Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 9
ARRET DU 10 SEPTEMBRE 2009
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/19864
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Octobre 2008 du juge-commissaire du Tribunal de Commerce d'AUXERRE
APPELANTE:
Société anonyme JULLIAN ET COMPAGNIE
ayant son siège [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
prise en la personne de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège
représentée par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoué à la Cour
assistée de Maître Olivier MURN, avocat substituant Maître Jean-Louis ALLIOT
au barreau d'Auxerre
INTIMEE:
S.A.R.L. HPVI
ayant son siège [Adresse 9]
[Localité 7]
prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
représentée par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoué à la Cour
qui a déposé son dossier
INTIMEE:
S.E.L.A.R.L. François CARLO
ayant son siège [Adresse 3]
[Localité 8]
ès qualités de représentant des créanciers de la société TEFA
représentée par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoué à la Cour
qui a déposé son dossier
INTIMEE:
SELAS [S]-[H]
ayant son siège [Adresse 2]
[Localité 6]
ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement par continuation de la société TEFA
représentée par la SCP Anne-Marie OUDINOTet Pascale FLAURAUD, avoué à la Cour
qui a déposé son dossier
INTIMEE:
Société anonyme TEFA
ayant son siège [Adresse 5]
[Localité 6]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
n'ayant pas constitué avoué
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Juin 2009, en audience publique, l' avocat ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice MONIN-HERSANT, Président
Monsieur Edouard LOOS, Conseiller
Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller
Greffier, lors des débats : Monsieur Daniel COULON,
MINISTERE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au Ministère Public,
ARRET :
- par défaut,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Monsieur Patrice MONIN-HERSANT, Président, et par Monsieur Daniel COULON, Greffier présent lors du prononcé.
La S.A. TEFA a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Auxerre du 6 janvier 2003, ayant désigné Maître [S] en qualité d'administrateur judiciaire et Maître [B] en qualité de représentant des créanciers. Elle a ensuite fait l'objet :
- d'une part, d'un plan de redressement par voie de cession partielle concernant sa branche industrielle au bénéfice de la société TEFA INDUSTRIE, homologué par jugement du 16 juin 2003,
- d'autre part, d'un plan de redressement par voie de continuation pour le surplus de ses activités, limitées à la location de matériels et d'immeubles, au bénéfice de la sarl HPVI, homologué par jugement du 5 décembre 2003.
Le 20 avril 2007, la selas [S]-[H] a été désignée commissaire à l'exécution du plan en remplacement de Maître [K] [S] précédemment désigné.
La société TEFA a été absorbée par la sarl HPVI aux termes d'un traité de fusion du 27 octobre 2003, l'opération étant devenue définitive lors de l'assemblée générale extraordinaire du 19 décembre 2003.
La société HPVI affirme (conclusions page 3) venir aux droits des sociétés :
- TEFA, dans les limites du plan de continuation et de la fusion,
- TEFA TECHNOLOGIE dans les limites du plan de cession de cette dernière.
La S.A. JULLIAN et Cie indique avoir déclaré sa créance au passif de la société TEFA le 20 mars 2003 à hauteur de 23.630,23 € correspondant à la condamnation prononcée par jugement du 17 juillet 2002 du tribunal de commerce de Nîmes à lui payer des dommages et intérêts. Appel de cette décision ayant été interjeté devant la cour de Nîmes, le juge commissaire de la procédure collective de la société TEFA a sursis à statuer, par ordonnance du 2 juin 2004, au motif d'une instance en cours.
Par arrêt du 16 décembre 2004, la cour d'appel de Nîmes a confirmé le jugement précité du tribunal de commerce de Nîmes, en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts.
La selarl François CARLO, agissant en sa qualité de nouveau représentant des créanciers de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société TEFA a, par requête du 16 novembre 2007, saisi le juge commissaire de ladite procédure collective afin de clore la procédure de vérification de la créance déclarée en 2003 par la société JULLIAN.
Vu l'ordonnance du 8 octobre 2008 du juge commissaire de la procédure collective de la société TEFA qui :
- relevant que le sursis à statuer ordonné le 4 juin 2004 était justifié par l'instance alors en cours devant la cour d'appel de Nîmes et qu'il avait à nouveau été saisi plus de deux années après que les causes du sursis aient disparu par l'effet de l'arrêt rendu le 16 décembre 2004,
- a constaté la péremption d'instance et a dit n'y avoir lieu à statuer en condamnant la société JULLIAN à payer 1.000 € de frais irrépétibles à la société HPVI ;
Vu l'appel interjeté le 20 octobre 2008, par la société JULLIAN et ses ultimes écritures signifiées le 27 mai 2009 réclamant 1.500 € de frais irrépétibles et tendant à l'infirmation de l'ordonnance en demandant à la cour d'admettre la créance déclarée au visa de l'article L 621-104 ancien du code de commerce 'sans péremption d'instance possible' ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 12 mai 2009 par la société HPVI, la selarl François CARLO ès qualités et la selas [S]-[H] ès qualités réclamant 3.000 € de frais non compris dans les dépens et tendant :
- à titre principal, à la confirmation de l'ordonnance,
- subsidiairement, prétendant que l'arrêt du 16 décembre 2004 de la cour d'appel de Nîmes a fixé la créance de la société JULLIAN au passif de la procédure collective de la société TEFA TECHNOLOGIE, distincte de la société TEFA, pour en déduire que :
. la même créance ne peut plus être admise au passif de la société TEFA, le délai de déclaration au passif de cette dernière étant expiré,
. le rejet de la demande d'admission au visa de l'article L 621-104 ancien du code de commerce, la cour de céans ne pouvant pas, selon les intimées, interpréter l'arrêt de la cour de Nîmes sur l'identité des parties ayant été attraites dans l'instance qui s'est déroulée devant cette juridiction ;
SUR CE, la cour :
Considérant que la société JULLIAN, observant que l'ordonnance du 4 juin 2004 n'avait pas fixé de terme précis au sursis à statuer, estime que la péremption d'instance est 'totalement inappropriée' en soutenant qu'en application de l'article L 621-104 ancien du code de commerce, le juge commissaire ne pouvait que :
- soit admettre ou rejeter la créance,
- soit constater qu'une instance était en cours ou que la contestation ne relevait pas de sa compétence ;
Qu'elle affirme avoir déclaré sa créance au représentant des créanciers de la société TEFA, les ordonnances du juge commissaire ayant été rendues dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'encontre de cette dernière, et estime que, sans avoir à l'interpréter, il résulte de l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes qu'il a prononcé la condamnation à l'encontre de la société HPVI venant aux droits de la société TEFA ;
Considérant que pour leur part, la société HPVI, la selarl François CARLO ès qualités et la selas [S]-[H] ès qualités exposent qu'initialement, la société JULLIAN a attrait la société TEFA TECHNOLOGIE le 3 août 1999 devant le tribunal de commerce de Nîmes lequel a, par jugement du 17 juillet 2002, fait droit aux demandes de la société JULLIAN à hauteur de 23.630,23 € de dommages et intérêts mis à la charge de la société TEFA TECHNOLOGIE, laquelle a relevé appel le 7 octobre suivant ;
Qu'elles estiment que l'arrêt du 16 décembre 2004 de la cour d'appel de Nîmes a fixé la créance de la société JULLIAN au passif de la société TEFA TECHNOLOGIE, dont le redressement judiciaire a été ouvert le 3 janvier 1994 ;
Qu'elles précisent que, dans les limites du plan de cession, la société TEFA vient aux droits de la société TEFA TECHNOLOGIE (conclusions page 3) ;
Que les intimées font valoir que le sursis à statuer était motivé par la procédure pendante devant la cour d'appel de Nîmes et qu'un nouveau délai biennal de péremption a commencé à courir le jour de l'arrêt jusqu'au 16 décembre 2006, dont seule la reprise de la procédure de vérification de la créance litigieuse aurait pu en interrompre le cours ;
Qu'elles estiment que la procédure de vérification des créances constitue une instance susceptible de péremption et que l'instance alors en cours devant la cour d'appel de Nîmes n'était pas dirigée contre la société TEFA elle-même, de sorte qu'il n'y avait pas, selon elles, de procédure engagée contre la société TEFA au jour de l'ouverture de la procédure collective la concernant ;
Qu'elles font encore valoir que la société JULLIAN n'ayant fait de déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société TEFA, se trouve aujourd'hui forclose pour le faire, son éventuelle créance se trouvant dès lors éteinte ;
ceci ayant été rappelé,
Considérant que l'ordonnance initiale du 4 juin 2004 du juge commissaire ayant ordonné un sursis à statuer tout en constatant qu'une instance était en cours devant le juge du fond, n'a pas fait l'objet d'un recours ;
Que la péremption d'instance a pour objet de sanctionner le défaut de diligence des parties ;
Que les créanciers du débiteur placé dans les liens d'une procédure collective, n'ont aucune diligence à accomplir une fois effectuées leurs déclarations de créance, les opérations de vérification incombant au représentant des créanciers du débiteur en redressement judiciaire;
Qu'il en résulte que c'est à tort que, dans l'ordonnance du 8 octobre 2008 le juge-commissaire a constaté une péremption d'instance en ce que le représentant des créanciers l'avait de nouveau saisi plus de deux années après que les causes du sursis aient disparu par l'effet de l'arrêt rendu le 16 décembre 2004 de la cour d'appel de Nîmes ;
Que dès lors, l'ordonnance entreprise sera infirmée ;
Considérant qu'il résulte des termes :
- du jugement du 8 juillet 1994 du tribunal de commerce d'Auxerre (pièce n° 7 du bordereau des intimées) que l'ancienne S.A. TEFA TECHNOLOGIES (RCS Auxerre n° 379 057 508), a fait l'objet d'un plan de cession au profit de Monsieur [R] [E], agissant au nom et pour le compte de la société TEFA, S.A. en cours de constitution,
- de l'extrait Kbis du registre du commerce d'Auxerre du 18 mai 2005 (pièce n° 2 du bordereau des intimées) concernant la S.A. TEFA TECHNOLOGIES que cette société est sans activité depuis le 1er août 1994 et que la procédure de redressement judiciaire -régime simplifié- ouverte depuis le 3 janvier 1994, a été clôturée par jugement du 1er septembre 2000 du tribunal de commerce d'Auxerre 'pour exécution du plan de cession' ;
Qu'il résulte par ailleurs des lettres des :
- 20 mars 2003 (Maître [C], avocat de la société JULLIAN à Maître [B], mandataire judiciaire),
- 31 mars 2003 (réponse de Maître [B] à Maître [C]) visant expressément le redressement judiciaire de la S.A. TEFA,
que le 20 mars 2003, la société JULLIAN a déclaré une créance de 23.630,23 €, outre 760 € de frais irrépétibles, au passif de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société TEFA par jugement du 6 janvier 2003 du tribunal de commerce d'Auxerre ;
Qu'aux termes de l'arrêt du 16 décembre 2004 de la cour d'appel de Nîmes, la société HPVI, venant aux droits de la société TEFA, était l'une des appelantes du jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 17 juillet 2002 ;
Que sont également volontairement intervenus à cette même instance devant la cour d'appel de Nîmes :
- Maître [B] 'pris ès qualités de représentant des créanciers de la S.A. TEFA',
- Maître [S] 'pris ès qualités d'administrateur judiciaire de la S.A. TEFA et actuel commissaire à l'exécution du plan de continuation de ladite société ';
Que dans le dispositif de la décision, la cour d'appel de Nîmes a :
- fixé 'la créance de la S.A. JULLIAN ET Cie au passif du redressement judiciaire de la S.A. TEFA TECHNOLOGIES, aux droits de laquelle vient régulièrement la S.A.R.L. H.P.V.I., à la somme de 23.630,23 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice causé par le vice caché affectant le matériel de climatisation vendu',
- dit que 'la créance de la S.A. JULLIAN ET Cie comprendra aussi la somme de 760 € mise à la charge de la S.A. TEFA TECHNOLOGIES en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi que les dépens de première instance, conformément au jugement déféré, confirmé de ces chefs, outre les dépens d'appel ' ;
Qu'en relatant les faits dans l'arrêt, en visant la société 'TEFA TECHNOLOGIE' la cour d'appel de Nîmes ne vise en réalité que des événements qui ne concernent que la société TEFA (déclaration de cessation des paiements du 2 janvier 2003[arrêt page 4], déclaration de créance du 8 avril 2003 et contestation du représentant des créanciers du 29 octobre 2003 [arrêt pages 4 et 5], cession de la branche industrielle par jugement du 16 juin 2003 [arrêt page 5], fusion avec la société HPVI avec reprise du passif sous réserve du plan de continuation [arrêt page 5]);
Que dans la motivation de l'arrêt précité du 16 décembre 2004, la cour d'appel de Nîmes relève 'qu'il n'est pas contesté que la sarl HPVI vient désormais régulièrement aux droits de la S.A. TEFA TECHNOLOGIES' et qu'il s'agit en fait, compte tenu du contexte, de la société TEFA, laquelle a été absorbée par la société HPVI ;
Qu'au demeurant, l'ancienne société TEFA TECHNOLOGIE étant dans les liens d'une procédure collective depuis le 3 janvier 1994, l'arrêt du 16 décembre 2004 de la cour d'appel de Nîmes ne vise pas l'intervention des organes correspondants de la procédure à cette instance ;
Qu'il se déduit de l'ensemble de ces constatations que, nonobstant une ambiguïté entretenue par les parties intéressées sur les dénominations sociales, la créance de la société JULLIAN, fixée à hauteur de 23.630,23 € par la cour d'appel de Nîmes, concerne bien le passif de la procédure collective ouverte le 6 janvier 2003 à l'encontre de la S.A. TEFA ;
Qu'en conséquence les demandes subsidiaires des intimées ne seront pas accueillies et qu'il sera fait droit à la demande de la société JULLIAN d'admettre la créance déclarée au passif de la procédure collective ouverte le 6 janvier 2003 à l'encontre de la société TEFA ;
Qu'il serait inéquitable de laisser à l'appelante la charge définitive des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits ;
PAR CES MOTIFS:
Infirme en toutes ses dispositions, l'ordonnance du 8 octobre 2008 du juge commissaire de la procédure collective ouverte le 6 janvier 2003 à l'encontre de la S.A. TEFA,
Statuant à nouveau,
Admet les créances de la S.A. JULLIAN et Cie, déclarées le 20 mars 2003 au passif de la S.A. TEFA à hauteur de 23.630,23 € et de 760 €,
Condamne solidairement la société HPVI, et la selarl François CARLO ès qualités de représentant des créanciers de la S.A. TEFA, aux dépens de première instance et d'appel et à verser mille cinq cents euros (1.500 €) de frais irrépétibles à la S.A. JULLIAN et Cie,
Admet la SCP LAGOURGUE-OLIVIER au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
D.COULON P. MONIN-HERSANT