RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
18ème Chambre B
ARRÊT DU 19 Juin 2008
(no , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 07/00399/MCL
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Février 2007 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG no 20501631/EV
APPELANTE
SA FOUASSIN ENTREPRISES
2, rue Nicéphore Niepce
91420 MORANGIS
représentée par Me Franck SINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : D 903
INTIMÉE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES (CPAM 78)
92, avenue de Paris
78014 VERSAILLES CEDEX
représentée par M. PY LEBRUN en vertu d'un pouvoir spécial
Monsieur le Directeur Régional des Affaires Sanitaires et Sociales - Région d'Ile-de-France (DRASSIF)
58-62, rue de Mouzaia
75935 PARIS CEDEX 19
Régulièrement avisé - non représenté.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2008, en audience publique, les parties représentées ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine LAGRANGE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bertrand FAURE, Président
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseiller
Madame Marie-Christine LAGRANGE, Conseiller
Greffier : Madame Claire AUBIN-PANDELLÉ, lors des débats
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Monsieur Bertrand FAURE, Président et par Madame Claire AUBIN- PANDELLÉ, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 22 mai 2001, Monsieur Eric Y..., salarié de la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES en qualité d'électricien, a établi une déclaration de maladie professionnelle à laquelle était annexée un certificat médical initial faisant état d'une lombosciatique droite L5/S1 sur hernie discale.
Cette maladie a été admise comme maladie professionnelle par décision du 25 octobre 2001 de la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines.
La S.A. FOUASSIN ENTREPRISES a contesté cette décision devant la Commission de recours amiable qui, dans sa séance du 15 septembre 2005, a rejeté le recours.
Par jugement en date du 13 février 2007, le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry a débouté la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES de toutes ses demandes et déclaré opposable à celle-ci la décision d'admettre au titre du livre IV du code de la sécurité sociale la maladie professionnelle déclarée le 22 mai 2001 par Monsieur Eric Y....
Par déclaration reçue au Greffe de la Cour le 23 mars 2007, la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions déposées au Greffe le 19 mars 2008 et soutenues oralement à l'audience par son Conseil, la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES demande à la Cour, infirmant le jugement entrepris, de déclarer que la décision de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de la maladie déclarée par Monsieur Y... le 22 mai 2001 lui est inopposable et ordonner à la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines de faire procéder au retrait de l'ensemble des sommes afférentes à cette maladie de ses comptes employeur et de faire rectifier les tarifications subséquentes.
La société appelante soutient que, le certificat médical initial ne lui ayant pas été transmis avec la déclaration de maladie professionnelle par la Caisse primaire, elle a considéré que seul le tableau no97 était visé et que la condition relative aux travaux n'était pas remplie, que la Caisse a cependant requalifié la maladie sans l'en informer et sur avis de son médecin conseil dont l'employeur n'a jamais eu connaissance. Elle ajoute qu'elle n'a pu disposer du délai suffisant pour consulter le dossier puisqu'il était inférieur à huit jours. Elle en conclut que la Caisse n'a pas satisfait à son obligation d'information et de respect du principe du contradictoire.
En outre, la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES fait valoir que son salarié ne remplissait pas les conditions d'exposition ni de délai de prise en charge prévues au tableau no97 comme le démontre l'enquête de la Caisse qui aurait donc dû saisir le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles pour requalifier la maladie, ce qu'elle n'a pas fait en violation des alinés 4 et 5 de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale.
Dans ses dernières conclusions déposées au Greffe le 25 avril 2008 et soutenues oralement à l'audience par son représentant, la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris.
La Caisse soutient qu'elle a informé la société appelante de la procédure d'instruction et de la date de clôture de celle-ci en l'invitant dans un délai suffisant à venir consulter les pièces du dossier, que la société admet elle-même dans ses écritures qu'elle n'a pas jugé utile de consulter le dossier. Concernant le changement de qualification, la Caisse fait valoir que la société ne pouvait ignorer qu'une simple indication du salarié relative au tableau n'engage pas l'organisme social qui peut la requalifier sans avoir à consulter le C2RMP.
SUR CE
Considérant que, le 25 mai 2001, Monsieur Eric Y..., salarié de la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES en qualité d'électricien, a établi une déclaration de maladie professionnelle ainsi libellée "Lombosciatique, hernie discale avec atteinte radiculaire L5-S1 chez un salarié du BTP- Electricien, tel décrit T 97" ; que, par lettre du 5 juin 2001, la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines a communiqué à l'employeur cette déclaration en précisant que les pièces jointes étaient :" copies de la déclaration de maladie professionnelle, Courrier à l'attention du médecin du travail" ; qu'il n'est donc pas contestable que le certificat médical initial n'était pas joint en communication ;
Considérant que, le 25 octobre 2001, la Caisse primaire informait Monsieur Eric Y... que le caractère professionnel de la maladie déclarée le 22 mai 2001 était admis au titre du tableau no98 pour lombosciatique ;
Considérant que la Caisse primaire n'a pas communiqué le certificat initial attestant des lésions dont la prise en charge était demandée au titre du tableau no97 ; que si différents courriers ont été adressés à l'employeur par la Caisse primaire le 22 août 2001 pour informer du délai complémentaire prévu à l'article R 441-10 du code de la sécurité sociale et le 10 octobre 2001 pour informer de la fin de l'instruction du dossier , pour autant aucune de ces deux lettres ne fait état dudit certificat médical initial ;
Considérant que le défaut de communication du certificat médical initial constitue un manquement à l'obligation d'information de la Caisse primaire à l'égard de l'employeur ;
Considérant, par ailleurs, que le tableau no97 vise les affections chroniques du rachis lombaire provoquées par des vibrations de moyennes et basses fréquences transmises au corps entier alors que le tableau no98 vise les travaux de manutention manuelle habituelle de charges lourdes ; que les listes de ces travaux sont strictement limitatives ; qu'il résulte de l'enquête effectuée par l'inspecteur de la Caisse primaire que Monsieur Eric Y... n'a pas été exposé aux risques du tableau no97 ; que la Caisse a alors substitué le tableau no98 au tableau no97 ;
Considérant que la Caisse primaire n'a pas informé l'employeur de cette requalification de la maladie professionnelle ; que, même si l'organisme social n'est pas tenu par le tableau de maladie professionnelle visé par la déclaration, pour autant il lui appartient d'informer l'employeur d'un changement de qualification de la maladie ; que la Caisse ne peut utilement soutenir, comme l'a également retenu le tribunal, que la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES ne pouvait ignorer que l'organisme social était libre d'opérer ce changement pour justifier le défaut d'information ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L 461-1 alinéas 3 et 5 du code de la sécurité sociale, si la condition tenant à la liste limitative des travaux visés n'est pas remplie, la Caisse reconnaît l'origine de la maladie professionnelle après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que la Caisse primaire qui avait ainsi constaté que la liste des travaux n'était pas remplie au titre du tableau no97 devait saisir un tel Comité qui aurait alors pu procéder, de façon contradictoire, à la requalification ; que la Caisse primaire a ainsi cherché, sans aucune information de l'employeur, à "faire tenir" la maladie professionnelle dans le cadre du tableau no98 après simple avis de son médecin conseil ;
Considérant, au vu de ces différents éléments, que la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines a d'une part manqué à son devoir d'information à l'égard de l'employeur et a commis une erreur de procédure en ne saisissant pas un Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles dès lors que l'enquête qu'elle avait diligentée démontrait que la condition tenant à la liste limitative des travaux du tableau no97 de la maladie professionnelle déclarée n'était pas remplie ;
Considérant, pour ces motifs, que la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle de Monsieur Eric Y... sera déclarée inopposable à la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES ; que le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que l'exécution du présent arrêt emporte nécessairement l'obligation pour la Caisse primaire du retrait de l'ensemble des sommes figurant sur le compte employeur de la société et de la rectification des tarifications subséquentes ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
DIT qu'est inopposable à la S.A. FOUASSIN ENTREPRISES, avec toutes conséquences de droit, la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Monsieur Eric Y... par la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines.
Le Greffier, Le Président,