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10/11/2009 | FRANCE | N°08/00199

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 10 novembre 2009, 08/00199


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRET DU 10 Novembre 2009

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/00199



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Novembre 2007 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL RG n° 06/00672





APPELANT

Monsieur [N] [T]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Christian COSTE, avocat au barreau de PARIS, toqu

e : G 253







INTIMÉES

SA SARJEL

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par M. [G], Superviseur et par Me Karine COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E 906



SARL DIS...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRET DU 10 Novembre 2009

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/00199

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Novembre 2007 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL RG n° 06/00672

APPELANT

Monsieur [N] [T]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Christian COSTE, avocat au barreau de PARIS, toque : G 253

INTIMÉES

SA SARJEL

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par M. [G], Superviseur et par Me Karine COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E 906

SARL DISTRIALESIA

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentée par M. [G], Superviseur et par Me Karine COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E 906

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Septembre 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Florence BRUGIDOU, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

Monsieur Philippe LABRÉGÈRE, Conseiller

Madame Florence BRUGIDOU, Conseiller

Greffier : Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, présidente et par Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, greffière présente lors du prononcé.

Mr [N] [T], engagé par la société DISTRIALESIA à compter du 1er juillet 2003 en qualité de directeur d'un magasin situé à Saint Maur des Fossés, suivant contrat à durée indéterminée, moyennant un salaire brut mensuel moyen fixé à 2 369,15 euros, a rompu par une lettre du 27 mars 2006 de prise d'acte son contrat de travail avec effet au 31 mars 2006 et saisi le Conseil de prud'hommes de Créteil lequel a, par un jugement du 22 novembre 2007, condamné la société DISTRIALESIA à lui verser les sommes suivantes:

-15 000 euros au titre des heures supplémentaires

-674,40 euros au titre de la garantie minimum de rémunération

outre les congés payés afférents soit 67,44 euros et l'a débouté pour le surplus et condamné à verser à la société DISTRIALESIA la somme de 7 107,45 euros au titre du préavis non effectué.

Mr [T] a relevé appel de cette décision.

Il sollicite son infirmation partielle et la condamnation de la société DISTRIALESIA à lui verser les sommes suivantes :

-56 859,60 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-7 107,45 euros au titre de l'indemnité de préavis et 710,45 de congés payés afférents

-509,56 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

-290,43 au titre de rappel de salaire sur mise à pied et 29,05 euros de congés payés

-43 078 euros au titre du rappel sur les heures supplémentaires

-674,40 euros au titre du rappel pour les années 2003 et 2004 et les congés payés

-1050 euros au titre du rappel sur prime de gratification

-2 948,30 euros rappel sur primes de bilan 2003 et 2004, 2540 euros pour l'année 2005 et 1950 euros pour les 3 mois de 2006

ces sommes augmentées des intérêts légaux à compter du 29 mars 2006

-4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Il expose qu'un avenant lui a été proposé le 19 janvier 2006 qu'il a refusé de signer alors que par ailleurs il demandait le paiement de ses heures supplémentaires. Il soutient qu'il a fait l'objet par la suite de reproches infondés et de pressions comme le samedi 4 février où il s'est retrouvé seul pour tenir la caisse au magasin ; qu'il a été mis à pied le 7 février 2006 ; qu'alors qu'il protestait et réclamait toujours la régularisation tant des heures supplémentaires que de ses primes, l'employeur a voulu lui imposer successivement trois nouveaux planning jusqu'à ce que son équipe refuse le 16 mars les changements imposés. Il a donc pris acte de la rupture le 27 mars 2006.

La société DISTRIALESIA a repris ses conclusions de 1er instance en ce qu'elle sollicitait la condamnation de Mr [T] à lui verser la somme de 7 105,45 euros au titre du préavis non effectué et le débouté de toutes les demandes.

Il est expressément fait référence pour les prétentions et moyens des parties aux conclusions soutenues oralement et contradictoirement le 21 septembre 2009, les côtes du dossier de plaidoirie de la société DISTRIALESIA, différentes des conclusions sus-visées seul écrit porté à la connaissance de Mr [T], étant écartées des débats.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la rupture du contrat de travail

Considérant que la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail du fait de son employeur a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués à l'appui de cette rupture par le salarié sont établis ;

Considérant que sont invoqués comme motifs de rupture par Mr [T] : sa mise à pied injustifiée le 7 février 2006 , la tentative de planning imposé, le non paiement d'heures supplémentaires, le non respect des dispositions du contrat de travail, les pressions multiples pour le pousser à démissionner ;

Considérant qu'il est constant que la société DISTRIALESIA a soumis le 19 janvier 2006 à Mr [T] un avenant que celui-ci a refusé de signer l'estimant moins avantageux pour lui quant aux modalités de calcul de la prime sur le chiffre d'affaire ce que l'employeur conteste; que ce document n'est pas produit ;

Considérant que s'en est suivie une altération des relations entre les parties ; que notamment bien qu'aucun reproche n'ait été antérieurement fait à ce salarié sur sa direction du magasin, il était convoqué le 24 janvier suivant pour un entretien fixé au 26 janvier sur une éventuelle mesure disciplinaire laquelle était mise en oeuvre par une mise à pied le 7 février 2006 pour une tenue négligée du magasin de septembre à décembre 2005, des arrivées tardives à raison de quelques minutes entre le 5 décembre 2005 et le 15 janvier 2006, une mauvaise rotation du personnel le 21 janvier et une journée prise, le 28 janvier, en dépit du refus du responsable ; que par des courriers adressés dès le 6 février 2006, Mr [T] protestait contre cette mesure disciplinaire, en contestant chacun des points ; qu'il en demande l'annulation ;

Considérant qu'effectivement le grief relatif à l'entretien du magasin n'est prouvé par aucun élément ; que les quelques minutes de retard relevées le matin ne se basent sur aucun horaire par lequel l'employeur aurait exigé que le personnel arrive à 8 heures et précèdent en tout état de cause l'heure d'ouverture à la clientèle ; que les autres faits reprochés sont ponctuels et non vérifiés ; que la mise à pied sera donc annulée ;

Considérant que Mr [T] persévérait dans ses courriers en faisant état des difficultés crées par l'employeur tout en maintenant ses demandes ; qu'il s'inquiétait d'une part de l'envoi par l'employeur d'un nouveau salarié pour renforcer l'équipe du magasin, ce qui avait pour effet de majorer la masse salariale et donc de diminuer, compte tenu des modalités de calcul, la prime sur le chiffre d'affaires, d'autre part de la suppression de ses heures supplémentaires ;

Considérant que, par la suite, la société tentait de modifier le planning des employés du magasin et notamment celui de Mr [T] sans que les nécessités de la gestion de l'établissement ne le justifient ; que d'ailleurs une pétition était signée pour s'y opposer le 9 mars 2006 par tous les salariés ;

Considérant enfin que, si se trouvent au dossier toutes les lettres adressées entre le 6 février et sa démission par Mr [T] à son employeur, doit être relevé le laconisme des réponses de ce dernier sur les heures supplémentaires et les primes ; que ses courriers des 20 février et 28 mars 2006 ne sont relatifs qu'aux motifs de la sanction du 7 février et lui reprochent la mise en oeuvre d'une opération de déstabilisation du magasin ainsi que lui précisent que la suppression du paiement des heures supplémentaires, décidée au mois d'avril 2005, s'explique par son statut de directeur de magasin ;

Considérant en effet que pour répondre aux réclamations de Mr [T] sur les modifications concernant aussi bien sa rémunération que ses conditions de travail, la société DISTRIALESIA invoque la dégradation de l'exécution par ce salarié de ses missions qui nécessitait une réorganisation des horaires ainsi que l'application stricte du contrat de travail ; que cependant aucune remarque n'est constatée sur le travail de Mr [T] avant la proposition d'un avenant au début de l'année 2006, les appréciations négatives apparaissant pour la première fois dans la lettre de mise à pied du 7 février 2006 ;

Considérant que le climat ainsi crée par l'employeur en ayant recours d'une part à des mesures de rétorsion affectant l'ensemble de l'activité professionnelle de Mr [T] d'autre part en remettant en cause certains éléments de sa rémunération laquelle se trouve minorée, s'est avéré insupportable pour ce salarié ; qu'est ainsi constitué le motif légitime de la rupture de son contrat par celui-ci ; que le fait que Mr [T] ait retrouvé du travail le 3 avril suivant son départ n'exonère par l'employeur de sa responsabilité dans cette rupture alors qu'il est justifié par le salarié de son embauche à cette date, par la production en appel de l'attestation de Mr [F] qui en confirme les circonstances ; que les effets de cette prise d'acte sont ceux d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera infirmé sur ce point ;

Sur les dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Considérant que Mr [T] ayant immédiatement retrouvé du travail, il convient de limiter, puisqu'il était employé depuis plus de trois ans mais s'agissant d'une entreprise de moins de 11 salariés, le préjudice subi à la somme de 7200 euros ;

Sur l'indemnité de préavis

Considérant que le fait que Mr [T] ait retrouvé immédiatement du travail ne le prive pas de son préavis ; que s'agissant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande formée par l'employeur est mal fondée ; qu'il sera condamné à verser la somme sollicitée à ce titre ; que le jugement sera réformé sur ce point;

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement

Considérant que ne sont pas contestés le principe et le montant de l'indemnité réclamée à ce titre, laquelle est justifiée par l'article 10 de la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire ; que le décompte établi par l'appelant porte sur la somme de 509,56 euros ;

Sur le rappel de salaire sur mise à pied

Considérant que la sanction étant annulée, Mr [T] a droit aux salaires non perçus pendant trois jours soit la somme de 290, 43 euros outre les congés payés afférents ;

Sur les heures supplémentaires

Considérant que Mr [T] sollicite la somme de 43 078 euros à ce titre ; que la société DISTRIALESIA s'y oppose ;

Considérant qu'il résulte de l'article L3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié, qui doit produire des éléments de nature à étayer sa demande, le juge forme sa conviction ;

Considérant que l'article 5 du contrat de travail de Mr [T] prévoyait que s'il n'était pas astreint à un horaire de travail précis, il devait consacrer le temps nécessaire au bon exercice de ses fonctions ; que l'article 6 stipulait l'application des dispositions légales à la durée de travail du salarié dont la rémunération était établie en fonction de l'horaire de l'entreprise et comprenait les dépassements individuels horaires résultant de ses fonctions ; que cependant des heures supplémentaires lui étaient réglées jusqu'en mars 2005 comme le prouve la lettre de l'employeur du 20 février 2006 ainsi que les bulletins de salaire, à raison de 110% soit 119,03 euros, qui complétaient à compter du 1er janvier 2004 le salaire alors minoré à 1769,16 euros ; qu'elles étaient, à compter du 1er avril 2005, incluses dans ce salaire dont le montant total s'élevait alors à 1 887,62 ;

Considérant que les variations du salaire brut mensuel de Mr [T], dont le montant n'a été conforme à celui prévu au contrat, soit 1 982 euros, que de la date de son engagement au mois de décembre 2003, étaient donc conditionnées par la majoration forfaitaire ainsi intitulée 'heures supplémentaires' qui permettaient à l'employeur de modifier unilatéralement son salaire ;

Considérant que Mr [T] produit des tableaux complets et détaillés des heures supplémentaires effectuées depuis l'année 2003 puisqu'il allègue qu'il travaillait à raison de 50 à 55 heures par semaine, les heures d'ouverture du magasin 9h-20h l'obligeant à être présent dès 7h45 ;

Considérant par ailleurs l'employeur n'apporte pas la preuve des horaires effectuées par le personnel comme le prouve la lettre de l'inspection du travail du 26 janvier 2006 qui a relevé, le 22 juin 2005, l'absence de tenue de documents de décompte de la durée du travail ; que les plannings de l'employeur signés par les salariés, qui comportent pour Mr [T] un horaire hebdomadaire de 39 heures, ne sont dans ces conditions pas probants ; que les éléments d'appréciation entrainent la conviction de la Cour quant à la réalité des heures ainsi accomplies ; qu'il sera fait droit à la demande ;que le jugement sera réformé sur ce point ;

Sur le rappel de salaire sur l'année 2003-2004

Considérant que dans le contrat du 30 juin 2003, la rémunération minimale globale garantie pour un an au contrat (salaire mensuel brut+primes mensuelles) s'élevait au moins à 2 287 euros ; que l'employeur ne le conteste pas ; qu'au vu des bulletins de salaires, la somme de 674,40 euros reste due à ce titre outre les congés payés afférents; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Sur les rappels sur prime de gratification et sur les primes de bilan sur les années 2003 à 2006

Considérant que la prime de gratification basée sur le salaire mensuel est payable, selon l'article 6 du contrat, chaque trimestre en fonction des résultats de l'entreprise ; que seules figurent sur les bulletins de paye délivrés par l'employeur des primes exceptionnelles et des primes sur le chiffre d'affaires ; que faute de justificatif de paiement de cette prime, elle reste due ;

Considérant qu'en ce qui concerne les primes de bilan sur les années 2003 à 2006, elles correspondent à 5% du résultat net après impôt au vu du montant de la démarque et de la progression du chiffre d'affaires ; que faute de justifier de leur paiement, elles devront être versées par l'employeur ; qu'il sera fait droit aux demandes formulées à ce titre au vu des justificatifs produits ; que le jugement sera réformé

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

Considérant qu'il est inéquitable que les frais irrépétibles demeurent à la charge de l'appelant, qu'une somme de 1000 euros sera allouée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Ecarte des débats les cotes du dossier de plaidoirie de la société DISTRIALESIA,

Réforme le jugement,

Condamne la société DISTRIALESIA à verser à Mr [T] les sommes suivantes :

- 7200 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse augmentée des intérêts à compter de la présente décision

-7 107,45 euros au titre de l'indemnité de préavis et 710,45 de congés payés afférents

-43 078 euros au titre du rappel sur les heures supplémentaires et 4 307,80 euros au titre des congés payés

-1050 euros au titre du rappel sur prime de gratification

-2 948,30 euros au titre du rappel sur primes de bilan 2003 et 2004,

-2540 euros au titre du rappel pour primes de bilan pour l'année 2005

-1950 euros au titre du rappel pour primes de bilan pour l'année 2006

augmentées des intérêts à compter du 29 mars 2006

Y ajoutant,

Annule la mise à pied du 7 février 2006,

Condamne la société DISTRIALESIA à verser à Mr [T] les sommes suivantes:

-509,56 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

-290,43 euros au titre de rappel de salaire sur mise à pied et 29,05 euros de congés payés

augmentées des intérêts légaux à compter du 29 mars 2006,

Confirme pour le surplus,

Rejette les autres demandes,

Condamne la société DISTRIALESIA à verser à Mr [T] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société DISTRIALESIA aux dépens.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 08/00199
Date de la décision : 10/11/2009

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°08/00199 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-10;08.00199 ?
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