Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
15ème Chambre - Section B
ARRET DU 14 DECEMBRE 2007
(no 07/ , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/01808
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Janvier 2007 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG no 05/12629
APPELANTE
S.C.I. LABADIE CRETEIL prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège Chemin de Lamouret
64300 ORTHEZ
représentée par Me François TEYTAUD, avoué à la Cour
assistée de Me Lydia LECLAIR, avocat au barreau de BAYONNE, de la SCP JUNQUA LECLAIR
INTIMÉES
S.A. FINAMUR venant aux droits de la société SLIBAIL IMMOBILIER prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 1/3 Rue du Passeur de Boulogne
92861 ISSY LES MOULINEAUX CEDEX 9
représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Françoise BELLEMARE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 92
S.A. FRUCTICOMI, prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 115 rue Montmartre
75002 PARIS
représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Françoise BELLEMARE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 92
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 Novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Patrick HENRY-BONNIOT, Président
Madame Marie-Christine DEGRANDI, Conseiller
Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du nouveau Code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Valérie Z...
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
- signé par M. Patrick HENRY-BONNIOT, président, et par Melle Sandrine KERVAREC, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par acte authentique du 30 mai 2000, les sociétés SLIBAIL IMMOBILIER et FRUCTICOMI ont conclu avec la SCI LABADIE CRETEIL un crédit-bail immobilier portant sur un bâtiment à usage de bureaux, sis à Créteil, 2 Allée des Saules. Le contrat de crédit-bail était assorti d'une promesse de vente de l'immeuble au preneur et le bail consenti pour une durée de dix ans à compter du 1er juin 2000. La SCI LABADIE CRETEIL a sous-loué l'immeuble à la SA CHRONOTIQUE, à compter de cette même date.
Suite à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire dont a fait l'objet celle-ci le 28 avril 2003, la SCI LABADIE CRETEIL a rapidement rencontré des difficultés pour assumer le paiement des loyers dus aux sociétés SLIBAIL et FRUCTICOMI, lesquelles après l'envoi, le 21 mai 2003, d'une mise en demeure restée vaine, lui ont délivré un commandement de payer, le 18 juillet 2003, visant la clause résolutoire inscrite dans le contrat de crédit-bail immobilier. Les parties ont alors tenté de se rapprocher et la SCI LABADIE CONSEIL a obtenu de la Banque FORTIS un accord de principe du financement nécessaire à la levée d'option anticipée. Le 1er décembre 2004, la société SLIBAIL a fait savoir par télécopie que son comité ne s'était pas prononcé favorablement au rachat du bâtiment pour le prix de 900.000 €. Le 20 décembre 2004, les sociétés SLIBAIL et FRUCTICOMI ont signifié à la SCI LABADIE CONSEIL un second commandement de payer visant la clause résolutoire.
Tout en proposant de nouvelles offres de prix, cette dernière a saisi le juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Pau aux fins d'obtenir la suspension des effets du commandement de payer et faire constater que les bailleresses avaient de fait renoncé au bénéfice de la clause résolutoire. Par décision du 22 juin 2005, confirmée par arrêt du 2 mai 2006, le juge de l'exécution s'est déclaré incompétent pour trancher le litige au motif que la demande nécessitait d'interpréter le contrat liant les parties.
En cet état, la SCI LABADIE CONSEIL a saisi le tribunal de grande instance de Paris pour qu'il déclare les commandements de payer des 18 juillet 2003 et 20 décembre 2004 nuls et qu'il constate en état de cause la renonciation des bailleresses au bénéfice de la clause résolutoire.
Par jugement du 10 janvier 2007, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Paris a :
- débouté la SCI LABADIE CONSEIL du moyen tiré de la nullité du commandement du 20 décembre 2004 ;
- dit que les défenderesses n'ont pas renoncé au bénéfice de la clause résolutoire contenue dans le contrat de crédit-bail ;
- dit que la clause résolutoire a produit ses effets à compter du 25 janvier 2005 ;
- ordonné l'expulsion de la SCI LABADIE CONSEIL et de tous occupants de son chef de l'immeuble ;
- dit que tous meubles et objets garnissant les lieux pourront être séquestrés en garantie du paiement de la créance des demanderesses ;
- condamné la SCI LABADIE CONSEIL à payer aux sociétés SLIBAIL et NATEXIS LEASE - FRUCTOMI, la somme de 430.820,76 € au titre de la créance principale arrêtée au 15 février 2005, incluant l'indemnité d'occupation jusqu'au 31 mars 2005 ;
- dit que la SCI LABADIE CRETEIL devra supporter à compter du 21 janvier 2005, jusqu'à libération définitive des lieux, une indemnité mensuelle d'occupation de 16.737,27 € TTC ;
- condamné la SCI LABADIE CONSEIL à payer mensuellement cette somme à compter du 1er avril 2005, ainsi que 1.500 € sur le fondement de l'article 700 nouveau Code de procédure civile.
La SCI LABADIE CONSEIL a interjeté appel de cette décision par déclaration déposée
au greffe le 31 janvier 2007.
Dans ses dernières conclusions au sens de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, déposées le 27 septembre 2007, elle demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré ;
- débouter les sociétés SLIBAIL IMMOBILIER et NATEXIS LEASE de l'intégralité de leurs demandes ;
- dire les commandements de payer délivrés les 18 juillet 2003 et 20 décembre 2004 nuls et de nul effet ;
- en tout état de cause, constater que la résiliation anticipée prévue par la clause résolutoire figurant au contrat du 30 mai 2000 n'a pas joué ;
- constater également que les sociétés SLIBAIL IMMOBILIER et NATEXIS LEASE-FRUCTICOMI ont renoncé tacitement au bénéfice de la résiliation anticipée ;
- condamné celles-ci solidairement à payer à la SCI LABADIE CRETEIL 1.500 € en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Dans leurs dernières écritures au sens de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, déposées le 10 juillet 2007, la SA FINAMUR venant aux droits de la SCI SLIBAIL IMMOBILIER, et la SA FRUCTICOMI demandent la confirmation de la décision déférée.
A titre subsidiaire, elles sollicitent la résiliation judiciaire du contrat de crédit-bail immobilier à compter du 25 janvier 2005 et la confirmation des dispositions du jugement entrepris relatives à l'expulsion de la SCI LABADIE CRETEIL, au paiement des arriérés arrêtés au 15 février 2005 et à l'indemnité d'occupation. Elles réclament 4.000 € pour procédure abusive sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
CELA ETANT EXPOSE,
LA COUR,
Sur la procédure
Considérant qu'il convient de constater l'intervention volontaire aux débats de la société FINAMUR, venant aux droits de la société SLIBAIL IMMOBILIER, ce qui n'est pas discuté ; qu'il y a lieu également de relever l'absence de changement de dénomination sociale de la société FRUCTICOMI, telle qu'assignée en première instance ;
Sur la nullité des commandements de payer du 18 juillet 2003 et 20 décembre 2004
Considérant que dans le cadre de la première instance le tribunal a limité son examen au seul commandement de payer du 20 décembre 2004, après avoir constaté que les sociétés SLIBAIL et FRUCTICOMI n'entendaient pas se prévaloir du premier commandement de payer délivré le 18 juillet 2003 à la SCI LABADIE CRETEIL ;
Considérant que celle-ci soulevant en cause d'appel la nullité de l'un et l'autre de ces deux commandements de payer, il y a lieu pour la cour de statuer sur ces deux actes ;
Considérant que la SCI LABADIE CRETEIL soutient que les commandements de payer sont nuls en l'absence de consentement de tous les indivisaires, la société SLIBAIL qui les a fait délivrer tant en son nom qu'au nom de la société FRUCTICOMI n'ayant pas été dûment mandatée pour ce faire par sa co-indivisaire ;
Considérant que les sociétés SLIBAIL et FRUCTICOMI ne contestent pas que, en vertu de l'article 710 du contrat de crédit-bail du 30 mai 2000, le mandat donné pour toute la durée du contrat de crédit-bail à la société SLIBAIL par sa co-indivisaire à l'effet d'effectuer toutes opérations courantes de gestion et d'administration ne recouvrait pas la faculté pour la mandataire de délivrer congé sans avoir recueilli l'accord préalable de la société FRUCTICOMI ;
Considérant que dans chacun des commandements de payer il est mentionné que la SLIBAIL IMMOBILIER intervient "en sa qualité de chef de file et dûment mandatée à cet effet" ;
Considérant que les intimées versent aux débats la télécopie d'un courrier adressé le 8 octobre 2003 par la société FRUCTICOMI à la société SLIBAIL ainsi libellé : "dossier SLIBAIL-FRUCTICOMI/SCI LABADIE CRETEIL".... "Nous faisons suite à notre communication téléphonique de ce jour. Nous vous confirmons notre accord pour la signification d'un nouveau commandement de payer visant la clause résolutoire." ;
Considérant que ce courrier, daté, signé et rédigé en termes clairs est dépourvu d'ambiguïté sur la volonté de la société FRUCTICOMI de voir délivrer congé à la SCI LABADIE CRETEIL ;
Considérant que le second commandement du 20 décembre 2004 a été précédé d'un courrier adressé le 2 novembre 2004, rédigé comme suit : "Nous vous remercions de bien vouloir faire signifier un nouveau commandement de payer visant la clause résolutoire puis d'engager judiciairement la résiliation du contrat de crédit-bail immobilier de la société LABADIE CRETEIL" ;
Considérant que comme relevé à bon droit par les premiers juges, sauf à engager une procédure de faux en écriture, ces télécopies suffisent à établir l'existence du mandat donné à la société SLIBAIL par la société FRUCTICOMI ;
Considérant également que le tribunal a retenu par d'exacts motifs que ni le contrat de crédit-bail, ni l'article 1985 du Code civil n'imposent une forme quelconque pour la validité du mandat qui peut même être donné verbalement ;
Considérant que le moyen de nullité des commandements des 18 juillet 2003 et 20 décembre 2004 ne peut prospérer ;
Sur la clause résolutoire
Considérant que le jugement déféré déclare au terme d'une motivation pertinente expressément adoptée par la cour que les sociétés SLIBAIL IMMOBILIÈRE FRUCTICOMI n'ont pas renoncé au bénéfice de la clause résolutoire contenue dans le contrat de crédit-bail, laquelle reprise intégralement dans le commandement de payer du 20 décembre 2004 a produit ses effets à compter du 21 janvier 2005 ;
Considérant qu'il convient d'ajouter que la clause résolutoire était déjà spécifiquement mentionnée dans le premier commandement de payer du 18 juillet 2003 et que sont inopérantes pour la solution du litige les offres d'acquisition du bien objet du crédit - bail invoquées par la société appelante ;
Considérant que les dispositions du jugement ordonnant l'expulsion de la SCI LABADIE CRETEIL et fixant le montant de l'indemnité d'occupation due par l'intéressée doivent être confirmées, ainsi que celle relative à la créance principale arrêtée au 15 février 2005 ;
Considérant que bien que dépourvue de fondement, la procédure d'appel engagée par la SCI LABADIE CRETEIL ne revêt pas de caractère abusif ; que la demande de dommages-intérêts formée par les sociétés FINAMUR et FRUCTICOMI sera rejetée ;
Considérant que, succombant, la SCI LABADIE CRETEIL supportera les frais non répétibles qu'elle a exposés devant la cour ; qu'elle versera la somme globale de 1.500 € aux intimées et réglera les entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS
Constate l'intervention volontaire aux débats de la société FINAMUR venant aux droits de la société SLIBAIL IMMOBILIER ;
Confirme le jugement déféré ;
Ajoutant,
Rejette la demande de dommages-intérêts formée par les sociétés FINAMUR et FRUCTICOMI pour résistance abusive ;
Déboute la SCI LABADIE CRETEIL de sa demandes au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
La condamne à verser aux sociétés intimées la somme globale de 1.500 € en vertu de ce texte, ainsi qu'aux dépens qui seront recouvrés par les avoués de la cause selon les modalités prévues par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT