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10/12/2009 | FRANCE | N°08/00265

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 10 décembre 2009, 08/00265


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 10 Décembre 2009



(n° 3 , pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/00265 LL



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Janvier 2008 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 07-00191MN





APPELANTS

Madame [V] [T] veuve [G] ayant droit de Monsieur [P] [G] décédé le [Date décès 4] 2009

[Adresse

5]

[Localité 21]

comparante en personne, assistée de Me Elisabeth LEROUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P 229





Monsieur [S] [G] ayant droit de Monsieur [P] [G] décédé le [Da...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 10 Décembre 2009

(n° 3 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/00265 LL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Janvier 2008 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 07-00191MN

APPELANTS

Madame [V] [T] veuve [G] ayant droit de Monsieur [P] [G] décédé le [Date décès 4] 2009

[Adresse 5]

[Localité 21]

comparante en personne, assistée de Me Elisabeth LEROUX, avocat au barreau de PARIS, toque : P 229

Monsieur [S] [G] ayant droit de Monsieur [P] [G] décédé le [Date décès 4] 2009,

agissant en son nom personnel et en qualité de représentant de ses enfants mineurs: -[U] [G] né le [Date naissance 3] 2002 à [Localité 22] (77)

-[Y] [G] née le [Date naissance 6] 2004 à [Localité 22] (77)

[Adresse 1]

[Localité 15]

représentée par Me Elisabeth LEROUX, avocat au barreau de PARIS, P 229

Madame [W] [G] épouse [H] ayant droit de Monsieur [P] [G] décédé le [Date décès 4] 2009,

agissant en son nom personnel et en qualité de représentant de ses enfants mineurs :

- [K] [H] née le [Date naissance 2] 2000 à [Localité 20] (95)

- [Z] [H] née le [Date naissance 11] 2003 à [Localité 20] (95)

[Adresse 23]

[Adresse 23]

[Localité 8]

comparante en personne, assistée de Me Elisabeth LEROUX, avocat au barreau de PARIS, P 229

Madame [E] [G] épouse [F] ayant droit de Monsieur [P] [G] décédé le [Date décès 4] 2009,

agissant en son nom personnel et en qualité de représentant de ses enfants mineurs :

- [I] [F], née le [Date naissance 12] 1999 à [Localité 18] (90)

- [J] [F], né le [Date naissance 7] 2002 à [Localité 18] (90)

[Adresse 9]

[Localité 13]

comparante en personne, assistée de Me Elisabeth LEROUX, avocat au barreau de PARIS, P 229

INTIMÉES

Société MACOCCO

[Adresse 19]

[Adresse 19]

[Localité 17]

représentée par Me Philippe JUCHS, avocat au barreau de PARIS, toque : A 146 substitué par Me Anne SAVELLI, avocat au barreau de PARIS

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SEINE ET MARNE (CPAM 77)

[Adresse 24]

[Localité 16]

représentée par Melle [A] en vertu d'un pouvoir général

Monsieur le Directeur Régional des Affaires Sanitaires et Sociales - Région d'Ile-de-France (DRASSIF)

[Adresse 10]

[Localité 14]

Régulièrement avisé - non représenté.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Novembre 2009, en audience publique, les parties présentes et représentées ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Bertrand FAURE, Président

Monsieur Louis-Marie DABOSVILLE, Conseiller

Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller

Greffier : Mademoiselle Ingrid JOHANSSON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Bertrand FAURE, Président et par Mademoiselle Séverine GUICHERD, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par les consorts [G] d'un jugement rendu le 29 janvier 2008 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun dans un litige l'opposant à la société MACOCCO ;

Les faits, la procédure, les prétentions des parties :

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard ;

Il suffit de rappeler qu'[P] [G] a travaillé en qualité de mécanicien d'entretien au sein de la société MACCOCO, entre avril 1973 et février 1995 ; qu'en 2006, un scanner thoracique a révélé l'existence de plaques pleurales bilatérales calcifiées ; que cette maladie a été déclarée et prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels le 16 juin 2006 ; que, le 29 janvier 2007, l'intéressé a engagé une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son ancien employeur dans la survenance de sa maladie et a saisi la juridiction des affaires de sécurité sociale à cette fin ; que, postérieurement, un mésothéliome pleural a été diagnostiqué et [P] [G] s'est vu reconnaître un taux d'incapacité de 100% peu avant son décès survenu le [Date décès 4] 2009 ;

Entre temps, par jugement du 29 janvier 2008, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun l'avait débouté de l'ensemble de ses demandes.

Après reprise de l'instance d'appel, les consorts [G] font déposer et soutenir oralement par leur conseil des conclusions aux termes desquelles il est demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de juger que la maladie professionnelle dont est décédé [P] [G] est due à la faute inexcusable de la société MACCOCO, de fixer au taux maximum la rente majorée due à la victime jusqu'à son décès et celle due ensuite au conjoint survivant, d'indemniser les préjudices personnels du défunt et ceux subis par ses proches de la manière suivante :

- Au titre de l'action successorale :

- 120.000 euros pour la souffrance physique,

- 120.000 euros pour la souffrance morale,

- 120.000 euros pour le préjudice d'agrément,

- 20.000 euros pour le préjudice esthétique,

- En leur nom propre

- 100.000 euros pour le préjudice personnel supporté par Mme [G],

- 35.000 euros pour le préjudice subi par son fils, M. [S] [G]

- 35.000 euros pour le préjudice subi par sa fille, Mme [H],

- 35.000 euros pour le préjudice subi par sa fille, Mme [F],

- 20.000 euros pour le préjudice de chacun des six petits enfants mineurs ;

Il est demandé enfin de condamner la société MACOCCO à verser aux consorts [G] une indemnité de 1.600 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que la société MACOCCO, pourtant spécialisée dans le traitement thermique du verre, n'a pas respecté la réglementation applicable en matière de poussières d'amiante, qu'il s'agisse de la loi du 12 juin 1893 et du décret des 10-11 mars 1894 sur la salubrité des établissements industriels et l'évacuation des poussières ou du décret du 17 août 1977 sur le contrôle de l'empoussièrement dû à l'amiante, la mise à disposition d'équipements de protection et l'information sur les risques encourus alors qu'elle ne pouvait pas ignorer que son salarié était exposé au danger lié à l'amiante. Ils indiquent qu'en qualité de mécanicien d'entretien, [P] [G] se trouvait au contact de l'amiante dans chacune de ses activités. Il s'occupait, en effet, d'une part, de la maintenance et de la réparation des embrayages et garnitures de freins en amiante des camions de livraison et était chargé, d'autre part, de la découpe des cartons isolants utilisés à l'occasion de la cuisson des vitrages. Ils ajoutent que la société MACCOCO qui dispose d'un service de médecine du travail, avait nécessairement conscience du danger inhérent à l'utilisation de produits en amiante et précisent que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail avait alerté la direction à ce sujet. Ils prétendent que si la société MACCOCO a procédé au remplacement des cartons en amiante au milieu des années 1980, il demeure qu'au début de l'activité professionnelle d'[P] [G] des produits isolants en amiante étaient encore utilisés.

La société MACCOCO fait déposer et soutenir oralement des conclusions tendant à la confirmation du jugement et au débouté de toutes les demandes. Subsidiairement, elle se prévaut du caractère non contradictoire de la procédure de reconnaissance de la maladie professionnelle pour en déduire son inopposabilité à son égard. A titre encore plus subsidiaire, elle conteste le montant des sommes demandées par les ayants droit. Enfin, elle demande la condamnation de ses adversaires à lui payer la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle prétend qu'[P] [G] qui était chargé de la maintenance du parc de poids lourds appartenant à la société et de l'entretien général des ateliers et machines de l'usine de [Localité 21], n'a pas été exposé chez elle au danger dû à l'inhalation de poussières d'amiante alors qu'auparavant, il avait occupé des postes de mécanicien l'ayant mis en contact avec l'amiante. Elle précise, en effet, qu'il n'était que très occasionnellement amené à changer une plaquette de frein sur un véhicule et dément avoir utilisé des cartons en amiante lors de la fabrication des vitrages. Elle invoque une confusion fréquente, y compris lors des réunions du comité d'hygiène et de sécurité, entre les isolants en amiante et le produit réellement utilisé dénommé 'Cartocéram' qui n'en comporte pas. Elle ne pouvait donc pas avoir conscience du risque encouru par le salarié. Enfin, elle soutient que la procédure de reconnaissance de la maladie professionnelle n'a pas été menée contradictoirement dès lors qu'aucune enquête n'a été effectuée auprès des précédents employeurs d'[P] [G] et que la commission de recours amiable lui a indiqué, dans une lettre du 18 septembre 2006, que sa réclamation au sujet du caractère professionnel de la maladie était classée sans suite en raison de l'inscription sur le compte spécial des conséquences financières de la maladie. Elle en déduit l'inopposabilité à son égard de la décision de la caisse reconnaissant le caractère professionnel de la maladie.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne s'en rapporte à justice sur le mérite des demandes des consorts [G] mais se prévaut de son droit, si la faute inexcusable est reconnue, de récupérer auprès de l'employeur le montant des sommes allouées à ce titre. Elle prétend avoir respecté toutes ses obligations en matière de reconnaissance d'une maladie professionnelle et fait observer que la société ne peut utilement tirer argument du fait que les conséquences de la maladie ont été imputées sur le compte spécial dès lors que, même en ce cas, la caisse conserve contre l'employeur dont la faute est reconnue le recours prévu par l'article L 452-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;

Sur quoi la Cour :

Sur l'existence de la faute inexcusable

Considérant qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

Considérant qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'enquête établi pour le compte de la CPAM le 12 avril 2006 qu'au cours des 22 années passées au service de la société MACCOCO, [P] [G] était notamment chargé de l'entretien des camions et semi-remorques de l'entreprise ; qu'il travaillait également à l'atelier où il découpait à la scie circulaire des bandes de cartons isolants destinées à être posées sur les chariots contenant les vitrages avant leur passage dans l'étuve chauffée à 140 ° ;

Considérant que s'agissant de la première activité, il n'est pas contesté qu'[P] [G] entretenait toute la flotte de camions de l'entreprise et s'occupait des freins et embrayages en amiante ; qu'il résulte de l'attestation de Monsieur [R], collègue de travail de l'intéressé, que ce dernier 'entretenait entre autres les freins et ponçait les larges garnitures en amiante des tracteurs et remorques' ; qu'il se trouvait donc directement exposé à l'amiante lorsqu'il intervenait sur les plaquettes de freins et les embrayages ;

Considérant que s'agissant de la découpe des bandes isolantes avant le passage des vitrages dans l'autoclave, la société prétend que le carton utilisé à cette occasion ne contenait pas d'amiante alors que Messieurs . [R], [X] et [L], anciens collègues de travail, attestent qu'[P] [G] était chargé de tronçonner à la scie circulaire des bandes d'amiante de nature friable et volatile ;

Considérant que s'il résulte d'une lettre du fabriquant que le produit utilisé en dernier lieu ne comporte effectivement pas d'amiante, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit, selon sa fiche de données de sécurité, d'un matériau dangereux irritant pour les yeux et les muqueuses et nocif pour les poumons à très haute température ;

Considérant qu'au demeurant le descriptif de présentation de ce produit indique qu'il est destiné à remplacer les cartons d'amiante et le plus ancien bon de commande de ce matériau date de 1983 ; que l'attestation de Monsieur [R] selon laquelle ce n'est qu'au milieu des années 1980 que l'entreprise a utilisé un produit de substitution aux cartons d'amiante se trouve donc confirmée ;

