RÉPUBLIQUE FRANOEAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
22ème Chambre C
ARRET DU 28 septembre 2006
(no , 5 pages)Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/01781Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 novembre 2004 par le conseil de prud'hommes de Paris (1 Ch) - section encadrement - RG no 03/16083 APPELANTE Madame Patricia X... ... 94170 LE PERREUX SUR MARNE comparant e personne, assistée de M. Joùl Y... (Délégué syndical ouvrier dûment mandaté)INTIMEE SA EDITIONS J'AI LU 84 quai Panhard et Levassor 75647 PARIS CEDEX 13 représentée par Me Martine MONTAGNON, avocat au barreau de PARIS, toque : R 153 COMPOSITION DE L COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 juin 2006, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Françoise CHANDELON-LEJUSTE, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Gérard PANCRAZI, président
Mme Françoise CHANDELON-LEJUSTE, conseiller
Mme Véronique NADAL, conseiller désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président pour compléter la Chambre
Greffier : Mme Francine ROBIN, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par M. Gérard PANCRAZI, président
- signé par M. Gérard PANCRAZI, président et par Mme Francine ROBIN, greffier présent lors du prononcé.
Vu l'appel régulièrement interjeté par Patricia X... à l'encontre d'un jugement prononcé le 17 novembre 2004 par le Conseil de prud'hommes de PARIS, section encadrement, chambre 1, qui a statué sur le litige qui l'oppose à la société EDITIONS J'AI LU sur ses demandes relatives au licenciement dont elle a été l'objet,
Vu le jugement déféré qui a débouté Patricia X...,
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles, Patricia X..., appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré et sollicite que la société EDITIONS J'AI LU soit condamnée à lui payer : - 81.116,88 ç pour licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse, - 6.083,81 ç au titre de complément d'indemnité de licenciement, - 1.500 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;La société EDITIONS J'AI LU, intimée conclut à la confirmation du jugement.CELA ETANT EXPOSE Par contrat à durée indéterminée du 16 avril 1984, Patricia X... a été engagée par la société EDITIONS J'AI LU, filiale du groupe Flammarion en qualité de comptable catégorie D, coefficient 230.Son dernier salaire s'élevait à 3.379,87 ç.La convention collective applicable est celle de l'édition.Le 13 mai 2002, Patricia X... était avisée du transfert de son poste au sein de la direction Flammarion SA et invitée à signer un nouveau
contrat de travail dans les termes de l'article L321-1-2 du Code du travail.Le 17 juin 2002 elle s'y refusait.Le 1er août son employeur engageait une procédure de licenciement économique qu'il annulait en septembre suivant en raison de la grossesse de la salariée.Le 21 octobre 2002, Patricia X... l'avisait de son interruption de grossesse et l'informait de son retour au travail le 24 suivant.Le 28 octobre 2002 la société EDITIONS J'AI LU engageait une nouvelle procédure de licenciement, avec entretien préalable le 4 novembre et notification le 13 suivant.Elle recevait une indemnité de 62.527,55 ç, supérieure de 10.139,70 ç à celle prévue par les dispositions de la convention collective.Le 11 décembre 2003 elle saisissait le conseil des prud'hommes des demandes en paiement rappelées ci dessus.SUR CESur la nullité du licenciementConsidérant que Patricia X... soutient que son licenciement ne pouvait intervenir pendant la période de protection fixée par l'article L122-25-2 du Code du travail, calculant le délai de quatre semaines prévu par ce texte à compter du terme de l'arrêt de travail succédant à l'interruption de grossesse ;Considérant cependant qu'un tel raisonnement ne saurait prospérer ; Que le texte précité étend la protection des femmes enceintes pendant quatre semaines à compter :- de la fin de la grossesse ou- du terme des suspensions du contrat prévues par l'article L122-26 du même code ;Considérant que l'article L.122-26 ne prévoit que des suspensions voisines de l'accouchement et liées aux naissances ;Qu'il ne concerne en aucune façon un arrêt maladie succédant à une interruption de grossesse ;Que celle ci étant intervenue le 1er octobre, la protection de Patricia X... se terminait à la fin de la quatrième semaine suivante ;Que dans ces conditions, le licenciement intervenu le 13 novembre 2003 ne peut être critiqué de ce chef ;Sur la violation de l'article L.122-12 du Code du travailConsidérant que Patricia X... reproche à son
employeur de ne pas lui avoir imposé sur ce fondement son transfert de contrat, oubliant qu'une telle position ne lui permettait pas de refuser les nouvelles conventions proposées sauf à se priver, par une démission, de l'indemnité conséquente perçue dans le cadre du licenciement économique opéré ;Considérant en tout état de cause que l'article L122-12 n'est applicable qu'en cas de transfert d'une entité économique autonome appelée à conserver son identité ;Qu'en l'espèce, l'opération réalisée ne répond pas à cette définition ;Que tous les services comptabilité, finance et informatique des 23 filiales de la société Flammarion transférés à la maison mère pour leur permettre de se consacrer exclusivement à leur métier, notamment en développement leur clientèle, n'avaient ni autonomie ni objectif propre se bornant à participer à celui de l'édition ;Qu'aucun d'eux et notamment de celui de la société EDITIONS J'AI LU n'était appelé à conserver son identité au sein de la maison mère au sein de laquelle les outils de travail n'étaient même pas transférés ;Qu'au surplus en l'absence de licenciement du personnel ainsi muté par chaque filiale pour centraliser ces opérations de service une restructuration était inéluctable ainsi qu'un redéploiement des salariés ;Considérant en conséquence que cet argument ne saurait davantage prospérer ;Sur l'absence de cause du licenciementConsidérant que Patricia X... soutient que la première procédure ayant été annulée, l'employeur ne pouvait en déclencher une autre sans lui permettre à nouveau d'opter pour le transfert de son contrat dans les termes de l'article L321-1-2 du Code du travail ;Considérant que toute nullité a pour effet de remettre les choses dans leur état précédant l'acte qui en est affecté ; qu'elle n'a aucune conséquence sur les actes "environnants" ;Considérant en conséquence que le refus opposé par Patricia X... de signer un nouveau contrat n'est pas devenu caduc du seul fait que l'employeur ne puisse plus en tirer de
conséquence du fait de la protection de la salariée enceinte ; qu'il sera en outre observé que celle ci n'est jamais revenue sur son refus initial, dont elle confirmait au contraire les termes à la veille de la seconde procédure ;Que dans ces conditions Patricia X... ne saurait tirer aucune conséquence juridique du fait que l'employeur n'a pas renouvelé sa proposition de modification de contrat de travail en octobre 2002 ;Sur l'obligation de reclassementConsidérant que si l'obligation de reclassement persiste pour l'employeur même si, comme en l'espèce, le poste refusé par la salariée est le même que celui précédemment occupé au niveau de la classification et de la spécialité, la modification du contrat ne résultant, d'après les pièces produites, que de l'emplacement géographique du lieu de travail, passant du 7ème au 6ème arrondissement de Paris et de la présence, au sein de la société Flammarion d'un quatorzième mois contre treize dans la société EDITIONS J'AI LU, tous "inconvénients" compensés par l'octroi d'une prime de 1.500 ç, il convient de constater que l'employeur l'a mise en oeuvre au-delà même de ses obligations légales ;Considérant en effet qu'il a été proposé à l'appelante, le 4 novembre 2002, un poste de comptable au sein de la direction financière de la société Flammarion qui venait de se libérer ; qu'y était joint un descriptif complet outre les conditions financières ;Considérant encore que l'employeur a estimé devoir mettre en place des mesures d'accompagnement auxquelles il n'était pas tenu dès lors que seuls huit salariés se voyaient proposer une modification de leur contrat, aucun licenciement "spontané" n'étant envisagé ;Considérant qu'un espace mobilité emploi était ainsi créé visant à regrouper toutes les offres adaptées aux salariés et de les aider à préparer leur candidature ;Que le dispositif s'accompagnait d'aides financières à l'adaptation et à la reconversion ainsi qu'à la création d'entreprise individuelle ;Considérant que par courrier du
20 novembre 2002, Patricia X... indiquait adhérer au PARE anticipé mais refuser l'aide de "BPI", dont les locaux accueillaient l'espace mobilité emploi, sollicitant en contrepartie "l'offre ordinateur" envisagée par l'employeur à qui elle adressait un devis de 1.513,43 ç correspondant au matériel choisi chez la société SPVG manifestement destiné à un futur exercice indépendant de sa profession, thèse d'ailleurs confortée par l'absence de production de tout justificatif de chômage ou de recherche d'emploi ;Qu'il résulte de ces éléments que non seulement l'employeur a mis en oeuvre son obligation de reclassement mais que son effort a abouti à un reclassement de la salariée concernée, dont la société EDITIONS J'AI LU a assuré les premières dépenses d'équipement ;Sur le complément d'indemnité de licenciementConsidérant que la nouvelle convention de l'édition a été signée le 14 janvier 2000 comportait, en matière d'indemnité de licenciement, des dispositions transitoires aux termes desquelles les cadres engagés avant le 14 janvier 2002 avaient vocation à recevoir la plus forte des indemnités résultant :- du calcul des droits selon la nouvelle convention, - du montant de l'indemnité calculée sur la base de la convention du 6 janvier 1994 tenant compte de l'ancienneté acquise à la date de l'entrée en vigueur de la nouvelle convention ;Considérant que pour réclamer un complément de 6.083,81 ç, par rapport à l'indemnité conventionnelle (inférieure de plus de 10.000 ç à l'indemnité perçue...), Patricia X... ajoute au calcul arrêté au 14 janvier 2000 selon les modalités prévues par l'ancienne convention collective l'ancienneté acquise de cette date au jour de son départ de l'entreprise ;Considérant qu'il s'agit d'un calcul purement fantaisiste ne répondant pas aux prescriptions de la convention adoptée que les partenaires sociaux ont estimé devoir accompagner d'une note explicative donnant des exemples de calcul délibérément ignorés de
l'appelante ;Que l'employeur produit aux débats les modalités qu'il a adoptées permettant de constater que Patricia X... pouvait prétendre recevoir 52.387,95 ç par application de l'ancienne convention et 47.487,14 ç selon la nouvelle ;Que la première somme a été retenue par l'employeur, majorée comme indiqué précédemment ;Qu'il a dès lors parfaitement respecté les dispositions en vigueur ;Considérant qu'il convient dans ces conditions de confirmer le Jugement déféré en toutes ses dispositions et de débouter Patricia X..., succombant en son appel de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;Sur le prononcé d'une amende civileConsidérant que l'accès en justice et le principe du double degré de juridiction sont des droits fondamentaux dont il convient d'assurer la protection ;Considérant cependant que de tels droits sont susceptibles d'abus lorsqu'ils sont manifestement utilisés à des fins détournées de leurs objectifs ;Que tel est le cas en l'espèce, l'employeur injustement assigné ayant été au-delà de ses obligations légales dans un souci de protection de sa salariée comme l'avait déjà clairement souligné la juridiction prud'homale ;Qu'un tel agissement doit être sanctionné par la condamnation de Patricia X... au paiement d'une amende civile de 1.000 ç ; PAR CES MOTIFS LA COUR Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;Y ajoutant ;Condamne Patricia X... au paiement d'une amende civile de 1.000 ç (mille euros) ainsi qu'aux dépens.LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :