de leur décision d'acheter des billets de train pour effectuer le trajet retour [Localité 10]/[Localité 3].
L'article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004 dispose que lorsqu'il est fait référence au présent article, les passagers reçoivent une indemnisation dont le montant est fixé à :
a) 250 euros pour tous les vols de 1 500 kilomètres ou moins
b) 400 euros pour tous les vols intracommunautaires de plus de 1 500 kilomètres et pour tous les autres vols de 1 500 à 3 500 kilomètres
c) 600 euros pour tous les vols qui ne relèvent pas des points a) ou b).
Pour déterminer la distance à prendre en considération, il est tenu compte de la dernière destination où le passager arrivera après l'heure prévue du fait du refus d'embarquement ou de l'annulation.
L'article 2 du règlement définit la destination finale comme étant la destination figurant sur le billet présenté au comptoir d'enregistrement, ou, dans le cas des vols avec correspondances, la destination du dernier vol.
Il s'en suit que le vol avec une correspondance ayant fait l'objet d'une réservation unique constitue un ensemble aux fins du droit à indemnisation.
Par conséquent, les appelants sont en droit d'obtenir une indemnité de 600 euros chacun, la distance à prendre en considération étant celle du trajet d'ensemble [Localité 8]/[Localité 3].
3) Sur le remboursement du vol infructueux
L'assistance prévue à l'article 8 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004 consiste à proposer aux passagers le choix entre le remboursement du billet du vol annulé, dans un délai de sept jours, au prix auquel il a été acheté, pour la ou les parties du voyage non effectuées ou pour la ou les parties du voyage déjà effectuées et devenues inutiles, ou bien le ré-acheminement.
Les appelants sont donc bien fondés à obtenir le remboursement de la somme de 163,99 euros qu'ils ont déboursée au titre du vol infructueux.
4) Sur la réparation du préjudice matériel
La compagnie aérienne intimée a manqué à son obligation d'offrir aux passagers une option entre le remboursement de leur billet de vol annulé ou le réacheminement vers leur destination finale, dans des conditions de transport comparables.
Si des places sur l'un des vols suivant le vol annulé et notamment sur le vol AF7666 du 7 mai 2018 de 15 heures 10 avaient été proposées aux passagers, ceux-ci les auraient incontestablement acceptées dans la mesure où ils seraient parvenus à destination avant l'heure d'arrivée du train à grande vitesse qu'ils ont emprunté. Ils n'auraient donc pas exposé des frais de train et de taxi d'un montant total de 528 euros. Néanmoins, en cas de réacheminement vers leur destination finale par la compagnie aérienne, les appelants n'auraient pas non plus obtenu le remboursement de leur billet d'avion de 163,99 euros. Par conséquent, leur préjudice matériel s'élève à la somme de 363,99 euros.
5) Sur la réparation du préjudice moral complémentaire
Les passagers sont arrivés à la gare de [7] à 18 heures alors qu'ils auraient du atterrir à l'aéroport de [Localité 3] à 14 heures 20 le même jour. Ils ne justifient donc pas de la perte d'une journée de congé, de l'annulation de loisirs, de retrouvailles familiales ou amicales manquées ou d'un bouleversement de leur agenda professionnel. Ils ont voyagé dans un train à grande vitesse en première classe, dans des conditions de confort qui ne sont pas moindres que celles dont ils auraient bénéficié en classe économique en avion, y compris pour des enfants en bas âge. Ils ne démontrent pas avoir subi un stress important et perdu confiance dans la la compagnie aérienne alors que deux heures et demi seulement après avoir été informés par celle-ci de l'annulation de leur vol retour [11]/[Localité 3], ils avaient déjà acquis des billets de train et étaient donc certains de pouvoir rentrer à leur domicile, le jour prévu.
En l'absence de preuve d'un préjudice moral non suffisamment réparé par l'allocation de l'indemnité forfaitaire de 600 euros par passager, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande en paiement de la somme de 4 000 euros chacun en réparation du préjudice moral complémentaire.
6) Sur l'absence de remise de notice informative
L'article 14 paragraphe 2 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004 impose au transporteur aérien effectif qui annule un vol de présenter à chaque passager concerné une notice écrite reprenant les règles d'indemnisation et d'assistance conformément aux dispositions du présent règlement. Les coordonnées de l'organisme national désigné visé à l'article 16 doivent également être fournies par écrit au passager.
La compagnie aérienne intimée ne démontre pas avoir remis aux appelants la notice écrite prévue par ce texte. Toutefois, ces derniers ont pu se procurer la dite notice, publiée sur le site internet de la compagnie, et lui ont adressé des réclamations à partir des informations contenues dans ce document, dès le 7 décembre 2018. Les appelants ne justifient, par conséquent, d'aucun préjudice découlant de la non remise de la notice visée à l'article 14 du règlement n° 261/2004.
Ainsi, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande en paiement de la somme de 200 euros chacun pour non-remise de la notice informative.
7) Sur les frais du procès
La compagnie aérienne qui succombe sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel et le jugement doit être confirmé en ce qu'il l'a condamnée aux dépens de première instance.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur des appelants et de leur allouer une indemnité de 2 000 euros, à ce titre.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande en paiement de la somme de 4 000 euros chacun en réparation du préjudice moral complémentaire et de 200 euros chacun pour non-remise de la notice informative et en ce qu'il les a condamnés aux dépens, liquidés et taxés à la somme de 179,78 euros, en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, de la signification de la décision ainsi que tous autres frais et accessoires
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne la société Air France à rembourser à Monsieur [Y] [M] et Madame [Y] [O], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fils [Y] [U], Monsieur [I] [H] et Madame [I] [N], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fille [W] [I], la somme globale de 163,99 euros au titre du vol infructueux
Condamne la société Air France à verser à Monsieur [Y] [M] et Madame [Y] [O], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fils [Y] [U], Monsieur [I] [H] et Madame [I] [N], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fille [W] [I], la somme globale de 3 600 euros au titre de l'indemnisation forfaitaire
Condamne la société Air France à verser à Monsieur [Y] [M] et Madame [Y] [O], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fils [Y] [U], Monsieur [I] [H] et Madame [I] [N], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fille [W] [I], la somme globale de 363,99 euros au titre du préjudice matériel
Y ajoutant,
Condamne la société Air France aux entiers dépens de l'instance d'appel,
Condamne la société Air France à verser à Monsieur [Y] [M] et Madame [Y] [O], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fils [Y] [U], Monsieur [I] [H] et Madame [I] [N], agissant tant en leur nom personnel qu'à titre de représentants légaux de leur fille [W] [I], la somme globale de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Arrêt signé par Madame Christine CODOL, Présidente de chambre, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE