COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 26 Mars 2015
Chambre coutumière
Numéro R. G. : 14/ 00005
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Décembre 2013 par le Tribunal de première instance de NOUMEA (RG no : 13/ 562)
Saisine de la cour : 08 Janvier 2014
APPELANT
LE GDPL CHANRANMEA, pris en la personne de M. Evariste X...son représentant légal en exercice
OUATOM RT1-98812 BOULOUPARIS
Représentée par la SELARL MILLIARD-MILLION, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉS
M. Jean-Baptiste Y...
demeurant ...
Représenté par la SELARL BOITEAU, avocat au barreau de NOUMEA
M. Teddy Y...
demeurant ...
Représenté par la SELARL BOITEAU, avocat au barreau de NOUMEA
M. Théo Y...
demeurant ...
Représenté par la SELARL BOITEAU, avocat au barreau de NOUMEA
M. Roland Y...
demeurant ...
Représenté par la SELARL BOITEAU, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Mars 2015, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président,
M. Régis LAFARGUE, Conseiller,
M. François DIOR, Conseiller,
M. Jean-Baptiste NAOUMO, assesseur coutumier de l'aire de IAAI,
M. Elia PAWA, assesseur coutumier de l'aire de PAICI CAMUCI
Mme Scholastique BOIGUIVIE, assesseur coutumier de l'aire de HOOT MA WAAP
Mme Johana TEIN, assesseur coutumier de l'aire de PAICI CAMUCI
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Régis LAFARGUE.
Greffier lors des débats : Mme Cécile KNOCKAERT
ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Yves ROLLAND, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
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PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Par requête du 12 février 2013, M. Evariste X...agissant en qualité de représentant du groupement de droit particulier local Chanranmea (le GDPL) a fait citer devant la juridiction des référés, statuant en formation coutumière, MM. Jean-Baptiste, Teddy, Théo et Roland Y...(les consorts Y...), aux fins d'obtenir leur expulsion et celle de tous occupants de leur chef, d'un terrain sis lieudit Ouatom, commune de Boulouparis.
M. Evariste X...soutenait que le GDPL était propriétaire du terrain litigieux, en vertu d'un acte de cession daté du 23 octobre 1990 émanant de l'Adraf, et que les consorts Y...s'étaient installés sur les terres appartenant au GDPL sans y être autorisés.
Les consorts Y...contestaient le droit du GDPL en affirmant occuper ce terrain de plus de 600 hectares depuis neuf (9) générations. Ils affirmaient que ce terrain, qui faisait partie de l'ancienne propriété Bourgine, avait été attribué au GDPL, par l'Adraf, au mépris de leurs droits ancestraux. Ils demandaient donc au juge des référés de se déclarer incompétent, compte tenu de l'existence d'une contestation sérieuse.
A titre subsidiaire, ils demandaient au tribunal d'entendre le Grand chef Berger Y...(du district coutumier de La Foa), mais encore M. Z..., président du conseil de l'aire Xaracuu, et M. Marius A...président du conseil des anciens.
C'est dans ces conditions, que chaque partie se réclamant du " lien à la terre " et l'une d'elle demandant même à la juridiction de procéder à une enquête civile, que le juge des référés statuant en la forme coutumière, a, par décision du 19 décembre 2013 fait usage de la " passerelle ", en renvoyant l'affaire à date fixe devant la juridiction du fond, après s'être déclaré incompétent.
PROCÉDURE D'APPEL
Par requête du 30 décembre 2013, le groupement de droit particulier local Chanranmea a interjeté appel de ce jugement non signifié. Par mémoire ampliatif du 07 mars 2014, il a sollicité l'infirmation de la décision déférée et réitéré ses demandes initiales tendant à l'expulsion des consorts Y....
Par écritures du 31 juillet 2014, les consorts Y...ont conclu à la confirmation du jugement, tout en réitérant à titre subsidiaire leur demande d'audition des autorités coutumières afin d'établir la preuve de l'absence de lien à la terre du GDPL et de la famille X....
Par ordonnance du 03 décembre 2014 la clôture a été prononcée au 02 février 2015 et l'affaire fixée à l'audience du 02 mars 2015.
Par courrier du 9 février 2015 les parties ont été invitées à conclure sur la recevabilité de l'appel d'une décision prise en application des dispositions de l'article 811-1 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.
MOTIFS
Attendu, aux termes de l'article 811-1 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie, que " A la demande de l'une des parties et si l'urgence le justifie, le président saisi en référé peut renvoyer l'affaire à une audience dont il fixe la date pour qu'il soit statué au fond. Il veille à ce que le défendeur dispose d'un temps suffisant pour préparer sa défense. L'ordonnance emporte saisine du tribunal. Il est ensuite procédé comme il est dit aux deux derniers alinéas de l'article 792 " ;
Attendu que les écritures des parties démontrent les tensions entre deux clans rivaux autour de cette terre ; que l'urgence est donc démontrée ; que les conclusions des défendeurs (les consorts Y...) pressent la juridiction de procéder à des investigations devant permettre de déterminer lequel de ces deux clans a une légitimité coutumière à l'égard de cette terre ; que la demande en étant donc faite, et les conditions étant réunies, c'est à bon droit que le juge des référés a renvoyé l'affaire devant la juridiction du fond ; qu'il ne peut donc être soutenu qu'il aurait statué ultra petita ;
Et attendu que la décision du premier juge est une mesure d'administration judiciaire qui n'est pas susceptible de recours ;
Qu'ainsi, non seulement l'appel est irrecevable, mais qu'en outre, la juridiction du fond de première instance se trouve toujours saisie du dossier ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes relatives aux frais irrépétibles ;
Attendu que l'appel étant déclaré irrecevable, l'appelant supportera les dépens liés à cette procédure ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant, publiquement et en formation coutumière, par arrêt contradictoire, déposé au greffe ;
Vu l'avis donné aux parties ;
Vu l'article 811-1 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ;
Déclare irrecevable l'appel interjeté par M. X...en qualité de représentant du groupement de droit particulier local Chanranmea ;
Condamne M. X...en sa qualité de représentant du GDPL Chanranmea aux dépens de la présente procédure d'appel.
Le greffier, Le président,