Grosses délivrées
REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
1ère Chambre - Section A
ARRET DU 5 JUILLET 2006
(no , 4 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 05/06557 Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Décembre 2004 -Tribunal de Grande Instance de PARIS. (1ère chambre, 1ère section ) RG no 03/16444 APPELANTE AU PRINCIPAL ET INTIMEE INCIDEMMENT SOCIETE UBN Société à responsabilité limitée 96/98, avenue Raymond Poincaré 75207 PARIS CEDEX 16 représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoué à la Cour assistée de Me Bruno LANDON, avocat au barreau de PARIS, toque C 595, substitué à l'audience par Me Sandra FARGES du PLESSIS, avocat au barreau de PARIS, toque E 1709 INTIME AU PRINCIPAL ET APPELANT INCIDEMMENT Monsieur Eric X... ... représenté par la SCP HARDOUIN, avoué à la Cour assisté de Me Vincent PERRAUT, avocat au barreau de PARIS, plaidant pour la SCP HOCQUARD et Associés, toque P 87 COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 31 mai 2006, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du nouveau code de procédure civile devant la Cour composée de :
M. DEB , président
M. GRELLIER, président
Mme HORBETTE, conseiller
qui ont délibéré, Greffier, lors des débats : Mme RIGNAULT Ministère public : représenté lors des débats par Mme TERRIER-MAREUIL, avocat général qui a fait connaître son avis. ARRET :
- contradictoire
- prononcé en audience publique par M. DEB , président.
- signé par M. DEB , président et par Mme RIGNAULT, greffier présent lors du prononcé.
La S.A.R.L. UBN avait consenti en 1991 un prêt d'un montant de 500.000 francs (76.224,51 ç) à une société ALMA dont M. Alain Y... s'était porté caution. A la suite de la liquidation judiciaire de cette société en 1994, la créance de l'UBN avait été admise pour 528. 300 francs (80.538,82 ç).
Cette banque avait demandé le 6 janvier 1997 à son avocat, M. Eric X..., d'obtenir une inscription judiciaire d'hypothèque provisoire puis un titre exécutoire pour la rendre définitive, sur un immeuble appartenant à sa caution, libre alors de toute inscription, pour un montant de 635. 392, 85 francs.
M. X... a sollicité du juge de l'exécution cette inscription le 16 janvier 1998 pour un montant de 490.000 francs, ce magistrat autorisant le même jour l'inscription pour 480. 000 francs. Il sera procédé à cette inscription le 29 janvier suivant et le 26 juin 1999 à son inscription définitive pour un montant de 723.528,66 francs (110.301,23 ç) représentant la créance en principal, résultant d'un jugement de condamnation du tribunal de commerce, les intérêts et les frais.
Dans le même temps, M. Alain Y... avait fait juger l'inscription d'hypothèque provisoire caduque pour ne pas lui avoir été dénoncée et
que l'inscription définitive ne prenait rang qu'à sa date et son cousin, M. Pascal Y..., avait inscrit une hypothèque provisoire les 17 juin et 16 juillet 1998, devenue définitive le 25 juin 1999, pour 1.000.000 francs (152.449,02 ç) et primant donc celle de l'UBN. L'immeuble a été adjugé le 21 décembre 2000 pour la somme de 185.987,80 ç ; la procédure d'ordre, qui a retenu la créance de UBN pour 151.715,25 ç, s'est terminée le 25 avril 2003, UBN ne recevant que 40.957,28 ç dans la distribution.
La S.A.R.L. UBN reprochant à son avocat, M. X..., son retard à solliciter l'inscription de l'hypothèque provisoire et le non respect par lui de ses demandes d'inscription pour un montant de 635. 392, 85 francs au lieu des 490.000 de sa requête au juge de l'exécution, joint à son défaut de dénonciation de l'inscription provisoire, considère que ces fautes lui ont fait perdre le bénéfice de sa sûreté et lui ont interdit d'être payé de sa créance.
Le tribunal de grande instance de Paris lui a, par jugement du 15 décembre 2004, partiellement donné raison en condamnant M. X... à lui payer la somme de 32.218,25 ç à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de sa date, outre 1800 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile mais rejeté le surplus de ses demandes, estimant que le montant de l'hypothèque était celui arrêté par le juge de l'exécution dont rien n'indique qu'il aurait admis un montant supérieur s'il lui avait été demandé.
CECI ÉTANT EXPOSÉ,
Vu l'appel de la S.A.R.L. UBN à l'encontre de ce jugement,
Vu ses conclusions déposées le 12 mai 2006 selon lesquelles elle sollicite la réformation de la décision entreprise et la condamnation de M. X... à lui payer les sommes de 98.801,63 ç à titre de dommages
et intérêts augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation et de 4000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Vu les conclusions déposées le 6 décembre 2005 par M. X... par lesquelles, formant appel incident, il demande l'infirmation du jugement à titre principal, son infirmation quant au montant des dommages et intérêts alloués à titre subsidiaire et, en toute hypothèse, la condamnation de l'UBN à lui payer la somme de 4500 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
SUR CE, LA COUR,
Considérant que si M. X... ne conteste pas avoir manqué à ses obligations en ne dénonçant pas à la caution l'hypothèque judiciaire provisoire sollicitée par ses soins du juge de l'exécution, il conteste avoir reçu instruction pour une somme supérieure à celle figurant dans sa requête (490.000 F) et soutient que le décompte présenté par cette société à la cour a été établi pour les besoins de la cause ; qu'il fait par ailleurs observer qu'il n'était pas maître de la décision du juge de l'exécution qui a souverainement apprécié le montant de la créance à garantir et n'aurait sans doute pas accordé plus, ayant déjà réduit ce montant par rapport à la demande ; qu'il soutient enfin que le préjudice de UBN résulte tout autant de sa carence à exercer l'action paulienne à l'encontre du jugement du 22 février 1999 condamnant M. Alain Y... au paiement envers son cousin, M. Pascal Y... au motif que ce jugement et l'inscription qui en découle ont leur source dans une fraude et que rien n'indique que le recouvrement ne peut avoir lieu, l'UBN ayant un titre exécutoire ;
Mais considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que M. X... avait bien reçu formellement de la part d'UBN instruction de solliciter du juge de l'exécution une autorisation d'inscription
hypothécaire pour la somme de 635. 392, 85 francs (93.929,76 ç) et non de 490.000 ;
Qu'en effet, outre que le montant figurait en toutes lettres dans le courrier qui lui a été adressé le 6 janvier 1997, comme étant le montant, à cette date, de la créance, il convient de relever que la requête rédigée et déposée par M. X... ne mentionne pas ce montant et laisse en blanc deux des lignes de sa demande, à savoir les "intérêts de retard au taux de 16,206 %" sur les échéances impayées (2o) et le "montant des intérêts de retard" sur le capital restant dû au même taux (4o) alors que ces deux chefs d'intérêts couraient depuis le 16 juin 1994 ; qu'il ne saurait utilement soutenir que le juge de l'exécution n'aurait pas accordé un montant supérieur au motif qu'il avait déjà réduit celui demandé alors que, tout au contraire, une simple addition montre que ce magistrat, en accordant 480.000 francs, a été au delà de la demande qui n'arrivait qu'à 471.957,25 francs ;
Considérant en outre que M. X... ne saurait utilement soutenir que l'UBN aurait dû engager une action paulienne pour permettre l'invalidation de l'inscription hypothécaire primant la sienne alors que rien n'indique, au delà d'un simple rapprochement de date, de fraude organisée pour faire échec aux droits de l'UBN ;
Considérant en conséquence que M. X..., en s'abstenant de dénoncer l'inscription d'hypothèque provisoire à la caution, ce qui a entraîné sa caducité, et en omettant de solliciter une inscription pour le montant de la créance de l'UBN, a fait perdre à son client la chance de pouvoir être colloqué en rang utile et pour un montant supérieur dans la procédure d'ordre, lui faisant perdre la possibilité d'obtenir le bénéfice de sa créance arrêtée par le jugement du tribunal de commerce précité à la somme de 110.301,23 ç et, en tout état de cause, de la somme de 93.929,76 ç, montant de l'inscription
pouvant seul être retenu, augmentée des intérêts au taux légal échus entre l'adjudication et la procédure d'ordre ;
Considérant dès lors que le jugement, approuvé en ce qu'il a retenu la responsabilité de M. X..., dans la perte de chance subie par la S.A.R.L. UBN, sera réformé en ce qu'il n'a pas retenu le montant de l'inscription hypothécaire définitive qui aurait dû être obtenu sans cette faute ; qu'il sera donc fait droit intégralement à la demande de la S.A.R.L. UBN ;
Qu'il convient de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile dans la mesure prévue au dispositif ;
PAR CES MOTIFS
Réforme le jugement du 15 décembre 2004 rendu par le tribunal de grande instance de Paris ;
Condamne M. X... à payer à la S.A.R.L. UBN la somme de 98.801,63 ç à titre de dommages et intérêts ;
Dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du jugement ;
Condamne M. X... à payer à la S.A.R.L. UBN la somme de 2000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Le condamne aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT