RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/01578 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IAS2
AD
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'ALES
23 février 2021 RG :20/00954
[U]
Compagnie d'assurances MUTUELLE DES ARCHITECTESFRANCAIS - MAF
C/
Société [D] CARRELAGE
S.A. AXA FRANCE IARD
Grosse délivrée
le
à Me Pomiès Richaud
SCP Delran Sergent
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 12 JANVIER 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALES en date du 23 Février 2021, N°20/00954
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre
Mme Laure MALLET, Conseillère
M. André LIEGEON, Conseiller
GREFFIER :
Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 21 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 12 Janvier 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
Monsieur [T] [U]
[Adresse 8]
[Localité 3]
Représenté par Me Jérémy BALZARINI de la SCP LEVY, BALZARINI, SAGNES, SERRE, LEFEBVRE, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER
Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Compagnie d'assurances MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF immatriculée au RCS sous le N° 784 647 349 Société d'assurance mutuelle à cotisations variables prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Jérémy BALZARINI de la SCP LEVY, BALZARINI, SAGNES, SERRE, LEFEBVRE, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉES :
SARL [D] CARRELAGE prise en la personne de son gérant en exercice domicilié ès qualités au siège social sis
assignée à personne habilitée le 03/06/21
[Adresse 5]
[Localité 2]
S.A. AXA FRANCE IARD inscrite au RCS de Nanterre sous le n° B 722 057 460 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés ès qualités audit siège social
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SCP DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 03 Novembre 2022
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Anne DAMPFHOFFER, Présidente de chambre, le 12 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
Exposé :
Vu le jugement réputé contradictoire, rendu par le tribunal judiciaire d'Alès le 31 juillet 2020, ayant statué ainsi qu'il suit :
- dit irrecevable l'action de Madame [E] [L] et de Monsieur [X] [L] à l'encontre de la SAS Axa France assurances, assureur de la SARL [D] carrelage sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil,
- déclare recevable l'action de Monsieur [T] [U] et de la compagnie MAF (Mutuelle des Architectes Français assurance) à l'encontre de la SAS Axa France assurance,
- condamne in solidum Monsieur [T] [U] et la MAF (Mutuelle des Architectes Français assurance), à payer les sommes suivantes à Madame [E] [L] et Monsieur [L] :
* 1 404,18 euros pour la dépose et la repose des éléments de cuisine,
* 4 323 euros pour la reprise des peintures murales,
* 2 247,60 euros pour les frais de déménagement et de garde-meuble,
* 3 750 euros pour les frais de relogement pour une période de cinq semaines de travaux,
- condamne, in solidum, la SARL [D] carrelage et la SAS Axa France assurance, déduction faite de la franchise prévue au contrat d'assurance pour le montant de 1 200 euros, à garantir Monsieur [T] [U] et son assureur la MAF (Mutuelle des Architectes Français assurance) du paiement des sommes suivantes :
* 1 404,18 euros pour la dépose et la repose des éléments de cuisine,
* 4 323 euros pour la reprise des peintures murales,
* 2 247,60 euros pour les frais de déménagement et de garde-meuble,
* 3 750 euros pour les frais de relogement pour une période de cinq semaines de travaux,
- ordonne l'exécution provisoire du jugement,
- condamne in solidum, Monsieur [T] [U], la MAF (Mutuelle des Architectes Français assurance), la SARL [D] carrelage et la compagnie Axa aux dépens, en ce compris les frais d'expertise,
- condamne, in solidum, Monsieur [T] [U] et la MAF (Mutuelle des Architectes Français assurance) à payer la somme de 2 500 euros à Madame [E] [L] et Monsieur [X] [L] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne, in solidum, la SARL [D] carrelage et la compagnie Axa à payer la somme de 2 500 euros à Monsieur [T] [U] (Mutuelle des Architectes Français assurance) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu le jugement réputé contradictoire rectificatif rendu par le tribunal judiciaire d'Alès le 23 février 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :
- complète le dispositif du jugement rendu le 31 juillet 2020, de la manière suivante, au titre des condamnations prononcées à l'encontre de Monsieur [T] [U] et de la compagnie MAF, in solidum au bénéfice de Madame [E] [L] et de Monsieur [X] [L], avec condamnation in solidum de la SARL [D] carrelage et la SAS Axa France assurance, déduction faite de la franchise prévue au contrat d'assurance pour le montant de 1 200 euros, à garantir Monsieur [T] [U] et son assureur la MAF (Mutuelle des architectes français assurances) du paiement des sommes :
- condamne in solidum Monsieur [T] [U] et la compagnie MAF, à payer à Madame [E] [L] et Monsieur [X] [L] la somme de 14 404,18 euros au titre de la réfection des désordres,
- rectifie 1'erreur matérielle contenue dans le dispositif du jugement rendu le 31 juillet 2020, de la manière suivante, au titre de la condamnation pour la pose et la dépose des éléments de cuisine :
- l 450 euros (mille quatre cent cinquante euros),
- dit que le reste de la décision reste inchangé,
- dit que la présente décision sera annexée à la minute et aux expéditions du jugement rendu le 31 juillet 2020, sous le numéro 20/103,
- laisse les dépens à la charge du Trésor,
- dit que la présente décision sera notifiée à chacune des parties par lettre recommandée avec accusé de réception.
