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05/02/2008 | FRANCE | N°4

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0138, 05 février 2008, 4


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B

ARRÊT DU 05 Février 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/07863 (DF)

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Mai 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG no 04/08719

APPELANTE

Mademoiselle Soizic X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

comparante en personne, assistée de Me André JOULIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1135

INTIMÉE

SCP GASTALDI,

VIE, POLLACI (ETUDE VH 15)

...

75016 PARIS

représentée par M. POLLACI , Co-gérant, et par Me Jérôme B..., avocat au barreau de PARIS, toque : P38...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

22ème Chambre B

ARRÊT DU 05 Février 2008

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 05/07863 (DF)

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Mai 2005 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG no 04/08719

APPELANTE

Mademoiselle Soizic X...

...

92100 BOULOGNE BILLANCOURT

comparante en personne, assistée de Me André JOULIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1135

INTIMÉE

SCP GASTALDI, VIE, POLLACI (ETUDE VH 15)

...

75016 PARIS

représentée par M. POLLACI , Co-gérant, et par Me Jérôme B..., avocat au barreau de PARIS, toque : P381

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Décembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller

Monsieur Daniel FONTANAUD, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffière : Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, présidente et par Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, greffière présente lors du prononcé.

Exposé des faits et de la procédure

Mlle Soizic X..., engagée par la société GASTALDI VIE POLLACI NOTAIRES ASSOCIES à compter du 1er juillet 1987, en qualité de Clerc hors rang au dernier salaire mensuel brut de 7154,67 euros, a été déclarée inapte à "à tout poste dans l'entreprise" par le médecin du travail le 16 février 2004, puis licenciée par lettre du 2 mars 2004 énonçant le motif suivant :

"...Nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement en raison de votre inaptitude à tout poste au sein de l'Office. En effet, le 16 février 2004, dans le cadre d'une visite de reprise, la médecine du travail vous a déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise.

De plus, la médecine du travail a précisé qu'en raison de votre état de santé, et en application de l' article R.241-51-1 du code du travail, une seule visite était nécessaire pour déclarer votre inaptitude à tout poste dans l'entreprise.

Le 27 février 2004, préalablement à votre entretien préalable, les délégués du personnel ont été consultés sur votre reclassement éventuel au sein de l'Office.

Les délégués du personnel ont convenu qu'en raison de votre inaptitude à tout poste de travail dans l'entreprise constatée par la médecine du travail, votre reclassement est manifestement et matériellement impossible au sein de l'Office..."

Par jugement du 26 mai 2005, le Conseil de prud'hommes de PARIS a condamné la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI au paiement de 3.302,15 euros (trois mille trois cent deux euros et quinze centimes) à titre d'indemnité prévue à l'article 12-2 de la Convention Collective du Notariat et 5.000,00 euros (cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ainsi que d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile a dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté Mlle X... de ses autres demandes.

Mlle X... en a relevé appel.

Il est expressément fait référence au jugement pour l'exposé des faits et de la procédure ainsi que, pour les prétentions et moyens des parties, aux conclusions visées et soutenues oralement et contradictoirement le 18 décembre 2007.

* *

*

Discussion

Sur la rupture

Argumentation de Mlle X...

Mlle X... soutient qu'elle a été victime d'un harcèlement moral et fait valoir que les responsables de l'Étude GASTALDI ont sciemment dégradé ses conditions de travail, ce qui a eu de graves répercussions sur sa santé. Elle fait notamment valoir qu'un rythme de travail impossible à tenir lui a été imposé, que des tâches nouvelles lui étaient confiées et que la plupart n'entraient pas dans sa qualification, telle que répondre aux appels téléphoniques. Mlle X... précise qu'elle a alerté son employeur à de nombreuses reprises, oralement, puis par écrit, de l'impossibilité d'assumer une telle charge de travail alors que ses assistantes n'étaient pas remplacées. Elle indique que le fait de lui confier la charge de rédiger une revue de presse à partir de certaines documentations juridiques n'entrait pas dans ses attributions et constituait un obstacle supplémentaire au traitement de dossiers lourds et urgents. De plus, elle fait état de reproches injustifiés et de tracasseries inutiles de la part de son employeur. Elle estime que la dégradation de ses conditions de travail a été la cause de sa maladie et estime que c'est à tort que le Conseil de Prud'hommes a rejeté le caractère professionnel de son inaptitude. Elle demande à la Cour, d'une part, de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et, d'autre part, que le licenciement avait pour fondement une inaptitude professionnelle causée par la surcharge de travail et le harcèlement moral qu'elle a subis. En conséquence, elle estime avoir droit, d'une part, à des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et, d'autre part, au versement de l'indemnité spéciale de licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle. Elle soutient que son employeur reste lui devoir la somme de 18 665,59 € à titre de solde d'indemnité légale de licenciement.

