Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
2ème Chambre-Section A
ARRET DU 24 OCTOBRE 2007
(no, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 05 / 21436
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Septembre 2005-Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 02 / 18593
APPELANTE
S. A. S. ROYAL ESBLY
agissant poursuites et diligences en la personne de son président
63 rue de paris
93310 LE PRE SAINT-GERVAIS
représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour
assistée de Me Chantal ASTRUC, avocat au barreau de Paris, toque : P 335
INTIMEE
S. A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES IMMOBILIERES
5 rue Soyer
92200 NEUILLY SUR SEINE
représentée par Me Michel BLIN, avoué à la Cour
assistée de Me Marie-Claude REGNIER, avocat au barreau de Paris, toque C 299
INTIMEE et APPELANTE
S. N. C. NICE-BROC
prise en la personne de ses représentants légaux
59 boulevard Haussmann
75008 PARIS
représentée par la SCP RIBAUT, avoués à la Cour
assistée de Me Pierre LACOEUILHE, avocat au barreau de Paris, toque : L 0272
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue, rapport a été fait conformément à l'article 31 du décret du 28 décembre 2005 modifiant l'article 785 du nouveau code de procédure civile, le 18 septembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, Président
Madame Dominique REYGNER, Conseiller
Madame Isabelle LACABARATS, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Gisèle COCHET
ARRET :
-contradictoire
-rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
-signé par Mme Catherine DESLAUGIERS-WLACHE, président et par Mme Gisèle COCHET, greffier auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire
Le 21 février 2002 une promesse de vente a été consentie par Sté Nice Broc à Sté Royal Esbly, qui se réservait d'acquérir, portant sur un immeuble à usage de bureaux ateliers et entrepôts au Broc (06) pour 5. 850. 600 €, promesse consentie jusqu'au 28 juin 2002.
La promesse était assortie de diverses conditions suspensives relatives notamment à l'urbanisme, au revenu locatif minimum, au permis de construire purgé de recours et à la prise en charge de la TVA,
Une indemnité d'immobilisation de 292. 530 € était convenue et garantie par CEGI.
La vente ne s'est pas réalisée au terme convenu ni ultérieurement, la promettante s'étant prévalue de la caducité de la promesse ;
La cour statue sur l'appel relevé par Royal Esbly d'un jugement du 19 septembre 2005 du tribunal de grande instance de Paris qui a :
-dit caduque la promesse de vente du 21 février 2002 prorogée au 9 octobre 2002
-condamné Royal Esbly à verser à SNC Nice Broc la somme de 292. 530 € au titre de l'indemnité d'immobilisation avec intérêts légaux à compter du 2 décembre 2002 et celle de 8. 000 € pour frais irrépétibles
-constaté que la caution de la Sté CEGI est éteinte le 1er août 2002
-rejeté la demande de CEGI au titre des frais irrépétibles
-dit irrecevable l'intervention volontaire de la Sté Wurth et associés
-rejeté le surplus des demandes
-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Royal Esbly soutient que la caducité n'est pas de son fait, que la promettante a tardé dans ses informations sur l'état de l'immeuble alors que la banque prêteuse demandait des informations sur la solidité de celui-ci, que l'expertise entraînait un report du délai de réalisation, que Nice Broc n'a pas fourni un état locatif à jour ni la justification de la SHON vendue qui ne résulte d'aucun permis, que Nice Broc a eu un comportement déloyal en lui imposant de nouvelles conditions avant de se prévaloir de la caducité.
Elle soutient qu'elle avait la capacité financière de réaliser l'opération
Elle réitère sa demande de réalisation forcée de la vente
Elle demande :
-d'infirmer le jugement
-d'ordonner la signature de l'acte de vente dans les deux mois de l'arrêt après communication des documents d'information sur tous les points dénoncés (état locatif, couverture des sinistres..)
-dire qu'à défaut de signature l'arrêt vaudra vente
-de désigner un expert sur l'état de l'immeuble et le coût des travaux
-subsidiairement au cas de confirmation sur la caducité, de rejeter la demande d'indemnité d'immobilisation et de condamner Nice Broc à payer 318. 000 € pour frais et 585. 060 € indemnité égale au double de l'indemnité d'immobilisation avec intérêts et capitalisation et 10. 000 € pour frais irrépétibles.
