RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/01417 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HXFX
GLG/EB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON
20 mai 2020 RG :F18/00474
S.A.R.L. KMS KORCZ MARCELLIN SERVICES
C/
[K]
Grosse délivrée
le
à
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 24 JANVIER 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 20 Mai 2020, N°F18/00474
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Monsieur Guénaël LE GALLO, Magistrat honoraire juridictionnel, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Monsieur Guénaël LE GALLO, Magistrat honoraire juridictionnel
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
GREFFIER :
Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 07 Octobre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Décembre 2022 prorogé à ce jour
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
S.A.R.L. KMS KORCZ MARCELLIN SERVICES
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉ :
Monsieur [H] [K]
né le 22 Novembre 1964 à [Localité 4]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représenté par Me Philippe MESTRE, avocat au barreau d'AVIGNON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 23 Septembre 2022
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 24 janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
M. [H] [K] a été embauché la société Korcz Marcellin Services (KMS) en qualité de conducteur poids lourd, groupe 7 coefficient 150 M de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires, suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 19 mai 2003.
Placé en arrêt de travail pour accident du travail à compter du 13 avril 2017, il a été déclaré inapte par le médecin du travail à l'issue des visites des 4 et 15 juin 2018.
Convoqué le 13 juin 2018 à un entretien préalable à une mesure de licenciement pour inaptitude professionnelle fixé au 20 juin 2018, il a été licencié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement par lettre du 30 juin 2018, ainsi motivée : "Vous avez été déclaré inapte par avis rendu par le médecin du travail en date du 04 juin 2018. Nous vous précisons que votre contrat de travail prend fin le 3 juillet 2018, et que vous n'avez pas de préavis à effectuer."
Contestant cette mesure, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon, par requête reçue le 1er octobre 2018, en vue de voir dire son licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et voir condamner l'employeur à lui payer diverses indemnités et à lui remettre sous astreinte, dès le stade de la conciliation, une attestation Pôle Emploi rectifiée mentionnant : "dernier jour travaillé et payé : 13 avril 2017", outre les salaires des douze derniers mois précédents, soit de février 2016 à mars 2017, ainsi qu'à effectuer les diligences nécessaires afin de le faire bénéficier de la portabilité de la prévoyance.
Par décision du 14 novembre 2018, notifiée aux parties par lettres recommandées reçues le 15 décembre 2018, le bureau de conciliation et d'orientation a ordonné la remise au salarié de l'attestation Pôle emploi mentionnant les douze derniers mois civils complets précédant le dernier jour travaillé et payé, ainsi que du document de portabilité dûment renseigné, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours, que le conseil s'est réservé le pouvoir de liquider sur demande chiffrée.
Par jugement du 20 mai 2020, le conseil de prud'hommes a statué comme suit :
"Dit et juge que le licenciement de Monsieur [H] [K] intervenu le 30 juin 2018 pour inaptitude est sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence, le Conseil de céans :
Condamne la Société KORCZ MARCELLIN SERVICES prise en la personne de son représentant légal en exercice au paiement des sommes suivantes :
' 31 720 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
' 9 729,95 euros net au titre de l'indemnité légale de licenciement doublée
' 4 880 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis
' 488 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis
' 750 euros en application de l'article 700 du Code de procédure Civile
Ordonne l'exécution provisoire pour l'intégralité de toutes les condamnations susdites, conformément à l'article 515 CPC.
Constate que la moyenne des trois derniers mois de salaire du requérant s'élève à la somme de 2 440 euros.
Déboute Monsieur [H] [K] du surplus de ses demandes.
Dit que l'ensemble des condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la date du jugement à intervenir, conformément à l'article 1231-6 du code civil.
Prononce la capitalisation des intérêts, conformément à l'article 1343-2 du code civil.
Met les entiers dépens de l'instance ainsi que les éventuels frais d'exécution à la charge de la Société KORCZ MARCELLIN SERVICES, conformément à l'article 696 du CPC."
La société KMS a interjeté appel de cette décision par déclaration du 17 juin 2020.
Aux termes de ses dernières conclusions du 24 février 2021, l'appelante présente à la cour les demandes suivantes :
"Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,
Statuant sur l'appel formé par la SARL KMS KORCZ MARCELLIN SERVICES, à l'encontre de la décision rendue le 20 mai 2020 par le Conseil de Prud'hommes d'AVIGNON,
Le déclarant recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :
- Condamné la société KORCZ MARCELLIN SERVICES prise en la personne de son représentant légal en exercice au paiement des sommes suivantes :
o 31.720 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
o 9.729,95 € nets à titre d'indemnité légale de licenciement doublée,
o 4.880 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
o 488 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
o 750 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- Constaté que la moyenne des trois derniers mois de salaire s'élève à la somme de 2.440 €,
- Dit que l'ensemble des condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la date du jugement à intervenir, conformément à l'article 1231-6 du code civil,
- Prononcé la capitalisation des intérêts, conformément à l'article 1343-2 du code civil,
- Mis les entiers dépens de l'instance ainsi que les éventuels frais d'exécution à la charge de la société KORCZ MARCELLIN SERVICES, conformément à l'article 696 du CPC.
Statuant à nouveau,
- Limiter le solde de l'indemnité spéciale de licenciement à la somme de 9.331,55 € nets,
- Limiter l'indemnité prévue par l'article L. 1226-14 du Code du travail à la somme de 4.544,46 € bruts ;
- Limiter l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 6.819,19 € nets.
- Débouter Monsieur [H] [K] de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
- Déclarer irrecevable la demande nouvelle de Monsieur [H] [K] au titre de la liquidation d'astreinte prononcée par le Bureau de Conciliation
- Débouter Monsieur [H] [K] de son appel incident tendant à voir condamner la société KMS au versement des sommes suivantes :
' 14 640 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de recherche de reclassement,
' 14 640 € à titre de dommages et intérêts pour absence d'avis des représentants du personnel,
' 14 140 € à titre de dommages et intérêts pour absence d'information des motifs s'opposant au reclassement,
Le débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires."
Elle expose que :
'le gérant ayant considéré à tort, compte tenu de la réforme intervenue à compter du 1er janvier 2017 posant le principe d'une seule visite médicale complétée facultativement par une seconde visite à l'initiative du médecin du travail dans le délai maximum de 15 jours, que l'inaptitude physique de M. [K] était défnitivement déclarée à l'issue de la visite du 4 juin 2018 et de l'étude de poste effectuée le 11 juin 2018, elle ne conteste pas l'irrégularité de la procédure, ni l'origine professionnelle de l'inaptitude, ni la requalification subséquente de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais seulement la prétendue absence de toute recherche de reclassement déduite par les premiers juges alors que le registre du personnel versé aux débats démontre qu'aucun poste compatible avec les restrictions médicales et notamment aucun poste administratif n'était disponible, ainsi que le montant des indemnités allouées sur le fondement d'un salaire erroné, au mépris du barème d'indemnisation prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail et sans production d'aucune pièce justificative, étant précisé que les sommes mises à sa charge sont de nature à générer de graves difficultés économiques et à remettre en cause sa pérennité et donc ses emplois comme en atteste son expert-comptable ;
' dès lors que les dommages et intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse réparent l'ensemble des préjudices subis au titre de la rupture, les demandes en vue d'obtenir des sommes distinctes pour non-respect de l'obligation de reclassement, défaut de consultation des représentants du personnel et absence de communication des motifs s'opposant au reclassement ne pourront qu'être rejetées ;
' la demande de liquidation de l'astreinte, nouvelle en appel, est irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile.
L'intimé forme les demandes suivantes au dispositif de ses dernières conclusions du 4 juin 2021 :
"Déclarer recevable l'appel incident de Monsieur [H] [K] et le dire bien fondé
VU ensemble les articles L. 1226-10, L.1226-12 et l.1226-15 du Code du travail,
VU l'article L. 1226'14 du Code du travail
VU la jurisprudence constante,
VU les pièces produites,
CONFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a dit :
Que le licenciement dont a fait l'objet Monsieur [K] par courrier du 30 juin 2018 pour inaptitude ne repose pas sur le cause réelle et sérieuse,
Que la société requise n'a pas respecté les dispositions concernant les indemnités de rupture suite à une inaptitude d'origine professionnelle,
Que le salaire mensuel moyen brut de Monsieur [K] doit être fixé à la somme de 2 440 €.
