Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 12 JANVIER 2010
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/18409
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Juin 2008 -Tribunal de Commerce d'EVRY - RG n° 2007F00068
APPELANT
Maître [R] [H], ès qualités de curateur à la faillite de la société ORIENTAL WEAVERS BELGIUM
demeurant [Adresse 2]
[Localité 4])
représenté par Me Rémi PAMART, avoué à la Cour
assisté de Me Candice CHABRIT, avocat au barreau de PARIS, toque R109
INTIMES
Société HMD
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 1]
[Adresse 7]
[Localité 6]
représentée par la SCP MENARD - SCELLE-MILLET, avoués à la Cour
assistée de Me Léo REBILLAUD, avocat au barreau de PARIS, toque C1238
(pl p Me [C] [U])
Monsieur [E] [K]
demeurant [Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour
assisté de Me Isabelle VEYRIE DE RECOULES, avocat au barreau de PARIS, toque : P454
(SCP VERSINI-CAMPINCHI)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 16 Novembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Christine DEGRANDI, Présidente
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Conseillère
Madame Evelyne DELBES, Conseillère désignée par ordonnance du Premier Président du 1er Octobre 2009 pour compléter la chambre
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN
ARRÊT :
- contradictoire
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Christine DEGRANDI, présidente et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement rendu le 25/6/2008 par le tribunal de commerce d'Evry qui a dit irrecevable la demande formée par Maître [R] [H], ès qualités de curateur de faillite de la société Oriental Weavers Belgium, et a débouté ce dernier de toutes ses demandes ;
Vu l'appel interjeté par Maître [R] [H], ès qualités, à l'encontre du dit jugement ;
Vu les conclusions signifiées le 31/8/2009 par l'appelant qui demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de condamner la société HMD et Monsieur [K] à lui verser une somme respective de 32.536,03 €, augmentée des intérêts légaux à compter du 6/5/1996, date de la mise en demeure, et celle de 18.158,20 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4/4/1996, date de la mise en demeure, et solidairement, la somme de 10.000 €, à titre de dommages-intérêts, pour résistance abusive et celle de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les écritures signifiées le 28/4/2009 par la société HMD qui conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'appelant au paiement de la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions signifiées le 21/4/2009 par Monsieur [E] [K] qui, à titre principal, demande à la cour de constater l'acquisition de la prescription extinctive et en conséquence, de confirmer le jugement déféré, à titre subsidiaire, de constater le désistement d'action opéré le 9/2/2005 et de déclarer la demande de Maître [H] irrecevable, en toutes hypothèses, de condamner Maître [H] au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
SUR CE
Considérant que la société Invest Carpet Industry était une société anonyme belge ; que la société a changé de dénomination sociale le 11/7/1994 ; qu'elle s'est alors appelée Oriental Weavers Belgium ; que l'assemblée générale tenue ce jour-là a également décidé d'une augmentation de capital ; que la société HMD et Monsieur [K], qui était son dirigeant, déjà actionnaires, se sont engagés à souscrire, chacun, 1750 actions à hauteur de 1.750.000 francs belges ; que l'intégralité du capital souscrit n'a pas été libéré par la société HMD pour 1.312.500 FB et par Monsieur [K] pour 732.500 FB ; que le 1/4/1996 , le tribunal de commerce de Tournai a, sur déclaration de la cessation des paiements, prononcé la faillite de la société Oriental Weavers Belgium et désigné Maître [H] en qualité de curateur de faillite de la société ; que celui-ci a adressé, le 4/4/1996, à Monsieur [K] et le 6/5/1996, à la société HMD une sommation d'avoir à libérer le capital souscrit ; que celle-ci étant demeurée vaine, il a fait citer les susnommés devant le tribunal de commerce statuant en la forme des référés ; que par ordonnance en date du 9/10/1996, le magistrat saisi a retenu que la contestation soulevée, en l'espèce l'absence d'exequatur du jugement de liquidation judiciaire, pouvait être qualifiée de sérieuse et s'est déclaré incompétent ; que le 2/8/2004, le tribunal de grande instance d'Evry a déclaré exécutoire sur le territoire français le jugement rendu le 1/4/1996 par le tribunal de commerce de Tournai ; que cette décision a été régulièrement signifiée à la société HMD et à une mauvaise adresse à Monsieur [K] ; que celui-ci a formé appel à l'encontre de la décision d'exequatur ; que par acte du 20/12/2004, Maître [H] a, sur le fondement de ce jugement, assigné