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27/04/2023 | FRANCE | N°21/00040

France | France, Cour d'appel de Papeete, Chambre des terres, 27 avril 2023, 21/00040


N° 40



KS

---------------



Copies exécutoires

délivrées à :

- Me Quinquis,

- Me Dumas,

le 28.04.2023.





Copies authentiques

délivrées à :

- Me Grattirola,

- Me Lau,

- Me Lollichon,

- Me Paméla Céran J,

- Ministère de l'Economie...

- Service du Cadastre,

- M. Curateur,

le 28.04.2023.



REPUBLIQUE FRANCAISE



COUR D'APPEL DE PAPEETE



Chambre des Terres





Audience du 27 avril 202

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RG 21/00040 ;



Décision déférée à la Cour : jugement n° 216, rg n° 19/00008 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Tribunal Foncier de la Polynésie française, du 28 octore 2020 ;



Sur appel formé par requête déposée...

N° 40

KS

---------------

Copies exécutoires

délivrées à :

- Me Quinquis,

- Me Dumas,

le 28.04.2023.

Copies authentiques

délivrées à :

- Me Grattirola,

- Me Lau,

- Me Lollichon,

- Me Paméla Céran J,

- Ministère de l'Economie...

- Service du Cadastre,

- M. Curateur,

le 28.04.2023.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D'APPEL DE PAPEETE

Chambre des Terres

Audience du 27 avril 2023

RG 21/00040 ;

Décision déférée à la Cour : jugement n° 216, rg n° 19/00008 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete, Tribunal Foncier de la Polynésie française, du 28 octore 2020 ;

Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'appel le 10 juin 2021 ;

Appelante :

Mme [NI] [I] [DH] épouse [LH], née le 17 décembre 1975 à [Localité 28], de nationalité française, demeurant à [Adresse 37] ;

Représentée par Me Miguel GRATTIROLA, avocat au barreau de Papeete ;

Intimés :

La Société DELANO, société civile immobilière, immatriulée au Rcs de Papeete sous le n° 7123 - C (n° Tahiti 505701) ayant son siège à [Adresse 41] ;

La Société DELANO 3, société civile immobilière, immatriulée au Rcs de Papeete sous le n° 7126 - C (n° Tahiti 505701) ayant son siège TB Promotion [Adresse 18] ;

La Société DELANO 4, société civile immobilière, immatriulée au Rcs de Papeete sous le n° 9380 - C (n° Tahiti 660969) ayant son siège TB Promotion [Adresse 18] ;

La Société DELANO 5, société civile immobilière, immatriulée au Rcs de Papeete sous le n° 9489 - C (n° Tahiti 667956) ayant son siège TB Promotion [Adresse 18] ;

Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représentée par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;

M. [Y] [BJ], né le 29 avril 1951 à [Localité 31], de nationalité française, demeurant à [Adresse 39] ;

Représenté par Me James LAU, avocat au barreau de Papeete ;

Mme [AG] [BJ] épouse [VD], née le 19 avril 1950 à [Localité 31]

de nationalité française, demeurant à [Adresse 34] ;

Représentée par Me Jean-Claude LOLLICHON, avocat au barreau de Papeete ;

L'Association Sportive de Tir, [Localité 31] Comité Olympique de la Polynésie française complexe [29], [Adresse 23], représentée par son Président : M. [U] [XS] ;

Représenté par Me Brice DUMAS, avocat au barreau de Papeete ;

Mme [KP] [AT] [TP], veuve [M], née le 29 mai 1954 à [Localité 31], de nationalité française, demeurant à [Adresse 25], yant-droit de [K] [JY] ;

Mme [RB] [R] [ZB] épouse [KC], née le 24 juin 1969 à [Localité 31], de nationalité française, [Adresse 22], représentant son époux M. [SG] [KC], né le 8 octobre 1962 à [Localité 31] ;

Toutes deux ayants-droit de [K] [JY], née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26] ;

Représentés par Me Paméla CERAN-JERUSALEMY, avocat au barreau de Papeete ;

M. [PF] [VR] [BJ], né le 3 janvier 1953 à [Localité 31], de nationalité française, [Adresse 21] ;

Non comparant, assigné à personne le 13 avril 2022 ;

Mme [LZ] [O] [BJ], née le 4 janvier 1928 à [Localité 31] et décédée lez 10 mai 2015 à [Localité 40], représentée par ses ayants-droit :

- M. [YJ] [B] [S] [OS] [DZ], né le 28 janvier 1953 à [Localité 31], demeurant à [Adresse 36] ou [Adresse 30] ;

- Mme [SY] [C] [H] [BY] [DZ], née le 1 mars1954 à [Localité 31],demeurant à [Adresse 42] ;

- Mme [MR] [A] [DZ], née le 14 novembre 1955 à [Localité 31], demeurant à [Adresse 44] ;

M. [F] [Z] [DZ], né le 4 novembre 1959 à [Localité 31], demeurant à [Adresse 17] ;

Mme [X] [O] [ZT] [DZ], née le 27 janvier 1961 à [Localité 31], demeurant à [Adresse 43] ;

Mme [GS] [V] [CP] [TU] [ER] [DZ], née le 13 mai 1964, demeurant à [Adresse 44] ;

Tous assignés à personne les 24, 25 et 26 novembre 2021 ;

Mme [XA] [X] [RB] [PX] [BJ] épouse [J], née le 9 novembre 1931 à [Localité 31], de nationalité française, demeurant à [Localité 33] ;

Non comparante, assignée à personne le 17 août 2021 ;

Le Ministère de l'Economie verte et du Domaine en charge des Mines et de la Recherche, [Adresse 20] ;

Non comparant, assigné à la personne habilitée du 1er juin 2022 ;

Le Service du Cadastre, Direction des Affaires Foncières, [Adresse 19] ;

Non comparant, assigné à la personne Chef de Service du 1er juin 2022 ;

M. le Curateur aux Biens et Successions Vacants, [Adresse 32] ;

Non comparant, assigné à juriste le 1er juin 2022 ;

