RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 20/00574 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HUXN
YRD/JL
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NIMES
21 janvier 2020
RG:F 19/00130
Association UNEDIC - DELEGATION AGS - CGEA DE [Localité 9]
C/
[S]
S.E.L.A.R.L. BRMJ
Grosse délivrée le 31 Janvier 2023 à :
- Me Delphine ANDRES
COUR D'APPEL DE NÃŽMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 31 JANVIER 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NIMES en date du 21 Janvier 2020, N°F 19/00130
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président,
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère,
M. Michel SORIANO, Conseiller,
GREFFIER :
Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 04 Janvier 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 31 Janvier 2023.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Association UNEDIC - DELEGATION AGS - CGEA DE [Localité 9] L'UNEDIC, Délégation AGS ' CGEA de [Localité 9], Association déclarée, représentée par sa Directrice Nationale, Madame [O] [V], domiciliée à [Localité 10], [Adresse 1].
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Delphine ANDRES de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉES :
Madame [J] [S] assignée à sa personne
née le 28 Août 1969 à [Localité 8]
[Adresse 6]
[Localité 4]
n'ayant pas constitué avocat ou défenseur syndical
SELARL BRMJ Es qualité de « Mandataire ad'hoc» de la « SAS CHECKMATE »
[Adresse 7]
[Localité 3]
n'ayant pas constitué avocat ou défenseur syndical
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 31 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Mme [J] [S] a été engagée à compter du 9 juillet 2018 en qualité d'enquêteur téléphonique par la SAS Checkmate.
Le 28 novembre 2018, la SAS Checkmate a remis, à Mme [J] [S] ainsi qu'aux autres salariés de l'entreprise, une dispense d'activité.
Du 10 au 19 décembre 2018, Mme [J] [S] a été placée en arrêt de travail.
Par courrier du 14 décembre 2018, Mme [J] [S] a mis en demeure la SAS Checkmate de fixer une date de reprise du travail.
Par courrier du 9 janvier 2019, Mme [J] [S] a pris acte de la rupture de son contrat de travail.
Par jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 16 janvier 2019, la SAS Checkmate a été placée en liquidation judiciaire et Me [X] [K] a été désigné mandataire liquidateur.
Par requête du 12 février 2019, Mme [J] [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Nîmes aux fins de voir condamner la SAS Checkmate au paiement de la somme de 4.238, 52 euros à titre de salaire du 1er octobre 2018 au 9 janvier 2019, outre 423, 85 euros au titre de congés payés y afférents.
Par jugement du 21 janvier 2020, le conseil de prud'hommes de Nîmes a :
- dit que la prise d'acte du contrat de travail de Mme [J] [S] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- fixé la créance de Mme [J] [S] à l'encontre de la procédure collective
de la SAS Checkmate aux sommes suivantes :
- 6.422 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de paiement des salaires,
- 3.853, 20 euros à titre de dommages et intérêts pour exécutions déloyale du contrat de travail,
- 1. 284,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 128 euros au titre de congés payés y afférents fixées au passif de la SAS Checkmate et garanties par le CGEA AGS,
- 642, 20 euros fixée au passif de la SAS Checkmate et garanties par le CGEA AGS à titre d' indemnité de congés payés acquis,
- 7 706,40 euros fixée au passif de la SAS Checkmate et garanties par le CGEA AGS à titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- déclaré le présent jugement commun et opposable au CGEA de [Localité 9] gestionnaire de l'AGS,
- dit que la garantie de cet organisme interviendra dans les limites et plafond
réglementaires applicable en la matière, au vu du relevé qui lui sera produit et du jugement
de l'absence de fonds disponibles au titre de ladite procédure collective,
- dit que les dépens seront considérés comme frais privilégiés de la présente procédure collective.
Par acte du 13 février 2020, l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 9] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par jugement du 12 janvier 2022 le tribunal de commerce de Nîmes a prononcé la clôture pour insuffisance d'actifs de la procédure de liquidation poursuivie à l'encontre de la société Checkmate et, par ordonnance du 25 mai 2022, le président du tribunal de commerce de Nîmes a désigné la SELARL BRMJ, prise en la personne de Me [K], es qualité de mandataire ad hoc. Par acte du 7 juin 2022, l'AGS CGEA de [Localité 9] a assigné en intervention forcée la SELARL BRMJ, prise en la personne de Me [K], es qualité de mandataire ad hoc de la société Checkmate.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 13 mai 2020, l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 9] demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nîmes du 21 janvier 2020 en toutes ses dispositions,
- constater l'absence d'exécution déloyale du contrat de travail,
- constater l'absence de tout préjudice démontré par Mme [J] [S],
- constater l'absence de toute situation de travail dissimulé,
- constater l'absence de justificatif de la réception du courrier de prise d'acte en date du 4 janvier 2019,
- dire et juger que le contrat de travail de Mme [J] [S] rompu par le licenciement pour motif économique notifié le 29 janvier 2019,
En conséquence,
- limiter les créances de Mme [J] [S] aux sommes suivantes :
- 4.238, 52 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er octobre 2018 au 9 janvier 2019, outre 423, 85 euros de congés payés y afférents,
- 1.284, 40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 128, 00 euros de congés payés afférents,
- 290, 03 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ,
- débouter Mme [J] [S] de ses plus amples demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause,
- dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances viséesaux articles L. 3253-6 et L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-17, L. 3253-19 et suivants du code du travail,
- dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
- faire application des dispositions du code de commerce et du décret,
- donner acte à l'UNEDIC et l'AGS de ce qu'ils revendiquent le bénéfice exprès et d'ordre public des textes légaux et décrets réglementaires applicables, tant au plan de la mise en oeuvre du régime d'assurance des créances des salariés, que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément les articles L 3253-8 L 3253-17 et D3253-5 du code du travail.
L'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 9] soutient que :
- le montant des rémunérations dues à la salariée a été régularisé dans le cadre de la liquidation judiciaire et de la garantie AGS, aucun préjudice complémentaire ne peut être invoqué par la salariée en application de l'article 1231-6 du code civil, les difficultés financières auxquelles a été confronté l'employeur sont unanimement reconnues,
- la salariée sollicite l'indemnisation d'un même préjudice à un double titre,
- la salariée ne s'est jamais présentée à son poste de travail le 26 novembre 2018,
- concernant l'absence de mutuelle d'entreprise, l'AGS ne dispose d'aucun élément permettant d'apporter la contradiction sauf que la salariée ne justifie d'aucun préjudice,
- sur le travail dissimulé, si aucune déclaration préalable n'est intervenue, l'établissement d'un contrat de travail et la délivrance de bulletins de salaire sont exclusifs de toute volonté de dissimulation.
- les congés payés ont été pris par la salariée étant au surplus relevé que les périodes d'arrêt de travail pour cause non professionnelle ne sont pas assimilées à du travail effectif,
- il n'est pas démontré que l'employeur a été destinataire du courrier de prise d'acte, le seul défaut de paiement des salaires d'octobre et novembre n'est pas une cause grave de rupture du contrat de travail
La SELARL BRMJ, prise en la personne de Me [K], es qualité de mandataire ad hoc de la société Checkmate et Mme [S] n'ont pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 9 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure.
MOTIFS
Sur le préjudice découlant du non paiement des salaires à leur échéance
Il n'est pas discuté que le montant des rémunérations dues aux salariés de la société Checkmate a été régularisé dans le cadre de la liquidation judiciaire et de la garantie AGS.
L'article 1231-6 du code civil dispose dans son alinéa 3 que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.
Outre qu'il n'est justifié d'aucun préjudice distinct du défaut de paiement, les difficultés financières auxquelles a été confrontée la société Checkmate ont été reconnues par l'inspecteur du travail qui a pris acte de l'impossibilité pour celle-ci d'assumer la charge salariale qui lui incombait, la société a été placée en liquidation judiciaire dès le 16 janvier 2019, la date de cessation des paiements étant fixée au 5 novembre 2018, aussi, aucune mauvaise foi à l'origine du défaut de paiement des salaires à l'échéance n'est démontrée.
La demande est en voie de rejet et le jugement en voie de réformation de ce chef. Â
Sur l'exécution déloyale du contrat de travail
En l'absence de toute argumentation de l'intimée, elle-ci sera déboutée de ses demandes.
Sur la prise d'acte de rupture du contrat de travail
En l'absence de toute argumentation de l'intimée, elle-ci sera déboutée de ses demandes.
Sur le travail dissimulé
Le travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié suppose de démontrer que l'employeur a entendu se soustraire intentionnellement à l'accomplissement d'une des formalités mises à sa charge par l'article L.8221-5 du code du travail, laquelle intention n'est pas en l'espèce établie.
En l'absence de toute argumentation de l'intimée, elle-ci sera déboutée de ses demandes.
Conformément aux écritures de l'Unedic, les créances de Mme [S] seront limitées aux sommes suivantes :
- 4.238, 52 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er octobre 2018 au 9 janvier 2019, outre 423, 85 euros de congés payés y afférents,
- 1.284, 40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 128, 00 euros de congés payés afférents,
- 290, 03 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt réputé contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
- Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,
- Limite les créances de Mme [S] aux sommes suivantes :
- 4.238, 52 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er octobre 2018 au 9 janvier 2019, outre 423, 85 euros de congés payés y afférents,
- 1.284, 40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 128, 00 euros de congés payés afférents,
- 290, 03 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
- Dit que cette somme sera inscrite par le mandataire liquidateur sur l'état des créances de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société,
- Dit qu'en application des articles L 622-28 et L 641-3 du Code de commerce, le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts au taux légal des créances salariales nées antérieurement,
- Déboute Mme [S] de ses autres prétentions,
- Dit que les dépens seront considérés comme frais privilégiés dans le cadre de la procédure collective.
Arrêt signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT