RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 23/01516 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IZXC
VH
COUR D'APPEL DE NIMES
03 décembre 2020
RG:19/00068
[Z]
[Y]
C/
S.A.R.L. MENUISERIE CHARPENTE [H]
Grosse délivrée
le
à Selarl Chabannes-Reche...
Selarl Gouyet Pommaret...
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 27 JUIN 2024
Décision déférée à la Cour : Arrêt du Cour d'Appel de Nîmes en date du 03 Décembre 2020, N°19/00068
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre,
Madame Virginie HUET, Conseillère,
M. André LIEGEON, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Céline DELCOURT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 Mai 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 Juin 2024.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
M. [B], [G], [F] [Z]
né le 08 Janvier 1972 à [Localité 3]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représenté par Me Jean paul CHABANNES de la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Mme [M], [U] [Y]
née le 24 Juillet 1974 à [Localité 4]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Jean paul CHABANNES de la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A.R.L. MENUISERIE CHARPENTE [H] inscrite au RCS d'Aubenas sous le numéro 509 717 153 Représentée par son gérant, Monsieur [N] [H]dont le siège social sis
[Adresse 6]
[Localité 1]
Représentée par Me Laurette GOUYET POMMARET de la SELARL GOUYET POMMARET - ORARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'ARDECHE
Statuant sur demande de réinscription après expertise
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 18 Avril 2024
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 27 Juin 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Mme [M] [Y] et M. [B] [Z] confiaient la réalisation de travaux de charpente couverture, cuisine et zinguerie à la SARL Menuiserie Charpente [H] dans le courant de l'année 2017.
M. [Z] et Mme [Y] réglaient une partie des factures.
Considérant que M. [Z] et Mme [Y] restaient redevables du paiement de la somme de 6 210,34 euros, la SARL [H] les mettait en demeure, par courrier en date du 23 mars 2018 de payer ladite somme.
La mise en demeure étant restée infructueuse, la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] les assignait devant le tribunal d'instance d'ANNONAY afin d'être réglée de la somme 6 210,34 euros, outre 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par jugement du 23 novembre 2018, le tribunal d'instance d'ANNONAY a statué comme suit:
- CONSTATE qu'aucun accord formel et exprès n'était formulé par la partie demanderesse relativement à l'organisation d'une mesure d'instruction ;
- JUGE n'y avoir nécessité à ordonner une expertise judiciaire ;
- CONDAMNE [B] [Z] et [M] [Y] à payer en exécution de leur obligation contractuelle (acceptation de marchés de travaux) à la SARL MENUISERIE [H] la somme de 5 663,40 euros au titre du solde de quatre factures (cf supra), outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
- CONDAMNE [B] [Z] et [M] [Y] à payer à la SARL MENUISERIE [H] la somme de 750 euros à titre d'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile, soit 375 euros à la charge de chacun ;
- CONDAMNE [B] [Z] et [M] [Y] aux entiers dépens de l'instance.
M. [Z] et Mme [Y] ont interjeté appel de cette décision.
Dans le cadre de la procédure d'appel, M. [Z] et Mme [Y] ont produit un rapport d'expertise non contradictoire au soutien de leur argumentation relative à une surfacturation.
Par arrêt en date du 3 décembre 2020, la cour d'appel de céans, ne s'estimant pas suffisamment éclairée, a ordonné une expertise judiciaire.
M. [C], expert, a déposé son rapport le 30 juin 2021.
EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 05 mai 2023, les appelants, M. [Z] et Mme [Y], demandent à la cour de :
Vu les articles 1104 et suivants du code civil,
Vu le rapport d'expertise judiciaire,
Vu les pièces du dossier,
Vu le jugement du 23 novembre 2018 du tribunal d'instance d'ANNONAY,
Déclarer l'appel bien fondé et ce faisant,
Rejetant toutes conclusions contraires, et statuant à nouveau,
Réformer le jugement du tribunal d'Instance d'Annonay du 23 novembre 2018 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a diminué une partie des sommes dues de 546,94 euros,
Constater que la MENUISERIE CHARPENTE [H] a facturé ses travaux pour un montant total de 49.244,73 euros TTC,
Constater que M. [Z] et Mme [Y] ont payé la somme globale de 43.034,39 euros,
Constater une surfacturation par rapport à la réalité des prestations effectuées pour un montant total de 6.995,87 euros,
Par conséquent,
Débouter la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Juger que la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] est redevable de la somme de 785,53 euros,
Condamner la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] à payer à M. [Z] et Mme [Y] la somme de 785,53 euros,
Condamner la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] au paiement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au bénéfice de M. [Z] et Mme [Y],
Condamner la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] aux entiers dépens d'appel et de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de l'avocat soussigné par application de 699 code de procédure civile ainsi que les frais d'expertise amiable qu'ils ont dû avancer pour un montant de 1 339,44 euros.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 mars 2024, la SARL Menuiserie Charpente [H], intimée, demande à la cour de :
Vu les articles 1104 et suivants du code civil,
Vu la procédure,
Vu les pièces versées aux débats,
Débouter M. [Z] et Mme [Y] de l'ensemble de leurs demandes ;
Confirmer le jugement du tribunal d'instance d'ANNONAY rendu le 23 novembre 2018, en toutes ses dispositions, excepté en ce qu'il a :
Condamner [B] [Z] et [M] [Y] à payer de leur obligation contractuelle (acceptation de marchés de travaux) à la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] la somme de 5 663,40 euros au titre du solde de quatre factures (cf supra), outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Et, statuant à nouveau :
Condamner [B] [Z] et [M] [Y] à payer de leur obligation contractuelle à la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] la somme de 6 210,34 euros au titre du solde des factures des travaux, outre intérêts au taux légal à compter de la décision de première instance ;
Condamner M. [Z] et Mme [Y] à verser à la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] la somme 2 000 euros au titre de la résistance abusive;
Condamner M. [Z] et Mme [Y] à verser à la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] la somme supplémentaire de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
Condamner M. [B] [Z] et Mme [M] [Y] aux entiers dépens de l'instance.
Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance en date du 30 janvier 2024 a prononcé la clôture de l'affaire au 18 avril 2024.
MOTIVATION
Depuis l'entrée en vigueur de l'article 34 du Décret n°2017-891 du 6 mai 2017, l'alinéa 2 de l'article 954 du code de procédure civile dispose que «les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions ». Par ailleurs, selon l'alinéa 3, « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ».
La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de 'constatations' ou de 'dire' lorsqu'elles constituent de seuls moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Sur la demande en paiement :
Les consorts [Z]-[Y] considèrent qu'il y a eu une surfacturation et des travaux suplémentaires non acceptés par devis.
Ils affirment que la toiture objet du litige n'a pas été entièrement isolée. Ils affirment que la facture d'isolation a été examinée et qu'ils se sont rendus compte que la menuiserie facturait en fait l'isolation jusqu'au débord du toit alors que l'isolation s'arrête à l'intérieur des murs. Ils ajoutent aussi que sur une facture le paiement des matériaux a été réalisé deux fois.
Ils arguent du rapport de l'expert M. [C], dans lequel, selon eux, il apparaît que l'intimée a surfacturé les appelants pour la somme de 6.995,87 euros. Ils précisent même que l'expert a fait les comptes entre les parties, et explicite un trop-perçu par l'intimée de la somme de 785,53 euros.
Ils rappellent que Mme [P], expert amiable, avait, elle, estimé la surfacturation à hauteur de 7 054,90 euros.
Ils considèrent, eux, que la surfacturation s'élève à la somme de 7 835,04 euros. Cependant, ils demandent au tribunal de constater une surfacturation par rapport à la réalité des prestations effectuées pour un montant total de 6.995,87 euros et en conséquence de condamner l'intimée au paiement de la somme de 785,53 euros.
* * *
La SARL Menuiserie Charpente [H] argue que les consorts [Z]-[Y] ont accepté et signé les différents devis émis. Ils soulignent qu'ils n'ont pas participé à l'expertise amiable. La SARL indique que malgré l'acceptation des devis, les consorts [Z]-[Y] sont revenus sur leurs engagements et ont, finalement, limité les travaux confiés.
Elle indique qu'elle a réalisé les travaux souhaités par les appelants et a émis, à l'issue de ces derniers, les factures afférentes à savoir :
1. Facture 18003 du 12 janvier 2018, remplacement poutres, pour un montant de 2 475 euros,
2. Facture 18032 du 19 février 2018, travaux de charpente couverture garage, pour un montant de 10 452,70 euros,
3. Facture 18033 du 19 février 2018 travaux de charpente couverture grange, pour un montant de 13 446,13 euros
4. Facture 18034 du 19 février 2018, travaux de maçonnerie couverture, pour un montant de 519,20 euros.
La SARL conteste l'expertise judiciaire en ce qu'elle a utilisé la méthode du 'Starking'. Ainsi, il est parfaitement normal qu'il y ait une différence d'isolant puisque cette différence sert à compenser l'ossature bois bas de pente posée sur la partie non isolée. Cette partie est comptée au même tarif que l'isolant et non détaillée comme telle. Il s'agit bien, selon elle, de bois et non de maçonnerie. Elle considère, à l'appui de schémas explicatifs, qu'il n'y a donc aucune surfacturation. Elle conclut donc que les consorts [Z]-[Y] sont bien redevables envers la SARL [H] du paiement de la somme de 6 210,34 euros.
Réponse de la cour :
Aux termes des articles 1103, 1104 et 1193 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi, ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui s'en prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Selon l'article 9 du code de procédure civile, c'est à celui qui allègue un fait de le démontrer.
Les conclusions de l'expert sont contestées par la SARL, sans qu'il ne soit apporté plus d'éléments que dans les dires déjà formulés à l'expert.
L'expert judiciaire a analysé les factures et pour trois d'entres elles, a estimé un surcoût qu'il a détaillé et expliqué longuement et sérieusement (entre les pages 10 et 19 de son rapport).
L'expert répond au dire de la SARL concernant le 'starking', qu'il a bien pris connaissance des notes et croquis explicatif mais qu'il maintient ses conclusions en l'expliquant de manière technique expliquant notamment que certaines prestations facturées n'ont pas été réalisées. (pages 21 et 22 du rapport).
L'expert judiciaire conclut, après la réception des dires, au décompte suivant entre les parties :
- « Montant total des factures contestées : 49 244,73 euros TTC ;
- Montant réglé : 43 034,39 euros TTC ;
- Solde réclamé : 6 210,34 euros TTC ;
- Somme trop facturée : 6 995,87 euros TTC ;
Somme à régler aux époux [Z]-[Y] : 785,53 euros TTC ». (sic)
La cour relève de manière surabondante que cette expertise judiciaire est conforme aux conclusions de l'expertise amiable diligentée (page 10 du rapport de Mme [P] en date du 11 mars 2019) qui concluait à une surfacturation d'un montant sensiblement égal.
En conséquence, il convient d'infirmer le jugement rendu en première instance et après décompte entre les parties, de condamner l'intimée au paiement de la somme de 785,53 euros tel que cela apparaît dans le décompte de l'expert.
Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive :
Le droit d'agir en justice ne dégénère en abus que dans l'hypothèse de malice ou mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol mais l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute.
Il ne peut en l'espèce être reproché aux consorts [Z]-[Y] de s'être opposés au paiement d'une partie des factures en l'absence de preuve d'une mauvaise foi de leur part non caractérisée en l'espèce de sorte que la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive sera rejetée.
Sur les frais du procès :
Succombant à l'instance, la SARL Menuiserie Charpente [H] sera condamnée à en régler les entiers dépens, de première instance et d'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, en ce compris les frais d'expertise judiciaire et amiable.
L'équité commande par ailleurs de condamner la SARL Menuiserie Charpente [H] à payer à M. [Z] et Mme [Y] la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par ces derniers sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en appel outre 500 euros en première instance.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant par arrêt contradictoire, statuant en matière civile, rendu publiquement en dernier ressort,
- Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau de ces chefs :
- Condamne la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] à payer à M. [Z] et Mme [Y] la somme de 785,53 euros, au titre du solde des travaux de menuiserie effectués en 2017,
- Condamne la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] aux dépens de première instance,
- Condamne la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] à payer à M. [B] [Z] et Mme [M] [Y] la somme de 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant,
- Condamne la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] aux dépens d'appel, comprenant les frais de l'expertise judiciaire,
- Condamne la SARL MENUISERIE CHARPENTE [H] à payer à M. [B] [Z] et Mme [M] [Y] la somme de 1 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,