Vu l'appel interjeté le 21 avril 2021 par M. [U] et la Mutuelle des architectes de France (MAF) relativement aux deux décisions ainsi rendues.
Vu les conclusions des appelants en date du 9 juillet 2021, demandant de :
- réformer les jugements rendus en ce qu'ils n'ont pas fait droit à la demande de M. [T] [U] et de la MAF dirigée contre la SARL [D] carrelage et la société Axa tendant à être relevés et garantis par ces dernières de la condamnation à payer aux époux [L] la somme de 14 404, 18 € au titre de la réfection des désordres,
Statuant à nouveau,
Vu l'article 1792 du code civil,
Vu l'article L121-12 du code des assurances,
- dire et juger que les désordres litigieux sont de nature décennale,
- condamner la société [J] [D] et Axa à relever et garantir la Mutuelle des architectes français assurance de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,
Vu l'article 1240 du code civil,
- dire et juger que la société [J] [D] a commis une faute technique qui est exclusivement à l'origine des désordres,
- condamner la société [J] [D] et Axa à relever et garantir Monsieur [U] de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,
- condamner M. [D] et Axa au paiement d'une somme de 2500 € au profit de la MAF et de M. [U] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Vu les conclusions de la société Axa France IARD en date du 6 octobre 2021, demandant de :
Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Alès le 31 juillet 2020,
Vu le jugement rectificatif rendu par le tribunal judiciaire d'Alès le 21 février 2021,
Vu l'appel interjeté par Monsieur [U] et la compagnie d'assurance MAF,
Vu les conclusions d'appelant et les pièces versées aux débats,
Vu les présentes conclusions d'intimé et les pièces versées aux débats,
Vu les dispositions des articles 1792 et suivants du code civil,
Vu les dispositions de l'article 1240 du code civil,
A titre principal,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Alès le 31 juillet 2020 et rectifié par jugement en date du 23 février 2021,
en conséquence,
- débouter Monsieur [U] et son assureur la compagnie MAF de toutes leurs demandes, fins et prétentions telles que dirigées contre la compagnie Axa,
A titre subsidiaire,
Si par impossible la cour venait à faire droit aux demandes des appelants,
- statuer que la compagnie Axa ne peut être condamnée à prendre en charge un éventuel préjudice que dans la limite des dispositions contractuelles de la police d'assurance souscrite par Monsieur [D] prévoyant une franchise de 1 200 €,
En tout état de cause,
-condamner Monsieur [U] et son assureur la compagnie MAF au paiement de la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens tant de première instance que d'appel.
Vu la déclaration d'appel signifiée à la société [D] carrelage le 23 juin 2021, à personne habilitée, ainsi que les conclusions d'appel, le 28 juillet 2021 et les conclusions de l'intimée, le 7 octobre 2021, également à personne habilitée.
Vu la non-comparution de La société [D] Carrelage.
L'arrêt sera réputé contradictoire.
Vu la clôture du 3 novembre 2022.
MOTIFS
Le litige est relatif à une fissuration des carrelages au sol de l'appartement de Monsieur et Madame [L], lesdits carrelages ayant été réalisés par la société [D] carrelage, et les acquéreurs ayant acheté dans le cadre d'une VEFA d'un immeuble construit par la société Michel Immo, maître de l'ouvrage.
La réception sans réserve le 19 janvier 2007.
Une expertise judiciaire, sur assignation du 6 septembre 2016, a été diligentée au sujet de ces désordres, dont il résulte qu'ils consistent dans une fissuration anarchique et généralisée des carrelages au sol qui se déchaussent ou pour lesquels il y a des « désaffleurements » ; qu'il s'agit de désordres évolutifs rendant l'ouvrage impropre à sa destination dans toutes les pièces de l' appartement, la circulation ne pouvant se faire sans risque de chute ou d'entaille de pieds.
L'expert explique que la cause de ces désordres réside dans un défaut d'exécution imputable à la société en charge du carrelage dans la mise en 'uvre de la chape en mortier de ciment et de sable, et notamment, dans sa fabrication sur place.
L'expert préconise une réfection complète du sol de l'appartement, ayant chiffré la réparation au vu d'un devis de 14 498 €, auquel il convient d'ajouter les frais de dépose et repose des éléments de cuisine, de reprise des peintures murales, de déménagement et de garde-meubles et de relogement pour une période de 5 semaines.
La société [D] carrelage était assurée auprès de la société Axa France.
Monsieur [U], était l'architecte, maître d'oeuvre et la MAF l'assureur dommages ouvrage de la société Michel Immo qui est le cocontractant de la société [D] carrelage.
La MAF s'est vue adresser une déclaration de sinistre le 7 février 2014.
Dans les jugements attaqués, le tribunal a retenu que l'action de Monsieur et Madame [L] contre la compagnie Axa est irrecevable dès lors que celle-ci n'a été assignée par l'architecte et son assureur que le 31 mai 2017 alors que Monsieur et Madame [L] ont pris possession de l'immeuble le 19 janvier 2007, soit plus de 10 ans après la réception du chantier ; que le régime de droit commun de la prescription est inapplicable ; qu'en revanche, la prescription applicable dans les rapports entre constructeurs est la prescription de droit commun, les dispositions des articles 1792 et suivants ne régissant que les relations du maître de l'ouvrage et du constructeur ; que l'action de l'architecte contre la société chargée du carrelage est une action délictuelle soumise aux dispositions de l'article 2224, qui n'est pas prescrite.
Sur le fond, le tribunal a retenu que le caractère décennal des désordres n'était pas contesté et en conséquence, a condamné in solidum la société [D] carrelage, Monsieur [U] et la Maf à indemniser Monsieur et Madame [L] pour 14 404, 18€ au titre de la reprise des désordres; dit que l'assureur Axa devait relever l'architecte et la Maf du paiement des sommes indemnitaires mises à leur charge en application de l'article 1240 du Code civil, soit, les frais consécutifs à la réparation des désordres et non la réparation, elle-même, avec application de la franchise de 1200 €.
Au soutien de leur recours, M [U] et la MAF exposent, en substance, que la cause des désordres réside dans un défaut de pure exécution, imputable à l'entreprise de carrelage, que la MAF est recherchée en sa qualité d'assureur dommages ouvrage ; qu'elle ne conteste pas sa garantie, mais demande à être relevée par Monsieur [D] et son assureur de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre ; que l'architecte demande, pour sa part, à être également relevé par eux de l'ensemble des condamnations en soulignant également que l'architecte n'est pas tenu à une présence constante sur le chantier et qu'il ne peut intervenir dans le processus de fabrication de la chape en mortier, le dosage des matériaux relevant de la compétence technique de l'entreprise.
La société AXA fait, pour sa part, valoir que la demande de relevé et garantie de Monsieur [U] et celle de la MAF sont mal fondées au regard de la prescription retenue pour l'action diligentée sur les dispositions de l'article 1792 ; que l'action des époux [L] n'est pas prescrite à l'égard de l'architecte et de la MAF et qu' il conviendra de rejeter les demandes de l'architecte et de l'assureur MAF à son encontre.
La société Axa est l'assureur responsabilité décennale de l'entreprise chargée du carrelage et il a donc été jugé que l'action sur ce fondement des époux [L] à son encontre était prescrite.
L'action de l'architecte, M [U], et celle de la Maf contre le carreleur et son assureur est de nature délictuelle de sorte que la société Axa ne peut être tenue de les relever et garantir des condamnations prononcées au titre de la reprise des désordres et ce quand bien même les désordres ont une nature décennale dans les rapports du maître de l'ouvrage avec l'architecte.
Il a donc été exactement jugé que la société AXA ne devait relever et garantir l'architecte et la Maf que des condamnations indemnitaires délictuelles, à l'exclusion de la reprise des désordres.
La Maf expose, par ailleurs, qu'elle ne conteste pas sa garantie, mais qu'elle demande également à être relevée et garantie par l'entrepreneur en cause qui a été chargé du carrelage et M [U] fait, de son côté, valoir le caractère exclusif de la faute de l'entreprise chargée du carrelage pour conclure à la même demande de relevé et garantie.
Compte tenu des conclusions de l'expertise retenant que la cause des désordres réside dans la mise en 'uvre sans respect des règles de l'art par ladite société lors de la pose de la chape et dès lors que vu le procédé ainsi critiqué, aucune négligence, même de surveillance, ne saurait être reprochée à M [U] dont la présence n'est pas démontrée à cette étape des travaux et à qui on ne peut faire reproche de ce chef dans sa mission de suivi , il sera donc fait droit aux demandes de la MAF et de M [U] à l'encontre de la société [D] carrelage à fin qu'elle les relève et garantisse de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre.
Le jugement sera donc confirmé, sauf en ce qui concerne le recours en relevé et garantie de M [U] et de la MAF
contre la société [D] carrelage.
Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.
Vu la responsabilité consacrée de la société [D] carrelage dans l'origine des désordres à l'origine de cette instance.
Vu la demande au titre des frais irrépétibles des appelants formée contre M [D] et non la société, seule appelée aux débats, l'équité ne commandant par ailleurs pas une application plus ample de ces dispositions aux rapports des autres parties.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,
Confirme les jugements déférés sauf en ce qui concerne le rejet de l'appel en garantie de la MAF et de M [U] contre la société [D] carrelage,
Statuant à nouveau de ce chef :
Condamne la société [D] carrelage à relever et garantir la MAF et M [U] de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre,
y ajoutant :
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société [D] carrelage aux dépens.
Arrêt signé par la présidente et la greffière.
La greffière, La présidente,