No de minute : 256
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 30 août 2021
Chambre civile
Numéro R.G. : No RG 20/00271 - No Portalis DBWF-V-B7E-RGD
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 8 juin 2020 par le tribunal de première instance de NOUMEA (RG no :18/1276)
Saisine de la cour : 24 juillet 2020
APPELANT
M. [I] [Y]
né le [Date naissance 6] 1954 à BRIVE,
demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Nathalie LEPAPE, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉ
Mme [T] [Y] épouse [B]
née le [Date naissance 4] 1952 à BRIVE,
demeurant [Adresse 7]
Présente
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 juillet 2021, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
M. Charles TELLIER, Conseiller,
Mme Nathalie BRUN, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Philippe ALLARD.
Greffier lors des débats: M. Petelo GOGO
Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO
ARRÊT :
- réputé contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
- signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
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PROCEDURE DE PREMIERE INSTANCE
Par acte notarié en date des 23 et 28 novembre 1967, Mme [U] a vendu à M. [N] [Y] et à Mme [W] [L], son épouse, agissant tant en leur nom qu'au nom de leurs enfants mineurs, [T] [Y] et [I] [Y], un terrain nu situé au [Localité 8] formant la parcelle A provenant du lot no 24 du lotissement [F]. Il a été convenu que les parents auraient la jouissance de l'immeuble vendu tandis que les mineurs auraient, à compter de la vente, « la propriété dudit immeuble et (...) la jouissance à partir du jour du décès du survivant des époux [Y] - [L] ».
M. [N] [Y] est décédé le [Date décès 3] 2007 et Mme [W] [L] le [Date décès 2] 2011.
Par requête introductive d'instance déposée le 24 avril 2018, Mme [T] [Y] épouse [B], qui affirmait qu'elle avait rédigé les actes de procédure qui avaient abouti à un jugement du 10 avril 2015 ayant ordonné « l'exclusion de l'actif des successions de [N] [Y] et [W] [L] épouse [Y] la valeur du bien immobilier sis au Mont-Dore formant la parcelle A provenant du lot 24 du lotissement [F] » et qu'elle avait ainsi permis à son frère l'économie du paiement de droits de succession, a attrait M. [I] [Y] devant le tribunal de première instance de Nouméa pour obtenir, au visa de l'article 815-12 du code civil, le paiement d'une somme de 600.000 FCFP « au titre de sa rémunération pour son excellent travail de juriste » ainsi que le remboursement d'une somme de 8.738 FCFP au titre de sa quote-part des frais d'huissier.
M. [I] [Y] s'est opposé à cette demande en observant que sa soeur ne versait aucun état de frais et a reconventionnellement sollicité une expertise destinée à déterminer la consistance de l'indivision tant mobilière qu'immobilière dans la perspective du calcul de la masse à partager.
Par jugement en date du 8 juin 2020, la juridiction saisie a :
- déclaré recevable la demande de Mme [Y] [T] épouse [B],
- constaté l'indivision conventionnelle existante entre Mme [Y] [T] épouse [B] et M. [Y] [I] sur l'immeuble sis [Adresse 5] formant la parcelle A du lot no 24 propriété [E],
- fixé le montant de la créance de Mme [Y] [T] épouse [B] à la somme de 500.000 FCFP, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2018, due par l'indivision,
- déclaré la demande reconventionnelle de M. [Y] [I] sans objet,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage,
- renvoyé les parties devant le président de la chambre des notaires de la Nouvelle-Calédonie , ou son délégué, chargé des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision conventionnelle existante entre les parties.
Le premier juge a principalement retenu :
- que la demanderesse justifiait de diligences effectuées en justice avec mandat de son frère pour défendre leurs droits à l'encontre de la D.S.F. ayant abouti à la soustraction de leur bien immobilier indivis de toute assiette successorale ;
- qu'en l'absence d'accord sur le montant de la légitime rémunération due par l'indivision à Mme [T] [Y], la créance de cette dernière était « souverainement » fixée à 500.000 FCFP ;
- que la demande présentée par le défendeur était sans objet, compte tenu des termes d'une autre décision de justice rendue le même jour entre les parties.
PROCEDURE D'APPEL
Par requête déposée le 24 juillet 2020, M. [I] [Y] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de son mémoire ampliatif d'appel déposé le 27 octobre 2020, M. [I] [Y] demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris ;
in limine litis,
- dire et juger Mme [T] [B] irrecevable en toutes ses demandes .
- débouter Mme [T] [B] de toutes ses demandes ;
- condamner Mme [T] [B] aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 250.000 FCFP au titre des frais irrépétibles de première instance et de la somme de 250.000 FCFP au titre des frais irrépétibles d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
à titre subsidiaire,
- ordonner une expertise notamment destinée à permettre l'évaluation de la rémunération sollicitée ;
- surseoir à statuer dans cette attente.
La requête d'appel a été signifiée le 2 septembre 2020 à Mme [T] [Y] (acte remis à sa personne).
L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 juin 2021.
Le 7 juin 2021, Mme [T] [Y] a déposé des conclusions.
SUR CE, LA COUR,
Les conclusions déposées pour le compte de Mme [T] [Y], postérieurement à l'ordonnance de clôture, seront déclarées irrecevables en application de l'article 910-21 du code de procédure civile et l'ordonnance de clôture ne sera pas révoquée dès lors que Mme [T] [Y] a bénéficié d'un délai largement suffisant pour préparer sa défense. En effet, la requête d'appel lui avait été signifiée le 2 septembre 2020, soit neuf mois avant la clôture de la procédure, et l'obligation de constituer avocat dans le mois de la signification et le risque auquel elle s'exposait à défaut de constitution, avaient été rappelés à l'intimée.
Il n'est pas contesté que Mme [T] [Y] est la rédactrice des conclusions soumises au tribunal de première instance de Nouméa dans l'instance qui a opposé les consorts [Y] à la direction des services fiscaux et qui a abouti à un jugement rendu le 20 avril 2015 prévoyant que la parcelle A du lot no 24 du lotissement [F] n'entrait pas dans les actifs des successions de leurs parents.
Il résulte de la requête introductive d'instance et des conclusions déposées le 22 février 2019 que Mme [T] [Y] a entendu agir sur le fondement de l'article 815-12 du code civil qui prévoit :
« L'indivisaire qui gère un ou plusieurs biens indivis est redevable des produits nets de sa gestion. Il a droit à la rémunération de son activité dans les conditions fixées à l'amiable ou, à défaut, par décision de justice. »
Dans le cadre de l'instance ayant abouti au jugement du 20 avril 2015, Mme [T] [Y] et M. [I] [Y] n'agissaient pas pour le compte de l'indivision dans le dessein de conserver la parcelle A du lot no 24 du lotissement [F] mais pour leur propre compte, en leur qualité d'héritiers de M. [N] [Y] et à Mme [W] [L], auxquels l'administration fiscale était susceptible de réclamer des droits de succession au titre de ce bien.
En rédigeant les conclusions communes qu'elle-même et son frère ont déposées, Mme [T] [Y] n'a pas géré le bien indivis au sens de l'article 815-12 du code civil. Cet article ne peut servir de fondement à la demande en paiement présentée par l'intimée. Le jugement entrepris doit être infirmé.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Infirme le jugement déféré ;
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [T] [Y] de ses demandes ;
Déboute M. [I] [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [T] [Y] aux dépens de première instance et d'appel.
Le greffier,Le président.