en référé la société HMD ainsi que Monsieur [K] ; que par ordonnance en date du 16/3/2005, le juge des référés a donné acte à Maître [H], ès qualités, de ce qu'il se désistait à l'égard de Monsieur [K] qui avait interjeté appel , et l'a débouté des demandes formées à l'encontre de la société HMD, faute de production de justificatifs ; que le19/10/2006, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement d'exequatur ainsi que l'ordonnance de référé ; que par acte du 2/2/2007, Maître [H] a assigné la société HMD et Monsieur [K] devant le tribunal de commerce d'Evry pour les voir condamnés à verser les sommes correspondant au capital souscrit non libéré ; que c'est dans ces circonstances et conditions qu'est intervenu le jugement déféré qui a dit l'action prescrite ;
Considérant que les parties s'accordent pour dire que la prescription applicable en l'espèce est la prescription décennale prévue par l'article L110-4 du code de commerce ; que les intimés soutiennent que la prescription est acquise et qu'elle n'a pas été interrompue ; qu'ils rappellent que l'article 2244 du code civil énumère limitativement les causes d'interruption de la prescription et que l'article 2247 précise que, si l'assignation est nulle pour défaut de forme, si le demandeur se désiste de sa demande, s'il laisse périmer l'instance ou si sa demande est rejetée, l'interruption est regardée comme non avenue ; que la société HMD et Monsieur [K] exposent que la prescription a commencé à courir le 1/4/1996 et qu'elle n'a jamais été interrompue ni par la mise en demeure, qui n'est pas visée dans l'article 2244 du code civil, ni par la procédure d'exequatur qui n'a pas pour objet le recouvrement de la créance, ni par les deux actions en référé, dans lesquelles l'appelant a succombé ; que Monsieur [K] ajoute qu'en ce qui le concerne Maître [H] s'est désisté de l'action qu'il avait engagée à son encontre ; que les intimés soutiennent que la prescription a été acquise au 1/4/20006, donc antérieurement à la délivrance des assignations devant le tribunal de commerce statuant au fond ;
Considérant qu'il résulte des énonciations du jugement du 2/8/2004 rendu par le tribunal de grande instance d'Evry que Maître [H] a, par actes des 30/1/2003 et 6/2/2003, fait assigner la société HMD et Monsieur [K], en sollicitant l'exequatur du jugement belge prononçant la liquidation judiciaire avec exécution provisoire, au seul motif que la juridiction des référés avait estimé que l'exequatur du jugement de faillite était un préalable à toute action en paiement des sommes dues au titre de la libération du capital ; qu'il s'évince de cette constatation que l'instance en exequatur, engagée par assignation délivrée les 30 janvier et 6 février 2003, qui constituait le préalable nécessaire pour que les demandes en paiement dirigées contre la société HMD et Monsieur [K] puissent prospérer, a valablement interrompu la prescription, les actions étant indissociables ; qu'en outre, en se désistant à l'égard de Monsieur [K] qui avait interjeté appel de la décision d'exequatur, Maître [H], s'est simplement désisté de l'instance en référé mais n'a nullement signifié qu'il abandonnait ses demandes envers Monsieur [K] ;
Considérant qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a constaté l'acquisition de la prescription, et de dire Maître [H] recevable en ses demandes ;
Considérant que Maître [H], ès qualités, justifie précisément de l'existence des créances, ainsi que de leur quantum; que ni la société HMD ni Monsieur [K] n'émettent la moindre contestation ; qu'il y a donc lieu de faire droit dans leur intégralité aux demandes de l'appelant ;
Considérant qu'aucune des circonstances de l'espèce n'établit que les intimés aient fait preuve de résistance abusive ; que l'appelant sera débouté de la demande de dommages- intérêts formée à ce titre ;
Considérant que les intimés, qui succombent et seront condamnés aux dépens, ne peuvent prétendre à l'octroi de sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que l'équité commande au contraire qu'ils soient condamnés au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de ce texte ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne la société HMD à payer la somme de 32.536,03 €, augmentées des intérêts au taux légal à compter du 6/5/1996, et Monsieur [K] à verser la somme de 18.158,20 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4/4/1996 à Maître [H], ès qualités,
Condamne solidairement la société HMD et Monsieur [K] à payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes des parties,
Condamne solidairement la société HMD et Monsieur [K] aux dépens de première instance et d'appel et admet pour ceux d'appel l'avoué concerné au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
M.C HOUDIN M.C DEGRANDI