Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
1ère Chambre- Section A
ARRET DU 25 SEPTEMBRE 2007
(no, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 10351
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Septembre 2003- Tribunal de Grande Instance de PARIS- (1ère chambre, section sociale)
RG no 2003 / 05187
APPELANTS
ASSOCIATION POUR LA PRATIQUE DU CULTE ORTHODOXE ROUMAIN- APCOR- représentée par Monsieur Titus AA...
9 bis, rue Jean de Beauvais
75005 PARIS
Monsieur Titus AA...
...
75012 PARIS
représentés par la SCP BERNABE- CHARDIN- CHEVILLER, avoué à la Cour
assistés de Me Laurent DELVOLVÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : C 542
INTIMEE
ASSOCIATION POUR LA PRATIQUE DU CULTE ORTHODOXE ROUMAIN- APCOR- représentée par agissant poursuites et diligences en la personne de son président et des membres de son bureau
9 bis, rue Jean de Beauvais
75005 PARIS
représentée par Me Frédéric BURET, avoué à la Cour
assistée de Me Etienne KALCK, avocat au barreau de PARIS, toque C 832
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 juin 2007, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du nouveau code de procédure civile devant la Cour composée de :
M. GRELLIER, président
Mme HORBETTE, conseiller
Mme MOUILLARD, conseiller
qui ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme RIGNAULT
Ministère public :
représenté lors des débats par M. PION, substitut général, qui a fait connaître son avis
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par M. GRELLIER, président et par R. TALABOULMA, greffier
******
L'association pour la pratique du culte orthodoxe roumain (ci- après l'APCOR) est une association cultuelle fondée en 1948 qui, aux termes de l'article 1er de ses statuts, regroupe des roumains et des personnes d'origine roumaine de religion orthodoxe établis en France, plus particulièrement en région parisienne, et s'est fixé pour but de " donner son appui à l'Eglise Orthodoxe Roumaine à Paris, afin qu'elle puisse procéder à sa mission auprès de ses fidèles ".
Elle est soumise à l'autorité canonique de l'Evêché Orthodoxe Roumain d'Europe Occidentale, lui- même rattaché, de 1958 à 1998, à l'Eglise Orthodoxe Russe hors frontières.
Courant 2002, des dissensions ont surgi entre les membres de l'association, certains notamment prônant le rattachement à l'Eglise Orthodoxe Russe hors frontières, cependant que d'autres préféraient le rattachement à l'Eglise orthodoxe américaine.
C'est dans ces conditions que, par assignation à jour fixe délivrée le 9 avril 2003, l'APCOR, agissant en la personne de MM Georges A..., Matei B..., Septimiu Bosca, Jean- Paul Besse, Cecerone Ionitoiu et Eugène Ratiu, membres du bureau, a demandé au tribunal de grande instance de Paris d'ordonner à M. Barbulesco, ancien président du bureau, de lui remettre, sous astreinte, les clefs des locaux du siège social de l'association et de l'église, les documents bancaires et comptables, les documents administratifs (registres, procès- verbaux, listes des membres etc), les tampons et archives, ainsi que l'inventaire des biens.
M. Barbulesco est intervenu à l'instance, à la fois à titre personnel, mais également en qualité de représentant de l'APCOR, contestant la qualité à agir des membres du bureau au nom de cette association.
Par jugement du 30 septembre 2003, le tribunal de grande instance de Paris a :
- rejeté l'exception de nullité opposée à l'association demanderesse,
- déclaré l'APCOR, représentée par M. Barbulesco, irrecevable en son intervention volontaire,
- déclaré l'APCOR, agissant en la personne de MM. Georges A..., Matei B..., Septimiu Bosca, Jean- Paul Besse, Cecerone Ionitoiu et Eugène Ratiu, recevable et bien fondée en sa demande,
- ordonné à M. Barbulesco de remettre à ladite association :
. les clefs des locaux de son siège et celles de l'église,
. les documents bancaires et comptables,
. les documents administratifs, à savoir les registres, procès- verbaux et listes des membres,
. les tampons et archives,
. l'inventaire des biens de l'association,
dans le délai de huit jours à compter de la signification du jugement et passé ce délai sous astreinte de 20 euros par jour de retard, pendant deux mois après quoi il sera à nouveau fait droit,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné M. Barbulesco à payer à l'association demanderesse une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
LA COUR :
Vu l'appel de ce jugement interjeté par M. Barbulesco, tant en son nom personnel qu'au nom de l'APCOR, le 10 octobre 2003 ;
Vu les conclusions déposées le 9 juin 2006 par lesquelles l'APCOR, représentée par M. Barbulesco, et ce dernier, demandent à la cour d'infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau, de :
- juger nulle la décision prise le 13 mars 2002 par le Père C...de dissoudre le conseil de l'APCOR pour non- respect des dispositions des statuts et du règlement intérieur de l'association,
- juger nulle la décision prise le 16 septembre 2002 par le Père C...de dissoudre l'APCOR pour non respect des dispositions des statuts et du règlement intérieur et en raison du défaut de rattachement du Père C...à quelque hiérarchie ecclésiastique orthodoxe qui soit,
- juger nulle l'assemblée générale extraordinaire du 27 octobre 2002 pour non- respect des dispositions des statuts et du règlement intérieur de l'APCOR,
- juger que l'assemblée générale du 14 janvier 2001 est seule en vigueur,
- juger que M. Barbulesco avait pouvoir pour représenter l'APCOR en sa qualité de président du bureau et qu'il est fondé à conserver les objets et pièces appartenant à l'association,
- condamner l'intimée à payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions déposées le 9 janvier 2007 par lesquelles l'APCOR, représentée par son président et des membres de son bureau, poursuit la confirmation du jugement et demande à la cour :
- y ajoutant, de préciser que tant M. Barbulesco que toute personne les détenant de son chef devra remettre, sous astreinte, les clefs des locaux, les documents bancaires, comptables et administratifs, les tampons et archives et l'inventaire des biens,
- de déclarer irrecevables les demandes en annulation des décisions des 13 mars, 16 septembre et 27 octobre 2002, présentées pour la première fois en appel par M. Barbulesco,
- subsidiairement si la cour n'entendait pas déclarer ces demandes irrecevables, de recevoir sa demande, compte tenu des faits nouveaux, et de prononcer la caducité de l'assemblée générale de l'APCOR du 25 janvier 2004 convoquée par M. Barbulesco sans qualité, à titre subsidiaire, de prononcer sa nullité,
- de condamner M. Barbulesco à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu l'acte de décès de Georges A..., annexé aux conclusions susvisées ;
SUR CE :
- sur la procédure
Considérant qu'aux termes de l'article 7 des statuts, les organes de direction de l'association sont :
- un Conseil composé de 17 membres, élu pour trois ans par l'assemblée générale ordinaire,
- un bureau composé de 5 personnes, élu par le Conseil parmi ses membres,
- un Président élu par le Conseil parmi ses membres ;
Que le même article précise que les questions administratives sont de la compétence exclusive du bureau du Conseil, cependant que l'article 9 stipule que le bureau ou les personnes déléguées par celui- ci représentent l'association en justice, ainsi que devant les pouvoirs publics ;
Considérant qu'il suit de là que, serait- il encore président du bureau, M. Barbulesco, qui n'invoque aucune délégation de celui- ci, n'a pas qualité pour représenter l'association en justice ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont déclaré irrecevable son intervention au nom de l'APCOR ;
Qu'il en va de même, de l'intervention en cause d'appel du président de l'APCOR, visée par l'intimée dans ses écritures ;
Qu'en revanche, M. Barbulesco à titre personnel, étant assigné en restitution des éléments attachés à sa fonction de président du bureau, justifie d'un intérêt à discuter la recevabilité de l'action engagée et, partant, la validité des actes desquels les demandeurs prétendent tirer leurs pouvoirs en qualité de nouveaux membres du bureau ;
Considérant, sur la recevabilité de ses demandes d'annulation des décisions des 13 mars, 16 septembre et 27 octobre 2002, présentées pour la première fois en cause d'appel, qu'il résulte des termes mêmes du jugement que, s'il n'en avait pas expressément demandé l'annulation, M. Barbulesco en avait précisément contesté la validité ; que, de toute façon, ces demandes, en ce qu'elles visent à faire écarter les prétentions adverses, sont recevables en application de l'article 564 du nouveau code de procédure civile ;
- sur le fond
Considérant que MM B..., D..., E..., F...et G...fondent leur qualité à agir au nom de l'APCOR sur leur qualité de membres du bureau de l'association, désigné par le conseil paroissial, lui- même élu par l'assemblée générale extraordinaire du 27 octobre 2002 ; que cette assemblée générale extraordinaire faisait suite à la décision prise le 16 septembre 2002 par le père Vasile C..., au nom de l'Evêché Orthodoxe Roumain de Paris, de dissoudre, au vu du rapport motivé du prêtre Constantin H...et en application de l'article 44 du règlement intérieur de l'association, l'ancien conseil paroissial élu le 14 janvier 2001 et de désigner une commission chargée de diriger les affaires paroissiales jusqu'à l'élection d'un nouveau conseil ;
Considérant qu'il résulte du règlement intérieur de l'association, pris en application de l'article 12 des statuts, que :
- " du point de vue canonique, l'association fonctionne dans l'ordre ecclésiastique assuré par l'Evêché Orthodoxe Roumain d'Europe occidentale " (article 2),
- le conseil paroissial est l'organe administratif de l'association et l'organe exécutif de l'assemblée générale et travaille sous la présidence du prêtre supérieur (article 33) ;
- le conseil peut être dissous lorsqu'il n'accomplit pas les devoirs assumés (négligence dans l'administration des biens et des intérêts de l'Eglise ecclésiastique) ; en ce cas, " l'Evêché, suite au rapport motivé du prêtre supérieur, dissout le conseil en nommant une commission de cinq personnes, qui dirigera les affaires paroissiales jusqu'à l'élection d'un nouveau conseil ; le mandat de la commission sera limité jusqu'à la prochaine assemblée générale. " (article 44) ;
Considérant qu'il est constant que l'Evêché Orthodoxe Roumain d'Europe Occidentale ne dispose pas d'un évêque titulaire et qu'il est représenté en France, au plan administratif et juridique, par l'association cultuelle " L'Eparchie Orthodoxe Roumaine de l'Europe Occidentale " (ci- après l'AEOR), ayant son siège à la même adresse que l'APCOR, et dont le président assurait habituellement la fonction de Vicaire représentant le Primat de l'Eglise de rattachement ;
Considérant que la décision de dissolution du conseil, en date du 16 septembre 2002, a été prise par le père C..., agissant " en tant qu'Intérimaire Episcopal et Vicaire de l'Evêché nommé par l'archevêque I..., le 2 février 2002 et respectivement le 5 mars 2002, avec la mission d'assurer le bon fonctionnement de la vie ecclésiastique de la communauté roumaine pendant la vacance du siège épiscopal de notre évêché " ;
Que l'archevêque I..., archevêque de Cannes et d'Europe et de l'Eglise Russe hors- frontières, avait en effet, par un courrier du 5 mars 2002 se référant à une promesse de " renouer les liens canoniques " délivrée par lui le 2 février 2002 en tant que " représentant du Métropolite Vitaly et habitant en France ", nommé le père C...dans le poste de " Vicaire de l'Evêché Orthodoxe Roumain de Paris ", après avoir pris acte de son élection en tant que président de l'AEOR, intervenue suivant procès- verbal d'assemblée générale extraordinaire de cette association du 3 mars 2002, lequel avait également décidé le rattachement canonique de la paroisse à l'Eglise Orthodoxe Russe hors- frontières présidée par le Métropolite Vitaly ;