Elle soutient subsidiairement que la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI ne lui a pas versé l'intégralité des indemnités de licenciement pour inaptitude non professionnelle qui lui était dues compte tenu de la base salariale mensuelle à retenir de 7 154,67 euros et sollicite la confirmation de la condamnation de la SCP GASTALDI VIE, POLLACI à ce titre.

De plus, Mlle X... ayant été déclarée inapte, elle expose que son employeur avait l'obligation de rechercher des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise en application de l'article L.122-24-4 du Code du travail. Elle rappelle que l'employeur s'est simplement contenté d'une consultation des Représentants du Personnel sur l'éventualité d'un reclassement et soutient qu'en l'espèce, il était possible de la reclasser dans la mesure où la cause de son inaptitude était le surmenage en raison de la charge de travail trop importante et du harcèlement mené par son employeur.

Enfin, Mlle X... indique que l'indemnité compensatrice de préavis lui est due.

Argumentation de la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI

La SCP GASTALDI, VIE, POLLACI conteste que Mlle X... a été licenciée pour une inaptitude d'origine professionnelle. Par ailleurs, la SCP soutient que Mlle X... n'a jamais fait l'objet d'une surcharge de travail, pas plus que d'un harcèlement moral. La SCP GASTALDI, VIE, POLLACI fait valoir que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse en raison de la déclaration d'inaptitude de la salariée et du fait que l'employeur a respecté son obligation de tentative de reclassement.

Position de la Cour

Il résulte des pièces versées aux débats que Mlle X... a été arrêtée pour maladie à compter du 13 janvier 2004 puis a été déclarée inapte le 16 février 2004. La fiche du médecin du travail mentionne : "Inapte à tout poste dans l'entreprise-procédure d'urgence pour danger immédiat selon l'article R.241-51 du code du travail". Par ailleurs, un certificat médical établi le 3 novembre 2003 par le Docteur C... au sujet de Mlle X... mentionne : "Depuis le mois de juillet 2003, j'ai constaté chez la patiente une asthénie constante et croissante, manifestement en rapport avec un état de stress".

Il est par ailleurs constant que des tensions sont apparues au sein de l'Etude dans laquelle travaillait Mlle X... à compter de l'arrivée de deux nouveaux notaires associés, notamment entre Maître POLLACI, arrivé en août 2000 et une partie du personnel et que de nombreux salariés de l'ancienne équipe ont démissionné ou ont été licenciés et que Maître GASTALDI a quitté l'étude.

Cette situation a entraîné un malaise réel au sein de l'étude qui est attesté par les témoignages. De plus, Mlle X... a pu être confrontée à une charge de travail inhabituelle compte tenu du nombre de successions à traiter à la suite de la canicule de l'été 2003 et des décès intervenus.

Cependant, la salariée ne formule pas de demande spécifique au titre du harcèlement et il n'est pas établi que l'inaptitude de la salariée résulte d'agissements susceptibles d'être qualifiés de harcèlement moral de la part de l'employeur ou d'une maladie d'origine professionnelle.

Par ailleurs, l'inaptitude de la salariée à tout emploi dans l'entreprise a été régulièrement constatée. Cette inaptitude ne laissait place à aucune alternative au regard d'une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, et en l'espèce, il n'est pas contesté que l'employeur a consulté les représentants du personnel sur l'éventualité d'un reclassement et a, en l'espèce rempli son obligation de tentative de reclassement.

C'est à juste titre que les premiers juges ont décidé que le licenciement de Mlle X... est fondé sur une cause réelle et sérieuse et ont débouté la salariée de ses demandes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'au titre de l'indemnité spéciale de licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et de l'indemnité compensatrice de préavis, celui-ci étant impossible à effectuer.

Par ailleurs, il y a lieu de confirmer la condamnation de la SCP GASTALDI VIE, POLLACI au paiement de la somme de 3302,02 euros en application de l'article 12-2 de la convention collective du notariat en raison du défaut de déclaration du licenciement auprès de la commission paritaire nationale de l'emploi.

En ce qui concerne l' indemnité de licenciement pour inaptitude non professionnelle qui est due à la salariée, les éléments versés aux débats permettent de retenir la base salariale mensuelle de 7 154,67 euros et il y a lieu en conséquence, compte tenu du temps de présence de la salariée dans l'entreprise, de condamner la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI à payer la somme de 3249,67 euros à titre de solde d'indemnité légale de licenciement.

Sur la demande au titre du préjudice moral

Argumentation de Mlle X...

Mlle X... soutient que son employeur a rompu brutalement le contrat de travail après 17 ans de travail au sein de l'étude et fait valoir qu'il a manifesté une précipitation fautive en procédant au licenciement car l'avis d'inaptitude date du 16 février 2004 et elle était convoquée trois jour plus tard à un entretien préalable au licenciement. De plus, l'intéressée fait valoir que l'employeur ne lui a adressé aucun des documents afférents à la rupture du contrat (Attestation ASSEDIC, certificat de travail, solde de tout compte et derniers bulletin de salaire). La salariée demande une somme correspondant à trois mois de salaire à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral.

Argumentation de la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI

La SCP GASTALDI, VIE, POLLACI estime que cette demande n'est pas fondée et soutient que Mlle X... n'a rencontré aucune difficulté pour obtenir les documents de fin de contrat et n'a subi aucun préjudice à cet égard.

Position de la Cour

Il ne peut être reproché à l'employeur une précipitation fautive pour avoir procédé au licenciement de la salariée par lettre du 2 mars 2004 suite à l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise en date du 16 février 2004. Cependant, il est établi par l'ensemble des éléments versés aux débats que l'employeur, malgré les demandes de la salariée, a attendu plusieurs mois pour adresser à l'intéressée les documents afférents à la rupture du contrat (Attestation ASSEDIC, certificat de travail, solde de tout compte et derniers bulletin de salaire). Mlle X... a d'ailleurs eu recours à une sommation par huissier le 10 mai 2004 pour obtenir des bulletins de salaire remontant à janvier 2004. Ainsi, alors que la salariée a été licenciée le 2 mars 2004, l'employeur n'a accepté de remplir l'attestation ASSEDIC que le 26 juillet 2004, soit cinq mois après le licenciement. De plus, cette attestation, qui contenait des termes ambigus, a dans un premier temps, entraîné un refus de prise en charge par les ASSEDIC. Il résulte de ces agissements fautifs un préjudice dont les premiers juges ont fait une exacte évaluation en condamnant l'employeur à payer à la salariée une somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts.

Sur les autres demandes (au titre des congés payés, de la prime de 13ème mois, de remboursement de tickets restaurants)

Position de la Cour

Au titre du 13ème mois, compte tenu de la somme de 2356,94 euros versée à ce titre, l'employeur reste devoir à l'intéressée la somme de 1117,11 euros en application de l'article 14 de la Convention collective du Notariat.

En ce qui concerne la demande de remboursement de la somme de 147,40 euros retenue sur les salaires de Mlle X... au titre de tickets restaurant, aucun élément ne permet d'établir que la salariée n'a pas perçu les tickets restaurant correspondants. Mlle X... sera donc déboutée de ce chef de demande.

Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande qu'il soit fait application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de Mlle X....

PAR CES MOTIFS

REFORME le jugement, mais seulement en ce qu'il a débouté Mlle X... de ses demandes au titre du solde du treizième mois et d'indemnité légale de licenciement,

CONDAMNE la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI à payer à Mlle X... la somme de:

- 1 117,11 euros à titre de solde de treizième mois

- 3 249,67 euros à titre de solde d'indemnité légale de licenciement.

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI à payer à Mlle X... la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

DEBOUTE les parties du surplus des demandes,

LAISSE les dépens à la charge de la SCP GASTALDI, VIE, POLLACI.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0138
Numéro d'arrêt : 4
Date de la décision : 05/02/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 26 mai 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-02-05;4 ?
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