La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/12/2008 | FRANCE | N°08/04711

France | France, Cour d'appel de Paris, 02 décembre 2008, 08/04711


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



14ème Chambre - Section B



ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2008



(no 531 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/04711



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Mars 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2008001640 prononcée par Monsieur FOUQUET





APPELANTE



SAS DELPHI FRANCE agissant poursuites et diligences en l

a personne de ses représentants légaux

64 avenue de la Plaine de France

93290 TREMBLAY EN FRANCE



représentée par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour

assistée de Me Laurent COTRET, ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section B

ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2008

(no 531 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/04711

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Mars 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2008001640 prononcée par Monsieur FOUQUET

APPELANTE

SAS DELPHI FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

64 avenue de la Plaine de France

93290 TREMBLAY EN FRANCE

représentée par la SCP GUIZARD, avoués à la Cour

assistée de Me Laurent COTRET, avocat au barreau de PARIS, toque : P 438

INTIMÉE

S.A. COFFIMA agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

98 avenue des Roissy Hauts

91540 ORMOY

représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour

assistée de Me Bruno SAFFAR, avocat au barreau de PARIS, toque : E 809

*

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 3 juillet 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Martine PROVOST-LOPIN, conseiller faisant fonction de président

Madame Sophie DARBOIS, conseiller

Madame Irène LEBE, conseiller, désignée par ordonnance de monsieur le premier président, en remplacement de madame Martine PROVOST-LOPIN, conseiller appelée à présider l'audiencequi en ont délibéré

sur le rapport de Madame Sophie DARBOIS

Greffier, lors des débats : Madame Emmanuelle TURGNÉ

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par madame Martine PROVOST-LOPIN, conseiller faisant fonction de président, qui a remis la minute à madame Emmanuelle TURGNÉ greffier, pour signature.

*

Vu l'appel formé par la S.A.S. DELPHI FRANCE de l'ordonnance de référé rendue le 13 mars 2008 par le président du tribunal de commerce de PARIS qui, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, a :

- désigné Me Stéphane A..., huissier audiencier, avec la mission suivante :

o se rendre dans les locaux de la société DELPHI France S.A.S., 43 avenue du Gros Chêne à Herblay (95220),

* titre (a)

o constater les inscriptions en comptabilité des factures clients au nom de la société COFFIMA depuis le 1er juin 2004, en distinguant ventes d'amortisseurs et ventes de batteries, et s'en faire remettre copie,

o constater les inscriptions en comptabilité des remises de fin d'années dues à la société COFFIMA sur les ventes d'amortisseurs et de batteries pour les années 2004 et 2005 et s'en faire remettre copie,

* titre (b)

o relever la liste des clients de la société DELPHI France S.A.S. acheteurs d'amortisseurs domiciliés en Algérie, Tunisie, Maroc et Dubaï et en prendre copie,

o se faire remettre pour ces clients copie des factures de vente d'amortisseurs par DELPHI France depuis le 1er juin 2004,

o se faire remettre copie des factures émises au nom de la société AG DISTRIBUTION depuis le 1er juin 2004,

o prendre copie pour chacune de ces factures de la déclaration d'exportation (modèle EX1) et de la liste des prix des amortisseurs et des batteries vendues à destination du Maghreb avec les variations de prix depuis le 1er juin 2004 jusqu'à ce jour,

o se faire remettre copie de tous les courriers envoyés aux clients de DELPHI France au cours de l'année 2004 les informant de l'augmentation du prix des batteries du fait de celle du prix du plomb,

o au regard des pièces collectées, établir pour les clients sus cités les prix de vente pratiqués par DELPHI France sur les matériels concernés et leurs évolutions depuis le 1er juin 2004 ainsi que les volumes d'affaires correspondants, ceux-ci pouvant influer sur le niveau des prix pratiqués,

- dit que les éléments collectés par l'huissier sous le titre (b) seront séquestrés entre ses mains pendant le temps nécessaire à l'accomplissement de sa mission,

- dit que l'huissier une fois sa mission terminée en avertira les parties qui saisiront le juge des référés pour qu'il puisse statuer en référé-cabinet sur la communication aux parties du procès-verbal de constat qui aura été dressé, ainsi éventuellement que de certaines des pièces saisies,

- fixé à 2 000 € TTC le montant de la provision qui devra être versée par la S.A. COFFIMA directement au mandataire de justice, à titre d'avance sur sa rémunération préalablement à l'exécution de sa mission et ce, dès sa saisine,

- autorisé Me A... à se faire assister d'un expert en informatique et d'un sapiteur en comptabilité,

- dit qu'il lui en sera référé en cas de difficulté rencontrée par le mandataire de justice dans l'exécution de sa mission,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties,

- laissé les dépens à la charge de la S.A. COFFIMA ;

Vu les dernières conclusions en date du 19 juin 2008 par lesquelles l'appelante demande à la cour, au visa de l'article 145 du code de procédure civile :

- à titre principal, "rétracter" (sic) l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- à titre subsidiaire, "rétracter" la partie B de l'ordonnance,

- débouter la société COFFIMA de ses demandes d'extension,

- condamner la société COFFIMA au paiement de la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions en date du 26 juin 2008 par lesquelles l'intimée demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a missionné Me A... sur le fondement des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile dans les termes contenus à son dispositif,

y ajoutant,

- "dire et juger" que l'huissier commis relèvera les factures de vente de batteries établies à partir de juillet 2004 par DELPHI France à l'intention de ses clients installés à Madagascar, en Afrique du Sud, au Sénégal, au Ghana et au Cameroun, ou bien ayant acheté pareilles marchandises pour l'exportation sur ces territoires,

vu le pouvoir d'évocation,

- "dire et juger" dès à présent que le procès-verbal de Me A... et les pièces qu'il a saisies devront être communiqués aux parties,

- condamner la société DELPHI France au paiement d'une indemnité de 5 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel;

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'il ressort des écritures des parties et des pièces versées aux débats que la S.A. COFFIMA, qui a pour activité principale le négoce à l'export, spécialement à destination du Nigéria et de l'Algérie, de pièces détachées pour l'automobile, se fournit en batteries et amortisseurs depuis de nombreuses années auprès de la S.A.S. DELPHI France, filiale de la société américaine DELPHI ;

Que par jugement du 28 juin 2004, le tribunal de commerce d'EVRY a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société COFFIMA ; que le 7 décembre 2005, la société DELPHI France a accepté le plan de continuation de cette société qui prévoyait un remboursement échelonné de sa créance d'un montant de 1 065 015,38 € sur dix ans, soit des échéances de 106 501,54 € par an, la société COFFIMA devant, au cours de ce plan, rembourser une somme totale de 8 682 000 € à l'ensemble de ses créanciers ;

Que la société COFFIMA expose que, dépendant de la société DELPHI France dont les fournitures représentent une part significative de ses approvisionnements, elle a dû, pour continuer son activité, se soumettre à ses exigences ayant consisté en une majoration des factures à compter du deuxième trimestre de l'année 2004 afin de résorber par avance sa dette indépendamment du moratoire judiciaire dont la société DELPHI France ne réclama pas le paiement des deux premiers dividendes ; qu'elle ajoute que, bien qu'ayant atteint les objectifs fixés par les accords de remise de fin d'année, elle n'a pas bénéficié de leur versement ;

Que c'est dans ces conditions que, pour lui permettre, en vue d'une éventuelle action, d'effectuer la comparaison avec les conditions de prix consenties à ses concurrentes et d'établir l'enregistrement comptable de ses droits aux remises de fin d'année, la société COFFIMA a saisi le juge des référés afin d'obtenir une mesure de constat portant sur des pièces comptables de la société DELPHI France à laquelle il a été fait droit par l'ordonnance soumise à la cour selon les modalités énoncées ci-dessus ;

Considérant qu'aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées sur requête ou en référé, à la demande de tout intéressé, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige ;

Considérant que la mesure d'instruction a été sollicitée et obtenue par l'intimée par la voie d'un débat contradictoire en référé, en sorte qu'il ne saurait y avoir lieu à "rétractation" de l'ordonnance, cette voie étant ouverte lorsqu'il s'agit d'une ordonnance sur requête, mais qu'il appartient à la cour, requalifiant les termes du débat, d'apprécier s'il convient d'infirmer la décision entreprise, comme il s'induit des conclusions de l'appelante, ou de la confirmer et d'étendre la mesure, comme le demande l'intimée ;

Considérant que la société COFFIMA démontre, par deux attestations, l'existence de discussions, hors plan, sur l'organisation des relations entre les deux sociétés au moment de la procédure de redressement ;

Qu'elle rapporte la preuve d'une augmentation effective à compter du 1er juin 2004 de la facturation des marchandises livrées par la société DELPHI France qu'elle a supportée sans discussion ;

Que, si la société DELPHI France explique cette hausse par celle des matières premières, spécialement du plomb, ce dont elle a informé la société COFFIMA, celle-ci affirme toutefois que la lettre circulaire d'information du 26 mai 2004 dont se prévaut l'appelante était destinée à "déguiser" la mesure prise et n'a pas été adressée à ses concurrents ;

Que l'intimée justifie en outre que la société VB France, qui a repris l'activité "batteries" de la société DELPHI France, lui a immédiatement appliqué des prix moins élevés que les nouveaux tarifs mis en place par celle-ci, revenant aux prix antérieurs malgré le coût des matières premières;

Qu'elle soutient, par ailleurs, avoir rempli les conditions fixées pour prétendre aux remises de fin d'année qui lui avait été accordées par la société DELPHI France mais ne pas les avoir perçues du fait du montage mis en place permettant l'apurement de sa dette antérieure ;

Que la société COFFIMA indique avoir versé l'ensemble des échéances au titre des années 2006 et 2007 à ses créanciers, à l'exception de la société DELPHI France en raison des nouvelles dispositions adoptées avec celle-ci valant règlement de sa dette et il est constant que, malgré le non-paiement de ces deux premiers dividendes du plan de continuation auquel elle pouvait prétendre, l'appelante n'a pas réclamé leur règlement avant la présente procédure ni sollicité la résolution du plan ;

Qu'il s'ensuit que la société COFFIMA justifie d'un motif légitime d'obtenir par la remise d'éléments comptables concernant les autres clients de la société DELPHI France, auxquels elle n'a pas accès, les éléments de comparaison lui permettant d'établir si, comme elle le prétend, il y a eu mise en oeuvre par cette société d'une surfacturation et la promesse de remises, destinées à contourner l'exécution du plan et, par conséquent, à rompre l'équilibre entre ses créanciers ;

Considérant, dans ces conditions, qu'il convient de confirmer l'ordonnance entreprise sur la mesure ordonnée et, y ajoutant, d'étendre cette dernière à l'activité "batteries" ainsi qu'aux clients installés à Madagascar, en Afrique du Sud, au Sénégal, au Ghana et au Cameroun, ou bien ayant acheté pareilles marchandises pour l'exportation sur ces territoires, s'agissant d'une branche d'activité et d'une clientèle significatives pour la comparaison souhaitée ;

Considérant, en revanche, que, dès lors qu'est reconnu le motif légitime de l'intimée d'obtenir les pièces dont s'agit et que la mesure a été ordonnée à l'issue d'un débat contradictoire, il n'y a pas lieu d'en ordonner le séquestre entre les mains de l'huissier instrumentaire ni d'en soumettre la remise à une nouvelle procédure de référé ;

Que la décision sera donc infirmée de ce chef et la communication par l'huissier aux parties ordonnée ;

Considérant que le sens de cet arrêt conduit à confirmer l'ordonnance sur les dépens de première instance et l'article 700 du code de procédure civile et à condamner la société DELPHI France, qui succombe en son recours, aux dépens d'appel et à payer une indemnité de procédure à la société COFFIMA pour les frais qu'elle l'a contrainte à exposer en cause d'appel et qu'il serait inéquitable de laisser entièrement à sa charge ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit que les éléments collectés par l'huissier sous le titre (b) seront séquestrés entre ses mains et qu'il sera statué en référé-cabinet sur la communication aux parties du procès-verbal de constat qui aura été dressé, ainsi éventuellement que de certaines des pièces saisies ;

La confirme en ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Etend la mesure confiée à de Me A... aux factures de vente de batteries établies à partir de juillet 2004 par la S.A.S. DELPHI France à l'intention de ses clients installés à Madagascar, en Afrique du Sud, au Sénégal, au Ghana et au Cameroun, ou bien ayant acheté pareilles marchandises pour l'exportation sur ces territoires ;

Dit que le procès-verbal de Me A... et les pièces qui lui auront été remises seront communiqués aux parties ;

Condamne la S.A.S. DELPHI France à payer à la S.A. COFFIMA la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la S.A.S. DELPHI France aux dépens d'appel dont recouvrement dans les conditions prévues par l'article 699 du même code.

LE GREFFIER LE CONSEILLER faisant fonction de président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 08/04711
Date de la décision : 02/12/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-12-02;08.04711 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award