Que toutefois, il résulte d'un communiqué de " l'Eglise Orthodoxe Russe à l'Etranger ", revêtu de la signature du Métropolite Vitaly notamment, que le Synode des Evêques de l'Eglise Orthodoxe Russe hors- frontières du 15 / 28 novembre 2003 a désavoué la " réception individuelle par l'archevêque I...", en son sein, de l'Eparchie Orthodoxe Roumaine de l'Europe Occidentale, comme étant irrégulière faute d'avoir été décidée par le Concile des Evêques, et partant, " anti- canonique et sans valeur, ainsi que les diverses mesures qui lui sont liées " ; que, déjà précédemment, le Métropolite Vitaly, dans une lettre adressée à la Communauté orthodoxe roumaine de Paris le 7 avril 2002, avait pris acte de ce que " l'Evêché Orthodoxe Roumain libre " avait été " placé sous l'omophore du très respecté Archevêque J..., avec pour vicaire le très révérend père Petre K..., que nous connaissons et respectons depuis de longues années " et confirmé qu'il n'envisageait pas de revenir sur la position prise par le Concile de l'Eglise Orthodoxe Russe hors frontière, sous sa présidence, le 22 décembre 1998, de lui " rendre... sa liberté canonique " ;
Qu'au demeurant, il résulte du procès- verbal d'une assemblée générale ordinaire de l'APCOR, tenue le 10 mars 2002 en présence de M. Barbulesco notamment, qu'à cette occasion, le Vicaire en titre était le père Petre K..., désigné à cette fonction par le père J..., archevêque de Détroit et de l'Eglise Orthodoxe roumaine des Etats- Unis d'Amérique et du Canada ;
Qu'il résulte de ces éléments que le père C...ne pouvait légitimement se prévaloir de la qualité de Vicaire de l'Evêché, obtenue irrégulièrement, et que les décisions qu'il a prises en cette qualité, que ce soit celle du 3 mars 2002 ou celle du 16 septembre 2002, doivent être annulées, étant relevé surabondamment qu'il est constant que lors de ces actes, le prêtre auteur du rapport, Constantin H..., n'avait pas la qualité de prêtre supérieur exigée par l'article 44 du règlement intérieur de l'association ;
Considérant qu'il s'évince encore de cette constatation que les actes accomplis par la commission désignée par le père C..., notamment l'assemblée générale extraordinaire réunie à son initiative le 27 octobre 2002 en vue d'élire un nouveau conseil ainsi que les membres du bureau, demandeurs à la présente instance, ne peuvent être validés, étant observé au demeurant que M. Barbulesco soutient, sans être contredit, que le quorum exigé par l'article 21 du règlement intérieur n'était alors pas atteint ;
Considérant qu'il suit de là que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a accueilli la demande formée par l'APCOR, représentée par MM Cazacu, Bosca, Besse, Ionitoiu et Ratiu ;
Et considérant que M. Barbulesco a dû exposer des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge ; qu'il y a lieu de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en ce qu'il déclare irrecevable l'intervention de M. Barbulesco au nom de l'APCOR ;
L'infirme pour le surplus,
Et statuant à nouveau,
Ecarte l'exception d'irrecevabilité des demandes d'annulation formées par M. Barbulesco ;
Annule les décisions du 13 mars et du 16 septembre 2002 par lesquelles le père C...a dissous le bureau de l'APCOR ainsi que la délibération de l'assemblée générale extraordinaire du 27 octobre 2002 par laquelle l'APCOR a élu un nouveau conseil et un nouveau bureau ;
Déclare irrecevables les demandes formées par MM B..., D..., E..., F...et G..., en qualité de membres du bureau représentant l'APCOR ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne MM B..., D..., E..., F...et G...à payer à M. Barbulesco la somme de 4 000 euros et rejette leur demande ;
Condamne MM B..., D..., E..., F...et G...aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile ;
LE GREFFIER LE PRESIDENT