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04/07/2008 | FRANCE | N°07/07404

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0164, 04 juillet 2008, 07/07404


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 4 JUILLET 2008

(no , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/07404

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 06/05394

APPELANTES

La société EUROSTAR U.K LIMITED

société de droit britannique

agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal,

dont

le siège social est Eurostar House

Waterloo Station

LONDRES SE1 8SE

ROYAUME UNI

représentée par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avo...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 4 JUILLET 2008

(no , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/07404

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 06/05394

APPELANTES

La société EUROSTAR U.K LIMITED

société de droit britannique

agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est Eurostar House

Waterloo Station

LONDRES SE1 8SE

ROYAUME UNI

représentée par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour,

assistée de Maître Géraldine Y..., et de Maître Marie-Hélène Z..., avocats au Barreau de Paris, R73.

La SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGE S.N.C.B.

SA de droit public prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est ... Porte de Hall

1060 BRUXELLES

BELGIQUE

représentée par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour,

assistée de Maître Géraldine Y..., et de Maître Marie-Hélène Z..., avocats au Barreau de Paris, R73.

La SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS S.N.C.F.

Etablissement public à caractère industriel et commercial,

prise en la personne de son Président Directeur Général

ayant son siège social ...

75014 PARIS

représentée par la SCP BAUFUME - GALLAND - VIGNES, avoués à la Cour,

assistée de Maître Géraldine Y..., et de Maître Marie-Hélène Z..., avocats au Barreau de Paris, R73.

INTIMEE

La société EUROSTAR DIAMOND TRADERS

SA de droit belge,

dont le siège social est 2018 ANTWERPEN 1 Hoveniersstraat 53, 8th floor

MAILBOX 79

BELGIQUE

représentée par la SCP MONIN - d'AURIAC de BRONS, avoués à la Cour,

assistée de Maître Etienne A..., avocat aux Barreaux de Bruxelles et Paris,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 mai 2008, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur GIRARDET, président,

Madame REGNIEZ , conseiller,

Monsieur MARCUS, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : L. MALTERRE-PAYARD

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur GIRARDET, président et par Madame L. B... PAYARD, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (ci-après la SNCF), la SOCIÉTÉ NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGES (ci-après la SNCB) et la société de droit anglais EUROSTAR sont propriétaire de diverses marques EUROSTAR françaises, communautaires et internationales, dont une marque française EUROSTAR no 1 439 630 enregistrée auprès de l'INPI le 24 juin 1988 et la marque internationale EUROSTAR no 532 771 enregistrée auprès de l'OMPI le 19 décembre 1988. Elles utilisent depuis 1991 les marques EUROSTAR aux fins de désigner les services de liaison ferroviaire entre Paris, Londres et Bruxelles, de les promouvoir et de les commercialiser, notamment par le réseau Internet.

La société de droit belge EUROSTAR DIAMOND C... (ci-après la société EDT) a pour activité la sélection, la taille et la commercialisation de diamants et bijoux français. Elle a procédé au dépôt de plusieurs marques communautaires et internationales , à la fin de l'année 2001, comprenant le mot "EUROSTAR". Suite aux procédures d'opposition à l'encontre de ces dernières marques intentées par elle même, les parties se sont rapprochées et ont conclu un contrat de coexistence signé e 14 septembre 2004.

Ayant découvert que la société EDT avait enregistré le nom de domaine www.eurostar.eu, les sociétés SNCF, SNCB et EUROSTAR ont assigné cette dernière en violation de l'accord signé le 14 septembre 2004 ainsi qu'en contrefaçon des marques EUROSTAR.

* *

*

Par un jugement contradictoire rendu le 15 novembre 2006, la troisième chambre, première section, du tribunal de grande instance de Paris a :

- débouté les sociétés SNCF, SNCB et EUROSTAR de l'ensemble de leurs demandes,

- débouté la société EDT de sa demande de résiliation de la convention de coexistence passée entre les parties le 14 septembre 2004, de sa demande de provision d'un euro à valoir sur l'indemnisation du préjudice qui lui aurait été causé par l'inexécution fautive par ses co-contractants de la convention, ainsi que de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et atteinte à l'honneur et à la réputation,

- condamné in solidum les sociétés SNCF, SNCB et EUROSTAR aux dépens ainsi qu'à verser à la société EDT la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du (nouveau) Code de procédure civile.

*

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 15 avril 2008, les sociétés SNCF, SNCB et EUROSTAR, appelantes, demandent à la cour, pour l'essentiel, de :

- infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté la société EDT de ses demandes reconventionnelles,

- constater que l'enregistrement du nom de domaine www.eurostar.eu par la société EDT constitue une violation des stipulation de l'accord de co-existence du 14 septembre 2004, que cet acte constitue un acte de contrefaçon de la marque notoire EUROSTAR et un acte de parasitisme susceptible d'engager la responsabilité civile de la société EDT,

- ordonner le transfert du nom de domaine www.eurostar.eu au profit des sociétés appelantes,

- prononcer la résiliation de l'accord de co-existence du 14 septembre 2004,

- interdire à la société EDT l'utilisation du terme EUROSTAR sous quelque forme que ce soit,

- la condamner à leur verser les sommes de 50.000 euros à raison du préjudice subi du fait de la dilution de leurs marques EUROSTAR et 50.000 euros en réparation du préjudice d'image,

- la condamner en tout état de cause aux dépens ainsi qu'à leur verser à chacune la somme de 30.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

*

La société EDT, intimée, prie la cour, essentiellement, dans ses dernières conclusions signifiées le 9 mai 2008, de :

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes,

- prononcer la résiliation de l'accord de co-existence du 14 septembre 2004 aux torts des sociétés appelantes et les condamner à un euro provisionnel de ce chef,

- condamner ces dernières in solidum à lui verser la somme de 10.000 euros en réparation de l'abus de procédure commis et de l'atteinte à sa réputation et son honneur, aux dépens, et à lui verser la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Considérant que les appelantes font valoir que la société de droit belge Eurostar Diamond Traders EDT, a été créée le 20 mars 1991, soit près de trois ans après l'enregistrement de la première marque EUROSTAR opposée et qu'elle ne peut revendiquer une antériorité sur le terme EUROSTAR tirée de l'usage qu'auraient pu en faire avant elle les sociétés aux droits desquels elle prétend venir ; qu'ainsi, et en application du droit belge des sociétés applicable aux fusions dont elle se prévaut, la société EDT ne peut exciper d'aucun droit antérieur sur la dénomination EUROSTAR autre que celui qu'elle peut tirer de sa propre dénomination sociale ;

Qu'il suit que lors de la signature de l'accord de coexistence, conclu entre les parties le 14 septembre 2004, à la suite du dépôt par EDT de plusieurs marques communautaires et internationales comportant le vocable EUROSTAR, elle ne disposait que des droits détenus sur sa dénomination remontant à 1991 et tirés de ses demandes d'enregistrement de marques datant de 2001 ;

Qu'au terme de cet accord, les appelantes exposent qu'elles ont autorisé la société EDT sous certaines conditions limitatives, à maintenir ses dépôts de marque contenant le signe EUROSTAR, à la condition que l'usage de ce signe soit toujours accompagné d'un logo représentant un diamant ou d'autres mots associant le terme diamant, et soit réalisé dans le seul domaine d'activité de la société EDT ; que l'utilisation du terme EUROSTAR sous forme de marque verbale ou à titre de nom de domaine n'étant pas mentionnée dans l'accord, en est nécessairement exclu ;

Qu'elles en déduisent qu'en procédant, le 7 décembre 2005, à la demande d'enregistrement du nom de domaine «eurostar.eu», la société EDT a violé l'accord de coexistence précité et a commis des actes de contrefaçon de leurs marques notoires EUROSTAR ainsi que des actes de parasitisme ;