Considérant qu'antérieurement, les représentants du personnel ont à plusieurs reprises, lors des réunions du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions du travail, attiré l'attention de l'employeur sur le danger inhérent à l'utilisation de bandes d'amiante lors du passage des vitrages dans l'autoclave ; qu'ainsi les comptes-rendu de réunion du 10 septembre 1981 et du 11 mars 1982 demandent à la direction d'étudier leur remplacement ; qu'il est également mentionné que le médecin du travail a préconisé un changement de méthode pour éviter le recours à un produit composé d'amiante ;

Considérant, en outre, qu'il n'est pas contesté que la société MACCOCO dispose d'un service juridique nécessairement au courant de la réglementation de sécurité en matière d'amiante et d'un service médical apte à détecter les risques d'exposition encourus par les salariés ;

Considérant qu'il apparaît, dans ces conditions, que la société MACOCCO avait connaissance du danger encouru par [P] [G] non seulement lors des interventions effectuées dans l'atelier de réparation automobile mais encore lorsqu'il était affecté à la découpe des bandes isolantes ;

Considérant qu'il résulte pourtant des témoignages des anciens collègues de travail d'[P] [G] que l'entreprise n'avait mis en place aucune mesure pour évacuer la poussière et protéger les salariés ; que Messieurs [R] et [X] attestent qu'alors que la découpe à la scie circulaire dégageait beaucoup de poussières, l'atelier était nettoyé au balai et à la soufflette à air comprimé ; qu'il en allait de même pour le garage ;

Considérant qu'il ressort aussi du procès-verbal de la réunion du CHSCT en date du 10 décembre 1982 que l'aération de l'atelier n'était pas suffisante ;

Considérant, par ailleurs, qu'il n'est pas contesté que les salariés n'étaient pas pourvus de masques de protection alors même que cet équipement est prescrit en cas de sciage, y compris pour le nouveau matériau isolant ;

Considérant qu'enfin, il apparaît que les salariés n'ont jamais été informés des risques encourus par l'inhalation de poussières ;

Considérant qu'ainsi, en ne mettant pas en oeuvre les mesures nécessaires à la protection de son salarié, en ne lui donnant pas d'équipement adapté et en ne l'informant pas sur les risques encourus lorsque son travail l'exposait à inhaler des poussières nocives pour sa santé, la société MACCOCO qui avait conscience du danger, a commis une faute inexcusable à l'origine de la maladie professionnelle contractée par [P] [G] ;

Sur l'opposabilité à l'égard de la société MACCOCO de la reconnaissance de la maladie professionnelle

Considérant qu'il résulte des pièces de la procédure que la société MACCOCO a été avertie de l'instruction de la maladie professionnelle déclarée par son ancien salarié à tous les stades de la procédure et a été tenue au courant des griefs susceptibles d'être retenus à son encontre ;

Considérant qu'il est notamment justifié que la société a été informée à l'avance de la clôture de l'instruction ainsi que de la possibilité de venir consulter les pièces du dossier et il n'est pas contesté qu'il lui a été laissé un délai suffisant avant la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie ;

Considérant que la société MACCOCO ne saurait aujourd'hui se prévaloir de l'insuffisance de l'enquête effectuée auprès des anciens employeurs d'[P] [G] pour en contester le caractère contradictoire ;

Considérant, de même, que la circonstance qu'il lui ait été répondu que les conséquences de la maladie étaient inscrites au compte spécial ne fait pas obstacle à l'action récursoire de la caisse à son encontre sur le fondement de l'article L 452-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale ;

Que c'est donc à tort que la société MACCOCO se prévaut de l'inopposabilité à son égard de la reconnaissance de la maladie professionnelle pour échapper aux conséquences financières de la faute inexcusable ;

Sur les conséquences financières de la faute inexcusable

Considérant qu'en application de l'article L 452-2 du code de la sécurité sociale, [P] [G] avait droit au maximum de la rente majorée jusqu'au jour de son décès ;

Considérant que, de même, Mme [G] a le droit de bénéficier d'une majoration de sa rente de conjoint survivant au taux maximum ;

Considérant qu'aux termes de l'article L 452-3 du même code, la victime a le droit de demander la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées ainsi que de ses préjudices esthétique et d'agrément ;

Considérant que s'agissant du pretium doloris, il n'est pas contesté que l'intéressé a souffert, avant même que sa maladie ne soit diagnostiquée, de dyspnée et bronchites répétées ; qu'à la fin de sa vie, le moindre effort lui était douloureux ; que ses capacités respiratoires étaient réduites au minimum;

Considérant qu'il a dû supporter de nombreux examens et opérations ainsi que plusieurs séances de kinésithérapies respiratoires comprenant des drainages bronchiques et cures de radiothérapies puis chimiothérapies ;

Considérant qu'à ces souffrances physiques s'ajoute la douleur morale attestée par les témoignages de ses proches, compte tenu du caractère incurable de la maladie et de l'angoisse liée à son état ;

Considérant qu'en fonction de tous ces éléments, la réparation du prétium doloris qui constitue un seul poste d'indemnisation pour les souffrances tant physiques que morales, sera fixée à la somme de 120.000 euros;

Considérant qu'il n'est pas contesté qu'à la fin de sa vie, Monsieur [G] avait perdu beaucoup de poids et que son aspect physique s'était dégradé ; que le préjudice esthétique subi à ce titre sera indemnisé par la somme de 10.000 euros ;

Considérant qu'enfin, la maladie a privé [P] [G] des agréments de la vie et lui a apporté une gêne de plus en plus contraignante pour tous les actes de la vie courante ;

Considérant que, compte tenu de l'âge de la victime qui avait 64 ans lorsque la maladie a été diagnostiquée, le préjudice d'agrément sera évalué à 50.000 euros;

Considérant qu'enfin, la disparition prématurée d'[P] [G] a causé à son épouse, après quarante ans de mariage, à chacun de ses 3 enfants et à chacun de ses 6 petits enfants un préjudice moral qui sera réparé comme suit :

- 60.000 euros pour Madame [G],

- 25.000 euros pour chacun de ses enfants,

- 5.000 euros pour chacun de ses petits enfants,

Considérant qu'eu égard à la situation respective des parties, la société MACCOCO sera condamnée à verser à ses adversaires la somme globale de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par ces motifs :

Déclare les consorts [G] recevables et bien fondés en leur appel ;

Infirme le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau :

Dit que la maladie professionnelle dont est décédé [P] [G] est due à la faute inexcusable de la société MACCOCO ;

Dit que sa rente d'accident du travail sera majorée au taux maximum jusqu'à son décès ;

Dit que la rente de conjoint survivant sera fixée au maximum ;

Fixe le montant des préjudices personnels subis par [P] [G] de la façon suivante :

- 120.000 euros pour le pretium doloris,

- 10.000 euros pour le préjudice esthétique,

- 50.000 euros pour le préjudice d'agrément,

Fixe le montant des préjudices personnels subis par les proches de l'intéressé de la façon suivante :

- 60.000 euros pour Madame [G] ;

- 25.000 euros pour chacun de ses enfants ;

- 5.000 euros pour chacun de ses petits-enfants ;

Déboute la société MACCOCO de sa demande tendant à voir déclarer inopposable à son égard la reconnaissance de la maladie professionnelle ;

Rappelle que la caisse primaire d'assurance maladie dispose d'une action récursoire contre l'employeur à l'effet de récupérer l'ensemble des conséquences financières de sa faute inexcusable ;

Condamne la société MACCOCO à payer aux consorts [G] la somme globale de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à application du droit d'appel prévu par l'article R 144-10, alinéa 2, du code de la sécurité sociale ;

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 08/00265
Date de la décision : 10/12/2009

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°08/00265 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-12-10;08.00265 ?
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