M. [S] [IB] [PF] [RO] [BJ], né le 30 décembre 1935 à [Localité 31], de nationalité française, demeurant à [Adresse 38] ;

Mme [WI] [GA] [BJ] épouse [UH], née le 13 mai 1940,

de nationalité française, demeurant à [Localité 33] ;

Mme [UZ] [W] [IT] [O] [SK] [BJ], née le 25 août 1938 à [Localité 31],de nationalité française, demeurant à [Adresse 35] ;

Ces trois derniers non comparants ;

Ordonnance de clôture du 30 septembre 2022 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 8 décembre 2022, devant Mme SZKLARZ, conseiller faisant fonction de président, M. RIPOLL, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l'ordre judiciaire aux fins d'exercer à la cour d'appel de Papeete en qualité d'assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt par défaut ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme SZKLARZ, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :

Par requête déposée au Greffe le 14 janvier 2019, Madame [NI] [DH] épouse [LH] a saisi le Tribunal foncier de la Polynésie française au contradictoire de la SCI Delano, de la SCI Delano 3, de la SCI Delano 4, de la SCI Delano 5, de [Y] [BJ] qu'elle a indiqué être le représentant des consorts [BJ], à savoir [PF] [VR] [BJ], [AG] [BJ] épouse [VD], [LZ] [O] [BJ], [XA] [X] [RB] [PX] [BJ] épouse [J], [S] [IB] [PF] [RO] [BJ], [WI] [GA] [BJ] épouse [UH], [UZ] [W] [BJ], de [U] [XS] (Président du COPF), du Ministre de l'Economie verte et du domaine, en charge des mines et de la recherche, de [P] [FI], Chef du Service Cadastre à la Direction des Affaires Foncières et du Curateur des Successions vacantes pour rechercher les ayants droit de «[K] [JY]», afin de voir déclarer recevable sa demande de revendication et de restitution de biens immobiliers, en l'occurrence des terres «[Localité 49]» sise à [Localité 40] (plus particulièrement les parcelles KA n°[Cadastre 1] et KA n°[Cadastre 11]) et «[Localité 27]» sise à [Localité 26] (parcelle R n°[Cadastre 12]), au seul profit de Mme [NI], [I] [DH] épouse [LH].

Elle a soutenu que le nom «[E] [JY]» mentionné sur le Tomite de [Localité 40] en 1862, au n°73 [Localité 49], est totalement inexistant ; de juger qu'en lieu et place du nom «[E] [JY]» mentionné sur le Tomite de [Localité 40] en 1862 au n°73 [Localité 49], il faut écrire et lire «[K] [JY] » ; de juger qu'en lieu et place du nom «[E] [JY]» mentionné sur le Tomite de [Localité 40] en 1862 aux n°74 [Localité 46], n°75 [Localité 48] et n°76 [Localité 47], il faut écrire et lire «[K] [JY]» ; de juger que les terres n°73 [Localité 49], n°74 [Localité 46], n°75 [Localité 48], et n°76 [Localité 47], ces dernières incluses dans la terre [Localité 49], sises à [Localité 40] appartiennent effectivement à la dame «[K] [JY]».

Les SCI DELANO et Monsieur [Y] [BJ], s'affirmant les uns et les autres propriétaires des terres revendiquées se sont opposés aux demandes de Madame [NI] [DH] épouse [LH].

Par jugement n° RG 19/00008, n° de minute 216 en date du 28 octobre 2020, auquel la Cour se réfère expressément pour l'exposé de la procédure, des moyens et des prétentions de première instance, le Tribunal civil de première instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 1, a dit :

- Déclare les demandes à l'encontre de [PF] [VR] [BJ], [AG] [BJ] épouse [VD], [LZ] [O] [BJ], [XA] [X] [RB] [PX] [BJ] épouse [J], [S] [IB] [PF] [RO] [BJ], [WI] [GA] [BJ] épouse [UH], [UZ] [W] [IT] [O] [SK] [KU] [N] [HJ] [BJ] irrecevables;

- Reçoit [KP] [TP] en son intervention volontaire ;

- Déboute [KP] [TP] de sa demande de réouverture des débats ;

- Déboute [RB] [R] [KC] de sa demande de réouverture des débats ;

- Déclare Madame [NI] [DH] épouse [LH] irrecevable en ses demandes, faute de qualité pour agir ;

- Condamne Madame [NI] [DH] épouse [LH] à payer à Monsieur [U] [XS] la somme de 226 000 F CFP au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

- Condamne Madame [NI] [DH] épouse [LH] à payer aux société DELANO, la société DELANO 3, la société DELANO 4 et la société DELANO 5 la somme de 200.000 F CFP au titre de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

- Condamne Madame [NI] [DH] épouse [LH] aux entiers dépens.

Par requête d'appel enregistrée au greffe de la Cour le 10 juin 2021, Madame [NI], [I] [DH] épouse [LH], ayant pour avocat Maître Miguel GRATTIROLA a interjeté appel de cette décision qui a été signifiée par acte d'huissier en date du 13 avril 2021.

Aux termes de sa requête, à laquelle il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Madame [NI] [DH] épouse [LH] demande à la cour de :

- Recevoir l'appel et le déclarer fondé,

Statuant de nouveau,

- Réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

$gt; question préjudicielle :

- Donner acte de ce qu'il est demandé que le nom «[E] [JY]» mentionné sur le certificat de propriété dit «Tomite de [Localité 40] en 1862 aux n°74 [Localité 46], n°75 [Localité 48] et n°76 [Localité 47], doit être rectifié en «[K] [JY]» ;

- Dire et juger que ces questions de patronyme et d'état-civil n'étant pas de la compétence du Tribunal fonder, le premier juge aurait dû surseoir et poser la question préjudicielle à la chambre de la famille du Tribunal de première instance ;

- Renvoyer avant dire droit l'affaire sur l'état civil de «[E] [JY]» et de «[K] [JY]», à connaître par la chambre de la famille du Tribunal de première instance, en la forme d'un question préjudicielle ;

$gt; sur le fond :

- Dire et juger l'exposante propriétaire en indivision de la terre «[Localité 49]» au profit de l'indivision des ayants droits de «[K] [JY]» et plus précisément les parcelles n° KA [Cadastre 1] de 382.344 m2 et KA [Cadastre 11] de 438.063 m2 de la terre [Localité 49] ;

En ce qui concerne la parcelle KA [Cadastre 11] et l'association sportive de tir, de même que les SCI DELANO,

- Donner acte de ce que l'exposante, si les droits de ces parties sont prouvés, ne s'oppose pas à leurs mises hors de cause,

De même qu'à celle de M. le Ministre de l'Economie verte et du domaine, en charge des mines et de la recherche,

De même que le Chef du Service Cadastre à la Direction des Affaires Foncières ;

Concernant la terre «[Localité 27]» sise à [Localité 26],

- Dire et juger que cette terre a été revendiquée par «[K] [JY]» en 1852 ;

- Dire et juger l'exposante propriétaire en indivision de la terre «[Localité 27]» sise à [Localité 26] au profit de l'indivision des ayants droit de «[K] [JY]» laquelle parcelle numérotée R [Cadastre 12] sur extrait de plan cadastral, revendication pour une superficie de 6170 m2 ;

- Ordonner la transcription à la conservation des hypothèques ;

- Condamner les succombants en tous les dépens et frais irrépétibles pour un montant de 250.000 FCP.

Par conclusions reçues par voie électronique au greffe de la Cour le 16 décembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [U] [XS], Président du Comité Olympique de la Polynésie française, ayant pour avocat Maître Brice DUMAS, intervient volontairement devant la cour en précisant que :

«L' «Association Sportive de Tir » est attraite au présent appel alors même qu'elle n'était pas partie en première instance, étant rappelé que seul M. [U] [XS] avait été assigné en sa qualité de Président du comité Olympique (ce dernier n'est cependant pas attrait en cause d'appel).

Ce dernier intervient donc volontairement pour préciser d'une part que l'association dont il est prétendu être président n'est pas identifiée.

S'agit-il de la Fédération Sportive de Tir de Polynésie française ou d'une association sportive locale '

Cette mise en cause est pour le moins surprenante puisqu'aucune demande n'est pour l'heure formée à l'encontre de ladite association.»

Monsieur [U] [XS] demande à la cour de :

Vu l'indétermination de l'association polynésienne de Tir qui serait présidée par M. [XS],

Vu l'absence de demande à l'encontre de M. [XS],

- Mettre hors de cause M. [U] [XS] et l'association polynésienne de tir dont il est présenté comme étant le Président,

- Condamner l'appelante à verser la somme de 226.000 F CFP à M. [U] [XS], contraint à nouveau d'intervenir dans le cadre de la présente instance au regard de la confusion volontairement opérée, au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions reçues par voie électronique au greffe de la Cour le 17 mars 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Monsieur [Y] [BJ], ayant pour avocat Maître James LAU, demande à la Cour de :

- Confirmer le jugement du 28 octobre 2020 ;

- Débouter Madame [NI] épouse [LH] de ses demandes ;

- Condamner Madame [NI] épouse [LH] à payer à Monsieur [Y] [BJ] la somme de 200.000 FCP sur le fondement de l'article 407 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions reçues par voie électronique au greffe de la Cour le 8 juin 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Madame [KP] [AT] [TP] veuve [M] et Madame [R] [RB] [ZB] épouse [KC], représentant son époux Monsieur [SG] [KC] (les consorts [TP]), aux droits de [K] [JY], née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26], ayant pour avocat Maître Paméla CERAN-JERUSALEMY, demandent à la cour de :

- Confirmer le jugement du 28 octobre 2020 en ce qu'il déclare Mme [NI] [DH] épouse [LH] irrecevable en ses demandes, faute de qualité pour agir ;

Y ajoutant,

- Déclarer M. [Y] [BJ] et les SCI DELANO irrecevables en leurs demandes

pour défaut de qualité à agir ;

- Constater que Mme [KP] [AT] [TP] veuve [M] et Mme [R] [RB] [ZB] épouse [KC] représentent les ayants droit de [K] [JY], née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26] ;

- Dire que les ayants droit de [K] [JY], née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26], sont propriétaires des terres [Localité 49] cadastrée KA [Cadastre 1] et KA [Cadastre 11] sise à [Localité 40] et [Localité 27] cadastrée R [Cadastre 12] sise à [Localité 26] ;

- Condamner Mme [NI] [DH] épouse [LH] à payer à Mme [KP] [AT] [TP] veuve [M] et Mme [R] [RB] [ZB] épouse [KC] la somme de 200 000 FCP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Par conclusions reçues par voie électronique au greffe de la Cour le 16 août 2022 après injonction de conclure au fond, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Madame [AG] [BJ] épouse [VD], ayant pour avocat Maître Jean-Claude LOLLICHON-BARLE, demande à la cour de :

- Ordonner qu'il sera sursis à statuer sur la requête d'appel de Madame [LH] jusqu'à la décision de la Cour de Cassation à intervenir sur le pourvoi en cassation déclaré contre l'arrêt de la Cour d'Appel de Papeete n° 4 en date du 27 janvier 2022.

- Dépens réservés.

Par conclusions récapitulatives reçues par voie électronique au greffe de la Cour le 17 août 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, La Société DELANO, La Société DELANO 3, La Société DELANO 4 et La Société DELANO 5 (les sociétés DELANO), ayant pour conseil la SELARL JURISPOL, demandent à la cour de :

- Confirmer en toutes ses dispositions le Jugement du 28 octobre 2020

À défaut, statuant à nouveau :

À titre principal :

- Dire et Juger irrecevables Madame [NI] [LH] et Mesdames [KP] [TP] épouse [M] et [R] [ZB] épouse [KC] en leurs demandes, celles-ci étant nouvelles en appel, également pour défaut d'intérêt et de qualité à agir, et enfin en raison de la prescription ;

À titre subsidiaire :

- Rejeter toutes demandes fins et conclusions de Madame [NI] [LH] et de Mesdames [KP] [TP] épouse [M] et [R] [ZB] épouse [KC] comme étant infondées et injustifiées ;

En toutes hypothèses,

- Condamner solidairement Madame [NI] [LH] et de Mesdames [KP] [TP] épouse [M] et [R] [ZB] épouse [KC] au paiement de la somme de 500.000 F CFP à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- Condamner solidairement Madame [NI] [LH] et de Mesdames [KP] [TP] épouse [M] et [R] [ZB] épouse [KC] au paiement de la somme de 500.000 F CFP au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL JURISPOL.

Dans ses dernières écritures récapitulatives reçues par voie électronique au greffe de la cour le 20 septembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Madame [NI] [DH] épouse [LH] demande à la Cour de :

- Recevoir l'appel et le déclarer fondé,

Statuant de nouveau,

- Réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

$gt; question préjudicielle :

- Donner acte de ce qu'il est demandé que le nom «[E] [JY]» mentionné sur le certificat de propriété dit «Tomite» de [Localité 40] en 1862 aux n°74 [Localité 46], n°75 [Localité 48] et n°76 [Localité 47], doit être rectifié en «[K] [JY]» ;

- Dire et juger que ces questions de patronyme et d'état-civil n'étant pas de la compétence du Tribunal fonder, le premier juge aurait dû surseoir et poser la question préjudicielle à la chambre de la famille du Tribunal de première instance ;

- Renvoyer avant dire droit l'affaire sur l'état civil de «[E] [JY]» et de «[K] [JY]», à connaître par la chambre de la famille du Tribunal de première instance, en la forme d'une question préjudicielle ;

$gt; sur le fond :

- Dire et juger l'exposante propriétaire en indivision de la terre «[Localité 49]» au profit de l'indivision des ayants droit de «[K] [JY]» et plus précisément les parcelles n° KA [Cadastre 1] de 382.344 m2 et KA [Cadastre 11] de 438.063 m2 de la terre [Localité 49] ;

En ce qui concerne la parcelle KA [Cadastre 11] et l'association sportive de tir, de même que les SCI DELANO,

- Donner acte de ce que l'exposante, si les droits de ces parties sont prouvés, ne s'oppose pas à leurs mises hors de cause,

De même qu'à celle de M. le Ministre de l'Economie verte et du domaine, en charge des mines et de la recherche,

De même que le Chef du Service Cadastre à la Direction des Affaires Foncières ;

Concernant la terre «[Localité 27]» sise à [Localité 26],

- Dire et juger que cette terre a été revendiquée par «[K] [JY]» en 1852 ;

- Dire et juger l'exposante propriétaire en indivision de la terre «[Localité 27]» sise à [Localité 26] au profit de l'indivision des ayants droit de «[K] [JY]» laquelle parcelle numérotée R [Cadastre 12] sur extrait de plan cadastral, revendication pour une superficie de 6170 m2 ;

- Débouter les parties adverses en toutes leurs demandes fins et conclusions ;

- Ordonner la transcription à la conservation des hypothèques ;

- Condamner les succombants en tous les dépens et frais irrépétibles pour un montant de 250.000 FCP.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 30 septembre 2022 pour l'affaire être fixée à l'audience de la Cour du 8 décembre 2022. En l'état l'affaire a été mise en délibéré au 23 mars 2023, délibéré qui a dû être prorogé.

MOTIFS :

Sur la recevabilité de l'appel :

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée et aucun élément de la procédure ne permet à la Cour d'en relever d'office l'irrégularité.

Aucune demande n'est formulée à l'encontre de Monsieur [U] [XS], de l'association sportive de tir, de Monsieur le Ministre de l'Economie verte et du domaine, en charge des mines et de la recherche et du Chef du Service Cadastre à la Direction des Affaires Foncières, toutes personnes qui ne revendiquant pas de droits sur les terres [Localité 49] et [Localité 27]. En conséquence, il y a lieu de les mettre hors de cause.

Sur la demande de sursis à statuer :

En son arrêt n°4 en date du 27 janvier 2022, la cour a statué sur l'action en expulsion des sociétés DELANO à l'encontre de Monsieur [Y] [BJ] et sur la revendication de propriété des consorts [BJ] de la propriété des parcelles cadastrées à [Localité 40] AW n° [Cadastre 2], AW n° [Cadastre 3], AP n° [Cadastre 13], AR n° [Cadastre 9], AS n° [Cadastre 7], AS n° [Cadastre 8], AS n° [Cadastre 10], AV n° [Cadastre 1], CD n° [Cadastre 15], CD n° [Cadastre 16], CD n° [Cadastre 3], CD n° [Cadastre 4], CD n° [Cadastre 5], CD n° [Cadastre 6], dépendantes du [Adresse 24].

Le litige soumis à la cour porte sur les parcelles cadastrées KA n°[Cadastre 1] pour une superficie de 382.344 m2 et KA n°[Cadastre 11] pour une superficie de 438.063 m2 de la terre [Localité 49] ainsi que sur la terre [Localité 27] sise à [Localité 26], cadastrée R n°[Cadastre 12] pour une superficie de 6.170 m2.

Ainsi quelle que soit la décision de la Cour de cassation en suite du pourvoi formé à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Papeete n°4 en date du 27 janvier 2022, il n'existe pas de risques de contradictions de décisions.

En conséquence, la cour dit qu'il n'y a pas lieu à sursis à statuer.

Sur la question préjudicielle :

La loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures a modifié le code de l'organisation judiciaire et a institué un tribunal foncier, juridiction spécialisée dans les litiges fonciers en Polynésie française.

Aux termes de l'article L. 552-9-1 du Code de l'Organisation judiciaire, lorsque le tribunal de première instance statue en matière foncière, il est dénommé tribunal foncier. Il statue dans une formation présidée par un magistrat du siège et comprenant, en outre, deux assesseurs.

La procédure devant le tribunal est fixé au TITRE VI du code de procédure civile de la Polynésie française « Dispositions applicables aux actions réelles immobilières portées devant le tribunal foncier». L'article 449-3 dispose que «Sauf disposition expresse contraire, ne sont concernées par les dispositions du présent titre que les actions réelles immobilières ainsi que les actions relatives à l'indivision ou au partage portant sur des droits réels immobiliers, portées devant le tribunal foncier à compter du 1er janvier 2018.»

Il s'en déduit que les actions en bornage, les actions en désenclavement, servitudes, mitoyenneté, empiètement, droit de passage, les actions en expulsion en l'absence de bail et si revendication en usucapion, les successions dès lors qu'un ou des immeubles sont à partager, les actions en revendication, les administrations d'indivision successorale, les licitations et les recels successoraux sauf si l'action ne porte pas sur un bien immobilier, sont de la compétence exclusive du Tribunal foncier.

Ainsi, il doit être retenu que la nature de la demande initiale qui saisit la juridiction détermine la compétence matérielle, les demandes incidentes suivant le sort de la demande principale. Retenir le contraire conduirait à devoir rechercher la juridiction compétente au fur et à mesure de l'évolution du litige dans le courant de la mise en état, ce qui ne pourrait qu'être contraire à une bonne administration de la justice. Pour exemple, il est évident qu'une indivision mixte qui contiendrait des meubles et des immeubles ne peut pas être pour la partie immobilière de la compétence du tribunal foncier et pour la partie mobilière de la compétence du tribunal civil, l'ensemble de la masse partageable devant être prise en considération dans un même temps.

De même, si plusieurs demandes concernant un même litige sont soumises à justice, si une de ces demandes est de la compétence exclusive du Tribunal foncier, pour être une action réelle immobilière, l'ensemble du litige doit nécessairement être soumis au Tribunal foncier.

En l'espèce, Madame [NI] [DH] épouse [LH] soutient qu'il est certain, et sans nécessité de débattre, que l'état civil se prouve par tous moyens, et que ce contentieux constituait une question préjudicielle pour le premier juge ; que la compétence du tribunal foncier est fermée et que le tribunal foncier ne connait pas des affaires en matière d'état civil. Elle rappelle que dans sa requête introductive d'instance, elle a clairement demandé que le Tribunal foncier veuille bien juger que le nom «[E] [JY]», indiqué sur le certificat de propriété dit «Tomite» de [Localité 40] en 1862, au n°73 [Localité 49], serait en réalité inexistant du point de vue de l'état civil ; qu'en lieu et place du patronyme «[E] [JY]», elle a demandé sans ambiguïté que le patronyme «[K] [JY]» soit indiqué sur les actes ; qu'elle avait intérêt à faire juger cette demande relative à l'état civil ; que ces questions n'étant pas de la compétence du Tribunal fonder, le premier juge aurait dû surseoir et poser la question préjudicielle à la chambre de la famille du Tribunal de première instance.

Devant la cour, Madame [NI] [DH] épouse [LH] formule sa demande de manière identique, à savoir : «Donner acte de ce qu'il est demandé que le nom «[E] [JY]» mentionné sur le certificat de propriété dit «Tomite» de [Localité 40] en 1862 aux n°74 [Localité 46], n°75 [Localité 48] et n°76 [Localité 47], doit être rectifié en «[K] [JY]».

Si le Tribunal civil de première instance de Papeete est seul compétent pour statuer sur une demande en rectification ou modification d'état civil, il est constant que le tribunal foncier, saisi comme en l'espèce d'une action en revendication de propriété d'un bien immobilier, est compétent pour dérouler la dévolution successorale de la personne qui a revendiqué la terre en litige devant lui. Madame [NI] [DH] épouse [LH] a saisi le Tribunal foncier d'une action en revendication de la terre [Localité 49] en soutenant venir aux droits du Tomité. Pour justifier venir aux droits de [E] [JY] et se voir reconnus des droits sur les terres revendiquées par celle-ci, elle demande au Tribunal de modifier les mentions de l'acte de revendication foncier (tomité) de 1862 pour y voir lu «[K] [JY]» en lieu et place de la mention qui y a alors été portée «[E] [JY]».

Or, le Tomité, acte de revendication, est assimilé à un titre foncier et non à un acte d'état civil. La question que pose en réalité Madame [NI] [DH] épouse [LH], mais aussi les consorts [TP], est de déterminer si la revendiquante de la terre [Localité 49] tel qu'inscrit à l'acte de revendication, à savoir [E] [JY], et [K] [L], qu'ils affirment être leur auteur, sont une seule et même personne. Il s'agit là d'une question à laquelle doit nécessairement répondre le Tribunal foncier pour répondre à la revendication et qui est de ce fait de sa seule compétence.

Outre que si Madame [NI] [DH] épouse [LH] avait souhaité voir rectifier des actes d'état civil, il lui appartenait de saisir le Tribunal civil de première instance de Papeete en préalable à son action en revendication, la compétence du Tribunal foncier est certaine quant au déroulé de la dévolution successorale du Tomité.

En conséquence, la cour dit n'y avoir lieu à question préjudicielle.

Sur la recevabilité de l'action en revendication de propriété de Madame [NI] [DH] épouse [LH] et des consorts [TP] des parcelles cadastrées KA n°[Cadastre 1], d'une superficie de 382.344 m2, et KA n°[Cadastre 11] d'une superficie de 438.063 m2, sises à [Localité 40], dites issues de la terre [Localité 49] :

Aux termes de l'article 1er du code de procédure civile de la Polynésie française, l'action est le droit pour l'auteur d'une prétention de la soumettre au juge afin qu'il la dise bien ou mal fondée et pour son adversaire le droit de discuter de ce bien-fondé. L'action n'est ouverte qu'à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention et sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé.

Il est constant que l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès. Ainsi, celui qui se prétend propriétaire d'un bien immobilier a nécessairement qualité et intérêt à agir en revendication de la propriété de celui-ci. La charge de la preuve des droits de propriété qu'il revendique lui appartient.

De plus, dans le cadre d'une action en revendication de propriété, les parcelles revendiquées doivent nécessairement être identifiées et localisées correctement. Il faut donc, pour que l'objet de la demande soit clairement défini, produire devant la juridiction les éléments nécessaires à l'identification des parcelles cadastrales issues des terres, les mentions relatives à la désignation cadastrale des immeubles étant exigées pour la transcription.

Par ailleurs, il est constant qu'en Polynésie française comme dans le reste du territoire national, la preuve de la propriété peut se faire par la simple production d'un titre de propriété. Ainsi, la production d'un jugement d'adjudication, d'un acte authentique ou d'un jugement ayant tranché un conflit de propriété suffit à prouver les droits de propriété de l'acquéreur à l'acte, sans qu'il y ait lieu de remonter au Tomité par une chaîne ininterrompue d'acte translatifs de propriété.

C'est seulement dans le cadre d'un partage, lorsqu'il y a eu des cessions de droits indivis dont les quotités n'ont pas été précisées à l'acte, qu'il y a lieu de faire état d'une chaîne continue d'actes translatifs de droits depuis les titres originels, et ce afin, et seulement afin, de fixer les quotités à revenir à chaque propriétaire par titre.

Si un ayant droit du Tomité soutient que l'un ou l'autre des actes translatifs lui est inopposable pour avoir disposé irrégulièrement des droits de sa souche, ou est entaché de nullité, il est alors également constant que celui qui est propriétaire aux termes du juste titre dont l'inopposabilité est recherchée, pourrait éventuellement faire valoir sa possession en rapportant la preuve des actes matériels de possession qu'il aurait mis en 'uvre sur la terre en litige.

Ainsi, pour revendiquer des droits de propriété indivis sur une terre, tout particulièrement lorsque la matrice cadastrale ne mentionne pas pour propriétaire le tomité, il ne suffit pas de démontrer être ayants droits du Tomité, encore faut-il prouver que l'attributaire de la terre, et ses ayants droits après lui, n'ont pas disposé des droits de propriété qui ont été reconnus par le Tomité. Le défendeur à l'action en revendication est alors nécessairement le propriétaire inscrit à la matrice cadastrale.

En l'espèce, Madame [NI] [DH] épouse [LH] et les consorts [TP] revendiquent la propriété des parcelles cadastrées KA n°[Cadastre 1], et KA n°[Cadastre 11] sises à [Localité 40], dites issues de la terre [Localité 49], pour être ayants droit de la revendiquante [E] [JY]. Elles ont nécessairement qualité et intérêt à agir. Il leur appartient cependant de rapporter la preuve de leur qualité d'héritières des droits de [E] [JY] puis la preuve qu'il n'a pas été disposé de ces droits.

Madame [NI] [DH] épouse [LH] agit en revendication de propriété des parcelles cadastrées KA n°[Cadastre 1], et KA n°[Cadastre 11] sises à [Localité 40] au contradictoire des sociétés DELANO et de Monsieur [Y] [BJ], dont le litige est mentionné au cadastre pour la parcelle KA n°[Cadastre 1]. La parcelle KA n°[Cadastre 11] est dite au cadastre propriété des ayants droit de [E] [JY]. C'est pour représenter ses héritiers inconnus que le curateur aux biens et successions vacants aurait dû être appelé à l'instance et non pour représenter les héritiers de [K] [JY]. Cependant, la cour retient que la contradiction est amplement apportée face aux moyens de Madame [NI] [DH] épouse [LH].

En conséquence, la Cour déclare Madame [NI] [DH] épouse [LH] et les consorts [TP] recevables en leur action en revendication de propriété des parcelles cadastrées KA n°[Cadastre 1], d'une superficie de 382.344 m2, et KA n°[Cadastre 11] d'une superficie de 438.063 m2, sises à [Localité 40], dites issues de la terre [Localité 49]. La cour infirme le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 1 n° RG 19/00008, n° de minute 216 en date du 28 octobre 2020, seulement en ce qu'il a déclaré Madame [NI] [DH] épouse [LH] irrecevable en ses demandes, faute de qualité pour agir.

Sur l'identité de personne entre [E] [JY], revendiquante de la terre [Localité 49] et de [K] [JY] dont se revendiquent tant Madame [NI] [DH] épouse [LH] que les consorts [TP] :

Il est acquis aux débats, et le Tomité est produit devant la cour, que la terre [Localité 49] a fait l'objet de revendication et d'établissement d'un Tomité en 1862 au nom de [E] [JY].

Il est produit devant la cour une publication dans «Le Messager de Tahiti» dont il résulte que [E] [JY] a rendu publique en 1865 son intention de vendre la terre [Localité 49] à la Caisse Agricole. Dans l'encart paru dans «Le Messager», le nom de la venderesse est strictement identique à celui figurant au Tomité.

En 1866, La caisse Agricole a disposé des droits de [E] [JY] sur la terre [Localité 49].

Madame [NI] [DH] épouse [LH] affirme venir aux droits de [K] [JY] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26] pour venir aux droits de son frère [OA] [JY], celle-ci étant décédée sans postérité.

Mesdames [KP] [TP] épouse [M] et [R] [ZB] épouse [KC] se disent aux droits de ses descendants directs, [K] [JY] étant décédée en laissant 3 enfants pour lui succéder.

Ainsi, si les consorts [TP] et Madame [NI] [DH] épouse [LH] s'opposent quant à la dévolution successorale de [K] [JY] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26], il est demandé de concert à la cour de dire que [E] [JY], revendiquante de la terre [Localité 49] en 1962 et [K] [JY] sont une seule et même personne et qu'elle n'a pas vendu ses droits sur la terre [Localité 49].

La cour doit donc déterminer si la revendiquante [E] [JY] et [K] [JY] sont une seule et même personne. La charge de la preuve repose sur Madame [NI] [DH] épouse [LH] et les consorts [TP]. C'est seulement si la preuve de cette identité de personnes est rapportée qu'il sera nécessaire de rechercher si la vente des droits de [E] [JY] par le Crédit agricole est une vente a non domino comme il est soutenu.

Pour trancher cette question, la Cour doit nécessairement tenir compte des éléments suivants :

Si en 1847 un embryon d'état civil a été institué à [Localité 31], pour les Français et étrangers nés ou décédés dans les îles de Tahiti et de Moorea, c'est par la loi tahitienne du 11 mars 1852 sur les actes d'état civil qu'il fut prévu l'ouverture de registres dans chaque district pour l'inscription des actes de mariage, de naissance et décès tenus par les juges, l'article 21 énonçant que : «Le nom de famille devra se transmettre de père en fils sans qu'il soit permis de le changer, afin que désormais il n'y ait plus d'incertitude sur les ancêtres des familles, ce qui est une source de procès continuels pour les héritages.»

Cette loi n'a pas été immédiatement suivi d'effet et c'est seulement en 1866 que des commissions chargées d'un recensement général de la population ont été instituées. Ce sont ces commissions qui établirent les notoriétés de naissance et de mariage de tous les vivants et leur donnèrent un état civil.

De ce fait, les individus qui vinrent déclarer leurs propriétés conformément à la loi du 24 mars 1852 sur l'enregistrement des terres entre 1852 et 1862 le firent sous des noms qui ne correspondirent pas toujours à ceux qu'ils prirent en 1866, d'où les difficultés de preuve rencontrées encore aujourd'hui pour leurs successeurs.

De plus, l'exigence d'une revendication individuelle de la propriété s'est heurtée à un obstacle principal : la conception qu'avaient les «indigènes» de la propriété qui était familiale et inaliénable, d'où des co-revendications par des membres d'une même famille ou pour un groupe familial.

Il en résulte que la Cour ne peut pas être sans ignorer les imprécisions importantes qui ont pu exister dans la transcription des actes d'état civil dans le Pacifique, voir l'absence d'état civil avant 1866, ainsi que l'usage important des surnoms et des transcriptions phonétiques. De même, les règles de transmission du nom patronymique n'ont pas toujours été fixées et il est constant que pouvait être transmis comme nom patronymique, aussi bien le premier vocable que le deuxième vocable du nom paternel, voir les deux, de même parfois que les vocables désignant la mère ou les noms de mariage.

Compte tenu des incertitudes d'état civil avec lesquelles il faut nécessairement juger, pour déterminer si la revendiquante [E] [JY] a été nommée également [K] [JY], la Cour doit rechercher et retenir, en procédant à une analyse croisée des différents actes produits, ce qui est certain, ou à tout le moins le plus vraisemblable, et acté au plus près de l'événement qu'est la revendication.

En l'espèce, la revendiquante, [E] [JY], porte le même nom en 1862 au temps de la revendication et en 1865 dans le Messager de Tahiti. Aucun acte d'état civil n'aurait été retrouvé à son nom. Compte tenu des balbutiements de l'état civil en 1862, il ne peut être déduit de ce fait que personne de ce nom n'a existé, d'autant moins qu'il n'a pas été demandé au curateur de faire des recherches au nom de [E] [JY].

Selon l'acte de naissance produit, [K] [JY] a pour sa part déclaré sa naissance par acte du 26 février 1866. Elle s'est dite fille de [JY] [D] et de [PJ] [T]. Elle s'est dite mariée. En marge de cet acte, il est fait état de son décès le 17 mai 1869.

Sur l'acte de décès de [JK] [K] [G] qui est dite à l'acte sa fille, il est mentionné [K] [JY]. C'est le vocable de [K] qui est par ailleurs transmis à sa fille. On ne retrouve pas le vocable [E].

Il est produit très peu d'actes d'état civil devant la cour concernant [K] [JY], son acte de mariage est particulièrement manquant, aucun acte de notoriété, et pas davantage de déclarations de successions ou d'actes mis en 'uvre par [K] [JY] sous le nom de [E] [JY]. Compte tenu du peu d'éléments produits, la cour n'est pas en mesure de mettre en 'uvre une analyse croisée des documents pour rechercher ce qui est certain, ou à tout le moins le plus vraisemblable, et acté au plus près de l'événement qu'est la revendication.

Aucune des pièces produites ne démontrent que [K] [JY] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26] aurait été dite [E] [JY].

Par ailleurs, la seule démonstration mise en 'uvre par l'appelante devant la cour consiste à dire que [E] [JY] n'a pas existé parce qu'elle n'a pas d'état civil. La cour ne peut que rappeler que les notoriétés de naissance et de mariage n'ont été mises en 'uvre qu'en 1866 et seulement pour les vivants.

De même, les consorts [TP] se contentent d'affirmer que aucun acte d'état civil ni élément de généalogie n'a été retrouvé concernant Mme [E] [JY] ; que Mme [K] [JY] et Mme [E] [JY] vivaient à la même époque à Tahiti et que les terres revendiquées au nom de [K] [JY] sont situées à proximité les unes des autres dans les communes de [Localité 26] et [Localité 40].

Outre que ce dernier point est contesté devant la cour et n'est pas démontrée, la cour constate qu'en 1852, [K] [JY] a revendiqué plusieurs terres à ce nom et qu'en 1866, elle a déclaré sa naissance à ce même nom. Il est peu probable qu'en 1962, elle est utilisé un autre nom pour revendiquer la terre [Localité 49].

Ainsi, l'affirmation de Madame [NI] [DH] épouse [LH] et des consorts [TP] quant à l'identité de [K] [JY] avec [E] [JY] n'est étayée par aucune pièce et leur démonstration est bien insuffisante.

La cour dit que Madame [NI] [DH] épouse [LH] et les consorts [TP] échouent à rapporter la preuve de ce que l'auteur dont ils se revendiquent, [K] [JY] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26], et [E] [JY], revendiquante de la terre [Localité 49] en 1962, sont une seule et même personne.

En conséquence, la cour déboute Madame [NI] [DH] épouse [LH], Madame [KP] [AT] [TP] veuve [M] et Madame [R] [RB] [ZB] épouse [KC] de leur demande de voir dit que les ayants droit de [K] [JY], née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26], sont propriétaires de la terre [Localité 49] cadastrée KA n°[Cadastre 1] et KA n°[Cadastre 11], sise à [Localité 40].