Condamne la société KORCZ MARCELLIN SERVICES prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Monsieur [K] [H], les sommes suivantes :
' 31 720 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
' 9.729,95 € au titre de l'indemnité légale de licenciement doublée
' 4.880,00 € au titre de l'indemnité compensatrice sur préavis
' 488,00 € au titre de l'indemnit de congés payés sur préavis
' 750,00 € au titre de l'article 700 du CPC
Statuant nouveau,
Y ajoutant,
Condamner la société KMS (KORCZ MARCELLIN SERVICES), prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant et domicilié les qualité audit siège, à payer à Monsieur [H] [K] la somme suivante :
14 640 € titre de l'identité pour non-respect de l'obligation de recherche de reclassement,
Subsidiairement,
Condamner la société KMS (KORCZ MARCELLIN SERVICES), prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant et domicilié es qualité audit siège, à payer à Monsieur [H] [K] la somme suivante :
14 640 € au titre de dommages-intérêts pour absence d'avis des représentants du personnel,
Subsidiairement,
Condamner la société KMS (KORCZ MARCELLIN SERVICES), prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant et domicilié es qualité audit siège, à payer à Monsieur [H] [K] la somme suivante :
14 140 € au titre de dommages-intérêts pour non information par écrit des motifs qui se posaient au classement de son salarié,
En tout état de cause,
Condamner la société KMS (KORCZ MARCELLIN SERVICES), prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant et domicilié es qualité audit siège, à payer à Monsieur [H] [K] les sommes suivantes :
29 900 € au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le Conseil de prud'hommes d'Avignon,
3 000 € au titre d'article 700 du code de procdure civile
DIRE et juger que l'ensemble des condamnations, en ce compris l'article 700 du CPC et les dépens, constituent les créances nées de l'exécution d'un contrat de travail et bénéficie de l'exonération prévue à l'article 11, 2ième alinéa du décret du 8 mars 2001, portant modification du Décret du 12 décembre 1996, relatif aux tarifs des huissiers
DIRE et juger à défaut, que le montant des sommes retenues, en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du Décret du 12 décembre 1996 par l'huissier de justice dans le cadre de l'exécution forcée des condamnations sera supporté directement et intégralement par le débiteur, au lieu et place du créancier en sus de l'article 700.
ASSORTIR l'ensemble des condamnations des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement à intervenir, conformément à l'article 1153 du code civil
PRONONCER la capitalisation des intérêts, conformément à l'article 1154 du code civil
CONDAMNER enfin, la société KORCZ MARCELLIN SERVICES aux entiers dépens tant de première instance que d'appel conformément à l'article 696 du CPC."
Il fait valoir que :
' l'engagement de la procédure de licenciement avant l'avis définitif d'inaptitude et l'absence de toute recherche de reclassement privent le licenciement de cause réelle et sérieuse ;
' en sus des indemnités de rupture et des dommages et intérêts alloués par les premiers juges, dont le montant constitue la juste réparation de son préjudice, il peut prétendre à des dommages et intérêts pour non-respect des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail;
' l'attestation Pôle emploi mentionnant le dernier jour travaillé et payé, soit le 13 avril 2017, ainsi que les salaires des douze mois précédents, conformément à la décision du bureau d'orientation et de conciliation, ne lui ayant été remise que le 9 septembre 2020, l'astreinte qui a commencé à courir le 15 janvier 2019 doit être liquidée à la somme de 29 900 euros.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 12 juillet 2022, à effet au 23 septembre 2022.
MOTIFS
' sur le licenciement
* sur le reclassement
Aux termes de l'article L. 1226-10 alinéas 1, 2 et 3 du code du travail, "lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail."
Selon l'article L1226-12 du même code, "lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.
L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.
S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III."
Il résulte de ces dispositions que l'obligation de reclassement qui incombe à l'employeur naît à compter de l'inaptitude définitive du salarié constatée par le médecin du travail et que seules les recherches effectuées postérieurement à cet avis peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l'employeur de son obligation.
En l'espèce, la procédure de licenciement ayant été engagée dès le 13 juin 2018, soit avant l'avis d'inaptitude définitive intervenu à l'issue de la seconde visite du 15 juin 2018, c'est à bon droit que le salarié soutient que l'employeur a méconnu son obligation de reclassement.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
* sur l'indemnisation
Aux termes de l'article L. 1226-15 du code du travail, "lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives à la réintégration du salarié, prévues à l'article L. 1226-8, le tribunal saisi peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Il en va de même en cas de licenciement prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte prévues aux articles L. 1226-10 à L. 1226-12.
En cas de refus de réintégration par l'une ou l'autre des parties, le juge octroie une indemnité au salarié dont le montant est fixé conformément aux dispositions de l'article L. 1235-3-1. Elle se cumule avec l'indemnité compensatrice et, le cas échéant, l'indemnité spéciale de licenciement, prévues à l'article L. 1226-14.
Lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 1226-12, il est fait application des dispositions prévues par l'article L. 1235-2 en cas d'inobservation de la procédure de licenciement."
Selon l'article L. 1226-14 alinéa 1er du même code, la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5, ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.
L'article L. 1226-16 précise que les indemnités prévues aux articles L. 1226-14 et L. 1226-15 sont calculées sur la base du salaire moyen que l'intéressé aurait perçu au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoquée par l'accident du travail, la notion de salaire étant définie par le taux personnel, les primes, les avantages de toute nature, les indemnités et les gratifications qui composent le revenu.
Calculée sur la base du salaire brut moyen de 2 059,83 euros perçu par M. [K] au cours des mois de janvier, février et mars 2017, et d'une ancienneté de 15 ans et 1 mois, l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 1226-14 du code du travail, qui n'a pas la nature de salaire et n'ouvre donc pas droit à congés payés, s'établit à la somme de 4 119,66 euros, et l'indemnité spéciale de licenciement à la somme de 17 279,66 euros, dont à déduire la somme de 9 729,95 euros déjà versée, soit un solde de 7 549,71 euros.
L'indemnité prévue par l'article L. 1226-15 du code du travail, d'un montant au moins équivalent aux six derniers mois de salaire tels qu'ils résultent des bulletins de paie versés aux débats, sera fixée à la somme de 12 524,61 euros.
Cette indemnité réparant le préjudice né du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, il ne peut être fait droit aux demandes de dommages et intérêts distincts pour "non-respect de l'obligation de recherche de reclassement" et pour "absence d'avis des représentants du personnel."
De même, il est constant que l'indemnité allouée en application de l'article L. 1226-15 du code du travail inclut la réparation du dommage résultant du défaut de notification écrite des motifs qui s'opposent au reclassement.
Ces dispositions du jugement seront ainsi réformées et le salarié débouté de ses demandes additionnelles.
' sur l'astreinte
Selon l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.
En l'espèce, M. [K] ayant sollicité, dès sa requête introductive d'instance reçue le 1er octobre 2018, la remise sous astreinte d'une attestation Pôle emploi rectifiée mentionnant le 13 avril 2017, et non le 3 juillet 2018, comme étant le dernier jour travaillé et payé, ainsi que les salaires des douze derniers mois précédents, le bureau de conciliation et d'orientation a, par décision du 14 novembre 2018, notifiée à la société KMS par lettre recommandée avec avis de réception remise à son destinataire le 15 décembre 2018, ordonné la délivrance de ce document ainsi rectifié sous une astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours, que le conseil s'est réservé le pouvoir de liquider sur demande chiffrée, ainsi que la remise du document dit de portabilité par une disposition distincte non assortie d'une astreinte.
Saisi oralement par le conseil du salarié à l'audience du 26 juin 2019 d'une demande de liquidation de l'astreinte, le conseil de prud'hommes a débouté l'intéressé de cette prétention aux motifs qu'elle n'était pas chiffrée et n'avait pas été portée à la connaissance de l'employeur, non comparant ni représenté.
Justifiant n'avoir obtenu la remise de l'attestation Pôle emploi conforme que par courrier du conseil de la société KMS adressé le 9 septembre 2020, ce qui n'est pas discuté, M. [K] demande de liquider l'astreinte à la somme de 29 900 euros au titre de la période du 15 janvier 2019 au 9 septembre 2020.
Contrairement à ce qui est soutenu par l'appelante, la demande qui a été rejetée en première instance pour les motifs sus-énoncés n'est pas nouvelle en appel et ce moyen est au surplus inopérant, sa recevabilité n'étant pas discutable quand bien même il s'agirait d'une demande additionnelle.
Si elle fait valoir qu'elle avait confié la défense de ses intérêts à la société de conseil Cys Partners en la personne de Mme [T], qui la représentait lors de l'audience de conciliation mais a omis de se présenter à l'audience de jugement, ce qu'elle dit avoir découvert avec stupeur lors de la réception de la décision déférée, la société KMS, à laquelle la décision du bureau de conciliation et d'orientation a été notifiée le 15 décembre 2018, ne fournit aucun élément susceptible de justifier l'exécution tardive de son obligation de remise de l'attestation Pôle emploi rectifiée conformément à l'injonction des premiers juges, ni ne fait état de quelconques difficultés qu'elle aurait pu rencontrer.
Tenant les dispositions de l'article 4 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée par les ordonnances n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-666 du 3 juin 2020, dont il résulte que le cours des astreintes a été suspendu pendant la période du 12 mars 2020 au 23 juin 2020 inclus, l'astreinte prononcée le 14 novembre 2018 sera liquidée à la somme de 24 900 euros.
Le jugement sera ainsi infirmé de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,
Infirme le jugement en ce qu'il a :
' condamné l'employeur au paiement des sommes de 31 720 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 9 729,95 euros au titre de l'indemité légale de licenciement doublée, 4 880 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, et 488 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
' débouté le salarié de sa demande de liquidation de l'astreinte prononcée par décision du 14 novembre 2018,
Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,
Condamne la société Korcz Marcellin Services à payer à M. [K] les sommes suivantes :
' indemnité compensatrice (L. 1226-14 C.T) 4 119,66 euros
' solde d'indemnité spéciale de licenciement 7 549,71 euros
' dommages et intérêts (L. 1226-15 C.T) 12 524,61 euros
' astreinte liquidée 24 900,00 euros
' article 700 du code de procédure civile en appel 1 000,00 euros
Déboute le salarié du surplus de ses demandes,
Condamne l'appelante aux dépens.
Arrêt signé par le président et par la greffière.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,