Nice Broc, par dernières conclusions du 13 août 2007 demande de :
-confirmer sur la caducité et le paiement de l'indemnité d'immobilisation
-y ajouter la capitalisation des intérêts
-de confirmer sur l'article 700 en ajoutant 12. 000 € pour les frais irrépétibles d'appel
-infirmer en ce qu'il a rejeté sa demande contre CEGI et condamner celle-ci au paiement de la somme de 592. 530 € avec intérêts et 3. 000 € pour frais irrépéibles
Elle soutient qu'en réalité Royal Esbly n'a jamais levé l'option, ni été en possession des fonds suffisants, qu'elle est déchue du droit de réaliser la promesse, que tous les documents utiles ont été remis, que l'appelante a fait son affaire personnelle des conséquences des sinistres et ne pouvait revendiquer une réduction de prix non prévue ; que le désordre de fondation est minime ; que l'appelante entretient un débat inopérant ;
La CEGI par dernières conclusions du 31 mai 2007 demande :
-de constater la caducité de la promesse
-de constater que les conditions suspensives n'étaient pas remplies au 28 juin 2002
-de débouter Nice Broc de ses demandes.
Elle soutient que sa garantie n'a pas été prorogée et que faute de levée d'option la vente ne se s'est pas réalisée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Considérant que l'acte du 21 février 2002 stipulait que le bénéficiaire acceptait la faculté d'acquérir, si bon lui semblait et que la réalisation aurait lieu par la signature de l'acte authentique constatant le caractère définitif de la vente, accompagnée du paiement du prix et des frais par chèque de banque ;
Considérant que Royal Esbly soutient que le défaut de réalisation de la vente est dû au comportement du vendeur qui a tardé de manière anormale puis s'est refusé à communiquer loyalement les documents et informations qu'elle était en droit d'attendre eu égard à l'importance de son investissement ;
Considérant qu'il est constant que la promesse qui devait initialement être réalisée le 28 juin 2002 a été prorogée au 23 juillet 2002 ; qu'à cette date Me Godet notaire associé à la requête de Nice Broc a dressé un procès-verbal de difficultés contenant la liste des documents que M. AA... pour Royal Esbly estimait nécessaires à la régularisation de la vente ; que Nice Broc a déclaré que tous les documents indispensables avaient été fournis ; qu'Enténial, prêteur de fonds, avait en outre fait savoir qu'elle ne pourrait être présente ;
Considérant que cet acte mentionnait que M. AA... déclarait s'être organisé avec divers partenaires pour que l'intégralité du prix et des frais soient disponibles et produisait une lettre d'Investimur du 1er juillet 2002 précisant son accord de financement conjointement avec la SAARLB et deux chèques de banque pour un montant de 648. 341 € ainsi qu'une lettre de la compagnie européenne de garanties immobilières du 22 juillet 2002 déclarant ne pas s'opposer à une prorogation de la validité de son acte de cautionnement ;
Considérant que le 9 octobre 2002, un nouveau procès-verbal a été dressé par Me Godet à la requête de Nice-Broc qui avait fait sommer Royal Esbly le 3 octobre 2002 pour régulariser l'acte de vente ou y renoncer ; que Royal Esbly a déclaré qu'elle avait l'intention de se porter acquéreur, qu'un prêt de 6. 500. 000 € lui avait été accordé par SAARLB, à débloquer sous trois semaines et que le dernier état locatif n'avait pas été fourni ; que M. C...pour Nice Broc a répondu que Royal Esbly avait reconnu avoir eu à disposition tout le dossier locatif actualisé dont il conservait les originaux jusqu'à la signature de la vente ;
Considérant que si le délai initial a été reporté au 23 juillet puis au 9 octobre, il est constant qu'à cette date encore Royal Esbly, si elle manifestait encore sa volonté d'acquérir, n'était toujours pas en possession du financement, en tous cas du financement intégral ;
Considérant que si la promesse stipulait, que si à la date convenue pour la réalisation les divers documents nécessaires à la régularisation de l'acte n'étaient pas encore portés à la connaissance du notaire chargé de la rédaction le délai de réalisation serait automatiquement prorogé aux huit jours calendaires qui suivront la date à laquelle le notaire recevra le dernière des pièces indispensables, la défaillance prétendue de la promettante à fournir des pièces prévues à la promesse n'est pas établie ;
Considérant que dès le 11 juin 2002 Me Godet avait adressé à Me D..., notamment, le certificat de conformité et le projet d'acte de transfert de siège social, le 11 juillet 2002 une copie des conditions intégrales de la police dommages-ouvrages Albingla et l'attestation du paiement des cotisations, ajoutant ne pas être tenu de plus amples justificatifs ; que Me D...demandait de nouvelles pièces par lettre du 3 octobre 2002 qu'il y était répondu le 7 octobre suivant que le dossier locatif a été actualisé et que les originaux des baux n'étaient exigibles qu'au jour de la signature de l'acte authentique ;
Considérant que par lettre du 8 novembre 2002 Nice Bric dénonçait la caducité de la promesse précisant qu'elle était toujours disposée à vendre mais à des conditions nouvelles ; que sans réaction à cette lettre Nice Broc écrivait le 26 novembre à Royal Esbly qu'elle considérait avoir recouvré sa liberté et réclamait l'indemnité d'immobilisation de 292. 530 € convenue ;
Considérant que la condition suspensive relative à l'urbanisme n'a pas défailli dès lors qu'il n'est pas justifié de l ‘ existence de servitudes limitant les droits sur l'immeuble ;
Considérant il est vrai que l'appelante entend tirer la preuve de l'existence de vices dans un mauvais état de la construction ; qu'à cet égard la promesse contient la reconnaissance du promettant de l'existence de 3 sinistres survenus au cours du mois de janvier 2002 ayant donné lieu à des déclarations aux assureurs ; que le bénéficiaire a déclaré avoir connaissance de cette situation et en faire son affaire personnelle ; qu'aucune déloyauté ne peut être reprochée à Nice Broc ; que la suspicion d'un phénomène de tassement de l'immeuble a été écartée par le rapport d'expertise du 10 novembre 2004 à la requête de Nice Broc ; qu'il n'a été justifié d'aucun vice susceptible de rendre l'immeuble impropre à sa destination ;
Considérant par ailleurs que Nice Broc a parfaitement justifié de la SHON de 28. 065 m ² telle que résultant du permis modificatif du 10 décembre 2000, que la conformité a été délivrée sans réserves, que la facture TVA et l'état locatif, particulièrement les originaux des baux, étaient tenus à la disposition de la bénéficiaire dès lors que celle-ci manifestait son intention d'acquérir en étant porteuse de la somme suffisante pour paiement du prix et des frais ;
Considérant qu'il s'avère que sous couvert de non obtention de pièces qui n'étaient pas exigibles ou avaient déjà été fournies Royal Esbly a masqué sa propre carence à réunir le financement nécessaire à son acquisition ;
Considérant alors que le jugement mérite confirmation en ce qu'il a dit caduque la promesse de vente signée le 21 février 2002 et prorogée au 9 octobre 2002 et condamné Royal Esbly à verser à Nice Broc la somme de 292. 530 € au titre de l'indemnité d'immobilisation avec intérêts légaux à compter du 2 décembre 2002, date de réception de la mise en demeure par lettre recommandée, la demande de réalisation de la vente ne pouvant, partant, prospérer, non plus que les demandes complémentaires de communication de pièces et d'expertise ; que la cour y ajoutera le bénéfice de la capitalisation des intérêts selon l'article 1154 du code civil ;
Considérant que pour assurer le paiement de la dite indemnité, Royal Esbly avait obtenu la caution de CEGI laquelle pouvait être mise en oeuvre jusqu'au 31 juillet 2002 ; que faute d'accord express de prorogation de la part de la caution, son bénéfice s'est éteint le 1er août 2002 ; que la demande de Nice Broc de condamnation solidaire de Royal Esbly et CEGI sera rejetée ;
Considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
Rejette l'appel,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne Nice Broc au paiement des intérêts capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Déboute Nice Broc de ses demandes contre CEGI,
Condamne Royal Esbly aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile
Le greffier Le président