Considérant que la société EDT leur réplique qu'elle est notoirement connue dans le champ de la taille et de la commercialisation des diamants et pierres précieuses car elle est la première société sur ce marché en Belgique, pays réputé pour être le plus grand marché mondial pour la taille de diamants ; qu'elle ajoute, tout en relevant que la question de l'antériorité n'est pas déterminante dans le présent litige, que sa dénomination est l'aboutissement "d'une aventure entamée en 1980" sous diverses formes sociales qui ont toujours intégré l'appellation EUROSTAR ; que le choix de ce vocable n'est pas le fruit du hasard mais traduit l'association de deux idées qui renvoient pour l'une à l'origine géographique de certaines de ses activités et pour l'autre à une pierre précieuse de qualité exceptionnelle désignée dans le milieu des diamantaires par le terme "star" ;

Que s'agissant de l'accord de coexistence, elle souligne qu'il est d'interprétation stricte comme toute convention de coexistence, qu'il s'interprète en défaveur de celui qui l'a rédigé - en l'espèce les sociétés du Réseau Ferroviaire -, et que la recherche de la commune intention des parties conduit à constater que l'accord ne dit mot des noms de domaine alors qu'à la date de signature, les parties n'ignoraient nullement la possibilité qui leur était offerte d'enregistrer un nom de domaine sur la base d'une marque, notamment dans les extensions en "eu" ; que l'absence de toute mention à cet égard ne peut donc être interprétée que comme la volonté des parties de les exclure du périmètre de l'accord ;

Qu'elle ajoute que raisonner autrement aboutirait à une situation intenable qui reviendrait à lui interdire de se prévaloir de sa dénomination sociale et d'en utiliser l'élément distinctif dans des publicités "radio ou TV" ou dans sa communication comptable ou institutionnelle ; que selon elle, l'enregistrement du nom de domaine litigieux n'entraîne aucune confusion dans l'esprit du public tant l'activité des parties est distincte et exempte de tout chevauchement ; qu'en tous cas, elle s'est conformée aux exigences du Règlement européen 874/2004 et du règlement spécifique de la période Sunrise en se fondant sur sa marque semi-figurative pour solliciter l'enregistrement du nom de domaine litigieux ;

Considérant ceci rappelé, qu'il apparaît inutile comme en convient d'ailleurs l'intimée, de se prononcer sur les droits que celle-ci peut revendiquer sur le terme EUROSTAR à raison des fusions de sociétés aux droits desquelles elle dit venir, dans la mesure où le moyen avancé par les appelantes réside dans la violation d'un accord de coexistence conclu entre les parties le 14 septembre 2004 et n'est pas fondé - même si chacune des parties en fait état - sur l'antériorité des droits d'usage de la dénomination EUROSTAR que détiendrait une partie sur l'autre ;

Sur la portée de l'accord

Considérant qu'il sera rappelé en effet, qu'aux termes de cet accord chacune des parties a reconnu l'existence des marques de l'autre partie et s'est engagée à faire usage des droits tirés de l'enregistrement de sa ou de ses marques dans des conditions ci-après :

EDT dénommée " Diamond C..." s'engage à (article 1er, Chapitre 1er) « ne pas retirer de droits de l'utilisation et de l'enregistrement de la marque EUROSTAR DIAMOND contre la marque EUROSTAR, plus généralement à ne pas s'opposer à l'enregistrement de la marque EUROSTAR et / ou à ne pas les contester, et à ne pas s'opposer à de nouvelles demandes et /ou à des renouvellement de la marque EUROSTAR ou de toute représentation substantiellement équivalente de la marque EUROSTAR pour des produits identiques ou similaires ( exception faite des diamants et des bijoux...) »;

Qu'en miroir, le Réseau Ferroviaire s'engage dans les mêmes termes « à ne pas retirer de droits de l'utilisation et de l'enregistrement de la marque EUROSTAR contre la marque EUROSTAR DIAMOND, plus généralement à ne pas s'opposer à l'utilisation et à l'enregistrement de la marque EUROSTAR DIAMOND et /ou à ne pas les contester, et ou à ne pas s'opposer à de nouvelles demandes et / ou à des renouvellements de la marque EUROSTAR DIAMOND, ou de toute représentation substantiellement équivalente ...etc.» ;

Qu'à l'article 1.4 «Diamond Traders s'engage également à ne jamais utiliser la marque EUROSTAR Diamond avec un lettrage et /ou une stylisation susceptible de prêter à confusion avec ceux utilisés à tout moment par le Réseau Ferroviaire et notamment avec les représentations visées à l'annexe 1 » ;

Que Réseau Ferroviaire s'est engagé dans les mêmes termes, à l'article 4 du Chapitre 2 ;

Considérant que selon l'article 1135 du Code Civil, les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donne à l'obligation d'après sa nature ; que conformément à l'article 1134 du même code, elles doivent être exécutées de bonne foi ;

Considérant en l'espèce, qu'il résulte des termes de leur accord, que l'engagement que chacune des parties a souscrit concerne l'usage des droits tirés de l'enregistrement à titre de marque des signes considérés ;

Qu'il sera rappelé à cet égard que les marques de la société EDT sont des marques semi figuratives constituées de la dénomination EUROSTAR associée à la représentation dessinée d'un diamant taillé, alors que les marques des appelantes sont, pour l'essentiel, constituées du seul terme EUROSTAR ;

Que la société EDT s'est ainsi engagée selon l'article 1 précité à "ne pas retirer de droits de l'enregistrement (de ses marques ) contre"les marques du Réseau Ferroviaire et à ne pas utiliser ses marques avec un lettrage ou une stylisation susceptible de prêter à confusion ;

Considérant que pour la demande d'enregistrement du nom de domaine litigieux, il est constant et d'ailleurs non contesté, que la société EDT a excipé non pas de sa dénomination sociale mais de ses droits nés de l'enregistrement de ses marques ; qu' en effet, elle a promptement, le 7 décembre 2005, déposé sa demande pendant la période dite " Sunrise Io " ouverte aux seuls titulaires de droits de marque ;

Qu'elle a ainsi fait un "usage" de ses marques, au sens de l'accord de coexistence, indépendamment de la qualification que peut par ailleurs revêtir cet usage au regard de la contrefaçon ;

Considérant en outre qu'en choisissant le nom de domaine «eurostar.eu», elle a nécessairement fait un usage de sa marque sous une forme modifiée pour n'en retenir que la partie dénominative qui est précisément le signe constitutif des marques du Réseau Ferroviaire ;

Qu'elle n'a adjoint à ce signe aucun autre signe tiré par exemple de sa dénomination sociale qui aurait pu ainsi prévenir toute confusion ;

Considérant dès lors que l'usage qu'elle a ainsi fait du signe EUROSTAR,à l'exclusion de tout autre signe, viole l'engagement qu'elle avait souscrit d'autant plus qu'elle ne pouvait ignorer que ce faisant, elle mettait le Réseau Ferroviaire en difficulté pour exploiter ses marques sous la forme d'un nom de domaine de premier niveau en ".eu" ;

Qu'en outre, le choix de ce nom de domaine peut être à l'origine de confusion chez l'internaute qui ne s'apercevra de sa méprise éventuelle qu'une fois parvenu sur le site de la société EDT dont il découvrira alors que les activités sont différentes de celles du Réseau Ferroviaire ;

Considérant enfin que, comme rappelé ci-dessus, les conventions s'exécutent de bonne foi ; que la société EDT peut d'autant moins se retrancher derrière l'absence de toute mention faite dans l'accord au sort des noms de domaine, que cet accord met à la charge de chacune des parties une obligation générale d'usage de ses marques dans des conditions qui ne nuisent pas à l'usage légitime que l'autre partie peut faire de ses marques ;

Considérant que la violation des obligations souscrites par EDT, qui affecte l'économie générale de l'accord, commande, par application de l'article 1184 du Code Civil, d'en prononcer la résiliation aux torts de la société EDT ;

Sur la contrefaçon alléguée

Considérant que les marques EUROSTAR du Réseau Ferroviaire, française ( No1 439 630) et internationale (no532 771 visant la France) ont acquis une notoriété qui ne fait pas débat et justifie qu'elles soient protégées dans les termes de l'article L713-5 du CPI ;

Considérant que l'usage que la société EDT a fait lors de l'enregistrement du nom de domaine litigieux du signe constitutif de ces deux marques et porteur de leur distinctivité, caractérise un usage injustifié ; qu'il est indifférent que ce site ne soit pas exploité dans la mesure où l'usage est celui intervenu lors de la demande d'enregistrement du nom de domaine et n'est couvert par aucun juste motif au sens de l'article 5.2 de la directive 89/104 ;

Qu'un tel usage ne réalise pas une contrefaçon des marques définie par les seuls articles L 713-2, L713-3 et L713-4 du CPI mais constitue une faute quasi délictuelle qui engage la responsabilité de la société EDT ;

Sur les actes de parasitisme

Considérant que le Réseau Ferroviaire fait valoir que la réservation du nom de domaine incriminé traduit la volonté de la société EDT de se placer dans son sillage et de profiter de la très forte renommée de ses prestations ;

Mais considérant d'une part, qu'il n'est pas soutenu que l'intimée ait commencé à faire usage du dit nom de domaine ; que d'autre part, la réservation de ce dernier ne traduit pas un acte distinct de celui qui fonde l'engagement de la responsabilité de la société EDT en application de l'article L713-5 précité ;

Que ses demandes sont dès lors dénuées de fondement ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant qu'il sera fait droit à la demande de transfert du nom de domaine «eurostar.eu» au profit des appelantes ;

Qu'il n'y a en revanche pas lieu d'accueillir, en raison de sa généralité, la demande d'interdiction d'usage "sous quelque forme que ce soit" du terme EUROSTAR ;

Considérant qu'aucun site n'ayant été exploité par la société EDT sous la dénomination litigieuse, le préjudice subi par les appelantes né d'un détournement de sa clientèle qui ne ferait pas toujours l'effort de rechercher la bonne adresse du site d'achat de billets et abandonnerait sa connexion pour se tourner vers d'autres moyens d'acheter ses billets, est purement virtuel ;

Qu'en revanche cet usage injustifié de leurs marques notoires porte atteinte à ces dernières et commande la condamnation de la société EDT à verser aux appelantes la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Que les commentaires que la presse a pu faire de cette affaire dans des termes tels que «rien ne sert de rouler vite, il faut déposer à point» sont étrangers à la société EDT et relèvent d'une liberté d'analyse dont la forme et l'expression ne sauraient constituer une faute imputable à l'intimée ;

Que l'accueil des prétentions des appelantes conduit à rejeter les demandes reconventionnelles de la société EDT ;

Sur l'article 700 du CPC

Considérant que l'équité commande de condamner la société EDT à verser aux appelantes la somme de 15000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel .

PAR CES MOTIFS

Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,

Dit qu'en faisant procéder à l'enregistrement du nom de domaine «eurostar.eu», la société EDT a violé l'accord de coexistence qu'elle avait conclu avec les appelantes le 14 septembre 2004 et a en outre porté atteinte aux marques notoires EUROSTAR dont ces dernières sont titulaires,

Prononce la résiliation de l'accord de coexistence aux torts de la société EDT,

Ordonne le transfert du nom de domaine «eurostar.eu» au profit des appelantes ou de l'une d'entre elles selon les accords qu'elles pourront conclure,

Condamne la société EDT à leur verser la somme globale de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,

La condamne en outre à leur verser la somme de 15000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés dans les forme de l'article 699 du CPC par la SCP BAUFUMÉ, GALLAND, VIGNES, avoués.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0164
Numéro d'arrêt : 07/07404
Date de la décision : 04/07/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 15 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-07-04;07.07404 ?
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