Sur la propriété de la terre [Localité 27] sise à [Localité 26], cadastrée R n°[Cadastre 12] pour une superficie de 6170 m2 :

La Terre [Localité 27] cadastrée R n°[Cadastre 14] à [Localité 26] a été revendiquée par [K] [JY] en 1852.

La Terre [Localité 27] apparaît à la Matrice cadastrale comme appartenant à la «Succession [K] [JY]».

Les mentions de la matrice cadastrale sont conformes au Tomité dont se revendiquent Madame [NI] [DH] épouse [LH] et les consorts [TP]. Il n'y a donc pas de litige à trancher sur ce point.

Sur la dévolution successorale de [K] [L] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26] :

Conformément au principe du double degré de juridiction, seule la chose jugée par les premiers juges peut être remise en question en cause d'appel et la Cour ne peut se prononcer sur les points qui n'ont pas été tranchés par le premier juge.

Il est constant que les consorts [TP] sont intervenus trop tardivement devant le premier juge pour conclure au fond. Le premier juge les a renvoyés à agir en revendication des droits de propriété de [K] [L] dans une instance distincte. Il n'a donc pas été statué sur la dévolution successorale des droits de [K] [L] que revendiquent tant les consorts [TP] que Madame [NI] [DH] épouse [LH].

Les parties devant pouvoir bénéficier d'un double degré de juridictions sur ce point essentiel, la cour dit cette demande irrecevable devant la cour pour ne pas avoir été tranchée par le premier juge et renvoie les parties à saisir le Tribunal foncier quant aux devenirs des droits fonciers de [K] [L].

En conséquence de l'ensemble de ces éléments, la cour infirme le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 1 n° RG 19/00008, n° de minute 216 en date du 28 octobre 2020, seulement en ce qu'il a déclaré Madame [NI] [DH] épouse [LH] irrecevable en ses demandes, faute de qualité pour agir. La cour confirme le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 1 n° RG 19/00008, n° de minute 216 en date du 28 octobre 2020 en toutes ses autres dispositions.

Sur les autres chefs de demande :

Le seul fait d'agir en justice en revendication ne peut constituer en soi une faute. En conséquence, la cour rejette la demande des sociétés DELANO en dommages et intérêts pour procédure abusive.

Il serait inéquitable de laisser à la charge des sociétés DELANO et de Monsieur [U] [XS] les frais exposés par eux et non compris dans les dépens. La Cour condamne Madame [NI] [DH] épouse [LH] à leur payer, en application de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française :

- la somme de 500.000 francs pacifiques aux sociétés DELANO, prises en la personne de leur représentant légal,

- la somme de 100.000 francs pacifiques à Monsieur [U] [XS].

Il n'est par contre pas inéquitable de laisser à la charge de Madame [KP] [AT] [TP] veuve [M], de Madame [R] [RB] [ZB] épouse [KC], et de Monsieur [Y] [BJ] les frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

Madame [NI] [DH] épouse [LH] qui succombe pour le tout doit être condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

DÉCLARE l'appel recevable ;

METS hors de cause Monsieur [U] [XS], l'association sportive de tir, Monsieur le Ministre de l'Economie verte et du domaine, en charge des mines et de la recherche et le Chef du Service Cadastre à la Direction des Affaires Foncières ;

DIT n'y avoir lieu à question préjudicielle ;

INFIRME le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 1 n° RG 19/00008, n° de minute 216 en date du 28 octobre 2020, seulement en ce qu'il a déclaré Madame [NI] [DH] épouse [LH] irrecevable en ses demandes, faute de qualité pour agir ;

CONFIRME le jugement du Tribunal civil de première instance de Papeete, Tribunal foncier ' section 1 n° RG 19/00008, n° de minute 216 en date du 28 octobre 2020 en toutes ses autres dispositions ;

Et statuant à nouveau :

DÉCLARE Madame [NI] [DH] épouse [LH] et les consorts [TP] recevables en leur action en revendication de propriété des parcelles cadastrées KA n°[Cadastre 1], d'une superficie de 382.344 m2, et KA n°[Cadastre 11] d'une superficie de 438.063 m2, sises à [Localité 40], dites issues de la terre [Localité 49] ;

DIT que Madame [NI] [DH] épouse [LH] et les consorts [TP] échouent à rapporter la preuve de ce que l'auteur dont ils se revendiquent, [K] [JY] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26], et [E] [JY], revendiquante de la terre [Localité 49] en 1962, sont une seule et même personne ;

DÉBOUTE Madame [NI] [DH] épouse [LH], Madame [KP] [AT] [TP] veuve [M] et Madame [R] [RB] [ZB] épouse [KC] de leur demande de voir dire que les ayants droit de [K] [JY], née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26], sont propriétaires de la terre [Localité 49] cadastrée KA n°[Cadastre 1] et KA n°[Cadastre 11], sise à [Localité 40] ;

Y ajoutant,

DIT que le premier juge n'a pas statué sur la dévolution successorale de [K] [L] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26] ;

DIT la demande de voir statuer sur la dévolution successorale de [K] [L] née en 1819 à [Localité 45] et décédée le 17 mai 1869 à [Localité 26] irrecevable devant la cour pour ne pas avoir été tranchée par le premier juge et renvoie les parties à saisir le Tribunal foncier quant aux devenirs des droits fonciers de [K] [L] ;

CONDAMNE Madame [NI] [DH] épouse [LH] à payer, en application de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française :

- la somme de 500.000 francs pacifiques aux sociétés DELANO, prises en la personne de leur représentant légal,

- la somme de 100.000 francs pacifiques à Monsieur [U] [XS],

Et ce en application de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

REJETTE tout autre chef de demande des parties, plus ample ou contraire au présent arrêt,

CONDAMNE Madame [NI] [DH] épouse [LH] aux dépens d'appel.

Prononcé à Papeete, le 27 avril 2023.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : K. SZKLARZ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Papeete
Formation : Chambre des terres
Numéro d'arrêt : 21/00040
Date de la décision : 27/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-27;21.00040 ?
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